QUATRIÈME SÉRIE

DU 1er NOVEMBRE AU 4 DÉCEMBRE 1870

 

Continuation du siège

Batailles sur la Marne

 

Mardi 1er novembre

 

L’anxiété m’a empêché de dormir ; à six heures du matin je sors ; le gouvernement est sauvé. Maurice Joly s’est comporté ignoblement envers Jules Favre ; mais enfin l’entreprise a avorté ; malheureusement l’effet est produit. On n’est plus uni et l’on perd courage. À quoi sert d’aller risquer sa santé sur les remparts, alors que la Révolution va, par ses excès, ouvrir les portes aux ennemis !

Non seulement Jules Favre, mais tous les membres du gouvernement furent violemment outragés. Ce fut pour eux une nuit abominable. Mot entendu : Cette nuit-là ne comptera pas parmi leurs plus beaux jours. À la Bibliothèque nationale, en lisant, dans Charles Mazade, le récit de cette nuit d’épouvantement pour nos gouvernants d’alors, je vis en marge, écrites au crayon par une main inconnue, d’abord ces deux dates : 4 septembre-31 octobre, puis cette sentence biblique : Per quae peccaverit homo, per haec et torquetur.

Même jour, 1er novembre

 

Lettre de ma femme :

« Mon ami,

« La fête de la Toussaint est un jour bien triste ; mais ordinairement on a la consolation de pouvoir aller, en famille, sur la tombe de ceux qui vous sont chers, d’y pleurer ensemble. Cette année, cela est impossible ; le jour de la Toussaint et la fête des Morts vont se passer pour moi dans la plus grande désolation, car à la douleur que j’éprouve de ne pouvoir, pour la première fois, prier sur la tombe de ma mère, se joint encore l’inquiétude que j’ai sur ton sort et celui de ma famille enfermée à Paris. Voilà quinze jours que je n’ai reçu de tes nouvelles.

« Ne crois pas cependant, mon ami, que je me tourmente à me rendre malade ; non, je vais bien ; mais je suis triste et trouve le temps d’une longueur incroyable. Sept semaines loin de chez soi, loin de ce que l’on aime le mieux au monde, il faudrait être de marbre pour ne pas ressentir une vive douleur d’une telle situation. Et quand viendra le terme de ces souffrances ? Quand pourra-t-on se trouver réunis ! Dieu seul le sait et nous le tient caché d’une manière absolue...

« Que j’ai bien fait de ne pas aller dans le pays de père, car on parle de la présence de l’ennemi à Grandvilliers, Poix, sur la ligne du chemin de fer d’Amiens à Rouen.

« Henriette, Émile et petit Louis vont bien !

« Pauvres bébés ! voilà sept semaines qu’ils n’ont eu tes caresses ; ils seraient si heureux de t’embrasser ainsi que leur grand-papa.

« J’ai l’espoir qu’il ne vous arrivera rien, car les petits anges prient chaque matin et soir pour vous. Tous les matins, Louis appelle pendant un quart d’heure au moins : papa, papa ; il t’envoie de bons gros baisers qui font du bruit pour que tu les entendes.

« Ta femme qui t’embrasse, cher ami, avec tout son cœur, ainsi que son père, son frère et sa tante.

« AMÉLIE »

2 novembre

 

Ma première visite a été pour le Père-Lachaise. Déposé un bouquet d’immortelles sur la tombe de ma grand’mère et sur celle des parents de ma femme. Que tous ces morts sont donc tranquilles et heureux !

 

3 novembre

 

* Mon confrère Cresson vient d’être nommé préfet de police en remplacement d’Edmond Adam, démissionnaire.

E. Adam était le mari de Juliette Lamber, la spirituelle Picarde, devenue une vraie Parisienne. Elle ne s’amusait pas, oh ! mais pas du tout dans ce coin de Paris, compris entre le quai des Orfèvres et celui des Morfondus. Son journal de siège déborde de joie, le jour où elle quitta la sombre cage de la Préfecture.

4 novembre

 

Hier, voté pour le maintien du gouvernement.

J’ai voté en tremblant.

Je votai pour le gouvernement de la Défense en tremblant ; pourquoi ? Probablement parce que, dans une crise aussi grave, la capacité de nos gouvernants, les plus en vue, ne m’inspirait pas entière confiance.

5 novembre

 

Tout va bien. Le parti de l’ordre vient d’avoir un succès magnifique ; pour cette fois du moins, ô Belleville ! tu ne seras pas encore la capitale de la France1.

On se marie avec rage, ou plutôt on régularise, afin que la légitime puisse toucher les quinze sous de paie.

Amusantes les annonces matrimoniales de mon quartier :

M. X..., rue de la Parcheminerie, no, avec Melle Y..., même maison.

M. V..., rue Gît-le-Cœur, no, avec Melle W..., même maison.

On parle d’armistice ou plutôt d’amistie, comme on dit rues Saint-Jacques et de la Harpe ; les provisions sortent de la cave des marchands. Le beurre tombe de 18 francs à 5 francs la livre. Quelle aubaine !

