Durant cette période qui débute avec la mort d’Alexandre le Grand et qui s’achève avec la victoire de Rome sur Carthage, l’Afrique du Nord connut plusieurs événements majeurs et autant de mutations.
Libérée de l’occupation perse par Alexandre, l’Égypte vécut une véritable renaissance sous les souverains lagides104. Dans l’actuelle Libye, des colonies grecques, dont la plus brillante fut Cyrène, eurent un rayonnement régional. Dans le nord de l’actuelle Tunisie, la cité de Carthage, fondée vers 814 av. J.-C. par des colons phéniciens, développa une puissance remarquable jusqu’à sa destruction par Rome.
Plus à l’ouest, en Berbérie, apparurent trois grands royaumes s’étendant à peu de chose près sur les actuels Maroc, Algérie et Tunisie et préfigurant donc la moderne division du Maghreb.
La conquête macédonienne intervint dans une période incertaine faite de succession de régimes et de deux dominations perses. Puis, après la mort d’Alexandre le Grand survenue en 323, l’Égypte revint à l’un de ses généraux, Ptolémaios, fils de Lagos, fondateur d’une dynastie hellénistique qui se maintint au pouvoir jusqu’au suicide de Cléopâtre VII en 30 av. J.-C.
Avec les Lagides, l’Égypte ne fut plus tout à fait égyptienne. Les Grecs de Macédoine qui en firent leur pays, lui donnèrent en effet une nouvelle capitale, Alexandrie, qui remplaça Memphis. L’Égypte fut désormais tournée vers la Méditerranée et le monde grec, c’est-à-dire vers le nord, et non plus centrée sur le Nil.
Les souverains lagides (ou Ptolémées) furent au nombre de dix-sept. Le premier d’entre eux, Ptolémée Ier Sôter (le Sauveur) (323-282 av. J.-C.) qui fut satrape d’Égypte de 323 à 305, puis roi d’Égypte de 305 à 282, était un des plus proches compagnons d’Alexandre le Grand. Il épousa Eurydice, fille d’Antipater, le Régent de l’empire et il obtint la reconnaissance de ses droits sur l’Égypte et la Cyrénaïque. Après la mort d’Antipater en 319, les guerres reprirent entre les diadoques106. Ptolémée en profita pour annexer la Palestine107, puis, en 305 av. J.-C., il prit le titre de Roi d’Égypte. Il reconstitua alors une puissance égyptienne aussi vaste que celle qui existait sous le Nouvel Empire puisqu’il occupa Chypre, la Palestine et jusqu’à l’Anatolie.
Avec les Ptolémées il n’y eut pas d’interruption du principe de la monarchie pharaonique, ces souverains se faisant représenter accomplissant les offrandes aux dieux égyptiens. Ils furent donc acceptés par les Égyptiens et par le clergé108; d’autant plus que Ptolémée Ier combla les prêtres, fit restaurer nombre de temples et en fit construire d’autres.
Ptolémée Ier eut pour successeur son fils cadet qui régna sous le nom de Ptolémée II Philadelphe109 (282-246 av. J.-C.). Sous son règne, l’Égypte connut un essor remarquable illustré par l’embellissement de la nouvelle capitale, Alexandrie110, où il fit édifier le célèbre phare et la non moins célèbre bibliothèque. Pour réaliser ces grands travaux, il avait besoin d’or et c’est pourquoi, les mines du désert nubien, l’ancien pays de Ouaouat (carte page VIII), abandonnées depuis plusieurs siècles, furent remises en exploitation.
L’Égypte lagide réussit à capter le commerce Asie-Méditerranée grâce au contrôle qu’elle exerçait sur une partie du littoral de la mer Rouge (Janvier, 1976). Plusieurs ports y furent agrandis et d’autres fondés sous le règne de Ptolémée II Philadelphe. C’est ainsi que l’antique mouillage de Myos Hormos (l’actuel Quseir) fut aménagé, ainsi que celui de Soterias Limen (l’actuel Port Soudan), dont la situation exceptionnelle, au débouché des voies caravanières vers Méroé, en faisait un site de toute première importance. À environ 160 km au sud de Soterias Limen, à l’embouchure du Baraka, fut fondée la station de Ptolémaïs-des-Chasses destinée à la collecte du morfil (ivoire brut) et peut-être au dressage d’éléphants de guerre capturés plus au sud, dans la vallée de l’Atbara (carte page XIV).
Sous le règne de Ptolémée III Evergète Ier (246-221 av. J.-C.), successeur de Ptolémée II Philadelphe, le port d’Adoulis (l’actuelle Massaoua), fut fondé à l’emplacement d’un mouillage fréquenté par les marins naviguant en mer Rouge. Avant-port d’Axoum, Adoulis qui devint le principal port du commerce avec l’Inde connut une fortune considérable jusqu’à la conquête arabo-musulmane.
Les Grecs jouèrent un rôle moteur dans le commerce avec l’Inde. L’un d’entre eux, Eudoxe de Cyzique, semble être le premier Européen connu ayant fait la traversée entre la Corne de l’Afrique et le sous-continent indien.
