Question tautologique ? Pensez-vous que je découvre la couleur du cheval blanc d’Henri IV ? Que nenni ! Quel intérêt d’en faire un « Pourquoi » sinon ?
Je m’adresse ici aux profanes : sur le terrain, le joueur qui porte le numéro 10 a ceci de particulier qu’on l’appelle souvent « le numéro 10 ». Contrairement à celui qui porte le numéro 9, qui est en général l’avant-centre, le buteur. Car les joueurs ont un nom de poste : il y a donc l’avant-centre, le défenseur central, le latéral gauche, l’ailier droit, le demi défensif, etc. Le numéro 10, lui, jouit d’un statut particulier. Vous voulez quelques numéros 10 célèbres ? Quasiment tous les plus grands. Neymar, le plus gros transfert de l’histoire du football avec ses 222 millions d’euros, mais avant lui (pour rester au PSG) Zlatan Ibrahimovic. Et puis Messi, le meilleur joueur du monde, et peut-être de toute l’histoire. Ajoutez à cette liste le carré de rois : Zidane, Maradona, Platini, Pelé. Tous portaient le numéro 10.
C’est en 1912 qu’apparaissent pour la première fois des chiffres sur le maillot des joueurs. En Australie. Ne me demandez pas pourquoi là-bas, je cherche encore. La numérotation sur les maillots est imposée depuis la Coupe du monde 1950, au Brésil. Longtemps, le numéro de chaque joueur a correspondu à un poste particulier, en fonction de sa position sur le terrain – comme c’est le cas au rugby –, et non à tel ou tel.
Désormais, un joueur ne change plus de numéro, même s’il change de poste. Pour quel motif ? Le bizness. Les impératifs du marketing imposent que le joueur conserve le même numéro tout au long de la saison pour pouvoir vendre son maillot floqué aux supporters (Cristiano Ronaldo, qui joue avec le 7, a baptisé sa marque de produits dérivés CR7).
Autrefois, le gardien de but portait le numéro 1, les arrières latéraux le 2 et le 3, la défense centrale le 4 et le 5. Les milieux de terrain avaient les numéros pairs : 6, 8 et 10, et les attaquants les numéros impairs : l’ailier gauche le 11, l’ailier droit le 7, et l’avant-centre le 91.
Tout ce bel ordonnancement a valsé avec l’irruption de Michel Platini, dans les années 1980. Le génial Français, triple Ballon d’or, était capable de tirer des deux pieds, d’orienter le jeu, de dribbler, de déborder, mais également de marquer des buts tout seul. Avant lui, quand une équipe récupérait le ballon sur sa droite, elle jouait avec son milieu droit. Si elle récupérait la balle à gauche, elle enquillait avec le milieu gauche. Platini portait le numéro 10. Il a changé malgré lui la tactique du football. Quand son équipe avait le ballon (Nancy, puis Saint-Étienne, puis l’équipe de France, puis la Juventus de Turin), elle l’envoyait à Platini, qui ensuite orientait le jeu. Exactement ce qui s’est passé ensuite avec Zidane. Et ce qui se passe aujourd’hui à Barcelone avec Messi.
Ces joueurs sont à la fois des milieux de terrain et des attaquants, à la fois devant et au milieu, à la fois à droite et à gauche. Voilà pourquoi, par commodité, on les appelle des « numéro 10 ». Car ils portent le 10, et qu’ils font ce qu’ils veulent sur le terrain.
Et même parfois en dehors du terrain.
Jusqu’à preuve du contraire…