 

Dimanche 6 novembre

 

* L’armistice est rejeté !

M. Thiers était venu le 30 octobre à Paris afin d’y apporter des propositions d’armistice de la part de quatre puissances neutres ; mais le gouvernement de la Défense n’avait pas cru devoir les accepter, parce que la Prusse refusait de laisser ravitailler Paris durant les vingt-cinq jours nécessaires à la période électorale. À ce moment on eût traité plus avantageusement avec les Prussiens, désireux d’aller, pour la Noël, revoir leurs fraîches Gretchen et leurs tendres Dorothées. Certains journalistes, parmi lesquels Edmond About, si j’ai bonne souvenance, étaient d’avis de souscrire à l’armistice même sans ravitaillement. George Sand (Journal d’un voyageur pendant la guerre) dit ceci à la date du 20 janvier : « La température est douce, on souffre moins à Paris ! mais les pauvres ont-ils du charbon pour cuire leurs aliments ? Pourquoi donc a-t-on ajourné l’appel au pays, il y a trois mois, sous prétexte que Paris ne pouvait supporter vingt et un jours d’armistice sans ravitaillement ! »

7 novembre

 

Aux fortifications, aperçu un immense feu vers Choisy-le-Roy, près le Petit Vitry, à côté du pavillon de campagne où je fus, aux dernières vacances, si heureux pendant quelques jours.

C’était probablement un incendie allumé par les forts de Bicêtre et d’Ivry qui, perpétuellement, fouillaient de leurs obus Choisy-le-Roy, où campait l’ennemi.

8 novembre

 

Boulevard Saint-Michel, la foule s’arrête devant la porte de M. Minard, propriétaire du magasin de la patronne de Paris ; on y lit et on y commente une lettre annonçant la mort de son fils, âgé de vingt-trois ans, mobile du 5e bataillon. Dans un engagement près de Clamart, ce pauvre garçon avait eu le front légèrement froissé. Ce ne semblait rien, lorsque quelques jours après des accidents se déclarèrent et la mort s’ensuivit.

Beaucoup de soldats blessés légèrement ont été pris de violents maux de tête quelques jours après les blessures.

Les balles des Prussiens seraient-elles empoisonnées ?

Cette réflexion était l’écho des commentaires de la foule, mais dans aucun livre, dans aucun document je n’ai vu la confirmation de mes appréhensions.

9 novembre

 

Nouveau décret du gouvernement relatif à la garde nationale.

Chaque bataillon sera composé de huit compagnies. Les quatre premières, fortes de cent hommes, et destinées à la lutte, comprendront d’abord les célibataires, ensuite les gens mariés, faute d’un contingent suffisant de célibataires. Comme notre 21e bataillon a été recruté du temps de l’Empire, parmi les patentés ayant pignon, boutique ou ventre sur rue, il n’est guère composé que d’hommes mariés, archi-mariés. Nous serons donc obligés de nous trouver tous en première ligne. Par suite, grande émotion dans le quartier parmi les femmes, qui craignent pour leurs tendres époux.

 

10 novembre

 

Nos chefs ne sont pas longs à prendre une détermination héroïque : celle de happer, dans le Quartier latin, tout célibataire qui n’est pas garde national. La chasse commence, en avant les tambours ! Ils fouillent, sans faire de bruit et sans battre leurs caisses, tous les garnis, notamment ceux des rues Saint-Jacques, de la Harpe, Saint-Séverin, etc. Ils rabattent des célibataires en nombre tout à fait suffisant pour se faire casser la tête à la place des pauvres pères de famille. On ouvre une souscription pour leur acheter de grosses couvertures et des vêtements chauds. Me Lindet, notaire, notre camarade, toujours au premier rang des bienfaisants, donne une grosse somme.

Quelques jeunes gens, avec nous depuis le commencement du siège, nous quitteront non sans regret de notre part, notamment un charmant garçon distingué et très instruit, Bergaigne.

Les rats se sont vendus aujourd’hui, à la Halle, 25 centimes pièce.

 

11 novembre

 

Ce jour, monté la garde à Pélagie2 sous la fenêtre de l’ex-cellule du citoyen Rochefort, qui vient de donner sa démission de membre de la Défense nationale ; il est pas mal embarrassé avec son peuple, qui lui demande des choses impossibles, la lune souvent.

 

Nuit du 11 au 12 novembre

 

Deux heures de faction glaciale, la nuit, rue de la Clef ; que je voudrais donc prendre la clef des champs !

