Le terme même de « désert Libyque » mérite une explication. L'adjectif « libyque » s'applique à une région géographique, alors que l'adjectif « libyen » concerne l'État dont la capitale est Tripoli. Les anciens appelaient d'ailleurs Libye une large partie de l'Afrique du Nord.
En offrant au lecteur français un volume consacré au désert Libyque, on a voulu lui permettre de découvrir ce territoire qu'il a jusqu'ici trop longtemps ignoré, et que l'on pourrait également dénommer le Sahara oriental.
En fait, les termes Libyan desert ou Libysche Wüste désignent essentiellement ce que l'Égypte appelle son « désert Occidental ».
La carte de la page ci-contre s'efforce de montrer que le Western Desert égyptien, les oasis orientales (Koufra, etc.), le djebel Uweinat avec ses annexes (Arkenu, Kissu, Merga…) feront partie d'un désert Libyque lato sensu, qui se terminera vers le sud avec la limite des steppes sahéliennes, donc, en gros, avec le tracé du Wadi Howar.
Fallait-il traiter ici des oasis égyptiennes ? Étant donné les constantes relations historiques entre la vallée du Nil et les palmeraies, en raison également, il faut l'avouer, de l'insuffisance de la documentation à notre disposition, nous ne l'avons pas jugé possible.
Si le public français connaît surtout le Sud algérien avec le Hoggar et le Tassili, s'il visite parfois l'Aïr et le Ténéré, il sait peu de chose du désert Libyque. Après l'expédition allemande de 1873-1874, le désert Libyque devait d'ailleurs rester fermé à l'exploration européenne jusqu'au premier quart du XXe siècle. C'est alors seulement que, grâce à la voiture et parfois à l'avion, Anglais et Égyptiens ont pu, malgré l'énorme obstacle opposé par la Grande Mer de sable, entreprendre l'exploration d'un territoire jusque-là interdit aux voyageurs. En peu d'années allaient être découverts et, pour l'essentiel, étudiés les deux reliefs majeurs du désert Libyque : le djebel Uweinat et le Gilf Kebir.
Une caractéristique essentielle du désert Libyque est son extrême aridité, puisque l'on peut parcourir dans la Grande Mer de sable plus de 100 kilomètres sans y découvrir une seule plante vivante… Il s'agit d'ailleurs d'une péjoration relativement récente du climat, car les hommes de la préhistoire pouvaient y rencontrer éléphants, rhinocéros et girafes. Il y a peut-être un siècle ou deux, quelques pistes caravanières pouvaient encore assurer une certaine liaison entre les palmeraies égyptiennes et celles de la région de Koufra.
Si le pays n'a plus aujourd'hui ni nomades, ni chameaux, ni pâturages, ni gazelles, il faut noter que le désert Libyque semble bien avoir appartenu au cours des siècles historiques à un peuplement humain particulier, celui des Tebus, appelés parfois, suivant les régions, Tédas, Goranes ou Dazas. Le monde tebu succède vers l'est au monde touareg. Si son origine demeure mystérieuse et discutée, il paraît certain qu'il a historiquement occupé l'ensemble du désert Libyque avec ses prolongements méridionaux en pleine région sahélienne.
Cet ouvrage, volontairement dépourvu de toute érudition proprement dite, doit cependant pouvoir fournir au lecteur une connaissance suffisante de ce territoire.
Il semble juste de rendre ici un hommage mérité à tous ceux qui ont collaboré à la réalisation de ce volume : Samir et Wally Lama, Jean-François Sers, Edmond Diemer et Pascal Tournaire.