La neige tombait maintenant moins fort, en gros flocons qui semblaient resplendir de leur propre lumière. Michele avançait lentement vers Piana Aquilana. Il était déterminé à se rendre à pied à la clinique où se trouvait sa mère ; il avait besoin de la revoir avant de rentrer chez lui, à sa vie de toujours et à la solitude qui devenait désormais son unique demeure. Le froid était piquant. Il remonta jusqu’à son cou la fermeture de son blouson, tandis qu’un vent soudain faisait voltiger les flocons avant de les pousser vers les montagnes à l’ouest. Il marcha plus d’une heure avant d’apercevoir au loin les toits de la petite ville. Entre-temps, le soleil s’était frayé un chemin entre les nuages et formait un halo métallique et ouaté autour du paysage. Ses chaussures étaient trempées de boue et de neige, elles pesaient, il avait mal aux jambes. Les rares voitures qui passaient soulevaient des éclats de glace noire qu’il traversait, se moquant de mouiller son pantalon trop léger pour ce climat. C’était comme si ses sens étaient anesthésiés par le tourbillon de ses pensées, par l’amertume mêlée à la résignation. Un pas après l’autre, il avançait au sein d’une défaite qu’il savait qu’il méritait, comme s’il était né pour la subir, comme si son unique mission dans la vie était de se préparer au pire et de l’affronter, jour après jour, sans alternative possible. Quatre jours auparavant, quand il était parti, il était convaincu de pouvoir changer son destin : trouver des réponses, comprendre le pourquoi de son abandon. Maintenant il savait. Il voulait juste aller dire à sa mère qu’il avait capturé une vérité qu’il avait toujours refusé de saisir.
Quand le soleil commença sa descente, il atteignit Piana Aquilana. Il traversa la place de la gare, qui à cette heure était quasi déserte, et se dirigea vers la clinique en montant la ruelle sinueuse qu’il avait parcourue la veille en voiture avec sa sœur.
En entrant dans le hall, il fut accueilli par la chaleur des radiateurs et les visages muets des musiciens sur les murs. Derrière le comptoir se tenait un jeune infirmier, les cheveux relevés en une crête enduite de gel et un petit diamant brillant à sa narine gauche. Michele lui accorda à peine un regard avant de se diriger vers l’escalier.
— Euh, excusez-moi… où allez-vous ? demanda le jeune homme.
Michele se retourna, épuisé. Il était tellement dans ses pensées qu’il n’avait aucune perception de ce qui se passait autour de lui. Il le contempla un instant puis poursuivit son chemin. Il monta les premières marches, quand il sentit la main de l’infirmier se poser sur son épaule.
— Monsieur, ce n’est pas l’heure des visites.
Michele sursauta, comme s’il se réveillait d’un sommeil profond. Il avisa le jeune homme, éberlué.
— Je dois parler à ma mère, dit-il.
— Les visites commencent à 16 heures. Revenez plus tard, répondit l’infirmier.
Michele secoua la tête puis monta quelques marches. L’infirmier le dépassa et se planta devant lui.
— Vous n’avez pas compris ? Je vous ai dit que ce n’était pas l’heure des visites.
Michele le poussa sur le côté mais l’autre, sans perdre l’équilibre, l’attrapa par son blouson, menaçant.
— Écoutez-moi…
— Arrêtez ! Qu’est-ce que vous faites ?
Lena était apparue en haut de l’escalier, blême, inquiète. La femme et l’infirmier se lancèrent dans une discussion agitée. Michele ne comprenait pas ce qu’ils disaient. Leurs voix se superposèrent dans sa tête, formant une sorte de ronronnement gênant qui ne le concernait pas. Il comprit en regardant Lena qu’elle avait réussi à intercéder en sa faveur. Il vit le jeune homme retourner derrière le comptoir, à la fois contrarié et résigné. Puis il monta les dernières marches, repéra la chambre de sa mère et y entra sans hésiter.