La neige tombe, tombe. En qualité de frère, un ivrogne veut m’embrasser ; « au large, ou je t’embroche ». Peut-on se mettre dans un pareil état en face des Prussiens ! Et cependant beaucoup de gens s’enivrent d’eau-de-vie en ce moment ; beaucoup, heureusement aussi, s’enivrent de l’amour de la patrie ; ceci fait passer cela.

Boum, boum ; bon, le canon ; cra cra cra cra ; bon, les mitrailleuses ; ça chauffe aux avant-postes, mais ça ne me réchauffe pas, rue de la Clef.

Au moment de quitter le poste, un camarade qui a égaré ses bibelots me crie :

Si reperis par aventure

Mon bidon et ma couverture,

Tibi Dabo un sou marqué

Ad bibendum à ma santé.

« Cherche, je n’ai pas soif ! Ah ! si tu proposais un soupçon, un atome de gruyère ! »

 

12 novembre

 

Les choux valent 4 francs pièce.

Les rats montent ; 60 centimes, hier, à la Halle. Bientôt ils vaudront aussi cher que les rats d’opéra.

 

Dimanche 13 novembre

 

Parcouru les allées du cimetière de Gentilly ; les monuments funèbres sont renversés ; quelle douleur pour les mères, quand, après la guerre, elles ne pourront plus retrouver les tombes de leurs enfants ! Tout autour la Bièvre, dont le cours est obstrué, forme une immense nappe d’eau. Quelques maisons sont inondées jusqu’au toit ; c’est lamentable.

C’était un formidable moyen de défense, indispensable à cet endroit où les terrains et les fortifications subissent une énorme dépression, par suite du cours de la Bièvre. J’ai raconté plus haut que le jour de la bataille de Châtillon, le général Trochu avait fait garnir de soldats ces faibles fortifications. À ce moment on ne s’était pas encore résolu à détruire le cimetière et à faire un lac des eaux de la Bièvre.

Même jour, 13 novembre

 

* Après avoir parcouru les allées du cimetière, je rentrai dans Paris et allai voir les camarades d’une autre compagnie du 21e. Ils sont campés près de la porte des Peupliers, là où la Bièvre entre dans la ville. Je présente mes respects au brave père Cressent, le juge qui présidait quand Rochefort fut condamné au commencement de 1870. Malgré ses soixante ans, il veut absolument monter la garde comme un jeune. Je le trouve assis sur un talus, en train de manger une soupe aux carottes. Il est tout guilleret, très en train ; la cantinière a dû lui saler sa soupe avec un grain de poudre ou de salpêtre.

Souvent mon esprit, se reportant à vingt-quatre ans en arrière, se représente le vieux papa Cressent, mangeant fièrement sa soupe aux carottes, et aussitôt alors ma mémoire me chuchote aux oreilles ces vers (de L’Année terrible), malicieusement décochés par Victor Hugo à Trochu, qui s’était moqué du képi de garde national de notre poète :

Je n’étais, j’en conviens, qu’un vieillard désarmé,

Heureux d’être à Paris avec tous enfermé ;

Profitant quelquefois d’une nuit de mitraille

Et d’ombre, pour monter sur la grande muraille ;

Pouvant dire présent, mais non pas combattant,

Bon à rien ; je n’ai pas capitulé pourtant.

14 novembre

 

Grimpette sur le haut des fortifications pour voir le bois de Boulogne.

Les arbres, du côté de la porte Maillot et de la porte de Passy, sont sciés à un mètre du sol et taillés en pointe, afin de faire obstacle à la cavalerie ennemie.

Quel spectacle lamentable ! non, morbleu, fortifiant au contraire ! J’éprouve un certain plaisir à voir disparaître notre luxe, nos jouissances, parce que le sacrifice seul peut conserver l’honneur du pays.

 

15 novembre

Trente-deux francs pour une vareuse !

Les anciens bataillons furent forcés de changer leurs belles tuniques contre d’affreuses vareuses. C’était plus commode, il est vrai, mais surtout plus à la mode démocratique.

Cinq francs aux carabiniers de la garde nationale ! Surtout ne pas rire ! Ils ne ressemblaient pas aux carabiniers d’Offenbach, et se comportaient en braves soldats. Le 21 octobre, la compagnie des carabiniers du 48e bataillon se couvrit de gloire dans une reconnaissance. Le capitaine Proust (Désiré) fut mis par Trochu à l’ordre du jour ainsi que deux simples carabiniers, blessés en combattant vaillamment. Ce fait d’armes m’avait fait sortir 5 fr. de mon escarcelle.

16 novembre

 

Ce soir, visite rue Taitbout, à la famille de Devrez, architecte, un ami de Douai. Quel charmant intérieur ! les enfants sont occupés à tirer des exemplaires de la lithographie d’un dessin fait par leur père, en l’honneur de Châteaudun ; Devrez a séjourné longtemps dans la vaillante cité, pour y dessiner les admirables détails du château, ancienne résidence de Dunois. Ma visite me vaut une superbe épreuve teintée en rouge ; cette teinte sinistre rappelle l’incendie allumé par les Prussiens.

