1871

 

1er janvier

Les seaux neufs étaient destinés à lutter contre les incendies déclenchés par les obus.

 

4 janvier 1871

L’instrument détesté des enfants est la poire à lavements, qui resta d’un usage régulier jusque vers le milieu du XXe siècle.

 

7 et 9 janvier

Durant les huit premiers jours du bombardement, entre le 5 et le 13 janvier, les obus prussiens provoquèrent la mort de 51 personnes, dont 18 enfants, 12 femmes et 21 hommes (Gazette médicale de Paris, 21 janvier 1871, p. 24). D’après le vice-amiral de La Roncière, à la date du 9 janvier, les obus tombaient sur Paris à la cadence de deux ou trois par minute, et s’abattaient « principalement sur les quartiers de Saint-Sulpice, du Val-de-Grâce et du Panthéon ».

Les habitants se réfugièrent dans les caves, parfois seulement la nuit, mais, d’après certains récits, une partie d’entre eux y demeurèrent plusieurs jours d’affilée, après y avoir descendu les meubles indispensables. Dans Les Petits Robinsons des caves ou le siège de Paris raconté par une petite fille de huit ans, Alphonse Daudet a décrit l’installation, dans une cave assez spacieuse, d’une famille composée des deux parents, de deux enfants, dont un bébé, et de la bonne.

 

11 janvier

La Société de secours aux blessés militaires fut créée en 1864 par le Genevois Henri Dunant, qui avait été épouvanté par le nombre de morts et de blessés vus sur le champ de bataille de Solferino (24 juin 1859). C’est à son initiative que la convention de Genève fut signée par seize États, le 22 août 1859. En France, la Société fut reconnue d’utilité publique par le décret du 23 juin 1866. Sur les champs de bataille, les membres de cette société étaient reconnaissables grâce au port d’un brassard semblable au drapeau suisse, mais avec les couleurs inversées.

 

12 janvier

Dans les Scènes de la vie de bohème de Henri Murger, Phémie, Musette et Mimi sont les amies, respectivement d’Alexandre le musicien, de Marcel le peintre et de Rodolphe le poète ; l’expression « Pauvre Musette » se trouve dans cette œuvre (p. 288 de l’édition de Michel Lévy Frères, Paris, 1859). Par ailleurs, on relève « Pauvre Mimi » dans Alfred de Musset, « Mimi Pinson. Profil de Grisette », Contes, Paris, Charpentier, 1867, p. 258, et « Pauvre Phémie » dans Théodore de Banville, Nous tous, LXXIV, « Phémie ».

Lugete veneres cupidonesque. Il s’agit du premier vers d’une pièce de Catulle intitulée Deuil du moineau ; la citation correcte est Lugete, ô veneres cupidonesque (Pleurez, ô Grâces et vous amours).

 

15 janvier

La rue de la Pierre-Levée se trouve dans le XIe arrondissement de Paris ; elle donne sur la rue de la Fontaine-au-Roi et sur la rue des Trois-Bornes.

 

19 janvier

La construction du Palais de l’Industrie fut ordonnée par le décret du 27 mars 1852, au lendemain de l’Exposition universelle de Londres ; ce nouveau bâtiment devait rivaliser avec le Crystal Palace de la capitale britannique. Élevé sur les Champs-Élysées, à hauteur du Carré Marigny, le Palais était construit en fer et en fonte pour les supports, les planchers et les combles (qui étaient recouverts de verre), et en maçonnerie pour l’enveloppe. Il comprenait une salle longue de 250 mètres, large de 180 et haute de 35, raccordée à la galerie des machines (longue de 1 200 mètres et large de 27) par une galerie annulaire, dite annexe du Panorama. Il fut inauguré pour l’Exposition universelle de 1855 et détruit à la fin des années 1890, afin de permettre l’édification du Grand Palais, où se tint l’Exposition universelle de 1900.

L’attaque dont parle Henri Dabot se rapporte au combat de Buzenval, qui marqua la fin des espoirs et des illusions des Parisiens assiégés. Aux confins de Rueil-Malmaison et de Garches, dans un endroit reculé, sur une colline, un monument en forme d’obus rappelle cette triste journée (rue Général-Colonieu) ; il porte une plaque de marbre sur laquelle sont gravés ces mots : « Aux glorieux morts des combats de Buzenval-Malmaison. 19 janvier 1871. » Dans le cimetière de Saint-Cloud, un obélisque porte lui aussi la date du 19 janvier 1871, accompagnée de ces inscriptions : « Oublier ! Jamais !! — Section des vétérans de Saint-Cloud — À la mémoire des défenseurs de la Patrie. »

 

22 janvier

Bismarck était considéré par de nombreux Français comme une sorte de génie du mal, comme une incarnation du démon, d’où cette référence de Henri Dabot à « l’antique serpent ».