Elle était assise sur le lit, les yeux rivés sur l’armoire. Dans ses mains, une petite assiette contenait une pomme épluchée et coupée en fines tranches. Michele s’approcha et elle lui tendit l’assiette, comme un geste mécanique, comme pour la lui rendre. Il la posa sur la table de nuit puis s’assit dans le fauteuil en face d’elle. Elle lui sembla d’une beauté absolue, malgré son regard perdu et ses cheveux tressés comme du chanvre. La lumière extérieure éclairait son profil, faisait ressortir la fossette au milieu de son menton et la ligne de son nez légèrement recourbé, ses petites narines rondes parfaitement symétriques. Michele pensa qu’il était facile de tomber amoureux d’elle, que même le temps n’avait pas réussi à cacher cette lueur qui émanait d’elle. Il ferma les yeux et respira l’air imprégné d’elle, s’en emplit les poumons et le retint à l’intérieur, jusqu’à ce qu’il sente son sang circuler plus vite, grâce au même oxygène que celui que respirait sa mère. Quand il rouvrit les yeux, elle était toujours assise sur le lit, mais cette fois elle regardait le sol, comme si elle cherchait un pardon. Michele regarda dans la même direction qu’elle et trouva un enchevêtrement de mots à prononcer.
— Je m’étais habitué à l’idée que tu m’avais oublié. Et cette habitude me faisait du bien, parce que se sentir oublié c’est un peu comme mourir. On ne se rebelle plus. On se résigne, parce que de toute façon on ne peut rien y faire. Mais ça nous permet de survivre, de continuer. Se sentir oublié, c’était l’explication de ton absence et aussi la fin de tout espoir. Dans le fond, il est beau de ne pas avoir d’espoir, tu sais, maman ? C’est comme éteindre l’interrupteur de la douleur. Et moi j’avais réussi, jusqu’à il y a quelques jours.
Il se leva, s’approcha du lit et s’assit à côté d’elle. Il serra les poings, puis prit la main de sa mère dans la sienne.
— Or tu ne m’avais pas oublié. Maintenant je le sais. Néanmoins, je pense qu’aucun mensonge n’aurait dû t’arrêter. Tu aurais dû trouver la bonne tête à faire en rentrant, comme dit Luce. Tu aurais dû te poster devant la porte de chez nous, à la sortie de l’école, me traquer comme un chien de chasse, attendre dans le noir, te cacher dans l’ombre à côté de moi, pour ensuite te révéler… Tu aurais dû trouver un moyen, n’importe lequel, pour me faire savoir que j’étais encore dans tes pensées. Mais tu ne l’as pas fait, et maintenant je sais pourquoi. C’est parce que je ne le mérite pas. Je ne mérite même pas d’être oublié.
La femme leva les yeux vers la porte et posa dessus son regard vide, peut-être attirée par un bruit, des pas dans le couloir.
Michele l’embrassa sur une joue.
— Adieu, maman, murmura-t-il.
Puis il se leva et ramassa son sac, au moment où le bruit de pas cessait. La porte s’ouvrit, Michele aperçut Lena et, derrière elle, la silhouette d’une femme.
— Excusez-moi, il y a quelqu’un qui a insisté pour vous voir, dit l’infirmière en s’écartant.
La femme derrière elle était Elena.
Michele pâlit de surprise.
— Je peux y aller ? demanda Lena.
Michele fit un signe de tête et l’infirmière sortit en refermant la porte derrière elle.
— Que fais-tu ici ? lui demanda-t-il, épuisé.
Elena fit un pas en avant. Elle portait le blouson vert, trop léger pour la température du lieu, et tremblait de froid. Après le coup de téléphone de Michele, elle avait essayé de le rappeler, en vain. Alors elle avait pris sa voiture et roulé jusqu’à Piana Aquilana. Elle savait qu’il était blessé qu’elle lui ait tu la vérité sur Milù et elle voulait s’expliquer. Une fois arrivée en ville, elle n’avait eu aucune difficulté à se faire indiquer la clinique dont Michele lui avait parlé et elle avait décidé que, si elle ne l’y trouvait pas, elle l’attendrait sur place. Avant de poursuivre, elle regarda tendrement la mère de Michele et esquissa un sourire et un geste de salut. La femme n’eut aucune réaction. Elena tenta de freiner l’émotion qui l’envahit.