Aux quatre coins du dessin figurent quatre C couronnés, qu’enlace la palme du martyre ; au-dessous cette invitation patriotique : non lacrymis, sed exemplo ; ne la pleurez pas ; imitez-la.

Revenu chez moi par le quai Voltaire ; silence de mort ; je suis absolument seul, le bruit de mes pas m’effraie ; pas de lumière ; Paris ressemble à une ville morte !

Pour revenir de la rue Taitbout à la rue de la Sorbonne, où se trouvait mon domicile, ce n’était guère le chemin de passer par le quai Voltaire, mais Théophile Gautier avait, dans l’Officiel, publié quinze merveilleuses lignes sur ce quai noyé de ténèbres, et je voulais absolument voir le quai noir où on ne voyait rien, éprouver les sensations d’horreur nocturne que Théo avait si bien décrites. La fièvre obsidionale peut seule donner ces désirs d’impressions à l’Edgard Poe.

De ce jour, 16 novembre, lettre de ma chère femme, lettre reçue en mars 1871 :

« Mon cher ami,

« Mes lettres ne te parviennent pas, je le sais, et cependant je ne puis rester sans t’écrire. C’est une diversion à mon ennui. En t’écrivant, je crois te parler et cela me donne un instant de consolation. Depuis quelques jours surtout, je me sens dans un isolement complet. Une petite indisposition des enfants, qui ne les rend aucunement souffrants cependant, a nécessité des précautions très grandes, à cause du temps si glacial. Je les conserve donc toute la journée dans la pièce du fond du magasin de Mme R... pour les tenir dans une douce chaleur. Je suis recluse avec eux. Je passe ainsi tout mon temps, livrée à mes pensées, et tu dois bien croire qu’elles ne sont pas gaies. Naturellement elles se reportent toutes vers toi et je souffre des peines, privations et ennuis que tu dois supporter chaque jour davantage. Elles se reportent aussi vers l’avenir, que je voudrais tant connaître au milieu de pareils événements. Quels tristes souvenirs pour la vie entière ! Espérons que nos enfants ne verront jamais ce que nous voyons actuellement et que d’aussi dures épreuves leur seront épargnées. Il y a plus de dix jours que je n’ai eu de tes nouvelles et j’ai tremblé en apprenant que le nouveau décret te mobilise, puisque tu n’as que trente-neuf ans. Te voilà maintenant de l’armée, qu’on forme à Paris parmi les gardes nationaux sédentaires.

« Demain, jeudi 17 novembre ! À cette date, quel bien heureux jour il y a huit ans ! qu’il me sera pénible, pour cet anniversaire de notre mariage, d’être seule cette année. Quoique cela, je suis persuadée que, malgré notre séparation, nos deux cœurs se trouveront néanmoins réunis dans un souvenir d’amour et d’affection. Certainement mon bien-aimé mari n’oubliera pas cet anniversaire ; il enverra mille baisers affectueux à sa femme qui, de son côté, lui en adressera un million et fera plus pieusement encore que d’habitude sa prière pour le cher absent.

« Peut-on jamais compter sur ses propres forces ? La France se croyait invincible et Dieu montre qu’au-dessus de toute grandeur terrestre, il est là pour châtier et ramener à lui ceux qui se plaisent à le méconnaître. On nous a lu une lettre pastorale de Mgr l’évêque de Cambrai, qui apprécie les événements à ce point de vue avec beaucoup de justesse et d’élévation.

« Reçois, cher ami et bon ami, mes affectueux baisers et ceux de tes jolis bébés. Charge-toi d’en donner une part à papa et à toute la famille.

« Ta femme souhaitant de bien grand cœur la fin de son exil. »

18 novembre

 

Visite à mes moblots de Péronne, campés sous les arcades du pont de Billancourt. Ils reviennent des avant-postes. Les pauvres enfants sont aussi glacés que moi sur les remparts.

 

19 novembre

 

Mon Officiel publie un article, pas gai, sur le siège de Paris par Henri IV, ce siège où les mères, dit-on, mangèrent leurs enfants. J’ai joliment bien fait de faire partir les miens !

En faisant l’exercice de bataillon, au Luxembourg, entendu le tapage des forts d’Issy et de Montrouge. Il y a probablement un engagement entre nos artilleurs et les Prussiens, maîtres de la belle position de Châtillon.

 

Dimanche 20 novembre

 

Hier, c’était bien un combat entre artilleurs français et grand’gardes prussiennes. Nos soldats étant répandus aux environs de Bagneux, une colonne ennemie est venue pour les saisir. Le feu des forts d’Issy et de Montrouge les a protégés à temps.

 

22 novembre

 

Découverte inespérée de Hollande ; merci, ô mon Dieu ! je l’offre à mon beau-père sur un plat d’argent entre deux chandelles !

