7.

Louise avait déjà eu l’occasion de voyager à bord d’un jet privé, du temps où sa mère était la maîtresse de Kostas Kalakos. Tout en jetant un regard circulaire à la luxueuse cabine, elle se rappela combien Tina avait adoré ce mode de vie glamour. En échange, elle s’était donnée au plus offrant. Elle trouvait cela déplorable car si Tina avait dit qu’elle avait aimé Kostas, il n’y avait aucun doute qu’elle avait aussi aimé son argent.

Mais elle-même, faisait-elle mieux ? Elle avait accepté de se vendre à Dimitri contre un million de livres. Du moins, c’était ainsi qu’il devait l’interpréter.

Il était assis auprès d’elle dans l’un des confortables fauteuils de cuir blanc et, tout en étudiant ses traits ciselés, Louise sentit son cœur battre plus vite. Aurait-elle accepté sa condition si elle ne l’avait pas trouvé si attirant ? Chassant cette question dérangeante, elle essaya de se concentrer sur la seule véritable raison qu’elle avait d’entreprendre ce voyage à Athènes : Tina.

Le vol se déroulait sans encombre. Dès qu’ils s’étaient trouvés en plein ciel, deux charmantes hôtesses leur avaient servi une coupe de champagne.

La richesse de Dimitri s’exprimait partout, jusque dans la façon déférente dont les autres le traitaient. Elle n’appartenait pas à ce monde ; pourtant, pour les deux semaines à venir, elle allait vivre chez lui et partager son lit. Tels étaient les termes de leur contrat.

La tension nerveuse lui nouait le ventre. Une partie d’elle-même avait envie de hurler qu’elle ne pouvait pas faire ça, qu’elle ne ressemblait pas à sa mère. Mais c’était justement pour Tina qu’elle avait accepté les exigences de Dimitri. Et elle s’y conformerait.

Elle se tourna vers le hublot, tandis que l’avion amorçait sa descente vers Athènes. Elle avait du mal à croire que, moins d’une semaine plus tôt, elle avait fait ce même voyage, sur une ligne commerciale toutefois. En quittant le bureau de Dimitri ce jour-là, elle était optimiste et n’avait certainement pas imaginé qu’il lui imposerait une telle condition.

L’expression à la fois pensive et désabusée de Louise intriguait Dimitri. En dépit de son tailleur sophistiqué, elle paraissait si jeune et si vulnérable que le doute s’insinua dans son esprit. Etait-elle vraiment une croqueuse de diamants comme sa mère ? Pourtant, elle avait accepté de devenir sa maîtresse en échange d’un million de livres. Ce seul fait parlait de lui-même, non ?

— Nous devrions atterrir dans cinq minutes, déclara-t-il.

N’obtenant aucune réponse, il ajouta :

— Tu es bien silencieuse. Tu n’as pas dit un seul mot depuis que nous avons quitté Paris. Qu’y a-t-il ?

Au comble de la nervosité, Louise tourna la tête vers lui et rencontra son regard intense. Si seulement elle était moins sensible à son pouvoir de séduction… Mais les battements accélérés de son cœur lui prouvaient le contraire. La forfanterie était sa seule arme contre lui.

— Je ne savais pas que tu voulais aussi que je te distraie en dehors de la chambre.

Les traits de Dimitri se durcirent.

— Pas du tout. Tout ce que j’attends de toi, c’est que tu passes chaque nuit des deux semaines à venir nue et consentante dans mon lit, glikia.

Louise s’empourpra sous son regard de prédateur et tâcha de ne pas se laisser affecter par ce sarcasme. Des années plus tôt, il l’avait appelée glikia mou, ma chérie — et elle l’avait cru sincère. Jusqu’à ce qu’elle découvre qu’il avait feint de s’intéresser à elle pour se venger de sa mère. Quelle désillusion !

A cet instant, le pilote leur demanda d’attacher leurs ceintures. Louise accueillit cette interruption avec soulagement.

Quand l’avion toucha le tarmac, elle sut qu’il était trop tard pour revenir en arrière.

*  *  *

Dimitri habitait une banlieue résidentielle au nord-est d’Athènes, où s’alignaient des propriétés cossues entourées de parcs verdoyants. Louise s’était sentie de plus en plus tendue durant le court trajet depuis l’aéroport et, quand la voiture s’engagea dans une allée gravillonnée et que le portail électrique se referma silencieusement derrière eux, elle eut brusquement l’impression d’être prisonnière.

