11. Rêves de double vue — qui anticipent sur l’avenir

«Je me trouvais sur un pont. Il pleuvait à verse. Le pont franchissait une vallée profonde avec un torrent. Lorsque je suis arrivée au milieu du pont, il y a eu des éclairs et du tonnerre; j’ai eu très peur. Soudain, une femme de haute taille est venue à ma rencontre, elle était très belle. Elle m’a prise par la main et m’a fait parcourir en sens inverse le trajet que j’avais déjà fait. Lorsque je me suis retrouvée à mon point de départ, elle m’a dit de ne plus jamais faire de pareilles sottises et de ne plus essayer de franchir le torrent, surtout sur une planche aussi mince. le n’ai pas compris ce qu’elle voulait dire, car le pont que j’avais voulu emprunter était grand et solide. Mais avant que j’aie pu dire quelque chose, cette femme étrange avait déjà disparu. J’en ai été très étonnée.»

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Dans ce rêve, Annetraud l., 14 ans, s’avance sur un pont, ce qui, dans le symbolisme du rêve, signifie qu’il faut être sur ses gardes. La vallée et le cours d’eau représentent un obstacle. L’éclair qui tombe et le tonnerre qui l’accompagne annoncent une perte. Voilà qu’apparaît une personne belle comme un ange gardien qui ramène la fillette à son point de départ et l’exhorte à ne pas recommencer. En parlant d’une planche mince, elle établit un rapport distinct avec des événements à venir. Annetraud habite dans une petite localité du sud de l’Allemagne, près d’un fleuve dont la rive est en pente douce. Les enfants s’y baignent pendant les jours chauds de l’été. Annetraud ne sait pas nager. Ses parents lui ont défendu d’aller au bord du fleuve avec les autres enfants.

En amont se trouve un vieux château, encore habité, où une amie d’Annetraud vit avec sa famille. Les enfants y sont souvent allés. Dans la cour du château, il y a un puits profond dont on peut encore aujourd’hui tirer de l’eau. Le trou est bordé d’un mur qui fait près de 4 mètres de diamètre. Un jour, les enfants eurent l’idée de poser une longue planche sur le puits et de faire de l’équilibre sur cette planche. Ce jeu dangereux se passa sans accident jusqu’au moment où ce fut le tour d’Annetraud. Mais Annetraud refusa de monter sur la planche, parce qu’elle se souvint du rêve qu’elle avait eu quelques jours auparavant. On se moqua d’elle, mais elle en resta à son refus. Là-dessus, l’enfant suivant monta sur la planche pour franchir en équilibre la distance qui le séparait de l’autre bord. Quand il fut arrivé au milieu, la planche pourrie céda sous le poids et se rompit. L’enfant poussa un cri et tomba dans le puits sous les yeux de ses camarades épouvantés. Il était mort quand on l’en retira.

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«Chère maman, j’espère que cette lettre prendra une autre route que moi, qu’elle te parviendra par un autre avion que le mien. J’ai eu la nuit dernière un rêve effroyable. Notre avion s’écrasait sur le flanc d’une montagne géante. Je tombais dans un ravin profond. Il n’y avait plus que du feu autour de moi. Ensuite, tout s’est éclairci comme si j’étais dans le soleil, vers lequel je volais en réalité. J’en étais malade à mon réveil, j’étouffais. Je ne veux pas te faire peur, maman, mais j’ai des battements de coeur. C’est un vrai cauchemar et pourtant, je n’ose pas renoncer à ce vol. On se moquerait de moi…»

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Marcella Mariani, la reine de beauté italienne, a su d’avance le sort qui l’attendait, elle et les autres passagers. Deux jours après la catastrophe — l’avion s’est écrasé sur une face rocheuse du Monte Terminillo dans les Apennins — , sa mère a reçu cette lettre. Quatre heures avant l’envol

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Joseph interprète les rêves du Pharaon

Sept années maigres et sept années grasses

de l’appareil qui allait causer sa mort, Marcella a appelé le Dr William Terzy. Elle avait de la fièvre. Son coeur était irrégulier. Elle se plaignait de douleurs nerveuses. Elle a raconté au médecin le rêve qui la tourmentait. Le médecin s’est efforcé de la calmer. Marcella n’a pas osé tenir compte de l’avertissement et s’est embarquée dans l’avion qui devait causer sa mort.

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«Ici Nina. Barbara, Est-ce que tu sais où Alexis se trouve? Il faut absolument que je lui parle! Comment? À Saint-Sébastien? Aux courses? Il y prend part demain? J’ai rêvé qu’Alexis allait avoir un accident mortel — je l’ai vu dans une voiture couleur d’azur. Et à côté, il y avait une autre voiture — rouge sombre! Sans doute qu’un pneu avait éclaté. Il y a une collision…»

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C’est à peu près en ces termes que la princesse Nina Mdivani a téléphoné à Barbara Hutton, sa belle-sœur, qui allait se séparer du prince Alexis Mdivani, son frère. Nina, en téléphonant à Paris, à l’hôtel Ritz, a appris de Barbara Hutton l’adresse de son frère et lui a envoyé un télégramme. Alexis l’a reçu le lendemain matin au moment où la grande course de Saint-Sébastien allait commencer. Au lieu de l’ouvrir, il dit avec un sourire : «Je suis superstitieux. Il ne faut pas prendre connaissance d’un télégramme avant une course. S’il contient une mauvaise nouvelle, les nerfs en sont affectés.»

Le rêve de Nina s’est confirmé : Alexis a eu un accident mortel. On a retrouvé plus tard le télégramme : «Alexis, je t’en conjure, ne prends pas part à cette course. J’ai vu que tu avais un accident avec ta voiture. Je t’ai vu mort. Je t’en supplie — ne monte pas dans cette voiture!»