Il me remercie avec effusion, tout en me disant :

« Comment, mon ami, pouvez-vous être gai dans un pareil moment ?

« — Père, si nous ne sommes pas gais, nous sommes perdus ! »

Pendant le siège, rien ne mettait plus en joie les convives siégeant autour d’une table que la soudaine apparition d’une tête de mort... au dessert !

J’en appelle au témoignage de Mme Edmond Adam (Journal d’une Parisienne, p. 258) :

« ... M. Cernuschi est venu dîner un peu tard pour jouir d’un succès dont il était certain. Il a apporté du fromage. Aucun de nous n’en avait mangé depuis un mois ; nous n’avions pas attendu M. Cernuschi pour nous mettre à table, et le voyant arriver avec une tête de mort et l’entendant prononcer ces mots : “Elle est à vous”, nous nous sommes levés et l’avons embrassé... »

Heureux M. Cernuschi !

25 novembre

 

Les cours ont recommencé à l’École de droit.

Jusqu’alors l’École de droit abritait de nombreux ouvriers, occupés à confectionner pour la mobile des vareuses on des godillots.

À propos de cette réouverture de l’École de droit, voilà ce que dit un habitant du Quartier latin :

« Le Quartier latin a changé complètement de physionomie. L’École de droit vient de rouvrir ses portes, mais peu d’étudiants, bien entendu, y mettent les pieds ; à part quelques culs-de-jatte et quelques bossus, personne n’a le loisir de se plonger dans les pandectes, de disséquer le code et d’avaler la procédure. L’ouverture de l’École de droit ne fera nullement prendre le change aux Prussiens. Cet acte est tout bêtement une fanfaronnade de Jules Simon ; l’ennemi sait fort bien que, malgré toute la présomption naturelle aux Français, malgré leur insouciance et leur esprit moqueur, le siège a complètement modifié leur vie sociale, leurs habitudes et leurs occupations. » (Simples notes prises pendant le Siège de Paris, Paris, 1871, Ernest Thorin, par Nérée Quépat, ou plutôt René Paquet, un Ardennais, Parisien de province d’un esprit infini, grand ami des oiseaux du Luxembourg, qu’il a si bien décrits dans son ornithologie parisienne.)

C’est l’horreur des pandectes et de la procédure qui a fait jeter par Nérée Quépat une tuile à la tête de ce pauvre Jules Simon. Il n’était pas si bigrement en colère à la réouverture du cours de Renan, oh ! non ! il me sembla cependant qu’en présence de l’ennemi, la réouverture du cours de Renan n’était pas aussi nécessaire que celle des cours de droit, dans lesquels on enseigne cette maxime, souvent violée, mais immanente quand même : le droit prime la force.

Samedi 26 novembre

 

Vu passer, sur le boulevard Saint-Michel, les quatre compagnies de marche d’un bataillon du 9e arrondissement. Elles partaient pour prendre garnison au fort de Montrouge. Le maire et les adjoints du 9e étaient en tête, les hommes des compagnies sédentaires à la suite. En dernier lieu roulait une voiture chargée de quatre pièces de vin, précieux cadeau des sédentaires aux jeunes camarades.

Bravo ! bonum vinum laetificat cor hominum !

Enthousiasmés par l’exemple de la garde nationale de Passy, qui, au prix de douloureux sacrifices, s’est, avant-hier, emparée de Bondy, les gardes nationaux chantaient avec ardeur Le Chant du départ.

Pendant ce temps, et marchant au pas, des bambins criaient : « Achetez le premier combat de la garde nationale ! »

 

Nuit du 28 au 29 novembre

 

Réveillé en sursaut par une horrible canonnade. Les 106e et 116e bataillons de la garde nationale s’emparaient de la gare aux bœufs, à Choisy-le-Roi.

Le 106e, commandant Ibos, était un bataillon du quartier Saint-Germain qui, le 31 octobre, avait empêché le gouvernement de tomber entre les mains de Flourens ; Flourens, furieux, avait donné à ce bataillon le nom de bataillon des Marguilliers ; on voit que les marguilliers du 106e surent donner aux Prussiens des coups de goupillon aussi vigoureux que ceux dont ils avaient gratifié les Bellevillois3.

29 novembre

 

L’action est engagée. La lutte suprême commence. J’écris au son du canon, que le cours de l’eau nous transmet avec une netteté surprenante. Des groupes se forment à tous les coins du boulevard Saint-Michel ; la perplexité se lit sur les visages.

 

Nuit du 29 au 30 novembre

 

Nuit effroyable ! Des décharges d’artillerie me réveillent à minuit. Je ramène la couverture sur ma tête et prie pour les malheureux que jettent dans l’éternité tous les engins diaboliques, produit de la civilisation ! Le bruit est continuel et continuel mon serrement de cœur en entendant ces signaux de mort.