 

24 janvier

D’après la tradition catholique, l’archange saint Michel protégeait la France depuis son apparition à saint Aubert, évêque d’Avranches, sur le mont Tombe (devenu le mont Saint-Michel) au début du VIIIe siècle ; on lui attribuait la victoire de Charles Martel sur les Sarrasins et il était apparu à Jeanne d’Arc. Charlemagne rendit sa fête obligatoire en 813, Louis XI créa l’ordre de chevalerie de Saint-Michel et, sur les conseils de M. Olier, Anne d’Autriche lui consacra un vœu durant la Fronde. En 1870, les désastres réactivèrent son culte.

 

25 janvier

La mort de Henri Regnault provoqua une vive affliction dans les milieux artistiques et littéraires. « On pleure, sur ce jeune cadavre, l’enterrement de la France », écrivit Edmond de Goncourt (Journal, 27 janvier 1871). Lors de ses obsèques, célébrées à Saint-Augustin, Camille Saint-Saëns joua lui-même la Marche héroïque qu’il venait de composer. Théodore de Banville lui consacra un poème, inséré dans ses Idylles prussiennes, intitulé « Henri Regnault » qui s’ouvre sur cette strophe :

Henri Regnault ! La Muse pleure

Avec un long regard ami

Ce jeune homme illustre, avant l’heure

Dans la sombre gloire endormi.

Sa fiancée, Geneviève Bréton (1849-1918), sembla inconsolable ; le jour des obsèques, Edmond de Goncourt écrivit : « J’ai vu passer derrière sa bière une jeune fille, ainsi qu’une ombre, en habit de veuve. On m’a dit que c’était sa fiancée. » Restée longtemps fidèle à la mémoire du défunt, en janvier 1880 Geneviève Bréton accepta d’épouser l’architecte Alfred Vaudoyer (1846-1917), lui-même veuf. Leur fille Marianne se maria avec Daniel Halévy.

 

26 janvier

La Gazette des Absents était une lettre-journal qui partait par ballon monté de Paris vers la province. Elle se composait de deux feuilles imprimées, mesurant environ 42 centimètres de haut et 27 centimètres de large. Le papier en était très fin, presque transparent. Elle était imprimée sur deux colonnes, dont une partie était réservée à la correspondance privée qui était rédigée dans un style que l’on qualifiera plus tard de « télégraphique ».

 

28 janvier

De son côté, le 16 janvier, Nérée Quépat écrivit : « Le pain que nous essayons de manger maintenant, sans trop y parvenir, contient du son, de la terre, énormément de paille hachée, mais pas la moindre parcelle de farine de blé. Trop heureux si nous parvenons de temps à autre à y découvrir de légères traces de farine de seigle, d’orge ou d’avoine » (Simples notes prises pendant le siège de Paris, 1871, p. 39).

 

29 janvier

La baisse de la natalité française fut continue durant tout le XIXe siècle. Durant l’Empire, le taux brut de natalité oscilla entre 25 et 27 pour mille, et fléchit encore durant les deux dernières années ; cependant le mouvement de baisse de longue durée s’était arrêté et une reprise de la fécondité féminine se dessinait (André Armengaud). À la même époque, en Prusse, le taux brut de natalité était de 37 à 39 pour mille (Patrick Festy).

 

1er février

La tarte à l’œillette blanche est une sorte de génoise dans laquelle sont incorporées des graines de pavot blanc. La flamiche à porions est une tourte aux poireaux (le terme de flamiche, ou flamique, ne désigne pas un mode de préparation, mais se rapporte à la chaleur du four).

« Les Juifs n’ont pas soupiré plus ardemment après les oignons d’Égypte » : il s’agit d’une allusion au comportement des Juifs dans le désert, après la sortie d’Égypte. La manne ne les satisfaisait pas et ils regrettaient la nourriture du temps où ils étaient esclaves (Nombres, XI, 4-5 : « et même les enfants d’Israël se mirent à pleurer, disant : qui nous fera manger de la chair ? Il nous souvient des poissons que nous mangions en Égypte sans qu’il nous en coutât rien, des concombres, des melons, des poireaux, des oignons et des aulx »).