La route maritime ne cessa plus de se développer à partir de cette époque ; à telle enseigne qu’au IIe siècle de l’ère chrétienne, un anonyme voyageur grec, excellent connaisseur de ses détails rédigea un guide des mouillages et des ports, des populations, des marchandises proposées et des barèmes en mer Rouge, dans le sud de l’Arabie et sur la côte occidentale de l’Inde. Ce texte, connu sous le nom de Périple de la Mer Erythrée (Mauny, 1968 : 19-34), constitue une source exceptionnelle permettant de connaître avec une réelle précision l’organisation des échanges à cette époque.
Le commerce de l’Égypte avec l’Inde se faisait avec une rupture de charge dans le sud de la mer Rouge, là où les navires yéménites avaient le monopole de la traversée de l’océan Indien. Le rôle de l’Arabie du sud était double : les Yéménites étaient les intermédiaires obligés du commerce entre la Méditerranée et l’Inde et ils avaient le monopole de la navigation le long du littoral de l’Afrique orientale jusqu’à Zanzibar et probablement jusqu’à la hauteur de Sofala (Datoo, 1970 : 65-76 ; Janvier, 1975).
Ptolémée III Évergète fut le dernier grand souverain de la dynastie. Après lui, treize autres rois et reines se succédèrent, mais leur pouvoir, de plus en plus affaibli, sombra dans les intrigues et les règlements de comptes familiaux111.
Sous le règne de Ptolémée XII Aulète « le flutiste » (80-51 av. J.-C.), la fin de la dynastie se précipita et l’Égypte perdit son indépendance. Chassé d’Alexandrie par l’émeute populaire, Ptolémée XII se réfugia à Rhodes, puis il obtint le soutien de Pompée qui le réinstalla au pouvoir.
À sa mort, en 51 av. J.-C., il laissa le royaume à l’aîné de ses fils, Ptolémée XIII, âgé de dix ans et à sa fille Cléopâtre VII Théa Philopâtor « la déesse qui aime son père » (51-30 av. J.-C.), sœur de Ptolémée III qu’elle épousa. Tous deux se trouvèrent entraînés contre leur gré dans les guerres civiles romaines opposant César et Pompée. En 48 av. J.-C., Cléopâtre fut chassée d’Alexandrie par Ptolémée XIII.
Cette même année 48 av. J.-C., Pompée, vaincu par César, se réfugia en Égypte où il fut assassiné sur ordre de Ptolémée XIII. Quand César débarqua à Alexandrie, un esclave lui porta la tête de son rival. Cléopâtre VII112 se présenta alors au général romain qui lui donna le trône d’Égypte avant de l’épouser113 et de l’emmener vivre à Rome. Après la mort de César, Marc Antoine, maître de la partie orientale de l’Empire succomba à son tour à ses charmes. L’alliance de Rome et de l’Égypte fut de nouveau scellée mais Octave (Octavien), le futur empereur Auguste, petit-neveu de Jules César et son héritier, partit en guerre contre Antoine dont il fut vainqueur en 31 av. J.-C., à la bataille navale d’Actium, en Grèce. En 30 av. J.-C., il débarqua en Égypte où Antoine se suicida.
Octave promit à Cléopâtre de la maintenir sur le trône et de reconnaître Césarion, le fils qu’elle avait eu de César, comme l’héritier de la couronne. Quelques jours plus tard, Ptolémée XV Césarion, le dernier représentant de la dynastie des Lagides fut assassiné. Cléopâtre pensa qu’Octave était responsable de ce meurtre et elle choisit de se donner la mort114. L’Égypte passa alors sous le contrôle de Rome.
-332- 30 av. J.-C. en Égypte = Époque Ptolémaïque ou Lagide.
-30 av. J.-C. en Égypte = début de la période romaine puis romano-byzantine.
-618 apr. J.-C. en Égypte = conquête perse
-629 apr. J.-C. en Égypte : reconquête byzantine
Les Grecs donnaient le nom de Libyens à tous les peuples qui vivaient au nord de l’Afrique, depuis les oasis situées à l’ouest du Nil jusqu’au détroit de Gibraltar, les Colonnes d’Hercule. Hérodote avait remarqué qu’ :
« […] en Libye, les bords de la mer qui la limite vers le nord à partir de l’Égypte jusqu’au cap Soloeis, qui marque la fin du continent libyen, sont habités d’un bout à l’autre par des hommes de race libyenne divisés en nombreuses peuplades […] » (Hérodote, Histoires, II, p. 32).
Vers le sud, les Grecs ne connaissaient pas les limites des zones qu’occupaient ces peuples. Pour eux, le monde libyque prenait fin là où débutait le pays des Noirs, ceux qu’ils appelaient les Éthiopiens (Aethiops : peau foncée, peau brûlée).
Durant l’Antiquité gréco-romaine, le monde berbère semble avoir été composé de deux ensembles :
- Celui des « Libyco-berbères » vivant à l’ouest de la vallée du Nil jusqu’à l’actuelle Libye incluse, était en contact avec les colonies grecques de Cyrénaïque. Nos connaissances le concernant sont plus que fragmentaires.