Dans leur livre Paris sous les obus (Paris, 1883, éditeur : Georges Chamerot), les frères Dalseme, à la page 218, disent ceci : « Jamais peut-être, depuis l’heure ou pour la première fois, l’artillerie exerça dans le monde ses terribles ravages, jamais oreilles humaines n’entendirent une canonnade pareille à celle qui, durant cette nuit et la journée suivante, tint Paris en émoi.

« Dix-huit heures de suite, dans toutes les directions, au nord, au sud, à l’ouest et à l’est, l’air ne cessa de retentir du bruit sourd et continu que jetaient vers l’espace les milliers de pièces accumulées par la défense autour de nous. La nuit, après un long silence, s’était élevée tout d’un coup cette clameur formidable de canon rugissant au loin. Que de fenêtres on vit s’éclairer soudain le long des murailles obscures, que d’insomnies, que d’angoisses ! Que de terreurs et aussi que d’espérances ! »

30 novembre

 

Toujours le canon, le canon toujours ! Une bataille épouvantable doit évidemment se livrer en ce moment4. Ne pouvant rester en place, je trotte partout. Je vois, sur le boulevard Saint-Germain, se dirigeant du côté de la Bastille, un énorme frère de la Doctrine chrétienne, ceint d’une large ceinture jaune ; il allait remplir son service de brancardier ; je lui donnai une bonne poignée de main et lui dis que tous les Parisiens, catholiques ou non, admiraient le dévouement des frères.

Dans son livre Le Siège de Paris, livre si calme, si nourri de faits, si plein, qu’on me passe l’expression, Francisque Sarcey écrit à propos des brancardiers :

« ... Le corps des brancardiers était, si j’en crois les rapports qui m’ont été faits, rapports de témoins oculaires, composé de bien misérables éléments. J’en excepte les frères de la Doctrine chrétienne, dont la belle conduite fit l’admiration de tout Paris, et fut récompensée par la croix d’honneur, solennellement donnée au frère Philippe. Ces religieux portaient, dans l’exercice de ces fonctions nouvelles, leur esprit d’abnégation, de dévouement et ces habitudes d’obéissance passive, règle de toute leur vie. Ils s’en allaient paisiblement, sous la grêle des balles, ramasser les blessés, les rapportant dans leurs bras ; ne reculaient devant aucune besogne, si dure ou si dégoûtante qu’elle fût, ne se plaignaient jamais du manque de nourriture, ne buvaient que de l’eau, ne touchaient jamais à un sac abandonné et revenaient ensuite à leurs humbles travaux des classes, sans se douter qu’ils avaient été des héros. Combien peu leur ressemblaient ! la plupart des brancardiers n’étaient que des pillards... etc. » (Francisque Sarcey, Le Siège de Paris, p. 280. Paris, 1871, E. Lachaud, libraire-éditeur.)

Jeudi 1er décembre

 

En revenant de plaider à la police correctionnelle, au moment de monter le grand escalier de la cour du Mai pour aller défaire ma robe, je vois arriver le jeune blessé dont parle ainsi Le Siècle.

« Hier, dans la journée, on a conduit à l’ambulance du Palais un officier et plusieurs militaires grièvement blessés. Parmi eux se trouve un soldat saxon du 7e régiment royal qui avait eu, à l’attaque de L’Haÿ, la main droite et la cuisse gauche traversées par une balle. C’est un jeune homme de vingt-quatre ans, d’assez bonne tournure... L’état dans lequel se trouvaient son fourniment et ses vêtements prouve que rien ne manque à l’armée ennemie. »

Moi aussi j’avais fait la remarque, fort peu consolante pour nous, qu’il était parfaitement, même coquettement habillé. Pendant qu’on le tirait de la voiture, le pauvre garçon grimaçait horriblement, car le mouvement le faisait terriblement souffrir ; on le porta à l’ambulance du Palais.

J’allai bien vite enlever ma robe et, après avoir remis ma vareuse de garde national, je courus 27, avenue d’Italie, où j’étais de garde ; j’avais obtenu la permission de venir plaider au Palais.

Dans ses curieux et charmants Souvenirs du Siège, M. Rousse, bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris, au moment de ce siège, nous apprend que, malgré de très grands soins, le jeune Saxon mourut. Saxon ! l’était-il ? C’est possible ! mais j’ai entendu dire au Palais que tous les blessés prisonniers se disaient saxons. Nul ne voulait être Prussien. Par contre, nous autres Parisiens, nous ne parlions que des Prussiens, jamais des Allemands. Dans la plupart de mes griffonnages quotidiens, le mot Allemand vient rarement au bout de ma plume ; c’est toujours le mot : Prussien.