 

2 février

Avec l’osséine, dit H. de Sarrepont, on fabriquait « un potage assez nutritif et un produit cartilagineux qui satisfaisait l’estomac d’une façon bizarre » (p. 239).

 

4 février

Le 31 janvier, à Bordeaux, Crémieux, Gambetta, Glais-Bizoin et Fourichon prirent un décret déclarant certaines personnes inéligibles. Visant les ministres, les sénateurs, les conseillers d’État, les préfets et tous les députés ayant bénéficié de la candidature officielle, il commençait par ces lignes : « Il est juste que tous les complices du régime qui a commencé par l’attentat du 2 Décembre pour finir par la capitulation de Sedan, en léguant à la France la ruine et l’invasion, soient frappés momentanément de la même déchéance politique que la dynastie à jamais maudite dont ils ont été les coupables instruments. » Ce décret fut annulé le 4 février par un décret signé par Jules Favre, Garnier-Pagès, Ernest Picard, Jules Ferry, Emmanuel Arago, Eugène Pelletan, qui estimèrent que « les restrictions imposées aux électeurs par le susdit décret [étaient] incompatibles avec le principe de la liberté du suffrage universel ».

 

5 février

Henri Dabot explique lui-même le sens de cette appellation à la fin de l’ouvrage. Metz s’appelait aussi la « Pucelle » (cité par François Roth, p. 264). Le terme de « pucelle » évoque l’absence de pénétration, l’intégrité physique, image très explicite pour une ville forte faite pour rester inviolée.

 

16 février

L’expression de « petite vérole » (ou « vérolette ») désignait la variole, par opposition à la « grosse vérole » ou syphilis. Une épidémie de petite vérole frappa l’ensemble de l’Europe en 1870-1871. En 1860, pour 58 départements sur 89 — tous les préfets ne transmettaient pas les statistiques —, on compta 13 755 varioleux et 1 662 morts ; en 1865, pour 72 départements, le nombre des varioleux s’éleva à 25 993 et celui des décès à 4 166. Le rapport de 1871, qui inclut certainement les données de 1870, indique 221 417 varioleux et 58 236 morts. Voir Hervé Bazin, L’histoire des vaccinations, Montrouge, Éditions John Libbey Eurotext, 2008, p. 21.

 

20 février

Querrieu et Pont-Noyelles sont deux communes du département de la Somme, séparées l’une de l’autre par une rivière, l’Hallue. Une bataille s’y déroula du 20 au 23 décembre entre des combattants français de l’armée du Nord (général Faidherbe) et des Prussiens (général Manteuffel). Sur les hauteurs de Pont-Noyelles, où se déroulèrent les combats les plus durs, se dresse un monument, dit « colonne Faidherbe », érigé en 1873.

Sainte Colette de Corbie (1381-1447) fonda ou réforma dix-sept couvents de franciscains et de clarisses. Il se peut que son chemin ait croisé celui de Jeanne d’Arc. Elle fut béatifiée en 1625 et canonisée en 1807.

 

12 mars

Dyspepsie est un terme de médecine qui s’applique à des difficultés de digestion.

 

