BIBLIOGRAPHIE
Bonjour l’ambiance. Aborder le continent philosophique ne se fait pas sans réelles difficultés. L'idéal consiste à commencer par une histoire bien faite, claire, précise, intelligente – voire drôle ! : celle de Lucien Jerphagnon, Histoire de la pensée, Tallandier, 1989, Poche Pluriel, réunit toutes ces qualités. Pour l’ambiance, ce que signifie philosopher dans la période antique jusqu’aux premiers temps du christianisme, voir Pierre Hadot, Qu’est-ce que la philosophie antique? Folio, 1995. Du même auteur, on peut également lire Exercices spirituels et philosophie antique, Institut d’Etudes augustiniennes, 1993. On y découvre que la philosophie est avant toute chose un art de vivre, loin des spéculations gratuites et inutiles. Ce qu’analyse magistralement – le lire c’est l’entendre – Michel Foucault dans L'Herméneutique du sujet, ses cours professés au Collège de France en 1981-1982, Hautes Etudes-Gallimard-Seuil, 2001.
Pierre Hadot renvoie souvent à deux livres majeurs aux belles idées malheureusement entravées par une exposition universitaire prototypique : André-Jean Vœlke, La Philosophie comme thérapie de l’âme. Etudes de philosophie hellénistique, et Juliusz Domanski, La Philosophie, théorie ou manière de vivre ? Les controverses de l’Antiquité à la Renaissance. Les deux sont préfacés par Pierre Hadot aux Editions universitaires de Fribourg – 1993 pour le premier, 1996 pour le second. Vœlke, Domanski, Hadot optent pour la philosophie comme pharmacopée et pratique de l’existence. Les questions abordées dans ces deux ouvrages sont toujours d’actualité...
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Une philosophie hédoniste? On s’en doute, la philosophie et l’hédonisme font mauvais ménage dans la tradition occidentale, où l’on tient ces deux termes pour antinomiques... Bien évidemment, à ma connaissance, il n’a jamais existé d’histoire de la philosophie hédoniste en quelque langue que ce soit! On lira, pour des repères et quelques jalons, le texte d’A.J. Festugière, « La doctrine du plaisir des premiers âges à Epicure », pp. 81-116, repris dans Etudes de philosophie grecque, Vrin, 1971. Le survol est rapide, mais il permet une utile vue d’ensemble. Sur l’eudémonisme antique, avec des passages extrêmement cursifs, sinon fautifs – parce que inutilement moralisateurs –, et sur l’hédonisme d’Aristippe, on compulsera Léon Robin, La Morale antique, PUF, 1963, notamment les pages 32-33.
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De prétendus présocratiques. Les introductions aux philosophes présocratiques sont toujours succinctes car elles résument une quantité de philosophes qui n’ont pas grand-chose à voir, sinon d’être présentés fautivement comme ayant pensé avant Socrate – quand bon nombre en sont les contemporains ! On lira toutefois Abel Jeannière, Les Présocratiques, « Les écrivains de toujours », Seuil, 1996 – avec une iconographie intéressante. Le volume présenté par Jean-Paul Dumont aux éditions de La Pléiade permet de disposer des textes avec l’appareil critique que l’on connaît dans cette collection : Les Présocratiques, Gallimard, 1988. On évitera la réédition en Folio qui ampute le volume original d’un grand nombre de textes – dont ceux ayant trait à Antiphon, qui nous intéresse dans la perspective de cette histoire de la philosophie hédoniste...
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Misère du matérialisme atomiste. Pour Leucippe, la chose est claire : il n’existe aucune édition en langue française qui proposerait les fragments et les commentaires qu’ils pourraient susciter... Ce qui en dit long sur la façon platonicienne d’écrire et d’enseigner l’histoire de la philosophie! Démocrite est mieux loti, même si la bibliographie est vite rassemblée : L'Atomisme ancien. Fragments et témoignages, traduction de Maurice Solovine, Pocket, 1993. Jean Salem est le spécialiste : il a écrit plusieurs livres sur ce sujet. Obligatoirement ils se répètent un peu. On préférera Démocrite. Grains de poussière dans un rayon de soleil, Vrin, 1996, qui sert de matrice à tous les autres. L'élégant sous-titre est une phrase de Démocrite. Les pages consacrées à l’éthique se contentent de faire état des lectures sans que Jean Salem donne toujours sa propre interprétation. Il signale par exemple page 333 que Döring, Ueberweg et C. Bailey classent Démocrite du côté des philosophes hédonistes sans vraiment donner son avis, ni examiner ses thèses, encore moins en précisant dans quels ouvrages...
