LA MISÈRE

Rien n’a changé.

Les pauvres aux chemises trouées

puent encore de leur sueur.

Les enfants dont les mouches rongent les yeux

sucent toujours des tétons vides.

Quand le sol se tord les bâtiments qui croulent

broient trois riches et dix mille pauvres.

Les pauvres cueillent les tomates sous un soleil méchant

qui tuerait les riches.

Les pauvres cherchent du fil et des clous

dans les montagnes d’ordures.

Rien n’a changé.

Les pauvres rêvent de villas, de limousines,

rêvent de saigner les riches.

Sommés par les riches

les pauvres mitraillent les pauvres.

Éblouis par les brutes

les pauvres crient « Vive Hitler ! » « Hourra Pol Pot ! »

Rien ne change.

Dans un pli lointain de la galaxie,

un autre monde nous regarde, peut-être,

en n’en croit pas ses paisibles yeux.