Pourquoi le système de comptage des points au tennis est-il si compliqué ?

Zéro, 15, 30, 40, avantage, jeu, set et match !

Sûr que ce n’est pas simple. Souvenez-vous des grandes heures de Roland-Garros à la télévision. Heureusement que le commentateur rappelait indéfiniment le score, sinon la France tennistique aurait été complètement perdue en revenant du frigo les bras chargés de bières bien fraîches…

Pourquoi les points ne sont-ils pas comptabilisés 0, 1, 2, 3 ? Pourquoi pas 2, 4, 6, comme au basket ? Pourquoi pas 100, 200, 300, comme au flipper ?

Pourquoi 15, 30, puis 40 ? Même pas une progression régulière…

Il faut savoir que le tennis est l’héritier d’un jeu ancien, très en vogue au moment de la Révolution : le jeu de paume. Son principe s’apparentait à celui de notre tennis moderne : il y avait un filet, deux joueurs (quelquefois plus), et une balle qu’il fallait renvoyer de l’autre côté du filet. Non pas avec une raquette, mais avec la main (la paume plus précisément).

Le premier manuel officiel du jeu de paume est celui de Manevieux : Traité sur la connaissance du Royal Jeu de paume, publié en 1784. Nous en connaissons donc parfaitement les règles.

À l’origine, les points se marquaient un par un, en toute logique mathématique. Sauf que le jeu de paume se combinait à celui de « gagne-terrain ». Plus un joueur engrangeait de points contre son adversaire, plus il s’approchait du filet.

Quand il avait gagné son premier point, il avançait de 15 pieds (une mesure de l’époque qui correspond à peu près à un pied humain ; soit de nos jours un petit 42). Pour le deuxième point, il s’approchait encore de 15 pieds (ce qui faisait 30). Quand il gagnait une troisième fois, il s’approchait du filet de 10 pieds (ce qui faisait 40). Ensuite, comme il était très proche du filet, il avait beaucoup plus de facilité à passer la balle de l’autre côté ; on disait alors que le joueur avait un « avantage » sur son adversaire.

Et voilà, on s’y retrouve : 0, 15, 30, 40, avantage. Le comptage de base du tennis était né.

Au passage, le mot « tennis » est lui aussi issu du jeu de paume. Un jeu si prisé des gentilshommes qu’il avait franchi la Manche pour être adopté par les familles les plus huppées d’Angleterre. À Londres, comme à Saint-Pétersbourg, l’usage dans la haute société consistait alors à parler le français plutôt que l’anglais ou le russe. Et « tennis » est une déformation de l’impératif « tenez » qui vous prévenait qu’on allait vous lancer la balle.

Deux jeux, deux langues : pas étonnant que l’on s’y paume.

Jusqu’à preuve du contraire…

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