NOTE DE L’AUTEUR

Ce roman est le fruit d’un souhait impossible à réaliser, celui d’une rencontre entre le peintre Jean-Auguste-Dominique Ingres et la voyageuse lady Mary Wortley Montagu. Cette rencontre n’eut jamais lieu, car lady Montagu naquit en 1689, un siècle avant Ingres. Tout commença il y a plusieurs années, dans la salle consacrée à Ingres au Musée du Louvre. En contemplant La Petite Baigneuse, je m’aperçus que j’avais déjà rencontré les deux silhouettes du fond sur la gravure d’un livre de voyage publié deux siècles plus tôt. Je décidai d’entreprendre des recherches universitaires portant sur les ouvrages qu’Ingres avait pu consulter. À ma grande surprise, je découvris en lisant ses journaux qu’une de ses sources principales avait été les lettres de lady Montagu, dont le nom apparaît plus tard dans la marge de certains de ses carnets. Comme je connaissais déjà la voyageuse – j’avais écrit un article sur elle et sélectionné pour une exposition ses missives manuscrites – j’estimai que la découverte présentait un intérêt, du moins pour moi. Ainsi, un soir, je les imaginai ensemble. Lassée des exigences de réalité de l’écriture universitaire, je décidai de les réunir. J’oublierais tout ce que j’avais appris sur eux et je donnerais forme à ce désir. Comme dans la vie, la réalité et la fiction se sont mêlées dans mon roman. Parfois à tel point que je me suis vue dans l’obligation d’interrompre les paroles de la voyageuse et du peintre afin d’y placer des fragments littéraux des lettres de la première et des journaux du second. Tout le reste est également le résultat d’une rencontre : la mienne avec deux personnages passionnants et avec le processus d’écriture de cette fiction.