« L’amour fait de nous tous des héros. »
MURIEL STERLING,
Savoir mêler les affaires et la joie de vivre :
Comment équilibrer avec succès les affaires et l’amour
— J’aimerais tant que tu ne partes pas, chérie.
A l’aéroport, Muriel avait dit ces mots à Cecily tandis que celle-ci sortait son bagage du coffre de la voiture de sa mère.
— Il est temps, avait répondu Cecily. Je n’ai plus rien à faire ici.
Elle aurait aimé avoir une raison de rester, mais le Festival du chocolat était terminé, elles avaient fini par perdre la bataille pour sauver l’entreprise, et c’était pour elle le signal qu’elle devait partir sans tarder. La veille, leurs derniers espoirs s’étaient effondrés. Désormais, elle ne pouvait plus rien faire de plus pour sa sœur. Elles avaient épuisé toutes les solutions possibles.
Lorsqu’elle s’était arrêtée chez Sweet Dreams pour dire au revoir à tout le monde, Luke lui avait demandé :
— Vous êtes sûre que vous devez partir ?
Puis il l’avait raccompagnée sur le parking. Malgré sa mère qui l’attendait au bord du trottoir, le grondement du moteur et les gens qui passaient dans la rue, on aurait dit qu’ils étaient seuls dans la rue.
— J’ai mon billet, avait-elle répondu.
— Vous n’êtes pas obligée de l’utiliser.
— J’ai une vie en Californie.
Une vie qui consistait en un ancien petit copain qui essayait encore de lui taper de l’argent et une société qu’elle avait fermée. Une vie…
— Un loyer trop cher et des gens superficiels ?
— C’est partout pareil, Luke.
Mais ils n’étaient pas tous superficiels. Elle avait rencontré des gens merveilleux, dans la Cité des Anges.
— Pas ici, avait répliqué Luke.
Au bout d’un instant, il avait poursuivi :
— Ecoutez, Cecily, je sais que vous m’avez dit clairement que vous ne souhaitiez pas que vous et moi… mais je crois que nous pourrions être heureux ensemble.
Luke avait besoin d’une femme qui sache l’apprécier, pas d’une femme au cœur stupide qui en pinçait constamment pour les mauvais garçons, pas d’une femme lassée de l’amour et des hommes.
— Il faut que j’y aille, avait-elle répondu.
Puis elle s’était éloignée.
— Prenez soin de vous, Luke.
Quand elles avaient démarré, dans la rue tapissée de neige fondue, sa mère lui avait fait remarquer :
— C’est un homme bien.
— Oui, c’est vrai.
— Un jour, il sera un mari merveilleux pour une femme.
— Oui, c’est vrai. J’aimerais connaître une personne qui lui convienne.
— Moi, je connais quelqu’un qui lui convient.
Impossible de ne pas comprendre cette expression de sa mère.
— Pas moi.
— Pourquoi pas ? Tu es une femme adorable, et c’est un homme merveilleux.
Cecily avait répondu, haussant les épaules :
— La chimie ne fonctionne pas.
Un peu, sans doute, mais pas assez à son goût.
— Peut-être n’avez-vous pas passé assez de temps dans le laboratoire, tous les deux. Les sentiments peuvent grandir.
On le lui avait déjà dit.
— Après la grande ville, Icicle Falls doit sembler ridiculement petit, Cecily, mais les gens qui y vivent ont tous de grands cœurs. Je pense que ça t’a fait du bien de partir, mais peut-être cela te ferait-il encore plus de bien de revenir.
Cecily n’avait rien répondu, et Muriel avait abandonné le sujet. Leur conversation s’était orientée vers d’autres thèmes lorsqu’elles avaient descendu le col, mais les mots de sa mère s’étaient attardés au fond de son esprit.
Dès qu’elle serait à Los Angeles, elle ferait ses cartons et vendrait son appartement. Et après ça ? Elle n’en avait aucune idée. Que voulait-elle faire, quand elle était petite ? Et où voulait-elle vivre ?
Elle voulait vivre à Icicle Falls. Elle n’avait pas compris à quel point cet endroit lui manquait, avant son retour et son implication dans la vie locale.