16 mars

Ville forte, Péronne était défendue par environ 3 000 hommes (les gardes nationaux, des fusiliers marins, des soldats du 43e régiment de ligne) et 49 bouches à feu, à âme lisse et de faible portée. Après s’être approchés de la ville à plusieurs reprises, en novembre et décembre, les Prussiens sommèrent la ville de se rendre le 27 décembre ; le commandant de la place, le chef de bataillon Garnier, ayant refusé, le bombardement commença. Les Prussiens prirent comme point de mire l’église Saint-Jean-Baptiste et l’hôpital, sur lequel flottaient trois drapeaux d’ambulance, qui fut complètement détruit. De nombreux incendies se déclarèrent ; il était difficile de les combattre car il faisait moins quinze et les pompes étaient gelées. Péronne devint « un immense brasier dont la flamme, sans cesse ravivée et activée, portait partout la destruction et la ruine ». Le 30 décembre, les habitants demandèrent au commandant Garnier de faire cesser le siège, ce qu’il refusa, pensant que l’armée de Faidherbe allait venir débloquer la ville. Ce même jour, la toiture de la tour de l’église s’enflamma et les sept cloches « furent réduites en lingots ». Après un bref répit les 1er et 2 janvier, le bombardement reprit et dura jusqu’au 9, date à laquelle le général von Barnekaw envoya un parlementaire chargé de dire que la résistance était inutile, que, si la ville capitulait, « des conditions honorables » seraient accordées et que, en cas de refus, le bombardement continuerait « avec des batteries d’énorme calibre ». Une réponse était attendue pour onze heures. Le conseil de défense demanda à vérifier la présence de telles batteries, ce qui ne lui fut pas accordé. La population étant venue « implorer à grands cris la fin de ses misères », le conseil de défense se résigna à la reddition. Les trois mandataires du commandant Garnier ajoutèrent au bas du document énumérant les clauses de la capitulation qu’ils n’acceptaient de signer « qu’en raison des souffrances de la population civile de Péronne, éprouvée par un bombardement qui a détruit la plus grande partie de la ville » (Voir Jules Dournel, Histoire générale de Péronne, 1879, et M. de Clercq, Recueil des traités de la France, t. X, Paris, Pedone-Lauriel, 1880, p. 408-410). Mais le général Faidherbe ne l’entendit pas de cette oreille et fit preuve d’une étonnante dureté envers le commandant d’une ville dont 82 maisons avaient entièrement brûlé et 600 autres étaient effondrées ou endommagées. Comme il le relata lui-même dans La Guerre en province pendant le siège de Paris, il éprouva « un vif désappointement » car Péronne « gênait sérieusement les mouvements de l’ennemi » ; aussi, il « provoqua sur-le-champ la réunion d’un conseil d’enquête pour juger le commandant de la place ». Le sous-préfet ayant cherché à défendre le commandant Garnier, Faidherbe lui adressa, le 22 janvier 1871, une lettre qui engendra ultérieurement, dans plusieurs revues de droit international et de législation comparée, divers commentaires sur les nécessités de la guerre et l’humanité ; le bombardement des villes, lui, donna matière à des considérations sur le droit des gens et les règles de la guerre. Le 7 mai 1872, le conseil d’enquête blâma le commandant Garnier parce qu’il avait contrevenu à plusieurs articles du décret du 13 octobre 1863 « sur le service dans les places de guerre et les villes de garnison », notamment à l’article 255. Celui-ci constituait un rappel aux lois militaires condamnant à la dégradation militaire et à la peine de mort tout commandant de place qui aurait capitulé « sans avoir forcé l’ennemi à passer par les travaux lents et successifs des sièges et avant d’avoir repoussé au moins un assaut au corps de place sur des brèches praticables » ; or les remparts de Péronne étaient restés intacts.

 

29 mars

Une tapissière était « une voiture légère ouverte de tous côtés » qui servait surtout pour le transport des meubles (Littré).

Dès le début des années 1860, Napoléon III avait songé à faire du Mexique — dont la vie politique était constamment troublée depuis l’indépendance de 1821 — une monarchie catholique puissante, permettant de faire contrepoids aux États-Unis, de profiter d’avantages économiques liés au commerce — et ce d’autant plus que, grâce à un canal interocéanique, le pays pourrait devenir un carrefour de toute première importance —, sans oublier les mines d’or et d’argent. Le projet mexicain de Napoléon III était encouragé par l’Impératrice, par le duc de Morny et par le banquier Jecker. Quand le gouvernement Juárez décida de suspendre les remboursements des sommes que le Mexique devait à la France, à l’Angleterre et à l’Espagne, le prétexte de l’intervention fut tout trouvé. Des troupes françaises, britanniques et espagnoles débarquèrent en 1862, mais Londres et Madrid rappelèrent très tôt leurs soldats, après avoir trouvé un accord avec Juárez. Demeurés seuls, les Français remportèrent plusieurs victoires sur les troupes mexicaines et Juárez dut se réfugier dans le nord du pays. Maximilien d’Autriche, frère de l’empereur d’Autriche François-Joseph, accepta le trône qui lui fut offert ; le 19 avril 1864, une convention fut signée entre « le gouvernement de Sa Majesté l’Empereur des Français et celui de Sa Majesté l’Empereur du Mexique ». Maximilien et son épouse Charlotte arrivèrent au Mexique en mai 1864. L’armée française, commandée par le général Forey, puis par Bazaine, tentait de soumettre les troupes de Juárez, mais, à partir de la fin de la guerre de Sécession, celles-ci reçurent l’aide des Américains et multiplièrent les actions de guérilla. Aussi, Napoléon III finit par se désengager et tous les soldats français rentrèrent en France en 1866-1867. Seul et sans appui, Maximilien tomba aux mains de Juárez qui le fit fusiller le 19 juin 1867.