Nuit du 1er au 2 décembre

 

Pendant la nuit j’aperçois des femmes stationnant devant l’usine à gaz de l’avenue de Choisy ; elles sont là depuis trois heures du matin et resteront à la même place jusqu’à huit ou neuf heures, par un froid épouvantable ; elles attendent un peu de coke ! Quelle admirable population que cette population féminine ! Les malheureuses ! elles s’asseyent par terre, quand elles sont trop fatiguées ; parfois pour faire nique au froid et au sommeil, elles chantent La Marseillaise.

L’homme n’est que français, mais la femme est romaine ;

Elles acceptent tout les femmes de Paris,

Leur âtre éteint, leurs pieds par le verglas meurtris5,

Au seuil noir des bouchers les attentes nocturnes,

La neige et l’ouragan, vidant leurs froides urnes,

La famine, l’horreur, le combat ; sans rien voir

Que la grande Patrie et que le grand Devoir.

 

(V. H., L’Année terrible.)

Même nuit

 

On vient demander au poste vingt hommes ; il s’agit d’aller au plus vite recevoir des blessés au quai d’Austerlitz, port des Coches. J’y vais, sinon d’un cœur léger, du moins avec le contentement d’accomplir un devoir pénible.

Quatre bateaux, chargés de lignards et de moblots blessés, arrivent à la file les uns des autres. Au sortir des bateaux, nous conduisons les pauvres garçons aux voitures d’ambulance. Ils s’appuient fortement sur nos épaules, avec leurs mains ensanglantées. Si nous n’avions pas craint de leur faire mal, nous les aurions volontiers serrés sur nos cœurs. Une fois les braves enfants emballés, nous courons faire la chaîne pour déménager les fourniments. Les chassepots brisés et rougis, les épées empourprées par un sang généreux nous passent par les mains. Je vis alors un camarade qui embrassait sa main droite imprégnée de sang ; c’était folie, mais folie de patriotisme.

Le lieutenant-colonel de la Monneraye, neveu de l’ancien député de ce nom6, Breton intrépide, restait sur un bateau. Il avait la cuisse percée d’une balle et le bras foulé par une chute en bas de son cheval. Nous le portons à huit sur une civière jusqu’au Val-de-Grâce. Il jure comme un beau diable et répète souvent : « oh, ce four à chaux ! Oh, ce four à chaux ! Mais, c’était impossible7. »

Nous nous relevions de temps en temps, car c’était rudement dur de porter la civière sur nos épaules8. Un moment, mon épaule me fit tellement de mal que je passai la main entre la civière et cette pauvre épaule, afin de lui ménager une espèce de tampon. Le pauvre blessé, dont j’avais involontairement remué la jambe, poussa un cri terrible.

 

3 décembre

 

Hier, hélas ! malgré des efforts inouïs Ducrot n’a pu passer.

Mon beau-frère, A. D..., est dans les compagnies de marche. Pendant la grande lutte, il était campé près du fort de Nogent, au-delà du bois de Vincennes, à une lieue et demie de la bataille ; il voyait, au-dessus de sa tête, les bombes du fort de Nogent décrire leurs courbes magnifiques et dessiner leurs anneaux d’or lumineux.

 

Du même jour, 3 décembre

 

Lettre de ma chère femme, lettre reçue fin février 1871 :

« Après avoir employé tous les moyens, je suis désespérée de voir qu’aucune de mes lettres ne te parvient ; j’ai envoyé une dépêche, puis remis à la poste les deux cartes-réponses que tu m’as adressées et rien n’est arrivé. Je ne puis me résoudre cependant à ne pas, de temps en temps, m’entretenir avec toi ; cela me console. Réduisant encore le format de mon papier pelure, j’adresse ce mot à Tours ; j’espère toujours que l’une de mes nombreuses lettres te parviendra et t’apportera de nos nouvelles.

« Que l’épreuve est longue et pénible, mon cher et bon mari, et encore faut-il se résoudre à ne rien savoir de ce qui se passe ! Ce qu’un journal annonce un autre le dément et l’on vit dans la plus cruelle des perplexités. Je crois plutôt les nouvelles malheureuses, car ce sont presque toujours les seules qui soient confirmées.

« Le fils de notre bonne hôtesse, Mme R..., vient de quitter la maison et sa pauvre mère. Garde national mobilisé, il va à Lille provisoirement. Le départ est toujours chose bien triste et surtout dans de pareilles circonstances. Cela me rappelait le moment où, forcée de me rendre à ta volonté et à ton juste raisonnement, il fallut aussi que je me séparasse de toi. Encore étais-je loin de me douter que ce fût pour si longtemps, car je crois que cela eût été au-dessus de mes forces...

« Les enfants viennent d’avoir tous trois la petite vérole volante ; mais, Dieu merci, ils sont guéris maintenant et tu les trouveras bien portants à ton retour ; du moins je l’espère ; car c’est toujours ma crainte de ne pouvoir te les rendre tous les trois9.