Tout le monde dit qu’on ne peut pas retourner chez soi, se remémora-t-elle lorsque son avion se posa sur le sol de la Californie ensoleillée. Mais elle en mourait d’envie. Elle avait envie de laisser libre cours à sa créativité et de passer du temps avec sa mère, elle avait envie de commencer ses matinées par des « latte » du Bavarian Brews, et de faire des visites à la Gingerbread Haus pour goûter les biscuits de Cassandra.
L’avion parvint enfin à son parking et les téléphones portables se rallumèrent tout autour d’elle. Toute la carlingue se mit à retentir de rumeurs : les gens prévenaient leurs proches qu’ils étaient bien arrivés, sortaient leur bagage à main des rayonnages situés au-dessus des sièges et commençaient à se bousculer pour quitter l’avion. Ils avaient tous un endroit où aller, quelqu’un qui les attendait, et elle se sentit bizarrement seule dans la foule.
Elle ne put s’empêcher de se souvenir du plaisir qu’elle avait éprouvé à préparer le concours de Monsieur Idéal, des gens adorables qu’elle avait rencontrés lorsqu’elle travaillait chez Zelda’s. (Qu’y avait-il de si mal à être serveuse dans un restaurant, après tout ?) Elle se rappela encore cette danse avec Luke, au bal. Et, soudain, le visage de pirate satisfait de Todd Black lui vint à l’esprit.
Elle était là, dans cette grande ville trépidante, et elle ne pouvait penser à rien d’autre qu’à une petite ville nichée dans les montagnes. Sauf qu’elle n’avait rien à faire dans cette ville, aucun moyen d’y vivre et de s’y construire un avenir.
Essaie juste de poursuivre ta vie, se dit-elle en allant récupérer sa valise.
* * *
Essaie juste de poursuivre ta vie, se dit Samantha en raccrochant le téléphone. Les larmes jaillirent à ses yeux. Pardon, arrière-grand-maman… J’ai essayé, j’ai vraiment essayé.
Du moins son entreprise se retrouverait-elle vraisemblablement en de bonnes mains… si les gens d’Elegance Chocolates aimaient ce qu’ils verraient, lors de la visite programmée le vendredi suivant.
Mais que pourraient-ils ne pas aimer ? Ils faisaient l’acquisition d’une entreprise fabuleuse à un prix imbattable. L’année précédente avait été un peu chaotique, c’était vrai, mais elle leur avait adressé les bilans des cinq dernières années. Toute personne un peu douée pour les affaires aurait compris qu’il ne s’agissait que d’une mauvaise passe.
Elle s’était fait assurer que ses employés pourraient conserver leur travail. La seule qui se retrouverait sans emploi, ce serait elle. Elle avait du mal à imaginer que quelqu’un d’autre viendrait s’emparer de Sweet Dreams, mais c’était exactement ce qui allait se passer. Après une brève période de transition, elle serait oubliée. Les directeurs des chocolats Elegance souhaiteraient, naturellement, mettre la personne de leur choix aux commandes. Elle le savait sans avoir besoin de demander.
Elle ne s’était jamais trouvée vieille, auparavant, mais à cet instant, c’était exactement ce qu’elle ressentait. Tu as fait ce qu’il fallait faire, se dit-elle en guise de réconfort. Si Elegance prenait le contrôle de la société, tout se terminerait bien. Certes, Sweet Dreams n’existerait plus, mais leurs chocolats survivraient et ses employés conserveraient leur emploi. C’était ce qui comptait. Quant à elle, elle ferait… autre chose.
Et à ce sujet, que ferait-elle si, après avoir vu l’entreprise, les gens d’Elegance décidaient qu’ils n’en voulaient pas ? A cette pensée, Samantha se sentit mal.
C’est alors que la ligne d’Elena sonna.
— Blake Preston est là pour vous voir.
Cela n’améliora en rien son état. Voilà ce qu’on devait ressentir quand on mourait dans le désert en voyant les vautours tourner dans le ciel. Bon, nous ne sommes pas encore morts.
— Faites-le entrer, dit-elle en serrant les dents.
Il pénétra dans son bureau avec quelque chose comme de la ferveur dans le regard.
— Blake, je ne sais pas ce que vous faites ici, lui lança Samantha, mais je possède encore cette entreprise jusqu’à la fin du mois.
Il sourit à ces mots.
— Jusqu’à la fin du mois et après, corrigea-t-il.
Puis il déposa un chèque sur son bureau.
