Rolando Villazon
4 novembre 2010
Chanteur lyrique, Le Monde le définit comme « le ténor du XXIe siècle », ou « le nouveau Placido Domingo ». Il n’a que 38 ans. Il a chanté sur les plus grandes scènes du monde. Et il a déjà obtenu deux Victoires de la musique (en 2003 et 2008). Il est jeune, mais il a déjà eu un incident de carrière, de ces ruptures qui sont comme les mythes fondateurs de la gloire. Le 26 janvier 2009, il a fait une fausse note, un couac, de dix secondes. Et là, ça a pris des proportions hallucinantes. La nouvelle a fait le tour du monde…
Vous savez, c’est impressionnant, quand j’entends un couac, en plus, c’est très rigolo je crois ! Mon couac n’a pas duré dix secondes, c’est le silence qui a suivi. J’ai fait un petit couac, et après je me suis arrêté, la musique s’arrêtait, donc c’était assez impressionnant. Dix secondes de silence.
La musique s’est arrêtée parce que c’était dans la partition ?
Oui, il y a un moment où la musique s’arrêtait, le spectacle s’arrêtait et moi-même je ne savais pas quoi faire. Mais bon, voilà, un ciel sans nuage est un ciel, comment dire ?…
Et vous avez dû annuler les concerts du lendemain, vous vous êtes fait opérer d’un kyste aux cordes vocales.
Oui, j’avais un kyste, je me suis fait opérer ici à Paris, et j’ai suivi un an de réadaptation.
Vous avez eu peur de ne plus pouvoir rechanter ? Combien de temps de silence et combien de temps sans chanter ?
Sans chanter, quatre ou cinq mois. Et de silence, c’était dix jours.
Vous avez fait un triomphe pour votre retour. C’était à Vienne (Autriche). Vous avez eu une ovation de 26 minutes. Oui : 26 minutes, presque une demi-heure ! Tout à fait autre chose, j’ai su que quand vous étiez enfant, vous ne rêviez pas d’être ténor. Vous vouliez devenir footballeur ou prêtre. Puis vous vous êtes passionné pour la biographie de Gandhi, mais passionné à un point extrême. C’est allé très loin…
J’ai vécu un peu comme Gandhi. Je me rasais les cheveux, j’achetais des lunettes comme si…
Des petites lunettes rondes, même sans être myope ?
Non, c’est des Crystals, et je me suis mis une robe comme lui, et des sandales, et j’étais comme ça dans la rue.
Et vous aviez quel âge ?
J’avais 18 ans je crois.
Mais on ne vous prenait pas pour un fou ?
Si ! (Rires) Mais quand j’étais petit, j’admirais énormément Huckleberry Finn, et donc j’ai décidé de m’habiller un peu comme lui et je marchais sans chaussures, comme il adorait être sans chaussures. J’étais tout le temps sans chaussures.
J’aime bien l’image des clochards. Je n’étais pas un clochard, mais j’ai joué, j’ai vécu un peu avec eux. Même aujourd’hui à Paris je suis parfois avec eux. Si je trouve un clochard, j’adore m’asseoir à côté de lui, j’adore les artistes de la rue, les artistes qu’on trouve dans le métro.