Chapitre 45

Évidemment qu’il y avait eu des femmes ! De temps en temps, il y avait eu des femmes. Bien sûr !

Mikke était assis dans le chalet, et un frisson brûlant se propagea le long de sa colonne vertébrale en pensant aux propos de Nettan. Elle et Katrin. Il n’avait pas réalisé jusqu’à présent qu’elles parlaient souvent de lui, le disséquant, l’analysant. Est-ce que tu crois qu’il pourrait en être ? Il imaginait la scène, Nettan et Katrin derrière le rideau où elles s’installaient pour boire le café lorsqu’il n’y avait pas de clients dans le magasin. Mais putain ! Cancaner sur des sujets qui n’étaient pas leurs oignons ! Qu’avaient-elles dit d’autre ? Sur son corps, sa sexualité, son intégrité ? Des taches noires apparurent devant ses yeux, et il éprouva des difficultés de concentration. Leur attitude provoquait en lui le même sentiment que si elles l’avaient déshabillé et plus ou moins violé. Sa colère se déchaînant, il bondit sur ses pieds, attrapa le premier objet qui lui tomba sous la main, un dictionnaire de mots croisés, et le projeta avec fureur contre le mur. Le livre s’écrasa, ouvert, la tranche cassée et plusieurs pages se détachèrent. Il ne pourrait jamais le réparer. Il le ramassa, fourra les pages volantes à l’intérieur et le remit en place.

 

Des femmes, des femmes, des femmes. Mais pas de relation, rien de durable. Quelques jours tout au plus puis c’était fini. Personne qu’il n’ait ramené à la maison et présenté à Nettan. C’était plutôt des aventures d’une nuit. Il aimait cette expression. Aventure d’une nuit. Le fait est qu’il ne voulait pas de petite amie. Il n’avait vraiment pas besoin d’une personne supplémentaire se mêlant de sa vie et cherchant à la diriger. Il y avait Nettan, c’était plus qu’assez.

Cette Katrin, la copine de Nettan. Quelqu’un aurait dû lui passer dessus ! La sauter, histoire qu’elle se taise et qu’elle cesse de fourrer son sale nez dans ce qui ne la regardait pas. Elle l’observait souvent de manière si bizarre. Tout le temps à sortir des blagues idiotes, comme si elle ne parvenait pas à décider si elle allait le traiter en enfant ou en adulte.

— Comment ça va, Mikke ? Quel traitement te réserve la vie ?

Comme si sa vie était une entité séparée de lui et qu’il ne la dirigeait pas. Une espèce de super-vie qui l’aurait manipulé tel un pantin. Et comment répondre à une question pareille ? D’ailleurs, s’attendait-elle à une réponse ?

Sans parler de Nettan. Elle était sans doute constamment en train de geindre et de se plaindre derrière le rideau. « Il ne fait riiiiiiiiiiiiiiiiiien ! Il n’a pas de boulot ; il me pompe comme une éponge jusqu’à la moelle ! »

 

Il plissa les yeux, et l’image de Katrin se forma devant lui ; elle était allongée, grosse et bouffie, sur la grande table d’Henry et Märta. Elle était nue. Il lui avait intimé l’ordre de se déshabiller. Elle l’avait dévisagé, les yeux grands ouverts, avait protesté :

— Tu n’es pas sérieux. Mikke, nous nous connaissons. Je suis l’amie de Nettan.

Mais il était debout, droit, impavide, à désigner le sol :

— Pose tes affaires là.

Elle avait refusé, et il avait été obligé de la saisir violemment, ce qui avait été efficace. Elle s’était pliée à ses commandements sans rechigner : elle était montée sur la table, maladroite et tremblante ; il l’avait forcée à s’étendre sur le dos et à relever les genoux puis il avait pris une corde.

 

Son membre gonfla et grandit à cette pensée, il devint si dur que c’en était douloureux, dur, doux et chaud. Il se pencha en avant et attrapa un coussin du canapé sur lequel était brodé en caractères rouges : « Pas de meilleur endroit que chez soi. » Il éjacula sa semence forte et folle pile sur ces lettres rouges.