42. One. Number 31, 1950, 1950.
Huile et laque sur toile, 269,5 x 530,8 cm,
The Museum of Modern Art, New York.
L’œuvre fit partie des sixième et neuvième expositions personnelles de Pollock. L’exemple le plus manifeste où Pollock incorpora des objets tirés de son environnement fut son tableau intitulé The Wooden Horse, sur lequel il fixa la tête d’un vrai cheval de bois. Des bouts de cigarettes sont également présents dans Number 3, 1959 : Tiger. Il est vraiment surprenant que le tabac n’ait pas été plus souvent présent dans ses œuvres. Beaucoup, sinon toutes les photos de Pollock montrent l’artiste avec une cigarette à la main ou à la bouche. Pourtant, Mary Abbott, une amie de De Kooning, se rappelle avoir voulu offrir une cigarette à Pollock. Mais il lui répondit : « Je ne fume que de la toile ».
La plus célèbre de toutes est indubitablement celle qui parut dans Life Magazine en 1949. Pourtant, Mary, les années 1930 et 1940, les films hollywoodiens et la culture pop coopéraient avec la publicité de masse pour donner de la cigarette une image séduisante, comme si fumer était un signe de maturité, de succès, d’assurance, d’attirance sexuelle ou même de santé. Bien qu’anti-conformiste dans la plupart de ses actes, Pollock souscrivait en réalité à cette image.
En 1948, Peggy Guggenheim exhiba six œuvres de sa collection de Pollock lors de la XXIVe Biennale de Venise. Il s’agissait en réalité de la première exposition consacrée à Pollock en Europe. Il se rendit à Florence et à Milan en 1949. C’était la troisième fois en cinq ans consécutifs que le tableau Two de Pollock figurait dans une grande manifestation.
Entretemps, de retour chez lui, Pollock se joignit à d’autres artistes pour protester contre des critiques hostiles, en particulier ceux qui soutenaient une déclaration du Boston Institute of Contemporary Art.
1950 fut une année de visibilité extrême pour Pollock. D’abord, trois de ses tableaux participèrent à la Biennale de Venise. Puis une grande exposition personnelle comprenant 23 Pollock se tint au Museo Correr de Venise, sa première exposition en Italie.
Deux toiles provenaient du Stedelijk Museum d’Amsterdam. Le reste faisait partie de la Collection Guggenheim. Peggy Guggenheim collabora à l’organisation de la manifestation avec un groupe d’admirateurs italiens de l’art moderne.
Plus tard, Pollock exhiba également Number 3, 1950 lors de l’exposition annuelle du Whitney à Manhattan. La même sélection d’œuvres fut montrée à Paris deux ans plus tard.
En 1950, Pollock se joignit à un groupe d’artistes dirigé par Barnett Newman. Ils organisèrent une manifestation contre la politique d’exposition du Metropolitan Museum of Art. (Certains commentaires affirment, à tort, que celle-ci était dirigée contre le MoMA.) Les artistes étaient déconcertés par le choix des jurés fait par le directeur du Met, Francis Henry Taylor. Ils envoyèrent et donnèrent à la presse une lettre ouverte de protestation à Roland L. Redmond, président du Met. La lettre mentionnait le « mépris pour la peinture moderne » affiché par le directeur et le nombre disproportionné du nombre d'oeuvres d’art « futuriste » présentes dans l’exposition. Ils exprimèrent leur refus de participer à une future exposition d’envergure nationale. Par la suite, les médias nommèrent parfois le groupe « Les Irascibles » ou moins souvent « Les 18 Irascibles ».
Datant de cette période, Lucifer était catalogué en 2003 parmi les dix œuvres d’art les plus recherchées de l’année, selon le magazine ARTNews. Cette liste contenait les « chefs d’œuvres inaccessibles pour lesquels les collectionneurs étaient prêts à mourir ». L’œuvre devait atteindre les 100 millions de dollars, selon le magazine. Cette toile de grande taille est souvent choisie pour son caractère typique de la première période gestuelle de Pollock. C’est celle qui fut retenue pour accompagner le profil de l’artiste dans la nouvelle encyclopédie Funk & Wagnalls. De même, la National Gallery sélectionna Lucifer pour illustrer son portrait de Pollock.
Immédiatement après l’achèvement du pseudo-documentaire de Namuth, Pollock se remit à boire de façon inattendue, soudaine et dramatique, après deux années de sobriété très productives. Son retour explosif à la boisson fut dramatisé dans des romans, des pièces de théâtre et des films, en particulier celui d’Ed Harris. L’événement fut décrit à tous les biographes par Lee et par Namuth, ainsi que par les protagonistes de cette journée décisive.
Les commentateurs évoquent la possibilité que Pollock se soit remis à boire parce qu’il avait le sentiment de s’être compromis en jouant à peindre plutôt qu’en peignant réellement. L’idée d’avoir trahi, ce que beaucoup d’artistes reprochaient à Dali, pourrait aussi avoir poussé l’artiste à franchir le pas entre doute de soi et dépression. Comme si la malhonnêteté de son comportement devant la caméra (lorsqu’il était « dans » la peinture) avait de nouveau incité Pollock à boire.
Pollock continua à boire excessivement pendant les six dernières années de sa vie. Le docteur Edwin Heller, qui avait autrefois aidé l’artiste à se sevrer, était mort dans un accident de voiture plus tôt cette année-là.