— Qu’est-ce que c’est ?
— C’est pour maintenir une entreprise familiale là où elle doit être… avec la famille qui l’a fondée.
Elle se sentait comme Alice venant de tomber dans le trou du lapin.
— Je ne comprends pas…
— Joyeux Noël en avance, ou joyeuse Saint-Valentin en retard. Ou joyeux ce que bon vous semblera.
Sur ces mots, Blake poussa le chèque plus près d’elle.
Elle le prit et le considéra, stupéfaite. Mais au nom de…
— Un chèque personnel ?
— Tout ce que vous avez à faire est de l’endosser et de le déposer. J’attends votre visite demain.
Il se tourna pour partir.
— Blake, attendez !
Elle bondit de son bureau et courut vers lui :
— Mais où avez-vous trouvé une somme pareille ?
— Est-ce vraiment important ?
— Il faut que je le sache !
— Disons juste que j’ai fait marcher mes relations bancaires.
Elle haussa les sourcils.
— Que voulez-vous dire ?
Puis ses soupçons firent place à une compréhension horrifiée.
Blake haussa les épaules.
— Blake, dites-moi que vous n’avez pas fait un emprunt.
— Même les directeurs de banque peuvent demander les prêts réservés aux employés. J’aurais dû y penser plus tôt. Ma seule excuse est que, au début, je n’avais aucun moyen de rassembler la somme dont vous aviez besoin. Ce n’était donc même pas envisageable. Mais quand vous êtes partie en Californie, j’ai réfléchi et réalisé que, grâce au festival, la somme s’était réduite à un chiffre tout à fait accessible.
C’était tout de même une énorme somme, doublée d’un engagement considérable. Samantha ne pouvait pas le laisser, la conscience tranquille, faire un tel sacrifice.
— Je ne peux pas accepter, répondit-elle en lui rendant son chèque.
— Pourquoi pas ?
L’expression de ses yeux éveilla en elle des feux d’artifice.
— Ah oui ? Vous dites que votre entreprise ne vaut pas la peine d’être sauvée ?
— Je suis déjà en train de la sauver. Je vais la vendre aux chocolats Elegance.
Il acquiesça. Il semblait réfléchir à cette information.
— J’imagine qu’ils font du bon chocolat.
— Fabuleux, lui répondit-elle en luttant pour conserver une voix égale.
— Et c’est ce que vous voulez, Samantha ? lui demanda-t-il gentiment.
— Bien sûr que non, ce n’est pas ce que je veux ! s’écria-t-elle. Mais je ne peux pas vous prendre votre argent.
— Pourriez-vous accepter le prêt personnel d’un ami ?
Elle avait tant besoin d’un ami ! Elle se mordit la lèvre.
Blake fit un pas vers elle.
— D’un ami qui aimerait peut-être, un jour, être davantage ?
— Je… ne sais pas.
Y avait-il des conditions qui accompagnaient ce prêt ? Demanderait-il à prendre le contrôle de l’entreprise ? Exigerait-il qu’elle couche avec lui ? Mmm… Cette dernière condition serait-elle si terrible ?
Comme s’il lisait dans son esprit, il la rassura :
— Il n’y a aucune condition.
Après quelques secondes, il poursuivit :
— Je pense que vous pouvez redresser la barre, et que ce serait bénéfique pour toute la ville. Si cela vous gêne qu’on se contente de sceller ce prêt par une poignée de main, nous pouvons signer un contrat. De toute façon, cet argent est à vous. Je suis entré dans la banque pour aider les gens, et il n’y a personne que je souhaite aider autant que vous.
— Je n’arrive pas à croire que j’entends ça, dit alors Samantha.
Elle devait être en train de rêver. Son arrière-grand-mère Rose se cachait-elle quelque part avec d’autres recettes ?
— Je vous l’ai dit, Samantha, je ne suis pas votre ennemi.
Son esprit ressemblait à ces manèges qui tournent pendant que les tasses tournent aussi sur elles-mêmes : ses pensées partaient dans toutes les directions. Elle s’était efforcée si douloureusement de garder cette entreprise, elle était allée au fond de toutes les impasses, et en fin de compte la solution était aussi simple que ça : la dernière personne dont elle attendait du secours qui venait à son aide… Comment était-ce possible ?
— Je ne sais pas quoi dire.
