LE PRESBYTÈRE DU PÈRE LAURENT

« Homélie sur Jean 8.1 – 11

Cet épisode de la femme adultère possède une caractéristique rare. On le connaît habituellement pour le précepte qui nous y est inculqué : “Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre.” Et, cependant, la rareté de cet épisode tient aussi à ce qu’il est le seul, dans le Nouveau Testament, à présenter Jésus écrivant. Par deux fois, il se baisse pour écrire avec le doigt sur le sol. Jésus ne grave rien dans la pierre, mais il trace sur le sol calcaire du mont des Oliviers. Quoi ? Nous n’en savons rien. Il ne nous est pas dit que les Pharisiens lisent ce qui est écrit, ce qui est d’autant plus étonnant qu’ils sont connus pour descendre des scribes et être maîtres en exégèse. Or, la question essentielle n’est peut-être pas qu’a écrit Jésus ?, mais plutôt pourquoi Jésus, qui sait écrire, privilégie-t-il la parole ? Le verbe dire est sans conteste l’un des plus employés dans les saintes Écritures, et ce, dès la Genèse, où c’est par sa parole qui est volonté que Yahvé crée le monde. “Au commencement était le Verbe”, nous rappelle saint Jean. De fait, c’est par le dit, plus que par l’écrit, que Jésus manifeste son origine divine. Il est important de se remémorer cela en ces temps où la production exponentielle d’écrits, contrats et autres engagements au service du matériel tentent de faire contrepoids à une perte de confiance en la parole de l’autre. Le Seigneur parle et ce qu’il dit n’a pas besoin d’être écrit de sa main, car sa parole est infiniment plus fiable et indestructible que la roche la plus dure. »