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Pauvres sophistes! Les sophistes ont longtemps été maltraités. L'édition de leurs textes procède souvent d’anthologies qui ne permettent pas de rendre à chacun son dû ni de distinguer sa spécificité. Introduction accessible par Jacqueline de Romilly dans Les Grands Sophistes dans l’Athènes de Périclès, éd. de Fallois, 1988. Voir pour les textes, Les Présocratiques en Pléiade, op. cit. et, comme introduction générale plus technique, Gilbert-Romeyer-Dherbey, Les Sophistes, Que sais-je?, PUF, 1985. Avec W.C.K. Guthrie, Les Sophistes, traduit de l’anglais par J.P. Cottereau, Payot, 1971, on dispose d’une analyse plus longue qui leur rend mieux justice. On peut y lire des passages consacrés à l’hédonisme d’Antiphon, p. 295.
Sur ledit Antiphon, voir l’excellent ouvrage, le seul sur cet individu injustement oublié, d’Annie Hourcade, Antiphon d’Athènes. Une pensée de l’individu, « Figures illustres », éd. Ousia, 2001. Sur l’hédonisme du philosophe sophiste, voir le chapitre V, premier paragraphe : « Le plaisir, signe de la conformité de l’action avec la nature », pp. 125-132.
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Et les cyrénaïques, donc... Les plus mal logés puisque aucune édition en langue française n’a existé avant la mienne parue en 2002 au Livre de Poche : L'Invention du plaisir. Fragments cyrénaïques. Les Italiens avaient celle de Gabriele Giannantoni (1958) et les Néerlandais celle d’Erich Mannebach (1961). Sur Aristippe, on peut lire Jean Humbert, Socrate et les petits socratiques, PUF, 1967, pp. 250-272 – même s’il trouve Aristippe de peu de consistance... Passages intéressants pour se faire une idée de la figure de Socrate. Des pages également consacrées à Antisthène. Sur Socrate lui-même, voir la somme difficilement dépassable par son encyclopédisme de Jacques Mazel, Socrate, Fayard, 1987, et Pierre Hadot, Eloge de Socrate, éd. Allia, 1998.
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La mémoire cynique. Les cyniques disposent de leur doxographie grâce au travail précieux de Léonce Paquet, Les Cyniques grecs. Fragments et témoignages, éd. de l’Université d’Ottawa, 1975. Une excellente étude universitaire ligne à ligne de Marie-Odile Goulet Cazé, L'Ascèse cynique. Un commentaire de Diogène Laërce VI 70-71, Vrin, qui propose sa version d’un Diogène hédoniste p. 206. On doit à cette même personne et à son mari assisté d’une équipe, une très utile édition de Diogène Laërce, Vies et Doctrines des philosophes illustres, « La Pochothèque », Livre de Poche, 1999 : l’appareil critique est remarquable et l’index d’une incontestable efficacité. On peut aussi regarder les lettres pseudépigraphes tardives, Les Cyniques grecs. Lettres de Diogène et Cratès, traduites du grec ancien par Georges Rombi aux éditions Babel, 1998. Elles datent du IIesiècle av. J.-C. au Ier après, et trahissent un net infléchissement stoïcien visible par la critique radicale du plaisir à presque toutes les pages. Voir également Michel Onfray, Cynismes. Portrait du philosophe en chien, Grasset, 1990, Livre de Poche.
