Le fameux club de gym, lieu propice à la drague de par ses expositions de pectoraux, de fessiers rebondis et de seins fermes. Enfin, en théorie. Personnellement, même sans la charlotte de bain serrée autour de mes cheveux et malgré un jogging de trois fois ma taille, pas de rivalité possible avec les blondasses taille 36 dans leur combinaison rose fluo, à l’aise sous les haltères et sans une goutte de transpiration après trois kilomètres sur le tapis roulant.
Devant le miroir face à ma bicyclette, une brune potelée, des taches écœurantes sous les aisselles et la bave au bord des lèvres sous l’effort surhumain. Un spectacle affligeant… Et pourtant ! Dans cet univers dédié à la perfection physique et au narcissisme, le regard gourmand d’un homme sur mes épaules, mon ventre, mes cuisses, mes pieds. Pourquoi mes pieds ? Peut-être un fétichiste ? Ou alors encore un taré. Eh bien, ni l’un ni l’autre. Richard, un esprit sain dans un corps sain. Jamais marié, mais, d’après ses dires, enfin prêt pour le grand saut. Intéressant…
Deux ou trois mois d’espaliers à raison de trois fois par semaine et enfin le grand soir dans son appartement pour une dégustation de spaghettis carbonara préparés Maison.
Tirée à quatre épingles dans un ensemble en lin à 120 euros jamais étrenné et choisi pour l’occasion, découverte de son petit nid d’amour…
Plutôt un nid à microbes, oui ! Un agencement préhistorique, trente mètres carrés de crasse et de poussière et une odeur très, très éloignée de celle de la sauce carbonara. En deux temps, trois mouvements, mon ensemble en lin, fichu, bon pour 120 euros supplémentaires de pressing ! Vite, un petit tour aux toilettes au bord de la nausée. Mauvaise idée ! L’intérieur de la cuvette des WC ? Un véritable péril jaune ! Une marée noire de microbes ! Un coup d’œil rapide et un constat terrifiant. Douche en panne, un évier moucheté de marques suspectes. Aucune trace de savon ou de dentifrice. Par contre, un énorme paquet de cinquante préservatifs déjà entamé. Au secours ! Et juste à ce moment-là, une irrésistible envie de pipi… Pas question ! Et une maladie vénérienne, une ! Enclenchement immédiat de mon instinct de survie avec une idée de génie. Programmation de la sonnerie de mon portable dans cinq minutes.
Un gros soupir, un sourire figé sur les lèvres et retour forcé dans la pièce principale. Toujours pas de fragrance succulente d’ail et de crème fraîche, mais un relent agressif de chaussettes sales, de transpiration et de poisson. Plus que quatre minutes… Pas de machine pour le linge non plus, donc invasion probable de morpions et autres bébêtes à l’intérieur des draps. Plus que trois minutes… Et les pâtes presque terminées. Pitié ! Plus qu’une minute… Un verre ? Euh… non merci. À table alors ? Non plus. Plus que quelques secondes… Sauvée par le gong de mon téléphone. « Une urgence ? Maintenant ? Quel dommage ! » Fuite éperdue vers mon petit nid propret pour un décrassage complet sous la douche. Jogging à la poubelle et abandon définitif du sport au profit des œuvres humanitaires…