14. Rêves de morts et de mort

«La nuit qui a précédé l’excursion de notre école, j’ai eu beaucoup de mal à m’endormir, j’étais très agitée. De Munich, nous devions nous rendre en autocar dans les montagnes et passer quelques jours dans un chalet. J’ai vu Gudrun (sa cousine, qui dormait dans la même chambre) reposer paisiblement et j’ai essayé de m’endormir moi aussi. Soudain, j’ai vu ma mère assise sur le bord de mon lit. J’ai pleuré de joie de la revoir. Elle me caressait la tête de la main, comme elle avait l’habitude de le faire, et me dit : «Il ne faut pas pleurer, mon enfant, sache bien que je serai partout et toujours auprès de toi. Il va se passer quelque chose de très grave, mais il ne t’arrivera rien, parce que je serai là pour te protéger. Rappelle-toi toujours que je suis auprès de toi.» Je voulais encore lui dire combien elle m’avait manqué, mais elle avait déjà disparu. Le lendemain matin, à mon réveil, j’étais encore très lasse. J’ai failli arriver trop tard pour prendre l’autocar qui devait nous conduire dans les montagnes.»

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Birgit G. a 13 ans. Sa mère est morte subitement d’un cancer six mois plus tôt. Son père, dont les affaires exigent des déplacements fréquents, ne peut pas s’occuper suffisamment d’elle. Il l’a confiée à la famille de son oncle maternel. Birgit s’y trouve bien; sa cousine, Gudrun, qui est du même âge, est pour elle une véritable amie. Birgit a vu en rêve sa mère, c’est un symbole qui met en garde contre une étourderie ou un danger. Sa mère l’a mise en garde contre un danger, mais lui a fait comprendre aussi qu’il ne lui arriverait rien.

Lorsque le car a quitté Munich avec 20 enfants, personne ne pouvait naturellement se douter de ce qui allait se passer. Au moment de franchir un col, le conducteur a perdu le contrôle de son véhicule qui est tombé dans un ravin. Des équipes de secours n’ont dégagé que les cadavres du conducteur, de l’instituteur et de 12 enfants. Sept autres enfants ont été transportés avec des blessures graves à l’hôpital. Birgit, par contre, a pu être extraite saine et sauve des décombres. Un paquet de manteaux qui se trouvait dans le porte-bagages au-dessus de sa place était tombé sur elle et l’avait protégée. Plus tard, Birgit a répondu avoir vu de nouveau sa mère à l’instant de la catastrophe et que sa mère lui avait dit qu’il ne lui arriverait rien parce qu’elle était toujours auprès d’elle. (Voir également «Rêves de double vue — qui anticipent sur l’avenir»).

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«Dans mon rêve, j’étais dans notre ancienne maison, bien que, depuis plusieurs années, nous habitions une maison neuve. Ma grand-mère avait pris place à notre table, qui était ronde, et voulait prédire l’avenir. Ma mère dit qu’elle ne le pouvait pas. Soudain, j’ai vu mon père, qui est mort il y a quelques semaines. Il m’a souri doucement et a étendu la main vers moi. À ce moment, j’ai pensé tout à coup : «Il est mort. Il ne faut pas qu’il me touche. Sinon, je vais mourir aussi.» J’ai fait un geste pour me dégager et j’ai essayé de m’enfuir. Ma mère était debout à côté de moi; elle ne comprenait pas mon comportement parce qu’elle ne pouvait pas voir mon père. Chose épouvantable, sa bouche est devenue de plus en plus grande et de plus en plus large, un trait noir est apparu autour. J’avais le sentiment qu’il voulait dire quelque chose. Mais je n’ai pu percevoir aucun son de ses lèvres. Quand mon beau-frère est entré dans la pièce, j’ai constaté que j’étais la seule à voir mon père.»