- Les Berbères de l’ouest, autrement dit ceux de Berbérie, l’actuel Maghreb, sur lequel les connaissances sont inégales : abondantes pour l’actuelle Tunisie et la partie la plus orientale de l’actuelle Algérie, souvent inexistantes ailleurs, notamment de la région de l’Oranie aux îles Canaries.
La religion des Libyco-berbères reposait sur l’existence d’un au-delà et de l’immortalité de l’âme. Les morts étaient enterrés avec soin et entourés d’objets familiers, dans des tumuli de terre ou de pierre selon leur rang social. Ils pouvaient également être ensevelis dans des haounet ou caveaux creusés dans des falaises.
Les dieux des Libyco-berbères étaient les forces naturelles, montagnes, sources, arbres et ils pratiquaient le culte du bélier.
L’art monumental berbère se retrouve dans les djedars, qui sont des pyramides funéraires construites par des princes berbères (Laporte, 2005). Les plus connus sont les mausolées du Medracen, celui de la Souma du Khroub, celui de Beni Rhénane à Siga et le mausolée royal de Maurétanie faussement baptisé « Tombeau de la Chrétienne ».
Une importante bibliographie concerne ces monuments dont les références les plus récentes les concernant sont données dans Laporte (2005 : 403-406).
Vouloir dresser la carte d’établissement des peuples berbères durant l’Antiquité est une tâche difficile en raison d’une part des lacunes dans les connaissances, et d’autre part du nomadisme de certains d’entre eux. Jehan Desanges et Yves Modéran leur ayant consacré d’importants travaux, il est néanmoins possible d’identifier :
- Entre l’Égypte et les territoires dépendant de Carthage, les Meshwesh, les Téméhou, les Lebu (ou Lebou), les Nasamons, les Maces, les Lotophages et les Garamantes.
- En Tripolitaine et dans le sud de l’actuelle Tunisie, les Gétules et les Pharousiens qui :
« […] occupaient […] les immenses steppes de la Berbérie présaharienne […] pasteurs nomades, successeurs des « Bovidiens » blancs de la fin du Néolithique, prédécesseurs des chameliers, ces cavaliers nomades avaient déjà appris à remonter, tous les étés, vers les pâturages septentrionaux » (Camps, 1987 : 85).
À la différence de leurs frères de Libye, les Berbères de l’ouest créèrent des États. Au IVe siècle avant J.-C., les trois principaux étaient (carte page XVIII) :
1- Dans l’actuel Maroc, une fédération de peuples et de tribus donna naissance au royaume de Maurétanie – ou royaume des Maures –, qui s’étendait de l’Atlantique au fleuve Mulucha (Moulouya).
2- Entre le Mulucha et la rivière Amsaga (l’actuel Oued el-Kébir), s’étendait le royaume des Masaesyles116.
3- Entre la rivière Ampsaga et les territoires de Carthage s’étendait le royaume des Massyles ou Numidie.
Ces royaumes étaient dirigés par des souverains portant le nom d’Aguellid qui étaient des chefs de confédérations et des chefs de guerre. Leur pouvoir était généralement remis en cause après leur mort car les règles de transmission n’étaient pas clairement définies. Les tribus composant ces royaumes étant jalouses de leur autonomie, la contestation politique dégénérait régulièrement en guerre civile à la fin de chaque règne. Durant la seconde moitié du dernier millénaire avant J.-C., les royaumes berbères de l’ouest entrèrent en contact avec Carthage.
Les Guanches
Les Guanches ou Igwanciyen sont les Berbères des îles Canaries. Ils disparurent en quelques années après 1312, date de la découverte de l’archipel par Lancelo Malocello, puis entre 1402 et 1406 quand Jean de Béthencourt conquit les îles de Lanzarote, Fuerteventura et El Hierro au nom du roi de Castille.
Entre 1478 et 1483, les Guanches de Grande Canarie se révoltèrent et en 1492, eut lieu la conquête de La Palma. De 1493 à 1496, les Guanches de Tenerife opposèrent une farouche résistance aux Espagnols.
L’organisation politique des Guanches était différente d’une île à l’autre. Au point de vue anthropologique, les Guanches sont bien connus grâce aux nombreuses momies mises au jour sur l’archipel (Arco Aguilar et alii, 1999).
Leurs points communs avec le reste du monde amazigh sont nombreux, notamment la toponymie : Tenerife = Tin Irifi, les tifinagh et la parenté génétique. C’est ainsi que la génétique moléculaire (Fregel et alii, 2009,) a montré que les Guanches sont clairement des Berbères, leur apparentement ayant été établi, notamment avec les populations berbères de l’Atlas marocain.
Carthage « Quart Hadasht », « la nouvelle ville » en phénicien, fut d’abord une colonie de Tyr. Les traditions font état d’une fondation légendaire due à Elissa (Didon), reine de Tyr en 814 av. J.-C., au fond d’un golfe constituant un abri sûr pour les navires, au cœur de la zone maritime séparant la Méditerranée orientale de la Méditerranée occidentale. Jusqu’au VIIe siècle, les connaissances que nous avons de ce comptoir sont fragmentaires.