Pourtant, la maison de Dimitri ne ressemblait pas à une prison. De style néo-classique, elle était dotée d’arches élégantes et de fines colonnades. Les hautes fenêtres devaient laisser passer abondamment la lumière, se dit-elle en gravissant le bel escalier de pierre qui menait à la porte d’entrée. La façade couleur corail lui rappelait la vieille villa d’Eirenne, où Dimitri et elle étaient devenus amants. Cela semblait si loin maintenant…

L’intérieur était aussi d’une élégance intemporelle. Les pièces spacieuses et hautes de plafond étaient peintes dans des tons pastel ; les canapés confortables et le mobilier en chêne clair reflétaient un luxe subtil. Tandis que Dimitri lui faisait visiter les pièces du rez-de-chaussée, elle constata avec surprise que c’était une demeure où il faisait bon vivre plutôt qu’un logement fonctionnel.

— Ta maison n’est pas non plus ce que j’imaginais, commenta-t-elle, rappelant ainsi à Dimitri son étonnement lorsqu’il était entré dans son petit appartement à Paris.

— Tu t’attendais à quoi ?

— Je ne sais pas… Une garçonnière de play-boy, je suppose. Un décor minimaliste, un éclairage tamisé et des plaids en motif léopard.

Il rejeta la tête en arrière et partit d’un rire grave et sensuel qui apaisa la tension entre eux.

— Thee mou, j’espère avoir meilleur goût que ça ! Je peux t’assurer que tu ne verras pas de décor safari chez moi. J’ai grandi ici. C’était la maison familiale avant que mes parents ne se séparent. Mon père a donné la maison à ma mère au moment du divorce, et j’en ai hérité à sa mort.

Il balaya du regard le salon où ils se trouvaient et qui donnait sur l’allée.

— C’était la salle de jeux pour ma sœur et moi. Chaque soir, je m’agenouillais sur le rebord de la fenêtre pour guetter la voiture de mon père. Quand il arrivait, je me précipitais dehors et je le suppliais de jouer avec moi.

Dimitri marqua une pause, le regard perdu dans le vague.

— Il le faisait toujours. Même s’il était fatigué après sa journée de travail, il avait toujours du temps pour Ianthe et moi.

Il ébaucha une grimace.

— J’aurais aimé que les choses restent inchangées.

Louise comprit le sous-entendu : si seulement son père n’avait pas rencontré Tina… Elle eut la vision d’un petit garçon attendant avec impatience le retour de son père et son cœur se serra. Mais bien qu’il ait dans son esprit les traits de Dimitri, c’était leur enfant qu’elle imaginait. Si sa grossesse s’était déroulée normalement, ils auraient peut-être un fils, à présent.

Une vague de chagrin la submergea et elle se mordit la lèvre pour s’empêcher de tout lui avouer. Cela ne servait à rien de lui parler du bébé qu’elle avait perdu, et il était stupide de se tourmenter en rêvant à ce qui aurait pu être. De toute façon, la réalité n’aurait pas été aussi rose qu’elle l’imaginait, car Dimitri n’aurait sans doute pas voulu de leur enfant — comme il n’avait pas voulu d’elle. Elle aurait élevé seule ce bébé, avec tous les problèmes que cela supposait.

Se détournant de la fenêtre, Dimitri nota avec surprise la pâleur de Louise. Elle paraissait fragile aussi et des cernes mauves soulignaient ses yeux. Une fois de plus, il se prit à douter : avait-il eu raison de l’amener à Athènes ?

— Tu as besoin de manger quelque chose, dit-il. Justement, le dîner doit être prêt.

Louise avait l’estomac noué et se sentait incapable d’avaler quoi que ce soit. Néanmoins, elle le suivit jusqu’à la salle à manger, où la table était dressée pour deux.

Un homme d’un certain âge entra dans la pièce. Dimitri fit les présentations.

— Voici Joseph, mon majordome. Sa femme, Halia, travaille ici comme cuisinière et employée de maison. Viens t’asseoir, Louise. Veux-tu du vin ? Un jus de fruits ou un soda ?

— De l’eau m’ira très bien. Merci.

Elle tenait à garder la tête froide. Encore que ce ne serait peut-être pas une si mauvaise idée de boire jusqu’à s’enivrer, pensa-t-elle avec ironie. Au moins, elle n’aurait aucun souvenir de la nuit qui allait suivre, au cours de laquelle Dimitri ferait d’elle son esclave.