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Comme symbole du rêve, la grand-mère signifie qu’un bon projet se réalisera. Mais Thérèse L., 26 ans, ne peut pas se souvenir de ce que la grand-mère voulait prédire. Elle voit en rêve son père mort, cela lui annonce une joie ou une aide inattendues. Il semble bien s’agir d’un bilan curieux des relations entre la fille et son défunt père. Une telle rencontre se produit chez la plupart des gens un jour ou l’autre après le décès d’un proche. Cette dernière rencontre distincte, en rêve, peut avoir lieu quelques jours déjà après le décès, mais aussi souvent des mois et même des années plus tard. Nous connaissons des cas dans lesquels la rencontre n’a eu lieu que 12 ou 14 années plus tard.

Thérèse L. semble avoir eu beaucoup d’affinités avec son père. Elle n’approuve pas le comportement de ceux qui l’entourent depuis la mort de son père car, du fait qu’elle

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Les rêves d’un condamné avant son exécution

La première page des Police News de 1879 reproduit les rêves décrits par Peace, un assassin, durant la nuit qui précéda son exécution. Peace décrivit dans tous les détails des diverses phases de son sommeil ce qui caractérisait les visions de sa dernière nuit.

se trouvait sentimentalement en rapport étroit avec lui, elle sait ce que le mort aurait voulu. Mais elle n’a aucune raison d’avoir peur d’un contact avec le mort, un tel contact ne signifie pas qu’elle devrait mourir elle aussi. On peut parler en l’occurrence d’un processus qui se déroule dans un domaine marginal de l’âme; il est néanmoins possible d’interpréter ce rêve comme la détente de certaines cellules du cerveau au regard des souvenirs sympathiques laissés par le défunt.

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«Je suis encore fortement impressionnée par ce rêve. Mon père et ma mère fêtaient leurs quarante ans de mariage. Les parents et voisins étaient tous venus. Soudain, la porte s’ouvrit et un nouvel invité entra. Je levai les yeux et fus saisie de frayeur. C’était la Mort avec son manteau et son chapeau. Sous le chapeau, je vis deux petites cornes blanches comme la neige. Elle donna à ma soeur un coussin rouge sur lequel elle s’assit à cause de son rhumatisme. Je lui offris de la pâtisserie. C’était une faute de lui offrir de la pâtisserie, cela me vint aussitôt à l’idée. Mais pourquoi, je l’ignore. Elle ne me donna pas la main, comme par exemple à ma soeur à côté de moi. Je me sentis forcée de regarder dans le miroir. Comme il faisait sombre, je ne pus distinguer que ma silhouette. Il me fallut un certain temps pour trouver le miroir en le cherchant de la main. La Mort était partie. Je regardai à nouveau dans le miroir : un beau visage jeune me rendit mon regard. Je tournai le miroir et pus voir tout ce qui se passait dans la rue jusque dans l’église. L’abbé sortait du confessionnal.»

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Joséphine C. a 44 ans. La profusion des images qu’elle a vues en rêve a un sens profond. Visiblement, elle souffre des séquelles de quelque chose dont elle n’est pas venue à bout. Elle n’est pas mariée et c’est maintenant trop tard. Il faut qu’elle s’y résigne. Elle attend de ses parents, qu’elle voit en rêve, aide et soutien. Les nombreux invités sont le symbole de sa solitude intérieure. La Mort apparaît : elle indique la fin d’un chapitre de l’existence. L’espoir d’un mariage heureux et d’une famille doit être définitivement enterré. Sa sœur est sa propre ombre, elle-même par conséquent. Le coussin signifie un secours dans sa situation difficile mais il est rouge et un symbole sexuel masculin, de même que le geste d’offrir de la pâtisserie dévoile le désir de faire la connaissance d’un homme. Pendant que la Mort est présente, elle ne peut distinguer que sa silhouette dans le miroir : elle se voit sous la forme de l’ange qu’elle n’est pas en réalité. Plus tard, elle se voit elle-même sous les traits d’une jeune fille, ce qui signifie que sa situation actuelle est due à une faute commise dans sa jeunesse. Peut-être n’aurait-elle pas dû jadis être si exigeante lorsque des propositions lui étaient faites. Toutefois, il semble que, pour un motif quelconque, elle ait jadis renoncé à un certain homme car l’église est le symbole du sacrifice. L’abbé qu’elle voit sortir de l’église est un bon présage. Elle se résignera à sa situation.