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Platon, un lutteur malintentionné. Pas question d’examiner le statut du plaisir dans la philosophie de Platon, sujet vaste s’il en est... Son dualisme, sa célébration de l’âme, sa détestation du corps, sa déconsidération de la vie, du sensible, du réel, son tropisme pour la pulsion de mort – souvenez-vous du Phédon (64, b) : « Les philosophes authentiquement philosophes sont avides de mourir » ! – en font un penseur emblématique de l’antihédonisme antique. Pas étonnant que le christianisme ait trouvé son compte à cette philosophie ! Il est d’autant plus intéressant de lire son Philèbe, un dialogue entièrement consacré à la question du plaisir, notamment pour voir comment il s’y prend pour éviter le débat avec l’hédonisme... On préférera l’édition récente de Jean-François Pradeau aux éditions Garnier-Flammarion, 2002. Elle est considérablement annotée et préfacée de façon que le lecteur sache tout ce qu’il est utile de savoir sur ce texte. Ceux que la synthèse ne réjouirait pas peuvent se reporter aux deux volumes coordonnés par Monique Dixaut, La Fêlure du plaisir. Etudes sur le Philèbe de Platon, Vrin, 1999.
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Eudoxe sauvé par un adversaire... Sans Aristote, rien n’aurait subsisté d’Eudoxe de Cnide, philosophe hédoniste... On connaît ses activités scientifiques, on le présente comme précurseur d’Euclide, on l’intègre volontiers dans une histoire des idées scientifiques de l’Antiquité, certes, mais rarement on s’attarde sur ses fragments de philosophie morale, et plus particulièrement sur sa pensée du plaisir. Elle est essentiellement présentée par Aristote dans l’Ethique à Nicomaque. Un livre est entièrement consacré à la question du plaisir chez Aristote par A.J. Festugière : Le Plaisir. Ethique à Nicomaque VII 11-14, X 1-5, Introduction, traduction et notes, Vrin, 1946. Tout est là : les enjeux de l’époque, le contexte idéologique, les débats dans l’Académie, les critiques des uns et des autres, les thèses hédonistes d’Eudoxe, celles, antihédonistes, de Speusippe, la position eudémoniste d’Aristote.
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Le philosophe aux fourrures. La bibliographie des sophistes convient évidemment pour Prodicos de Céos qui était l’un des leurs. On trouvera les textes le concernant dans le volume des Présocratiques en Pléiade. Voir, bien sûr, le toujours utile Diogène Laërce et ses Vies. Sur le choix d’Héraclès comme prosopopée et allégorie – et non comme texte de morale prescriptive – : Pierre Fontanier, Les Figures du discours, Flammarion, 1968.
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Cochon d'Epicure ? Ce qui reste d’Epicure tient en moins d’une centaine de pages et l’influence de ce philosophe a été majeure dans la résistance au christianisme. Les Lettre à Hérodote, Lettre à Pythoclès, Lettre à Ménécée se trouvent dans le livre X de Diogène Laërce, op. cit., on y peut également lire des considérations sur la vie d’Epicure et des fragments de doxographie éthique. Les Vies et doctrines des philosophes illustres se terminent sur Epicure, non comme on l’a parfois dit parce que l’épicurisme serait le couronnement de la philosophie mais parce que la suite, donc la fin, a été perdue...
Les Maximes capitales et les Sentences vaticanes se trouvent dans les Lettres et maximes d’Epicure, édition établie, textes traduits et commentés par Marcel Conche, PUF, 1987. Jean Salem a consacré le premier volume de sa thèse au sujet : Tel un dieu parmi les hommes. L'éthique d’Epicure, Vrin, 1989. Le beau titre est d’Epicure, le sous-titre énonce véritablement le sujet et renseigne sur la sobriété de son traitement. On y lit un commentaire universitaire en règle sur la question. Commentaire de commentaires bien souvent, plus que commentaire du texte lui-même, le livre est clair, précis et documenté. Sans audaces. Le même auteur commente la lettre éthique et s’interroge sur les conditions du plaisir pur chez Epicure dans un recueil de textes intitulé Démocrite, Epicure et Lucrèce. La véritédu minuscule, Encre Marine, 1998.
Deux commentaires précis, exégèse pointue, philologique : Jean Bollack, Mayotte Bollack, Heinz Wismann, La Lettre d’Epicure, éd. de Minuit, 1971 (commentaire de la Lettre à Hérodote), et Jean Bollack, La Pensée du plaisir, éd. de Minuit, 1975 (commentaire de la Lettre à Ménécée). Voir aussi, dans le même esprit, Jean Bollack et André Laks, Etudes sur l’épicurisme antique, Cahiers de philologie, Publication de l’Université de Lille, volume 1, 1976.