— Que diriez-vous de « merci » ? répondit-il en plaisantant.
— Merci.
Sur ces mots, elle fondit en larmes.
Il la prit dans ses bras et elle sentit qu’il passait ses lèvres sur son front. Comme c’était merveilleux d’être serrée dans les bras de son pire ennemi… Ou plutôt : ex-pire ennemi, corrigea-t-elle.
— Il y a encore une chose que vous pourriez dire, murmura-t-il.
— Quoi ?
— Que vous voulez bien sortir avec moi. Et que nous pourrions enfin nous tutoyer…
A présent, elle pleurait et riait en même temps.
— Je dois avoir quelques soirées de libres sur mon agenda.
Ils scellèrent leur accord d’un baiser, un baiser ardent et passionné. Oh, oui ! Il y avait décidément des choses meilleures que le chocolat, et Blake venait de lui en offrir un merveilleux échantillon.
Il redevint soudain sérieux.
— J’ai une confession à te faire.
Samantha, intriguée, s’apprêta à l’écouter.
— Qu’est-ce que c’est ?
— Je suis allergique au chocolat.
Elle le regarda, bouche bée.
— Ces chocolats que je t’ai apportés ?
— Le club de lecture de ma grand-mère les a adorés. Tout le monde aime les chocolats Sweet Dreams.
— Sauf toi.
Quelle ironie, tout de même !
— Ce n’est pas grave, répondit-il en souriant. Je suis plus intéressé par la femme qui les fabrique.
Et pour le prouver, il l’embrassa de nouveau.
— Alors, quand penses-tu pouvoir être libre pour sortir ? lui demanda-t-il, une fois qu’ils eurent repris leur souffle.
— Oh ! Peut-être dès que j’aurais appelé ma mère et mes sœurs pour leur apprendre la bonne nouvelle, répondit-elle en souriant.
Elle appela Cecily en premier. Sa sœur fut heureuse pour elle, mais elle n’eut pas l’air surprise le moins du monde.
— J’en avais le pressentiment, lui dit-elle.
Samantha lui demanda alors, en souriant à Blake :
— Et quelles autres intuitions as-tu encore ?
— Eh bien, j’ai la forte impression que Blake est toujours avec toi. J’ai raison ?
— Oui ! Au fait, nous allons avoir du pain sur la planche pour redresser la barre, et j’aurais besoin d’aide concernant le marketing et la publicité. Je sais que tu as une vie à Los Angeles, mais j’aimerais que tu sois ici. J’imagine que je n’arriverai pas à te convaincre de rentrer à la maison ?
— J’imagine que tu ne pourrais pas te passer de moi, répliqua Cecily du tac au tac.
Décidément, la vie s’annonçait bien belle.
* * *
Samantha et Blake fêtèrent l’événement en allant dîner chez Zelda’s.
— Vous prendrez un dessert ? leur demanda Maria.
Samantha sourit à Blake.
Maria, qui n’était pas sotte, lança :
— Laissez-moi deviner… Vous allez quelque part pour des baisers chocolatés ?
— Non, répondit Samantha en souriant. Pour quelque chose d’encore meilleur.
* * *
Muriel marchait le long du sentier de la Disparue en compagnie de ses deux maris.
— On dirait que Sweet Dreams va tenir encore un bon bout de temps, leur annonça-t-elle. Samantha a sauvé la compagnie.
— Voilà qui m’enlève un souci de la tête, déclara Waldo.
— A moi aussi, dit Stephen. La seule chose qui me ferait encore plus plaisir serait de savoir qu’elle a trouvé quelqu’un qui peut la rendre heureuse.
— Je crois que c’est le cas, répondit Muriel.
Il sourit.
— Je suis heureux de l’entendre.
A présent, il regardait le chemin.
— Nous devons partir, maintenant. Ça va aller, pour toi ?
Elle leur sourit à tous deux.
— Oui, ça ira. Allez-y, tous les deux. Tout se passera bien pour moi, ici.
Ils l’embrassèrent l’un après l’autre, puis s’éloignèrent sur le sentier. Elle ne bougea pas et les regarda jusqu’à ce que la brume de la montagne les dérobe à ses yeux.
Muriel se réveilla pour se retrouver seule dans son lit. Le soleil du matin emplissait sa chambre. Elle sourit, puis rabattit les couvertures : une nouvelle journée commençait.