 

2 avril

Pâques fleuries était l’expression traditionnelle pour désigner le dimanche des Rameaux. On appelait le dimanche de Pâques « grandes Pâques ».

Dans ses Souvenirs, Charles Beslay écrivit qu’il ne se passa pas « une journée, une heure, sans que tous les esprits sincères n’[eussent] travaillé à chercher et à trouver une base de négociations acceptable pour les deux parties en présence » (1830-1848-1870. Mes Souvenirs, Paris, Sandoz, 1873, p. X)

 

4 avril

Cette église des dominicains est l’actuelle église orthodoxe roumaine. En 1866-1867, les dominicains avaient fait construire, rue Jean-de-Beauvais, un couvent dans lequel se trouva insérée l’ancienne chapelle du collège Dormans-Beauvais, fondé en 1375. Après les décrets du 29 mars 1880, les dominicains durent partir. En 1882, ils vendirent le couvent à une société immobilière qui morcela la propriété. L’église fut achetée par le gouvernement roumain et consacrée comme lieu de culte orthodoxe en 1892 ; quant au cloître, c’est le Dr Bourneville, franc-maçon, libre-penseur et principal artisan de la laïcisation des hôpitaux de la Seine, qui en fit l’acquisition...

L’expression de « bout de l’an » désigne la messe célébrée un an après le décès d’une personne.

 

5 avril

Mgr Darboy et l’abbé Deguerry, curé de la Madeleine, furent arrêtés le 4 avril ; la veille avait eu lieu l’arrestation de plusieurs pères jésuites de la rue Lhomond. La Commune agit ainsi pour deux motifs. Le 2 avril, avait été signé le décret ordonnant la séparation de l’Église et de l’État, la suppression du budget des cultes et la mise « à la disposition de la Nation » des biens des congrégations. Les ecclésiastiques séculiers et réguliers furent accusés d’avoir tenté de soustraire des biens et d’avoir organisé la résistance contre l’exécution de ce décret. Par ailleurs, lors de la sortie des fédérés du 3 avril, le gendarme Desmarets avait tué Flourens d’un coup de sabre et, le 4, Ferdinand Duval, qui s’était rendu, avait été fusillé sur ordre du général Vinoy, contrairement à la promesse du général Pellé. D’après Lissagaray, « les plus calmes » furent exaspérés et la Commune décida de « répondre œil pour œil, dent pour dent ». Sur la suggestion d’Olivier Pain, selon Gaston Da Costa, le 6 avril, la Commune prit le décret des otages, qui fut rédigé par Charles Delescluze. Rochefort protesta contre ce décret, ce qui provoqua l’interdiction du journal qu’il avait lancé le 3 février, Le Mot d’ordre.

Après le décret sur les otages, les fédérés voulurent échanger les personnes qu’ils détenaient contre Blanqui. Mgr Darboy et l’abbé Deguerry écrivirent eux-mêmes à Thiers pour lui demander de faire cesser les exécutions de blessés et de prisonniers, susceptibles de « soulev[er] de grandes colères à Paris » et d’y produire « de terribles représailles » (abbé Deguerry, lettre du 7 avril). Dans sa seconde lettre, datée du 12 avril, Mgr Darboy précisa que l’élargissement de Blanqui, qui était détenu, pourrait amener sa propre libération et celle des autres otages ; quoique étant lui-même « en jeu dans cette affaire », il recommandait l’adoption de cette transaction pour « préparer l’apaisement des esprits ». Mais Thiers démentit toute exécution de prisonniers ; par ailleurs, pour lui, il ne pouvait être question de relâcher Blanqui. Les otages restèrent donc en prison.

 

12 avril

Pour désengorger une partie du corps d’un patient, on pratiquait une saignée, qui ne touchait que des capillaires et des vaisseaux de petit calibre. On recourait à des sangsues ou à des ventouses scarifiées. Les ventouses, petits vases de verre « en forme de cloche », étaient appliquées directement sur la peau ; on y raréfiait l’air en y brûlant un morceau d’étoupe ou de la charpie imbibée d’alcool, ce qui faisait affluer le sang et on pratiquait alors des incisions à l’aide d’une lancette, d’un bistouri, d’un rasoir ou d’un instrument spécial, un scarificateur (mot qui désignait aussi l’homme de l’art pratiquant cette petite opération). Le procédé était douloureux et pouvait amener des complications. Les ventouses sèches amenaient aussi un désengorgement, mais sans saignée (Alexandre Jamain, Manuel de petite chirurgie, Paris, Germer Baillière, 2e édition, 1853, p. 407-430).