« Mais comment font donc les femmes de tes amis pour faire parvenir de leurs nouvelles ? Je suis désespérée de ne pouvoir réussir comme elles10...

« À toi. »

Dimanche 4 décembre

 

Ducrot est revenu vers Paris !

En date de ce jour, lettre à ma femme :

« Chère amie,

« Avant-hier une bien triste corvée m’est échue ! J’ai eu la mission d’aller recevoir des blessés et de les porter ensuite à l’hôpital. Après les batailles de fin novembre, j’ai ainsi transporté au Val-de-Grâce un lieutenant-colonel, M. de la Monneraye, qui avait eu la cuisse traversée par une balle. Il jurait comme un païen, le brave Breton, mais je crois bien que ce n’était que des lèvres.

« Aujourd’hui je suis allé lui rendre une petite visite, comme je lui avais promis. Crois-tu que je suis arrivé juste au moment de l’opération. Il criait abominablement. Après l’opération il a voulu me recevoir quand même. Ma carte, que j’avais passée, était sur son lit, toute maculée de sang. “Hein, me dit-il, comme je suis douillet.”

« J’ai dû rendre ma tabatière, on fait fi des hommes à enfants, on m’a donné un piston pour tirer par les embrasures des remparts ; mais ils reculent petit à petit ces maudits Prussiens, nous n’aurons donc pas l’occasion de tirer. »

 

Ces mots de ma lettre : mais ils reculent petit à petit... semblent être des mots ridicules, pleins d’infatuation. Ce serait injuste de les juger ainsi ; car à ce moment, les Prussiens ont véritablement reculé. Un stratégiste étranger du plus grand mérite a publié dans le Times une étude remarquable sur la guerre franco-allemande, étude fort bien traduite par mon confrère Roger Allou ; à la page 190 de la traduction on lit ceci :

« ... Un feu continuel des forts fut entretenu pour tourmenter et tenir en éveil les assiégeants, et, quoiqu’il infligeât peu de pertes, il embarrassa sérieusement leurs opérations.

« Le résultat fut qu’au bout de six semaines la ligne d’investissement autour de la ville avait reculé sur plusieurs points et que la chance pour les Allemands d’un bombardement prochain était perdue ; même des appréhensions commençaient à se faire sentir que l’artillerie allemande fût trop faible pour sa tâche. » (Récit des événements militaires depuis la déclaration de guerre jusqu’à la capitulation de Paris. Trad. de Roger Allou, Paris, 1871, Garnier frères, éditeurs).


1.  Dans mon cinquième arrondissement il y eut 13840 votes favorables au gouvernement et 1819 votes défavorables.

2 Prison de Sainte-Pélagie, rue de la Clef.

3 Un autre bataillon du faubourg Saint-Germain, le 17e, se chargea, dans cette même nuit du 31 octobre, de contenir Blanqui, qui se démenait comme un diable dans un bénitier. Le vieux révolutionnaire prétendit avoir été à moitié étranglé par le bataillon des Sacristains.

4 En ce moment les troupes du général Ducrot passaient la Marne, protégées par le feu incessant de nos forts.

5 Une tante de ma femme, Mlle Alexandrine Turin, souffrit, plus de dix ans, d’un doigt de pied gelé pendant une de ces attentes dont parle Victor Hugo. Elle était trop humaine pour toujours charger sa domestique de si cruelles corvées. Les ouvrières furent vaillantes et les bourgeoises aussi ; ab una disce omnes.

6 C’est du moins ce que l’on disait.

7 Le brave soldat voulait probablement dire qu’il était impossible de se maintenir sur le plateau du Four à chaux, parce que cette position était écrasée par les batteries allemandes de Villiers et de Cœuilly ; c’est là qu’il fut blessé ; du reste, sur le beau panorama de la bataille de Champigny, Détaille et de Neuville n’avaient pas oublié le colonel ; on l’y voyait au moment où, mortellement blessé, il tombait de cheval. Je parle à l’imparfait, au passé ; car le panorama n’existe plus dans son ampleur ; il a été dépecé et vendu par morceaux. De bons patriotes, en les achetant, ont voulu soustraire à une destruction complète l’œuvre de deux grands artistes, patriotes eux-mêmes.

8 D’autant plus que du quai au Val-de-Grâce, c’est toujours en montant.

9 C’était la grande préoccupation de la Parisienne exilée : « Pourrai-je, se disait-elle, rendre au père à la fin de la guerre tous les enfants qu’il m’a confiés ? »

10 Les lettres de ma femme ne m’arrivèrent point parce que les messagers, qui en étaient porteurs, ne purent traverser les lignes prussiennes. Dix ou douze messagers seulement purent accomplir ce périlleux exploit. Voir un chapitre très curieux sur ces messagers dans le livre de M. Steenackers, ancien directeur général des télégraphes et des postes pendant l’invasion : Les Télégraphes et les Postes pendant la guerre de 1870-1871.