Jörg K, 15 ans, d’Osnabrück, était allé à Munich avec son frère. Ils rentrèrent ensemble par le train. Comme tous les compartiments étaient occupés, ils s’étaient assis sur leurs valises dans le couloir. C’était un long trajet, la monotonie du bruit était lassante. La tête de Jörg s’abaissa de plus en plus sur sa poitrine — il s’était endormi. Soudain, il sortit de ses rêves en criant : «Ne tirez pas! Ne tirez pas!» Ensuite, il ouvrit d’un geste brusque la fenêtre et sauta du train en marche, qui venait de sortir d’une gare. On tira la sonnette d’alarme et porta secours au jeune homme, grièvement blessé, il avait notamment une commotion cérébrale. Des mois plus tard, il n’était toujours pas capable d’expliquer son rêve, ni de dire ce qui l’avait poussé à ce cri de détresse et à sauter du train en marche.
Ce cas apporte la confirmation que les rêves n’atteignent pas nécessairement la couche supérieure de la conscience. Nous pouvons rêver pendant des nuits entières sans qu’un seul rêve soit accessible à notre mémoire.
Mais, en même temps, le rêve de Jörg K. apporte la confirmation de la thèse défendue par les psychiatres, selon laquelle chez les jeunes, avec une intensité en proportion inverse de l’âge, le rêve se confond souvent avec la réalité. L’univers du rêve et l’univers réel deviennent soudain identiques. On remarque ces rêves contraignants surtout chez les jeunes de 13 à 16 ans.
Arthur G., 15 ans, était plus petit et plus frêle que les garçons de son âge à Birmingham. Mais il ne semblait pas en souffrir, car il était d’un naturel tenace et avait une saine ambition. C’était un assez bon élève et un excellent joueur de football. On le tenait généralement pour un garçon calme et réfléchi, avec lequel il n’était pas si facile de se quereller. Arthur vivait avec son père, veuf — sa mère était morte d’un cancer quelques années plus tôt — dans une petite maison individuelle. On pouvait dire qu’il s’entendait fort bien avec son père, à quelques petits différends près, comme il s’en produit partout. Chaque matin, le père réveillait son fils. Ils déjeunaient ensemble, puis leurs chemins se séparaient. Son père allait à son bureau, Arthur à l’école.
Le 21 août 1974 commença comme tous les autres jours. Après être sorti de la salle de bains, son père se rendit dans la chambre d’Arthur pour le réveiller. Parfois, Arthur dormait si profondément qu’il fallait le secouer pour le réveiller. Ce matin-là, Arthur semblait en proie à un cauchemar car il s’agitait dans son lit. Quand son père s’approcha du lit, Arthur bondit en criant : «Vas-tu bientôt finir! » et se précipita sur son père. Ils tombèrent tous les deux. Le père perdit conscience; il avait heurté le sol avec la partie postérieure de la tête. Arthur, sorti de son rêve, fut pris d’une peur panique lorsqu’il vit ce qui était arrivé et qu’il ne pouvait pas s’expliquer. Il croyait aussi que son père était mort. Mais son père, après être resté un moment sans faire de mouvements, ouvrit bientôt les yeux à nouveau.
Comme il a été établi plus tard, Arthur avait effectivement eu un cauchemar. Un homme inconnu l’avait poursuivi et assommé sans raison. Arthur s’était défendu en rêve. Quand son père avait voulu l’éveiller, il n’avait pas pu faire de distinction entre le rêve et la réalité.