Sur des questions précises : Jean-Marie Guyau montre la pensée d’Epicure comme étant à l’origine de l’utilitarisme anglo-saxon dans La Morale d’Epicure et ses rapports avec les doctrines contemporaines, Encre Marine, 2002; la thèse est poursuivie dans La Morale anglaise contemporaine. Morale de l’utilité et de l’évolution, Alcan, 1895; André-Jean Festugière, Epicure et ses dieux, PUF, Quadrige, première édition, 1946, éd. corrigée en 1985, aborde les questions du fait religieux dans l’ère hellénistique, la religion d’Epicure et son rapport à la religion astrale; sur le plaisir, Victor Brochard, Etudes de philosophie ancienne et de philosophie moderne, Vrin, 1974; sur le droit, la loi, le contrat, la protection des animaux, la justice, l’injustice, le droit naturel, la question de la philosophie politique et juridique du Jardin, La Doctrine d’Epicure et le droit, Victor Goldschmidt, Vrin, 1977; ouvrage passionnant pour ce qu’il obtient des trois maximes afférentes à ce sujet; sur l’amitié : Jean-Claude Fraisse, Philia. La notion d’amitié dans la philosophie antique, Vrin, 1984; sur la vie philosophique, Jacques Schlanger, Qu’est-ce qu’une vie bonne ? PUF.
Voir aussi les Actes du VIIIe congrès de l’Association Guillaume-Budé, Paris, 5-10 avril 1968, Les Belles Lettres, 1969 : sur le clinamen, les simulacres, la physique des dieux, l’amitié, la sensation, le discontinu, la connaissance, le scepticisme, l’amitié, la dialectique et autres sujets, mais aussi sur les lectures de Horace, Lucrèce, Montaigne, l’humanisme, Saint-Evremond, Gassendi, Kant, les structuralistes (!). Représentatif du genre colloque : du meilleur et du pire, beaucoup de glose, quelques intuitions, une quantité de compilateurs, une poignée de chercheurs qui trouvent... Ouvrage évidemment vieilli, mais utile pour les traces et les pistes.
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Avec, contre et malgréle Maître. Pour une présentation générale d’Epicure et de l’épicurisme : Geneviève Rodis-Lewis, Epicure et son école, Idées Gallimard, 1975 (ma première rencontre avec Epicure...) et Jean-François Duvernoy, L'Epicurisme et sa tradition antique, Bordas,1990.
Sur les poètes élégiaques – Catulle, Tibulle, Properce –, mais aussi sur Virgile, Ovide et leurs formules épicuriennes, voir de Paul Veyne, L'Elégie érotique romaine. L'amour, la poésie et l’occident, Seuil. Démontage intelligent et brillant du procédé élégiaque : la femme comme prétexte au texte...
Très peu sur Philodème de Gadara! Rien sur Métrodore... Aucune traduction française de l’un ni de l’autre... Les textes du premier sont édités en allemand, en italien, mais pas en français... Voir Marcello Gigante, La Bibliothèque de Philodème et l’épicurisme romain, Etudes anciennes, 56, Les Belles Lettres, 1987, longtemps le seul ouvrage. Et : Cicéron et Philodème. La polémique en philosophie, textes édités par Clara Auvray-Assayas et Daniel Delattre pour les éditions « Rue d’Ulm », Collection « Etudes de littérature ancienne, 12 », 2201, sur la question de l’esthétique de Philodème. Quelques extraits traduits, mais plutôt sur les dieux, la musique, la rhétorique que sur l’éthique... Bibliographie exhaustive des articles, souvent en langue étrangère, pages 393 à 407 – moins de dix articles sur Philodème en langue française! Les quelques épigrammes se retrouvent, éparses, dans les volumes de l’Anthologie grecque, Belles Lettres. Sur le site d’Herculanum, un ouvrage ancien, mais lisible comme un roman policier : Vie, mort et résurrection d’Herculanum et de Pompéi. Son auteur : Egon Caesar comte Corti, 10/18, 1963.