* * *
Mai était arrivé et la campagne était verte et luxuriante : les vignes reprenaient vie et les arbres fruitiers étaient en fleurs. Ce samedi en particulier était le jour idéal pour une promenade, avec son ciel d’un bleu sans tache et son soleil éblouissant.
Ciel bleu ou pas, Samantha avait prévu de faire sa lessive et peut-être le ménage de son appartement. Et c’est ce qu’elle annonça à Blake quand il lui suggéra une randonnée. Le ménage n’avait jamais fait partie de sa liste de priorités mais, ces derniers temps, entre la gestion de Sweet Dreams et les heures de loisir qu’elle passait avec Blake, elle ne s’y mettait plus du tout. Si elle ne faisait pas rapidement quelque chose, son appartement allait être condamné par les services de l’hygiène.
— Allez, chérie. Par un jour comme ça, ces choses-là peuvent attendre.
Si Blake lui présentait les choses ainsi…
— Je vais prendre mon appareil photo, lui dit-elle.
Deux heures plus tard, ils marchaient le long du sentier de la Disparue. Le soleil chauffait doucement leurs épaules, le grondement de la cascade leur promettait une vue magnifique juste derrière le coude du sentier. Normalement, il fallait marcher deux heures pour arriver à la cascade… sauf si l’on s’arrêtait fréquemment pour prendre des photos. Ou pour s’embrasser.
— Je me souviens que je montais ici quand j’étais scout, lui dit Blake. J’imagine que je boucle la boucle.
— Sauf que tu n’as plus de scouts autour de toi, répliqua Samantha.
— Je préfère les filles.
Et, pour le prouver, il l’attira contre lui.
Comme toujours, le contact de son corps solidement bâti alluma en elle un millier de feux d’artifice.
— T’ai-je dit récemment à quel point tu es stupéfiante ? lui demanda-t-il avec un sourire.
— Oh ! lança-t-elle malicieusement. Tu dis juste ça parce que c’est la vérité.
— Ah oui ? Comment sais-tu que je ne dis pas ça simplement pour protéger mon investissement ?
La réponse n’était pas difficile : la lueur de désir qui brillait dans ses yeux le trahissait.
Il posa ses lèvres sur celles de Samantha et passa ses doigts dans ses cheveux, mettant fin à la plaisanterie : ils étaient redevenus sérieux.
Au bout d’un long moment, ils arrivèrent enfin à la cascade.
— Regarde ! s’exclama Samantha. C’est magnifique…
— C’est bien vrai.
Elle se tourna vers lui et vit que ce n’était pas du tout la cascade qu’il admirait : la lueur était de retour dans ses yeux, promesse d’une autre longue pause avant qu’ils ne commencent à redescendre le sentier.
— Donne-moi l’appareil, lui dit-il. Je vais te prendre en photo.
Elle le lui tendit.
— Fais semblant de chercher la Disparue.
— Oh ! Ce ne sont que des légendes.
Cela dit, elle l’avait bel et bien vue. Et aujourd’hui, n’était-elle pas ici, en compagnie de Blake ?
— Allez, sois gentille…
— Bon. D’accord.
Elle se tourna et mit sa main au-dessus de ses yeux comme si elle cherchait, effectivement.
Et c’est alors qu’elle aperçut la silhouette d’une femme qui voletait derrière la cascade. Les cheveux de sa nuque se hérissèrent et elle resta bouche bée.
— C’est parfait, dit Blake. Je l’ai.
Elle se tourna vers lui, les yeux écarquillés.
— Tu l’as prise ?
— J’ai pris qui ? lui demanda-t-il, intrigué. Ah oui…
— Non, vraiment ! Elle est juste là.
Samantha indiqua la direction de son doigt pointé, mais… elle ne vit plus rien.
— Elle était là. Je l’ai vue.
Elle saisit l’appareil photo pour examiner le cliché. Il n’y avait qu’une seule femme dessus, une femme stupéfaite.
A présent, Blake la regardait gravement.
— Tu l’as vraiment vue ?
Peut-être n’était-ce que la force de la suggestion. Samantha secoua la tête et balaya d’un geste de la main la légende de la Disparue
— Non. Ça devait être une ombre.
Ou une promesse des bonheurs à venir.