Joseph s’éclipsa et reparut presque aussitôt pour servir le dîner, un gigot d’agneau aux fines herbes garni de légumes qui sentait délicieusement bon. Louise découvrit tout à coup qu’elle mourait de faim et fit honneur au plat. Etait-ce seulement la veille qu’elle avait dîné à La Marianne en compagnie de Dimitri ? Seigneur… Il s’était passé tellement de choses en l’espace de vingt-quatre heures ! Au souvenir de la nuit torride qu’ils avaient partagée, elle s’empourpra violemment et manqua s’étrangler. Elle se hâta d’avaler une gorgée d’eau.

— Ça va ?

— Oui. Très bien, merci. Tout est succulent, répondit-elle sans regarder son hôte qu’elle avait tendance à considérer comme un geôlier.

Ils mangèrent en silence. A travers les portes-fenêtres, Louise contempla la lune qui brillait comme un disque d’argent contre le ciel d’encre. Sa tension redoubla. Il était tard et Dimitri n’allait pas tarder à l’entraîner dans la chambre. Cette supposition lui serra la gorge en même temps qu’elle électrisait sa chair.

— Veux-tu un dessert ? Un café ?

Elle secoua la tête. La caféine ne risquait pas d’apaiser le mal de tête qui commençait à enserrer douloureusement ses tempes.

— Non, merci. En revanche, j’aimerais que tu me montres ma chambre. Mes comprimés contre la migraine se trouvent dans ma valise.

— Bien sûr.

Dimitri la guida vers le grand escalier tournant au fond du hall. Parvenu à l’étage, il longea un couloir, ouvrit une porte et invita Louise à le précéder.

Elle vit aussitôt qu’il s’agissait d’une suite. Le salon dans lequel ils entrèrent était séparé de la chambre par une belle arche. Comme le reste de la maison, ces pièces étaient somptueusement décorées. Les murs étaient recouverts d’une soie champagne qui mettait en valeur les tapis et les doubles rideaux vieil or, ainsi que le brocart plus sombre des sofas et du couvre-lit.

Avant même d’apercevoir la veste sur l’accoudoir d’un fauteuil ou la raquette de squash posée dans un coin, Louise sut qu’elle se trouvait dans l’appartement de Dimitri. Elle se raidit en reconnaissant sa valise posée au pied du lit.

— Je sais que nous avons… un arrangement, dit-elle. Mais j’espérais que tu me réserverais une chambre pour que je puisse avoir un peu d’intimité.

— Ça ne me paraît pas nécessaire. Comme tu le dis si bien, nous avons conclu un arrangement et tu passeras toutes les nuits dans mon lit. Mais tu disposes de ton propre cabinet de toilette.

Il traversa la pièce et ouvrit une porte, révélant une pièce avec douche et dressing.

— Tu peux aussi utiliser la baignoire dans ma salle de bains contiguë à la chambre.

Il consulta sa montre.

— Je te laisse t’installer. Je vais donner quelques coups de fil. Je n’en ai pas pour longtemps.

Ses yeux verts brillèrent d’une lueur diabolique.

— Tâche d’être prête pour moi, glikia.

Une vague de panique et de rébellion déferla sur Louise.

— J’ai mal à la tête et j’aimerais passer cette première nuit seule, déclara-t-elle d’une voix tendue. Est-ce trop te demander ?

Un sourire froid incurva les lèvres de Dimitri.

— J’espère pour toi que tes calmants feront de l’effet rapidement. Je reviens dans une demi-heure.

— Espèce de salaud ! jeta-t-elle, tremblante.

Comment diable était-elle tombée amoureuse de lui, sept ans plus tôt ? En cet instant, elle avait envie de l’étrangler !

*  *  *

Restée seule, Louise fixa la porte close. Elle était désespérément tentée de fuir — cette pièce, cette maison et cet homme !

Un frottement doux contre sa jambe lui fit baisser les yeux. Madeleine… Attendrie, elle se pencha et prit la chatte dans ses bras.

— J’ai passé un contrat avec le diable, murmura-t-elle en la caressant. Maintenant, je dois en payer le prix.

La chatte ronronna doucement, puis sauta à terre et marcha majestueusement jusqu’à l’appui de la fenêtre. Louise découvrit qu’un coussin avait été placé là à son attention.

— Toi au moins, tu te sens chez toi ici, dit-elle en soupirant.

Un quart d’heure plus tard, elle avait fait un brin de toilette et avait enfilé la vieille chemise de nuit en pilou qu’elle avait emportée. Si Dimitri s’attendait à trouver une nymphe en nuisette sexy entre ses draps, il allait recevoir un choc, jubila-t-elle. Cette chemise de nuit enveloppante et confortable, qui lui arrivait à mi-mollets, lui donnait plus l’air d’une vieille fille prude que d’une femme fatale.