À partir du VIe siècle av. J.-C., à la faveur de l’occupation assyrienne de la Phénicie117, puis des guerres contre les Perses, Carthage acquit sa totale autonomie par rapport à Tyr, sa métropole. Son rôle commença alors à être déterminant en Méditerranée occidentale puisque son rayonnement s’étendait aux Baléares, à la Sicile et à la Sardaigne, ce qui la conduisit à se heurter à la volonté expansionniste des Grecs de Sicile ou des entreprenants négociants de Massalia118.
Dans l’actuelle Algérie, les principaux comptoirs puniques119 étaient, d’est en ouest (carte page XVIII) : Hippo Regius (Annaba), Cirta (Constantine), Tiddis (Beni Hamiden), Chullu (El tarf), Igilgili (Jijel), Icosim (Alger), Tipaza, Iol (Cherchel), Gunugu (Gouraya), Marsa Medakh (Oran), Siga (Takembrit) et l’île de Rachgoun à deux kilomètres au large du village du même nom à proximité de la frontière marocaine (Ferdi, 2005 :13). Dans l’actuel Maroc, les Carthaginois fermèrent aux Grecs le détroit de Gibraltar en s’installant à Tanger-Tingi (Ponsich, 1970). Déjà présents à Lixus et sur l’îlot de Mogador (Essaouira), ils recherchaient peut-être l’or de l’Atlas et certainement la pourpre dont la variété locale, la pourpre gétule, était fort connue durant l’Antiquité (Desjacques et Koeberlé, 1956 ; Gattefossé, 1957).
Durant l’Antiquité, la pourpre était utilisée pour teindre les étoffes dans une gamme de coloris allant du rouge au bleu verdâtre. Elle était tirée de trois coquillages, le Murex brandaris, le Murex trunculus et la Purpura hemastoma.
Durant plusieurs siècles, les Phéniciens eurent le quasi-monopole de la fourniture de la pourpre, mais les côtes de la Méditerranée orientale s’épuisant, ils furent bientôt contraints d’aller de plus en plus loin afin de se procurer les précieux coquillages et toute la Méditerranée fut alors prospectée. L’île d’Ibiza dans les Baléares, permit un moment de fournir les teinturiers de Phénicie, puis il fut nécessaire d’aller plus loin encore.
Ce fut durant ces prospections que fut découverte la « pourpre gétule », différente de la pourpre phénicienne traditionnelle. Les recherches de J. Desjacques et P. Kœberlé (1955 : 193-202) et celles de J. Gattefossé (1957 : 329-333) ont largement permis de connaître cette question. L’industrie de la pourpre gétule ou pourpre maure avait un centre : l’îlot d’Essaouira (Mogador), situé à neuf cents mètres de la presqu’île sur laquelle est bâtie la ville moderne. Le site était commode et facile à défendre. On y trouvait du bois et de l’eau douce et les coquillages Purpura hemastoma y abondaient (Fantar, 1993).
Sur le littoral méditerranéen marocain, quelques établissements carthaginois ont été identifiés et fouillés, notamment à Abdeslam el-Behar, sur l’oued Emsa et à El Ksar Sghir120. Le comptoir carthaginois de Tanger est bien connu depuis les fouilles de Michel Ponsich (1970). Sur la côte atlantique, l’îlot d’Essaouira (Mogador), Lixus et Sala (Chella), ont fourni du matériel archéologique de provenance incontestable.
À l’époque des Magonides121 (535-450 av. J.-C.), Carthage possédait un empire maritime s’étendant des Baléares et du sud de l’Espagne jusqu’à Mogador. Sa fortune était alors fondée sur le commerce, les marchands de la ville fournissant essentiellement blé et huile à une partie du monde méditerranéen.
En 510 av. J.-C., la République romaine et Carthage signèrent un traité. La seconde s’engageait à ne pas nuire aux alliés de Rome, tandis que la première reconnaissait le monopole commercial carthaginois en Méditerranée occidentale. Carthage fut alors au sommet de sa puissance.
Ce vaste mouvement d’expansion fut brisé en 480 av. J.-C. quand les Grecs de Sicile dirigés par Gélon de Syracuse remportèrent la bataille d’Himère, ville dont Carthage cherchait à s’emparer122. Cette défaite eut des conséquences immédiates dans la mesure où les Carthaginois qui durent reculer en Méditerranée occidentale, recentrèrent leur empire sur le littoral de l’Afrique du Nord où ils développèrent leurs implantations. Comme au même moment, la ville recevait des réfugiés chassés de Tyr en raison de la pression que les Perses y exerçaient, il devint donc nécessaire d’élargir son emprise foncière. Or, durant deux à trois siècles, les Carthaginois n’avaient pas tenté de s’étendre dans l’arrière-pays car ils ne recherchaient pas une domination territoriale.
Ce ne fut donc qu’à partir du Ve siècle av. J.-C. qu’ils commencèrent à agrandir leur zone de contrôle, allant jusqu’à posséder un territoire s’étendant à la totalité de l’actuelle Tunisie et mordant sur la partie orientale de l’actuelle Algérie, jusqu’à Tébessa. Cette expansion territoriale se fit aux dépens des Berbères, en l’occurrence les Numides, et plus précisément les Massyles comme nous le verrons plus loin123.
