Pourquoi les ravitaillements en essence sont-ils interdits en F1 ?

Le Grand Prix de Monza, le plus rapide de la saison, avec quatre secteurs qui frôlent les 340 km/h, est paradoxalement le moins gourmand en carburant. (Au passage, il n’y a que les intégristes de l’écologie pour croire qu’installer des feux rouges partout ralentit les automobiles et par conséquent ferait baisser la consommation d’essence. C’est l’inverse : les réaccélérations font grimper la pollution !) Fermons la parenthèse et avouons-le ici : je suis nostalgique des ravitaillements en essence. Non pas que j’aime que le sort de la course se joue dans les stands, au contraire, mais comme de toute façon les pilotes doivent s’arrêter – souvent de manière artificielle – pour changer de pneus, autant qu’ils puissent faire le plein. La F1 est un sprint ; rien ne me désole plus que de savoir qu’un pilote lève le pied pour ne pas tomber en panne sèche, tel un vulgaire conducteur du dimanche.

Pourquoi les ravitaillements ont-ils été interdits depuis la saison 2010 ? Vous vous en doutez : pour des raisons de sécurité. Les pilotes et les mécaniciens sont souvent passés très près de la catastrophe avec l’essence qui s’enflamme au contact du moteur ou des échappements brûlants. Dans un autre genre : Massa redémarre en embarquant la « sucette » au Grand Prix de Singapour 2008. C’est également la raison pour laquelle le port du casque a été imposé sur la pit-lane durant la course. Tout cela est sage et logique. Sauf que j’entends le chœur des petits malins qui se demandent : mais alors, pourquoi les ravitaillements avaient-ils été autorisés en 1994 ? Pour relancer le spectacle et l’incertitude dans des courses qui commençaient à devenir lénifiantes à cause des progrès de l’aérodynamique (avec les turbulences créées par l’auto de devant, il devenait de plus en plus difficile de doubler). Cette année-là, on avait aussi interdit les aides électroniques – direction assistée, antipatinage, suspension active, passage automatique des vitesses, accélérateur électronique, etc. –, qui estompaient les incidents de pilotage, donc l’incertitude.

Mais j’entends des malins encore plus malins que les petits malins qui s’interrogent : pourquoi les ravitaillements ont-ils été interdits à partir de la saison 1984 ? Simple : à cause de l’accident qui a faillit coûter la vie à Keke Rosberg au Grand Prix du Brésil 1983. Sa Williams s’est embrasée dans les stands au moment du ravitaillement. Son équipe l’a ensuite forcé à reprendre la piste. Il aurait dû finir deuxième, mais il a été finalement déclassé pour poussette illicite dans les stands, à cause justement de ce problème de ravitaillement.

Mais au fait, pourquoi avait-on le droit à l’époque de s’arrêter pour faire le plein ? Élémentaire : le règlement avait changé en 1982 à cause de l’apparition de pneumatiques ultra-tendres, donc ultra-efficaces, mais fragiles. Sous la pression des manufacturiers, les écuries ont demandé à avoir le droit de changer de pneus en course. Et quitte à repasser au stand, les teams en profitaient pour refaire les niveaux, donc rouler avec moins de poids embarqué. Il faut savoir que depuis sa création, dans les années 1950, les ravitaillements étaient autorisés. Au début, il était même impossible de s’en passer, car les premières courses duraient approximativement trois heures, et pouvaient atteindre 500 kilomètres ! Entre-temps, les Grands Prix ont été ramenés à deux heures maxi, et les ravitaillements interdits.

Ouf ! On est arrivé au bout !

Jusqu’à preuve du contraire…