Diogène d’Œnanda, mieux servi, dispose depuis 1996 d’une édition au Cerf – Editions universitaires de Fribourg : La philosophie épicurienne sur pierre. Les fragments de Diogène d’Œnanda, traduits par Alexandre Etienne et Dominique O'Meara. Tout ce qui reste – c’est-à-dire peu de chose – est introduit avec ce qu’on peut savoir aujourd’hui sur la question.
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Vivre et philosopher en latin. Changement de monde : le passage d’Athènes à Rome oblige à des réajustements idéologiques et à des considérations nouvelles sur la liaison du temps et de la réflexion. Pour un fil d’Ariane dans ce dédale historique, voir les livres de Lucien Jerphagnon, Vivre et philosopher sous les Césars, et Vivre et philosopher sous l’Empire chrétien, publiés chez Privat, épuisés, mais refondus dans Le Divin César. Etude sur le pouvoir dans la Rome impériale, Tallandier – où comment se jouent les relations entre le Philosophe et le Prince. Enjoué, savant, brillant, intelligent, érudit, on entend la voix de celui qui fut mon initiateur à la philosophie antique – donc à la philosophie tout court... Du même, Histoire de la Rome antique. Les armes et les mots, Tallandier.
Sur Cicéron, Lucrèce – mais aussi les milieux épicuriens en Campanie –, Sénèque : Jean-Marie André, La Philosophie à Rome, PUF. En devenant latine, la pensée perd en talents idéalistes sur l’ontologie, la métaphysique et les fictions pour gagner en puissance sur la morale utilitariste et pragmatiste – aux sens nobles et philosophiques des termes.
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Le Divin Lucrèce... J’ai travaillé sur la traduction de Charles Guittard, Imprimerie nationale, bilingue, un peu littéraire, mais à l’index catastrophique... Editions de poche GF : Clouard; édition Tel-Gallimard : Ernout.
Trouvé aussi dans les bacs du bouquiniste un commentaire de Constant Martha, Le poème de Lucrèce, Hachette, sans date, mais fin XIXe siècle. L'auteur trouve que Lucrèce n’est pas moralement défendable, il précise qu’il n’adhère pas à ses théories, confesse un catholicisme de bon aloi qui lui vaut d’avoir été couronné par l’Académie française. Il n’y a pas de mystères...
Mme Agnès Lagache trouve le philosophe misogyne, phallocrate et pour tout dire machiste : Lucrèce. Fantasmes et limites de la pensée mécaniste, Alpha Bleue. Comme Constant Martha, le texte mérite d’être lu comme symptôme des a priori d’une époque. La thèse du livre? Le matérialisme atomiste épicurien n’a pas rendu Lucrèce heureux – quels textes ou témoignages fondent ce jugement? Cette idéologie, par son fantasme de toute-puissance, rendrait impossible l’amour, la politique, le rapport à l’autre ou la musique ! Impossible sur ces principes de donner corps à une « vie symbolique »...
Le Dr Logre est cité par la dame qui précède. On lui doit L'Anxiété de Lucrèce, chez J.B. Janin, un excellent prototype de projection effectué malgré lui par un médecin psychiatre. Drôle si ce n’était tragique – car le médicastre eut vraisemblablement des patients dans son cabinet et ne s’est pas contenté de nuire à un philosophe disparu depuis vingt siècles, il a également maltraité sur le même principe une clientèle sonnante et trébuchante...
Pour lire Lucrèce accompagné, voir Marcel Conche, Lucrèce, Seghers – avec un choix de textes –, Pierre Boyancé, Lucrèce et l’épicurisme, PUF, mais aussi un compendium de ce livre dans Lucrèce. Sa vie, son œuvre, avec un exposé de sa philosophie, PUF. Textes choisis aussi. Plus récent : Pierre-François Moreau, Lucrèce. L'âme, PUF. Commentaire ligne à ligne du livre III sur l’âme, l’esprit, le corps et leurs relations. Le travail le plus synthétique, le plus complet, est signé Jean Salem, Lucrèce et l’éthique. La mort n’est rien pour nous, Vrin. On lui doit également deux beaux livres déjà cités sur Démocrite et Epicure. Bibliographie de 638 titres pages 251-282.