— Je suis désolée…, dit-elle à Michele, les lèvres tremblant légèrement.
— Pourquoi es-tu venue ?
— J’ai essayé de t’appeler mais le portable était éteint.
— Il n’est pas éteint. Je l’ai cassé. Exprès.
Michele fit mine de sortir, poussé par la défiance et la douleur que lui procuraient la présence d’Elena. Mais elle lui saisit un bras.
— Attends !
— Nous n’avons rien à nous dire.
— Si, moi j’ai beaucoup de choses à te dire. Et toi, tu vas m’écouter. Ensuite, tu décideras si tu ne veux plus me voir. Mais d’abord laisse-moi parler.
— Essaye de faire vite, répondit-il, glacial.
— Non, pas comme ça, Michele. Assieds-toi. Assieds-toi et écoute-moi.
Michele regarda vers la porte, à la fois impatient et résigné. Puis il s’installa dans le fauteuil. Elena s’assit à ses pieds, les bras croisés sur sa poitrine pour se réchauffer. En la voyant trembler, Michele ferma les yeux un instant, puis il prit une couverture sur le lit de sa mère, la tendit à Elena et reprit sa place.
— Merci, dit-elle en s’enveloppant dedans et en souriant.
Il évita de regarder ce sourire qui pouvait le rendre à nouveau faible, en proie aux rêves et à toute une théorie de l’espoir qu’il voulait effacer de sa vie.
— Nous formions une seule chose, Milù et moi. Ou plutôt, nous sommes une seule chose. Depuis que nous sommes nées, à quelques minutes d’écart, nous n’avons jamais cessé de nous accompagner, de grandir ensemble, de pleurer, de rire, de tout nous confier… Il n’y a pas une respiration que nous n’ayons partagée. Milù t’aurait plu. Tu lui aurais plu. Quand quelque chose ou quelqu’un me plaît, il lui plaît aussi. Tout ce qu’elle aime, je l’aime aussi. J’en parle au présent parce que je la vis chaque jour, depuis l’instant où j’ouvre les yeux jusqu’à ce que je m’endorme, le soir. Elle avait vingt et un ans quand elle est tombée malade. Et quand elle est morte, je suis morte moi aussi. Mais tu sais le problème, Michele ? Le problème, c’est que j’ai senti que je mourais et ensuite je me suis aperçue que je respirais. J’ai maudit l’air qui entrait dans mes poumons parce que je le volais, cet air, parce que de droit il appartenait aussi à Milù. La musique que j’entends lui appartient, l’eau fraîche que je bois, le vent qui me décoiffe lui appartiennent. Alors tu sais ce qui s’est passé ? Je me suis sentie une voleuse, parce que je regardais seule un coucher de soleil qu’elle aurait dû regarder avec moi, parce que je savais que ce coucher de soleil était aussi le sien. Voilà. Tout ça, je n’ai pas pu le supporter. Je voulais continuer à tout partager avec Milù. Alors j’ai espéré avoir la même maladie qu’elle et mourir pour qu’on soit quittes. J’ai espéré tomber malade comme elle, chaque jour. Je priais pour tomber malade, j’essayais de toutes mes forces de tomber malade parce que la seule chose que je voulais, c’était la rejoindre, où qu’elle soit. Tu comprends ce que je veux dire ?
Michele acquiesça. Il regarda sa mère, qui s’était levée et était lentement allée jusqu’à la fenêtre, le regard perdu derrière la vitre, vers une promesse de crépuscule sur les montagnes.