Elle défit le couvre-lit et, en découvrant que Dimitri dormait dans des draps de soie, elle ne put se résoudre à se glisser dans le lit. Elle alla donc se poster près de la fenêtre et, fixant le jardin obscur en contrebas, elle écouta le tic-tac impitoyable de l’horloge rythmer le silence.

— Ta tenue de nuit n’est pas du tout ce que j’envisageais, fit soudain une voix réprobatrice.

Louise sursauta. Dimitri s’avançait vers elle, tel un félin sauvage. Il s’était débarrassé de sa veste ; sa chemise était largement ouverte. A la vue de son torse hâlé couvert d’une toison sombre, elle sentit son pouls s’accélérer.

Maudissant sa faiblesse, elle répondit d’une voix cassante :

— Même si tu me forces à coucher dans ton lit, tu ne me diras pas ce que je dois porter pour dormir.

Surpris, il haussa les sourcils.

— Te forcer, Louise ? Il n’y a pas de serrure sur la porte ni de chaînes pour t’attacher. Tu es libre de partir quand tu veux. Franchement, je commence à en avoir assez que tu me prennes pour une espèce de monstre. Nous sommes deux adultes consentants qui ont passé un marché.

Il sortit un papier de la poche de son pantalon.

— Tiens. Mon avocat m’a envoyé cet e-mail pour confirmer qu’il faisait le nécessaire concernant l’achat d’Eirenne. L’argent sera versé sur ton compte dans une semaine.

Il marqua une pause avant d’ajouter d’un ton dur :

— Mais je peux arrêter les transactions si tu as changé d’avis.

Louise n’eut pas besoin de réfléchir. Le lendemain, sa mère serait en route vers la clinique américaine. Il était hors de question d’annuler.

Elle prit une courte inspiration.

— Non. Je tiens à ce que la vente soit finalisée.

Un rayon de lune éclairait le visage de Dimitri, soulignant ses pommettes saillantes et la ligne dure de sa mâchoire — un physique d’une virilité anguleuse. Pourtant, la lueur qui dansait dans son regard de prédateur indiquait qu’il ne pouvait contrôler le désir qu’il avait d’elle. Sans doute se maudissait-il, comme elle, pour cette faiblesse. En somme, ils étaient tous deux prisonniers, constata-t-elle en frissonnant.

— Dans ce cas, tu n’as pas besoin de ça, lança-t-il en saisissant à deux mains l’ourlet de sa chemise de nuit.

Avant qu’elle ait eu le temps de l’en empêcher, il lui avait passé le vêtement par-dessus la tête.

Stoïque, Louise resta immobile, résistant à la tentation de couvrir ses seins nus. Elle releva même la tête. Par défi.

— Thee mou, comme tu es belle, murmura Dimitri. Alors qu’il y a sept ans, tu étais seulement charmante…

« Ne va pas par là ! » voulut-elle crier. Elle refusait de l’entendre évoquer la nuit qui, pour elle, avait été la plus mémorable de sa vie ; pas au moment où ils s’apprêtaient à avoir une expérience sexuelle dénuée d’émotion. Ses beaux souvenirs en seraient salis.

Doucement, Dimitri lui toucha le menton. Il se raidit en voyant ses yeux s’embuer de larmes. Theos ! Croyait-elle vraiment qu’il allait la prendre de force ? Ou était-ce une manœuvre pour le culpabiliser ?

— Pourquoi les larmes, pedhaki ? Suis-je vraiment un ogre pour toi ?

Louise tiqua. Avait-elle vraiment entendu une note douloureuse dans sa voix ? Non, c’était impossible de la part d’un homme aussi dur et aussi insensible. Pourtant…

Elle le dévisagea avec attention. Ses prunelles jade étaient pailletées d’or, comme piquetées de flammes minuscules et intenses. L’espace d’une seconde, elle reconnut le Dimitri d’autrefois, le garçon qui lui avait fait l’amour avec une tendresse bouleversante.

Du pouce, il suivit le tracé de sa lèvre inférieure.

— Tu as peur de moi ?

— Non.

Il ne la blesserait pas physiquement, elle en était sûre. C’étaient les réactions qu’il suscitait en elle qui l’effrayaient. Elle se sentait à la fois incontrôlable et dépendante de son propre désir.

Dimitri ne parut pas convaincu par sa dénégation.

