Une situation assez délicieuse

Charlotte Rampling

1er mars 2011

Oui, ce n’est pas porno, mais cela donne envie…

On a construit le rôle avec Jonathan Nossiter. On est parti à Rio – Jonathan Nossiter vivait à Rio à l’époque – et on a décidé ce qu’on allait être. Et avec Jonathan, on s’est demandé ce qui véhiculait beaucoup d’histoires et de passion autour, à Rio c’est la chirurgie esthétique.

C’est un très grand problème. Donc celles qui n’en ont pas fait vont devenir d’un coup des vedettes.

Oui, moi par exemple !

Je suis sur le bon cheval je pense.

Si on réfléchit une seconde, c’est vrai, si on veut être quelque chose qu’on ne pourra jamais plus être, on va entraver son développement vers un âge plus épanoui, qui est certes avec quelques rides, quelques expressions du visage qui d’habitude sont très belles sur des femmes ou des hommes qui vieillissent. Mais on a tellement horreur de ça, qu’avoir une ride devient une sorte de malédiction. La question fondamentale, ou la réponse fondamentale, pourquoi vouloir travestir la nature ? Parce qu’elle va vous avoir…

Oh !

Oui ! I’m a kept woman, comme on dit. Mais dans le temps, c’était comme ça ! C’est le mari qui payait toutes les factures.

Oui, mais on peut garder un peu de ça aussi ! On peut donner autre chose en échange.

C’est vrai ?

Je trouve que c’est bien. Je trouve que ce mot est bien pour ça aussi.

C’est donnant-donnant. Il faut savoir ce qu’on veut, il ne faut pas se cacher derrière les fausses idées et se dire « non, je ne ferai jamais ça parce que ci ou ça ». Il faut savoir ce qu’on veut et trouver le moyen de l’obtenir tout en étant en harmonie.

J’ai sombré, pas failli.

Oui quand on sombre, on sombre. Le « failli », c’est « oups ! presque ! non pas tout à fait ». Ce n’était pas mon cas.

Longtemps.

Parce que c’est une aventure extraordinaire !

Dans le sens que vous êtes tout à fait ce que vous n’étiez pas, et donc tous vos démons sortent. Toutes les choses qui rendaient votre vie invivable ressortent à la surface et il faut faire face, ce qui demande une grande force.

Non, on ne peut pas donner le change. Il y a une belle expression qui explique cela en anglais : « You hit rock bottom », c’est-à-dire qu’on ne peut pas aller plus bas.

Oui.

Je suis d’accord, j’étais très troublée… C’était juste avant Sous le sable avec François Ozon, et Sous le sable devait sortir dans cette année-là. C’était très troublant !

Oui ! J’avais cinquante ans ou quelque chose comme ça. Je me suis dit… est-ce que je vais le refuser, avec ce brave Toscan du Plantier qui voulait me le donner, etc. Mais j’ai inversement pensé, « est-ce que cela va être une poisse ? »

Non.

Oui. Très peu l’ont fait. Je pense que ce n’est pas bien de le refuser.

Oui !

Non.

Oui, j’aimerais bien y arriver, mais je ne le fais jamais ! En tout cas pas avec cette régularité, à 7 heures tous les jours. De temps en temps.

C’est un peu les deux. Parfois, c’est très énervant quand ils brodent et ce n’est pas bien. Et parfois, c’est moi qui brode et c’est très bien.

Oui. En fait, c’est une situation assez délicieuse.

Si vous vivez avec un homosexuel élégant, raffiné, qui vit bien, qui a de l’argent, qui a une magnifique maison, et qui ne veut pas trop de vous, vous êtes libre de faire ce que vous voulez en dehors, mais vous avez quand même une relation intime, intelligente, très belle avec pas toutes les emmerdes… (Rires)

Si ! Maintenant j’ai fait un peu de progrès. Je prépare une dinde une fois par an à Noël pour mes enfants, une vraie dinde magnifique, elle est délicieuse (vous pouvez demander à mes enfants et à ma famille), et des omelettes.

Oui !

J’ai un four pour ça, uniquement pour ma dinde.

Oui ! Sinon, on peut faire les petites choses en haut, mais la dinde, il faut qu’elle aille dans un grand four.

Bleu foncé…

Oui, c’est pour cela que c’est très bien de tout vérifier.

Oui, c’est vrai. Je ne roule pas comme une dingue, parce qu’on ne peut plus, ils vous arrêtent tout le temps maintenant.

Oui ! Même avec mes vitres teintées sur ma petite Mini bleu très foncé. Ils vont m’arrêter…

Oui.

Parce qu’il n’y a personne dans la voiture ! (Rires)

Oui, c’est ça, « il n’habite pas ici »…