Au début du IVe siècle, Carthage décida de se lancer dans une vaste politique de recrutement de mercenaires berbères, fantassins et cavaliers, les fameux cavaliers numides124.
En 312 av. J.-C., Agathocle, tyran de Syracuse attaqua Messine et Agrigente, cités liées à Carthage qui leur envoya une flotte de secours. En 311, ses troupes ayant été défaites lors de la bataille d’Himère, sur la côte septentrionale de la Sicile, Agathocle s’enferma dans Syracuse où il fut assiégé. Au mois d’août 310, il réussit cependant à rompre le siège et à porter la guerre en Afrique en débarquant dans la région d’Hippo Diarrhytus (Bizerte) (cartes pages XX et XXI). Plusieurs villes soumises à Carthage rallièrent alors son camp cependant que plusieurs cités siciliennes tombées aux mains de Carthage se soulevèrent, dont Agrigente. Un corps expéditionnaire carthaginois fut alors envoyé en Sicile où il ouvrit un second front, obligeant Agathocle à diviser ses troupes en deux. Laissant une partie de ses forces en Afrique sous les ordres d’Eumachos et de ses deux fils Archagathos et Héraclide, il se porta, avec le restant de son armée, au secours de ses possessions siciliennes.
La fortune des armes changea de camp en 306 quand les contingents berbères d’Agathocle rallièrent le camp carthaginois. Carthage sortit donc renforcée de sa guerre et de nouveau maîtresse de ses anciennes possessions siciliennes.
Ayant signé la paix avec Agathocle, Carthage fut ensuite confrontée à Pyrrhus d’Epire qui, entre 280 et 275 av J.-C., lui disputa en vain ses possessions siciliennes.
Carthage ne fut pas une simple colonie phénicienne accrochée en terre d’Afrique au milieu d’un monde hostile, un peu comme les « praesidios » espagnols de la côte rifaine ou les « fronteiras » portugaises de la côte atlantique du Maroc qui aux XVIe-XVIIe siècles vécurent en permanence assiégées. Entre Carthaginois et Numides, les alliances matrimoniales furent nombreuses. C’est ainsi que le Numide Massinissa :
« […] était aussi un Punique, ni physiquement, ni culturellement il ne se distinguait de ses adversaires carthaginois. Il coulait dans ses veines autant de sang carthaginois qu’il coulait de sang africain dans celles d’Hannibal » (Camps, 1987 : 110).
La culture carthaginoise imprégnait les élites berbères de la partie orientale du Maghreb car :
« ( ) c’est en punique que sont rédigés les dédicaces religieuses, les rares textes administratifs conservés, les épitaphes royales et les légendes monétaires, et non pas seulement chez les Numides de l’est, mais d’un bout à l’autre de l’Afrique du Nord » (Camps, 1987 :113).
Entre Carthage et Rome, la confrontation fut d’abord évitée par la signature de deux traités, l’un en 348 et l’autre en 306 av. J.-C. Puis, quand Rome fut maîtresse de tout le sud de la péninsule, un long conflit éclata qui fut rythmé par trois guerres qui eurent pour conséquence la destruction de la puissance carthaginoise. Ces guerres sont connues sous le nom de « Guerres puniques » (Le Bohec, 1995).
Cette guerre qui eut pour cause la volonté romaine de posséder la totalité de la Sicile fut à la fois terrestre et maritime. Les Romains qui, par deux fois furent vainqueurs de la flotte carthaginoise – en 260 av. J.-C. à Mylae et en 256 av. J.-C. à Ecnome –, pensèrent qu’ils allaient pouvoir l’emporter en tentant un débarquement en Afrique.
En 255, ils mirent ainsi à terre un corps expéditionnaire à proximité de Carthage. Le consul Marcus Atilius Regulus qui le commandait remporta une première victoire, puis il fut battu par le Grec Xanthippe, chef des mercenaires carthaginois. Capturé, il fut libéré sur parole deux ans plus tard contre la promesse de se constituer prisonnier en cas d’échec de la mission de paix dont les Carthaginois l’avaient chargé. Regulus prit la parole devant le Sénat romain et il défendit au contraire l’option de la guerre ; puis, respectant sa parole, il retourna à Carthage pour s’y constituer prisonnier125.
Le sort des armes pencha ensuite du côté de Carthage quand, en 249 av. J.-C., ses armées remportèrent coup sur coup deux victoires ; l’une sur mer au large de Drepanum, l’actuelle Trapani en Sicile, et l’autre, sur terre, également en Sicile. L’artisan de cette dernière était Hamilcar Barca. En 241, les Romains renversèrent la situation en envoyant par le fond la flotte carthaginoise lors de la bataille des îles Aegates à l’ouest de la Sicile et Carthage fut contrainte de demander la paix. Rome, jusque-là puissance continentale, avait donc vaincu Carthage, puissance maritime, ce qui bouleversa en profondeur les rapports de force en Méditerranée.