— Je n’ai jamais forcé une femme. L’idée même m’est insupportable. Tu as choisi de venir à Athènes avec moi.

— Je sais. Et je respecterai ma part du contrat, répondit Louise en humectant ses lèvres sèches.

Elle essaya d’ignorer l’élan de panique qui la saisit quand il posa les mains sur ses épaules pour l’attirer contre lui. Sa bouche lui effleura les lèvres, très doucement au départ, comme s’il lui laissait l’occasion ultime de fuir. Pourtant, dans ce contact léger, Louise sentit toute la puissance contenue de son désir. Quand il s’enhardit à explorer sa bouche de façon infiniment érotique, toutes les barrières qu’elle avait soigneusement érigées s’effondrèrent.

*  *  *

Sans cesser de l’embrasser, Dimitri la souleva dans ses bras et, passant dans la chambre, la déposa sur le lit. Agenouillé au-dessus d’elle, il enfouit les doigts dans ses cheveux pour les étaler sur l’oreiller, tel un halo doré. L’éclairage tamisé des lampes baignait sa nudité opalescente d’un éclat doux. Il entreprit de la caresser comme s’il était déterminé à graver sa silhouette dans sa mémoire. Sous ses doigts, le corps de Louise avait la douceur du satin.

Il pressa son visage dans la vallée qui séparait ses seins et huma son délicieux parfum de lys. Un désir furieux pulsa dans ses veines, résonnant à ses tempes comme le roulement de milliers de tambours.

Relevant la tête, il capta une certaine réserve dans le regard d’un bleu iridescent de Louise. Alors, le souvenir des paroles qu’elle avait prononcées le frappa : « Je respecterai ma part du contrat. » Comme si elle se résignait à subir un sort terrible…

Gamoto ! Il n’avait que faire d’une vierge sacrifiée. Il voulait retrouver la créature passionnée et incroyablement sensuelle qu’il avait tenue dans ses bras, la veille, dans sa chambre d’hôtel à Paris. Et il l’aurait ! A force de caresses et de baisers, il saurait l’exciter jusqu’à ce qu’elle demande grâce et le supplie de la faire sienne.

En quelques secondes, il se dévêtit et s’étendit sur elle. Sa virilité pressée contre le ventre de Louise, il l’entendit ravaler son souffle. Il reprit sa bouche et l’embrassa longuement, profondément, obtenant d’elle une réponse qui l’enivra.

Pour autant, il tâcha de calmer son impatience de la posséder. Lentement, il fit glisser sa bouche vers un sein, puis happa le téton mauve tandis que ses mains expertes parcouraient le corps divin de sa maîtresse.

Elle arqua le bassin en une réponse instinctive.

— Dimitri…

Il laissa échapper un sourire triomphant et reporta son attention sur les seins frémissants de Louise, qu’il lécha avec volupté.

— Dimitri… Je t’en prie…, gémit-elle de nouveau.

Elle ne pouvait plus nier le désir qu’elle avait de lui, et il aimait ça. Il glissa une main entre ses cuisses et effleura son sexe entrouvert. Elle était prête.

Il se redressa, le temps de mettre un préservatif, et se positionna de nouveau sur elle.

— Ise panemorfi, murmura-t-il d’une voix saccadée. Je veux te faire mienne. Maintenant, glikia mou !

— J’ai envie de toi, moi aussi.

La sincérité qui imprégnait la voix de Louise lui causa un choc. Cet aveu n’était pas une manœuvre, pensa-t-il, ébranlé. Louise avait-elle seulement essayé de le manipuler ? Peut-être n’avait-elle jamais cessé d’être la tendre Loulou qui s’était jadis offerte à lui spontanément, sans arrière-pensées…

Sa raison s’obscurcit et il s’élança en elle en un puissant coup de reins. Elle l’accueillit profondément dans son étau velouté. Quelque chose lui étreignit le cœur — un sentiment de possessivité qui l’aurait agacé s’il avait eu le temps de s’y attarder.

Mais Louise bougeait avec lui, accompagnant ses élans de plus en plus déchaînés, qui les menaient toujours plus haut dans leur quête du plaisir.

Le corps tendu comme un arc, elle cria son prénom avant de basculer dans l’extase. La puissance de l’orgasme la fit trembler et se convulser contre les oreillers, tandis qu’elle ancrait les ongles profondément dans ses épaules. Il perçut à peine la douleur et ne put se retenir.

— Tigresse ! souffla-t-il d’une voix hachée avant de jouir à son tour, en proie à un plaisir absolu.