— Maintenant, ce que je veux te dire, c’est qu’à un moment est arrivé un jour de mai, poursuivit Elena. Mai de cette année, tu te souviens ? Il faisait tellement chaud et beau que c’en était atroce. J’ai détesté mai de toutes mes forces. Je l’ai détesté parce que je ne le méritais pas. Ce jour de mai, le 18, pour être précise, après avoir travaillé au café je suis allée sur la petite place de Prosseto et je me suis assise sur un banc. Je regardais le sol, la pointe de mes chaussures, parce que je savais qu’autour de moi le printemps était partout et je ne voulais pas lui donner la satisfaction de m’apercevoir de sa présence. Voilà, je ne sais pas comment c’est arrivé, mais à un moment j’ai senti une douleur dans ma poitrine et un élancement dans mon dos. J’ai eu peur, Michele. Et j’ai compris que c’était la peur de mourir. Je me suis levée, j’ai essayé de respirer, parce que je n’y arrivais plus, à cause de la douleur. Et quand j’ai réussi, j’ai crié. J’ai poussé un cri animal. Avec tout le souffle et toute la force que j’avais à l’intérieur, j’ai crié fort fort fort. Et même si je n’ai pas crié de mots, ce cri voulait dire que je voulais vivre. Que j’avais le droit de vivre. Et puis j’ai aussi compris quelque chose d’important… que jusque-là je n’avais fait que trahir Milù, elle et son souvenir, parce que vouloir mourir signifiait renoncer à ce qui lui avait été retiré, alors que j’avais le devoir d’aller de l’avant, pour elle. Bref, je devais vivre, et je devais le faire pour deux. Pour elle et pour moi. Je devais prendre ses rêves en charge, ses espoirs, tous les projets qu’elle avait laissés en suspens, je devais les traîner avec moi comme un bagage, comme… comme une mission, voilà. Et c’est ce que j’essaye de faire chaque jour, tu sais ? Je traîne sa vie avec moi et ce n’est jamais un poids. J’ai appris à ne pas sentir l’ennui, à aimer la vie à chaque moment, quoi qu’il se passe. J’ai appris que je peux me mettre dans une colère noire, mais que je n’ai pas le droit d’être triste, parce que si je suis vivante je ne peux pas être triste. Voilà ce que je pense. Et tu sais quoi ? Je crois que quand je serai vieille je ne me plaindrai jamais de mes cheveux blancs, de mes rides et de toutes ces conneries. Parce que vieillir est un privilège, Michele. Milù n’a pas pu vieillir. Donc c’est un privilège, ça me semble logique. Et bref, pour finir, parce que tu sais que quand je commence à parler je ne m’arrête plus… donc pour finir, depuis que j’ai compris tout ça, Milù est vraiment avec moi. Elle est arrivée ce jour-là, sur le banc, elle m’a rappelé qu’ensemble, quand on était petites, on avait conclu un pacte. On l’appelait le pacte du bonheur et c’était notre engagement à être heureuses, quoi qu’il advienne. « Tu as trahi notre pacte », m’a-t-elle dit. Et j’ai compris que c’était vrai, qu’elle avait raison et que je n’avais pas le droit de trahir ce pacte, au risque de la perdre pour toujours. Ainsi, depuis ce moment je l’entends, je lui parle et elle me parle. Même si elle n’est pas là. Peut-être que c’est sa force qui me permet ça. Je ne sais pas. C’est-à-dire, je sais que c’est une illusion, bien sûr. Ou peut-être pas. Mais… mais c’est comme ça et ça me fait du bien. Et moi je veux aller bien, pour moi et pour elle. Voilà, et maintenant je vais retirer cette couverture parce que j’ai chaud.
Elle la replia soigneusement et la reposa sur le lit.
— Pourquoi ne me l’as-tu pas dit plus tôt ? demanda Michele, méfiant.
