Fanny m’a donné des conseils pour être heureuse. Je dois sortir de ma coquille, j’ai l’air tristounette, pas épanouie, il faut que je me trouve un mec et que je baise, il n’y a que ça.
Elle m’a enlacée, ne m’a pas lâchée, elle s’accrochait à moi, ça m’a donné chaud, elle sentait un mélange d’Angel, de transpiration et de cire refroidie. Moi je ne me parfume pas, je ne me maquille pas.
On s’est raconté notre vie. Elle m’a demandé pourquoi j’avais atterri dans l’épilation. J’ai haussé les épaules. Je ne savais vraiment pas. C’était comme ça, un accident. Mes parents sont coiffeurs à Soissons près de la gare et je n’avais pas envie de couper les cheveux à Soissons près de la gare. J’ai fait mon école d’esthéticienne, obtenu facilement mon CAP, tout de suite trouvé une place chez Mme Albertini. J’ai cru que ça ne durerait pas trop longtemps, mais ça fait déjà quelques années que ça dure. Avec les pourboires j’arrive à me faire huit mille francs net. C’est confortable.
Fanny aussi a passé son CAP, elle est parisienne, dit qu’elle rêve d’être une fille qu’on respecte. Elle couche, mais jamais avec les bonnes personnes. Les employés de bureau, ça l’emmerde. C’est l’odeur de la sueur qui l’enivre. C’est ce goût doux et acide qu’elle aime. Elle connaît ses limites. N’en a pas honte. Elle se trouve belle. Je la trouve belle. C’est surtout sa poitrine qui fait de l’effet.
Et le travail ?
Fanny me regarde ahurie. Ses yeux s’arrondissent, les couleurs de son maquillage s’entremêlent.
Quoi le travail ?