Un peu d'Elf

Loïk Le Floch-Prigent a eu une réflexion de bon sens. On lui demande s'il n'est pas gêné par les versements de commissions occultes et les emplois fictifs, bref par les pratiques frauduleuses. Il répond, massif : « Il s'agissait tout simplement des pratiques de la République. » Voilà un mot historique. On croyait savoir que la République évoquait la vertu. On n'imagine pas un fonctionnaire britannique disant : « Ce sont les pratiques du royaume. » Le sympathique député Montebourg n'a, me semble-t-il, qu'un défaut : il se croit en République au point d'en proposer une sixième version. C'est bien, mais c'est fatigant. Ses enfants le comprennent-ils encore ? On le souhaite.

L'inondation Loft Story, par ailleurs, ne doit pas enthousiasmer beaucoup les républicains souverainistes, les partisans de la Mère Patrie une et indivisible, les professeurs, les proviseurs, les « responsables ». Or le Loft, qu'on le veuille ou pas, est la véritable école d'aujourd'hui. Les familles ne transmettent plus de valeurs, l'enseignement non plus, va pour l'université pratique lofteuse, sorte de service militaire pour les deux sexes d'aujourd'hui. C'est un jeu et ce n'est pas un jeu : il s'agit d'éducation expérimentale.

Par la même occasion, le Spectacle commence sa sélection, son tri, sa formation des élites. Le prénom d'abord, le nom plus tard. Valse des visages, tourbillon des corps, grande partouze chaste de la marchandise. Vous êtes nominant ! Nominé ! Vous êtes anonymisé ! La prophétie d'Andy Warhol (« Tout le monde sera célèbre pendant un quart d'heure ») est en cours de réalisation accélérée. Pas étonnant si l'excellent livre de Catherine Millet, La Vie sexuelle de Catherine M., obtient aujourd'hui un si grand succès. C'est le contre-Loft absolu : ce qu'on ne vous montrera jamais, en clair, à une heure de grande écoute enfantine.

27/05/2001