— Parce que tu avais déjà tes problèmes, Michele. Et parce que je ne l’ai jamais dit à personne avant. Même ma mère ne sait pas que je parle avec Milù. Ni mon père. Bref, ce n’est pas facile d’évoquer ces choses-là. Et on n’a jamais vraiment eu l’occasion de le faire, tous les deux…
— Ce n’est pas vrai, l’interrompit-il. Quand je t’ai interrogée sur Milù, tu aurais pu.
— Oui, en effet, mais j’avais l’impression qu’il n’était pas temps. Ou peut-être que j’attendais le bon moment, ou que je n’y ai pas pensé, ou que j’ai eu honte, ou que… Michele, maintenant je t’ai tout raconté, mais je ne sais pas pourquoi je ne te l’ai pas dit plus tôt. C’est ça la vérité. Il peut y avoir mille raisons ou aucune. Je me suis trompée, j’ai fait une connerie. Et je ne peux plus rien y faire. Mais toi, tu dois accepter que les personnes fassent des erreurs, hein ? Nous ne sommes pas des machines parfaites. Tout le monde ne peut pas agir comme tu l’attends uniquement parce que tu as souffert, tu sais ? Tu n’es pas le seul au monde à avoir souffert. La vie est difficile. Mais ta vie doit dépendre de toi, pas de ce que font ou disent les autres. Et puis je te demande vraiment de m’excuser. Ça te suffit ?
Michele sentit qu’Elena avait raison et qu’il suffirait d’un « oui » pour récupérer au moins une partie de la sérénité à laquelle il avait goûté la veille au soir. Mais il s’était enfoncé dans son gouffre et il ne savait pas comment en sortir. Il prononça donc la seule réponse qui lui semblait possible.
— Non ! Ça ne me suffit pas, cria-t-il.
Sa voix fit sursauter sa mère qui se retourna, étonnée.
Puis il prit la poupée Milù dans son sac et la rendit à Elena.
— Il vaut mieux que ce soit toi qui la gardes. Bonne chance, dit-il sur un ton glacial.
Elena prit la poupée et le regarda, incrédule. Michele était absent, il lui sembla complètement différent de la personne qu’elle avait connue, comme si le changement qu’elle avait perçu était arrivé à son terme.
Il sortit et Elena comprit qu’il avait décidé de revenir à sa vie de toujours. Elle comprit qu’elle ne trouverait jamais le chemin pour le rejoindre, alors elle renonça à le suivre. Ce ne serait jamais plus dimanche.
Puis elle s’aperçut du regard de Laura.
La femme, qui fixait la poupée avec étonnement, s’approcha lentement et tendit les bras vers la petite Milù avec un sourire de petite fille. Ses yeux s’étaient remplis de tendresse, elle frôla les doigts d’Elena qui, après un instant d’hésitation, la laissa prendre la poupée. Laura la serra contre son torse, caressa ses cheveux et son petit visage en caoutchouc. Puis elle la berça, maternelle, et chantonna une berceuse qui fit frissonner Elena. Le son de sa voix était à la fois doux et désespéré, comme si elle produisait des notes jamais écoutées auparavant. Ces notes composaient un hymne à la vie, racontaient les images et les souvenirs d’un passé lointain et désormais inaccessible.
Soudain la berceuse s’arrêta, mais un éclair persista dans les yeux de Laura et elle s’approcha de l’armoire, en face du lit. Elle l’ouvrit et se pencha sur une petite caisse en bois peinte à la main. Le couvercle convexe était orné de chevaux galopant sur un pré vert, ternis par le temps, striés de petites rayures et de fins sillons. Elena s’approcha et Laura ouvrit la caisse. Elle était pleine de linge décoloré. La femme souleva des draps et dévoila le journal intime rouge de Michele, caché entre des pulls et des vieilles housses en flanelle. Elena le reconnut et sentit son cœur se serrer. La femme caressa le journal, puis déposa la poupée à côté. Elle recouvrit les deux objets avec le linge, puis referma la caisse et l’armoire.
Quand Elena croisa son regard, elle y lut à nouveau l’absence. Elle avait repris possession de Laura et, peut-être, de sa douleur.