Carthage renonça à la Sicile que Rome occupa en totalité et accepta de verser un énorme tribut qui devait être acquitté en vingt ans. Ruinée, la ville ne put payer ses mercenaires, ce qui provoqua leur soulèvement. Durant deux ans, de 240 à 238, Carthage mena une guerre difficile et impitoyable contre ses anciens soldats dirigés par Mathô et Spendios, ainsi que contre ses alliés berbères :
« C’est à eux-mêmes que devaient s’en prendre les Carthaginois devant l’étendue de leurs maux ; en effet, ils avaient […] fait sentir avec rigueur leur domination sur les Libyens ; ils avaient réclamé la moitié de toutes les récoltes, doublé le tribut dû par les villes, n’accordant aux pauvres aucune remise ou aucun délai pour les taxes qu’ils devaient acquitter […]. Aussi, chez les Libyens, les hommes n’eurent pas besoin qu’on leur prêchât la révolte […]. Quant aux femmes qui avaient eu l’occasion de voir emmener leurs époux et leurs pères coupables de n’avoir pas payé les taxes [elles se dépouillèrent] de leurs bijoux, les apportant sans hésiter, en contribution à l’effort de guerre » (Polybe, Histoires, I, 72. à propos de la révolte des mercenaires).
Dans un premier temps, les villes carthaginoises furent assiégées, mais Hamilcar Barca contre-attaqua grâce à l’aide que lui procura Naravas, son allié numide qui mit sa cavalerie à sa disposition126. En 237, Hamilcar réussit à prendre au piège les mercenaires révoltés et il les extermina.
Hamilcar Barca avait sauvé Carthage mais son prestige suscita des jalousies. Aussi, en 237, afin de l’écarter, le Sénat carthaginois lui confia-t-il la mission de conquérir l’Espagne pour compenser la perte de la Sicile. Il fut tué en 229 lors des opérations et son gendre Asdrubal lui succéda à la tête du corps expéditionnaire. Hannibal, un fils d’Hamilcar Barca devint ensuite général en chef de l’armée carthaginoise. En 218, il viola le traité de paix de 241 av. J.-C. en prenant la ville de Sagonte alliée de Rome, ce qui équivalait à une déclaration de guerre.
Cette seconde guerre éclata en Espagne, là où les zones d’influence de Rome et de Carthage étaient au contact. Elle débuta à l’avantage de Carthage dont les armées traversèrent les Pyrénées. Au mois de juin 218, ces dernières franchirent le Rhône, puis les Alpes et elles marchèrent sur Rome. Les Romains furent plusieurs fois battus, notamment en 217 au lac Trasimène et en 216 à Cannes. Rome fut alors à portée d’Hannibal, mais comme ce dernier ne disposait pas de matériel de siège, il installa son camp à Capoue où il attendit en vain les renforts promis. Les Romains eurent donc le temps de se réorganiser et de contre-attaquer, le repoussant dans le sud de la péninsule italienne.
Rome qui cherchait des alliés contre Carthage, approcha alors Syphax, roi des Massaesyles, lequel vit dans cette demande d’alliance une occasion de s’emparer des territoires massyles sur lesquels régnait Gaia, allié de Carthage, et il accepta donc l’offre romaine. Ce fut alors que Rome reçut le renfort de cavaliers qui servirent comme auxiliaires dans l’armée romaine (auxilia externa)127.
En 206, Gaia mourut et son fils Oezalces qui était marié à une Carthaginoise lui succéda. À sa mort, son frère Capussa monta sur le trône. Poussé par Syphax, Metzul, un des cousins du nouveau roi, le combattit. Capussa fut tué au combat et Metzul mit sur le trône Lacumazes, son propre frère. Carthage se vit alors affaiblie, mais Massinissa, le troisième fils survivant de Gaia quitta l’Espagne où, à la tête d’un contingent numide il combattait les Romains et il entra en guerre contre Lacumazes et Metzul, tous deux soutenus par Syphax. Massinissa l’emporta.
En 205, les Carthaginois demandèrent à Syphax d’entrer en guerre contre Massinissa qui fut vaincu128. La guerre tourna ensuite à l’avantage de Scipion et de Massinissa et au mois d’avril 203, lors de la bataille dite des « Grandes Plaines », la victoire romano-massyle fut totale. Massinissa poursuivit Syphax qui se retrancha à Cirta où il fut fait prisonnier129, puis il récupéra les terres massyles occupées par les Massaesyles. La Numidie fut alors unifiée depuis la Moulouya à l’ouest jusqu’à la Tripolitaine à l’est.
Scipion accorda une trêve à Carthage pour lui permettre de négocier la paix, mais un nouveau retournement de situation se produisit car Hannibal qui était rentré d’Italie durant l’été 203 s’allia à Vermina, fils de Syphax. Carthaginois et Massaesyles envahirent ensuite le royaume massyle, mais Scipion et Massinissa rassemblèrent leurs forces et ils se portèrent au-devant d’eux.
Une ultime négociation eut lieu entre Scipion et Hannibal. Carthage proposa la cession de l’Espagne et la destruction de sa flotte contre la reconnaissance par Rome de ses possessions africaines. Scipion ayant refusé, le choc eut lieu à Zama (carte page XVIII) au mois d’octobre 202. Hannibal fut défait et Carthage dut signer un traité extrêmement dur puisqu’il prévoyait, outre le désarmement de sa flotte et l’abandon de ses éléphants de guerre, le versement d’une énorme indemnité, l’envoi d’otages à Rome et l’interdiction d’engager une guerre sans l’accord du sénat romain130. En revanche, Carthage conservait ses possessions africaines moins la Numidie de Massinissa.
