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Le « Mâle du pays »

 

Le coup de foudre devant l’immeuble de mon gastro-entérologue. Pas très glamour comme lieu de rencontre, mais efficace… Une brûlure intense, violente dans le bas du ventre et court-circuit des neurones de la raison.

Appréhension de la coloscopie ou flèche de Cupidon en plein cœur ? L’esquisse d’une merveilleuse histoire de fesses après l’exploration de mon rectum ?

En tout cas, un mélange savoureux d’émotions à la fois fascinantes et effrayantes, la magie d’un destin bouleversé en une fraction de seconde, un élan fusionnel simultané et incontrôlable. Regards fiévreux échangés, propulsion immédiate sur une autre planète et…

Viva España !

Nouvel élu de mon cœur, Felipe, beau brun au regard énigmatique et à la bouche gourmande originaire d’Andalousie et fan de corridas. Olé ! Nul besoin d’un habit de lumière ou de muleta pour ce matador de l’amour. Nuit après nuit, véritable feria du sexe grâce à son incroyable jeu de castagnettes et sa banderille de premier choix ! Et soudain, après un fiasco cuisant à l’université en langue espagnole, voici ma curiosité à nouveau aiguisée pour les langues étrangères appliquées !

Premières vacances donc dans cet eldorado européen et immersion dans la famille de mon Hidalgo et dans la vie typique espagnole avec ses tapas, son FC Barcelone, ses innombrables fêtes et les pieds en éventail sur ses plages (l’éventail ? De rigueur en Espagne !). Un vrai bonheur, du moins en villégiature. Cependant, au quotidien, une réalité bien différente de mon style de vie rigoureusement français.

La paella obligatoire tous les dimanches avec la cinquantaine d’oncles, de tantes, de cousins, etc. Les potes toujours en retard de plusieurs heures sans jamais une explication ou un coup de fil, les interpellations des voisins devant notre porte jusqu’à quatre heures du matin, les horaires de repas décalés, les incontournables « pas aujourd’hui, mais mañana ». Traduction : « Un jour peut-être ! » Un exotisme appréciable pour une durée maximale de quinze jours, mais hélas, pas pour Felipe, habitué depuis toujours à ce rythme différent.

De retour en France, comparaison des deux cultures, incompréhension, intolérance et le mot malheureux, la blague de trop d’un ami un soir trop arrosé : « Eh, Felipe, tapas cent balles ? Pour l’achat d’un Manuel du parfait Espagnol ! »

Avec, pour résultat final, la mise à mort de notre couple et, estocade finale, l’exil définitif de mon beau latino dans son pays.

Pour lui, le mal du pays et pour moi, le mal de lui, mais pas pour très longtemps, car heureusement, ultime consolation, rendez-vous chez mon gynéco dans deux semaines !