J’échange par Skype avec un ami interniste de la région Centre. Il est responsable d’une unité Covid. Il souhaite discuter des bouleversements dans sa vie de famille. Sa femme est « hystérique » face aux risques de contamination. Elle lui impose le masque. Il dort sur la mezzanine : « Je ne vis plus, je suis obligé de passer toute la journée avec un masque et quand je rentre je ne peux plus toucher le chien, je mange à dix mètres des enfants. Le jour de mon anniversaire, elle était dans une autre pièce. Notre seul lieu de rencontre c’est le jardin. Je suis confiné chez moi. Pestiféré de l’intérieur. J’en peux plus des gouttelettes, j’en peux plus du Synthol, de l’eau de Javel et des lingettes qu’elle utilise. Les enfants sont confinés à la PlayStation. Je ne les vois plus. Je n’ai pas de mot pour décrire tout cela. Elle n’entend rien. Je suis rentré à 17 h 30, obligé de prévenir quand je rentre par téléphone pour que tout soit prêt pour mon arrivée. » Cet interniste a dû changer de corps de métier, d’équipe, de lieu de travail, de typologie de malades. Et maintenant voilà sa vie familiale chamboulée. En fait, sa femme est persuadée qu’il va mourir. Lorsque je lui demande avec qui il parle le soir, il me répond : « Avec le chien ! »