Rome avait donc reconnu à Carthage la possession d’une partie des territoires massyles, mais elle laissa faire quand Massinissa se les réappropria peu à peu. En 162, ce dernier décida ainsi d’occuper la petite Syrte (le golfe de Gabès) et la région de Tacapae. Puis, en 153, le chef massyle revendiqua des terres agricoles situées à quelques kilomètres à peine de Carthage.
En 150 av. J.-C., les Carthaginois n’acceptèrent plus de se laisser démembrer mais ils furent vaincus par Massinissa et condamnés à lui verser d’énormes indemnités.
Cette guerre éclata pour deux raisons principales. La première était certes que les Carthaginois avaient violé le traité de 201 en attaquant les Massyles, mais la seconde, et la plus importante, était que Rome ne désirait pas voir naître un État berbère fort qui contrôlerait les ports carthaginois.
Durant cette troisième guerre, Rome décida d’en finir avec Carthage. Le sénat romain ayant exigé que la population abandonne la ville pour qu’elle puisse être rasée, les Carthaginois ne pouvaient donc que résister avec l’énergie du désespoir ; d’autant plus que, même si leur armée avait été anéantie, la ville disposait de solides fortifications131. Débuta alors un siège de trois ans dirigé par Scipion Emilien, petit-fils adoptif de Scipion l’Africain. La défense fut acharnée et l’on se battit de maison à maison. Finalement, au printemps 146, les derniers combattants carthaginois s’immolèrent par le feu. Rome fit raser la ville, sema du sel sur son emplacement, annexa la région et décida de partager la Numidie entre les trois héritiers de Massinissa.
La guerre inexpiable
Durant cette guerre, et citant Appien, Yann Le Bohec montre que les Carthaginois commirent l’irréparable en torturant des prisonniers romains. Le chef des troupes, Hasdrubal le Boétharque132 :
« avec des outils de fer, leur fait arracher les yeux, la langue, les tendons, les organes sexuels ; aux uns, il fait lacérer la plante des pieds, aux autres, couper les doigts. Il les fait jeter encore vivants du haut des remparts » […] On comprend alors un point : il ne faut peut-être pas chercher ailleurs que dans ces cruautés l’explication de l’acharnement mis par Scipion Emilien et ses hommes lors de la destruction de Carthage. Ces supplices inutiles changèrent le but de la guerre qui leur avait été fixé : il ne s’agissait plus seulement de détruire Carthage en tant qu’État, en tant que puissance, mais d’anéantir physiquement la population de la ville. La clémence était devenue impossible. Décidément, les Puniques avaient parfois du talent pour rendre les guerres « inexpiables ». Les extrémistes carthaginois, qui ne l’ignoraient pas, avaient ce jour-là, délibérément joué le sort de leur cité à quitte ou double. Mais cette fois, ils avaient en face d’eux des légionnaires » (Le Bohec, 1996 : 307-308).
104. Ptolémée était le fils de Lagos, d’où le nom de Lagide. Lagos était l’un des généraux d’Alexandre le Grand.
105. Pour la bibliographie concernant l’époque ptolémaïque, voir Hugot (2004). Pour tout ce qui concerne l’Orient méditerranéen de la mort d’Alexandre au Ier siècle avant notre ère, voir Le Dinahet (2003). Pour les divers aspects de la question et de la période, voir Skeat (1954) et Bernand (1995, 1998).
106. Les guerres de succession qui opposèrent les généraux d’Alexandre, les diadoques, se terminèrent en 281 après la bataille de Couroupédion qui opposa le roi de Thrace Lysimaque à celui de Syrie, Séleucos. Auparavant, en 321, par l’Accord de Babylone les diadoques s’étaient partagés.
107. Il annexa également Chypre, des îles en mer Egée, des cités en Asie Mineure etc.
108. Pour la question concernant la place d’Alexandre dans la continuité de l’histoire égyptienne, voir S. M. Burstein (1994).
109. Littéralement « qui aime sa sœur ». Ptolémée II avait épousé sa sœur Arsinoé.
110. « Alexandrie près l’Égypte », dont toute la partie administrative et les palais se sont effondrés dans la mer.
111. Ptolémée III eut pour successeurs Ptolémée IV Philopator « qui aime son père »(221-205 av. J.-C.) mais qui assassina son oncle, sa mère et son frère ; Ptolémée V Epiphane (205- 181 av. J.-C.) ; Ptolémée VI Philométor « qui aime sa mère » (181-145) ; Ptolémée VII qui ne régna que quelques mois ; Ptolémée VIII Évergète II (145-116 av. J.-C.) frère du précédent dont il épousa la veuve qui était sa sœur, qui fit assassiner son fils, donc son neveu Eupator et qui viola la fille de sa femme laquelle était donc deux fois sa nièce avant de l’épouser. Quant à Ptolémée IX Sôter II (116- 107 av. J.-C.), Ptolémée X Alexandre Ier (107- 88 av. J.-C.) et Ptolémée XI Alexandre II (? –80 av. J.-C.), ils eurent des règnes insignifiants.
112. Cléopâtre VII Théa Philopator gouverna l’Égypte entre 51 et 30 av. J.-C., d’abord avec ses deux frères et époux Ptolémée XIII et Ptolémée XIV, puis avec Marc-Antoine.
113. Elle eut un fils de César, Césarion, le dernier des Ptolémée, né en 47 av. J.-C. et assassiné en 30 av. J.-C. Elle eut des jumeaux de Marc Antoine qui étaient Alexandre Hélios et Cléopâtre Séléné laquelle épousa Juba, roi berbère de Numidie qui régna sur la Mauritanie et un fils, Ptolémée XVI Philadelphe. En 44 av. J.-C., après que César eut été assassiné, elle retourna vivre en Égypte.
114. Comme elle était surveillée, elle trouva une ruse, se faisant apporter un panier de figues dans lequel ses fidèles avaient caché, dit-on, une vipère des sables et non un aspic, serpent au venin non mortel comme le veut la légende, et qui la piqua à la main.
115. Sur les Berbères en général, voir Camps (1980, 1981), Malika Hachid (2000), Lugan (2012).
116. Au IIIe siècle av. J.-C. les royaumes Massyle et Masaesyle furent réunis dans le royaume de Numidie (Decret et Fantar, 1998 : 71-72).
117. Tyr fut occupée par les Assyriens au VIe siècle et, dès lors, sa colonie africaine fut livrée à son destin.
118. Dans l’immensité de la littérature concernant Carthage en général on se reportera utilement à François Decret (1977) et à Hédi Dridi (2006).
119. Punique, du latin punicus, Carthaginois.
120. Pour tout ce qui concerne les ports puniques – et phéniciens –, on se reportera à la thèse de Nicolas Carayon (2008).
121. Du nom de la famille Magon. La cité était dirigée par un conseil des Anciens ou Sénat qui détenait tous les pouvoirs et une assemblée du peuple qui élisait les généraux et les suffètes ou magistrats. Durant son histoire, Carthage fut dominée par quelques grandes familles qui se réservèrent les fonctions officielles dont les Magon (Magonides) et les Barca (Barcides).Hannibal était un Barca.
122. Les Carthaginois prirent leur revanche en 409 av. J.-C. quand ils détruisirent la ville.
123. La politique de Massinissa vis-à-vis de Carthage s’explique largement par cette réalité car le chef numide chercha constamment à reconquérir les territoires massyles passés sous domination carthaginoise.
124. Pour tout ce qui concerne la cavalerie berbère, il sera utile de se reporter à Christine Hamdoune (2005). Carthage n’ayant pas d’armée permanente enrôla les Berbères vivant sur son territoire ou bien recruta des mercenaires en Afrique du Nord ou ailleurs. Sa force principale résidait dans sa marine composée de trirèmes ou de quinquérèmes (navires à cinq rangs de rames).
125. Les Carthaginois l’auraient torturé à mort.
126. En 237, à l’issue de la guerre, il épousa Salammbô, la fille d’Hamilcar.
127. Au sujet des cavaliers berbères de l’armée romaine, voir Hamdoune (2005).
128. Pour tout ce qui concerne les hésitations et les motivations de Syphax ainsi que ses négociations avec Rome, on se reportera à Decret et Fantar (1998 : 90-99).
129. D’où la légende du suicide de Sophonisbe son épouse. Fille d’Hasdrubal et fiancée à Massinissa, Sophonisbe fut mariée à Syphax afin de sceller l’alliance numido-carthaginoise. Quand Massinissa prit Cirta, il l’épousa mais Scipion qui craignit alors de voir le nouveau chef numide se rapprocher de Carthage la destina à son triomphe. Afin d’éviter un tel déshonneur, elle s’empoisonna.
130. Quel fut le sort d’Hannibal après le traité de 201 ? Nous l’ignorons. Il est établi qu’il se retira sur ses terres pour reprendre un rôle politique en 196 quand il fut élu suffète par le peuple de Carthage. C’est alors qu’il vit se dresser contre lui une partie des notables de la cité car il avait dénoncé leurs trafics divers et pour l’écarter, ces derniers dénoncèrent à Rome sa volonté de revanche. En 195, il s’enfuit pour trouver refuge à Tyr, en Phénicie puis il offrit ses services à Antiochos III, roi macédonien de Syrie qui projetait d’entrer en guerre contre Rome, puis, après la défaite de ce dernier, il se mit au service de Prusias, roi de Bithynie qui fut sommé par Rome de le lui livrer. En 183 av. J.-C., pour échapper au sort infamant qui l’attendait, Hannibal se suicida (Le Bohec, 1995 ; Saumagne, 1966 ; Colonna, 2003).
131. Pour tout ce qui concerne les causes et les péripéties de cette guerre ainsi que les forces en présence, voir Le Bohec (1995 : 275- 314).
132. Qu’il ne faut pas confondre avec Hasdrubal Barca.