 

16 avril

Rue Boutebrie, se trouvait un établissement des Filles de la Charité (ou sœurs de Saint-Vincent-de-Paul) qui comprenait une école, un dispensaire et une pharmacie.

 

17 avril

Le mot de « poulet » désigne un « billet de galanterie », une « missive d’amour ». Littré précise que ce mot s’emploie quelquefois, « par plaisanterie », pour désigner « toute autre missive ».

 

18 avril

Dès le début du XIXe siècle, on chercha à conserver le lait grâce à des méthodes de dessication ou de concentration. Des produits de bonne qualité étaient élaborés aux États-Unis et en Suisse (laiterie de Cham). En France, M. Martin de Lignac, établi dans la Creuse, fournissait un lait concentré fort apprécié qui était utilisé dans la marine (M. de Jouffroy, Dictionnaire des inventions et découvertes anciennes et modernes dans les sciences, les arts et l’industrie, t. II, Paris, Migne, 1853, p. 174-181).

Des barricades furent élevées à Paris en février et en juin 1848. Certaines n’étaient que de minces constructions, mais quelques-unes se présentaient comme de formidables remparts atteignant et même dépassant cinq mètres de haut. Toutefois, aucune, sans doute, n’aurait pu être comparée à certaines barricades de 1871. Le colonel Rossel, rallié à la Commune, créa une commission des barricades. L’« artiste chaussurier » Napoléon Gaillard, tout d’abord responsable des barricades des Ier et XXe arrondissements, fut ensuite chargé de toutes les barricades de Paris et fit édifier de spectaculaires constructions, comme la barricade de la place de la Concorde.

En 1897, un auteur, du nom de Richard, publia un livre intitulé Cantinières et vivandières, dans lequel sont décrits tous les uniformes des cantinières des armées du second Empire, à l’exclusion toutefois de celui des cantinières de la garde nationale. Dans les régiments d’infanterie, d’artillerie, de chasseurs, les cantinières portaient toutes un pantalon long et large et, par-dessus, une jupe. Seules les cantinières des zouaves de la Garde portaient « des jambières de cuir fauve prenant bien le mollet ». Édith Thomas mentionna aussi, incidemment, que les cantinières des bataillons de fédérés portaient un pantalon (Les pétroleuses, Paris, Gallimard, 1960, p. 163) ; dans la série « Types de la Commune », une gravure de Bertall, reproduite dans La Commune de Paris par ceux qui l’ont vécue (Laure Godineau, Paris, Éditions Parigromme, 2010, p. 155), montre une cantinière vêtue d’un pantalon long et une autre, portant un pantalon bouffant s’arrêtant au genou et des guêtres.

 

28 avril

Dans la seconde édition de ses Griffonnages, Henri Dabot précisa qu’il pensait que le dominicain rencontré ce jour-là était le père Captier, qui fut tué sur l’avenue d’Italie, le 25 mai 1871.

 

29 avril

Le 8 avril, la loge Les Disciples du Progrès rédigea un manifeste invitant les adversaires à la réconciliation : « La Maçonnerie maudit toutes les guerres, elle ne saurait assez gémir sur les guerres civiles. Elle a le droit et le devoir de venir au milieu de vous et de vous dire : “Au nom de l’Humanité, au nom de la Fraternité, au nom de la Patrie désolée, arrêtez l’effusion de sang, nous vous le demandons, nous vous supplions d’entendre notre appel.” » Une délégation maçonnique se rendit à Versailles le 23 avril ; ses membres ne purent obtenir la moindre parole apaisante de Thiers, qui aurait même dit : « Il y aura quelques maisons de trouées, quelques personnes de tuées, mais force restera à la loi. » Après quelques réunions houleuses, où s’affrontaient « communeux et conciliateurs », il fut décidé d’organiser une grande manifestation, le 29 avril, et d’aller planter les bannières maçonniques sur les remparts. Trois frères furent autorisés à franchir les lignes versaillaises, les yeux bandés ; ils furent reçus par Thiers, « entre deux portes », mais cette entrevue fut encore un échec, ce qui acheva de faire basculer bon nombre de maçons parisiens du côté de la Commune (Voir André Combes, Histoire de la franc-maçonnerie au XIXe siècle, t. II, Monaco, Éditions du Rocher, 1999, p. 100-116). La grande manifestation maçonnique du 29 avril frappa les contemporains, qui n’étaient pas habitués aux décors maçonniques. Mme Blanchecotte laissa ce témoignage : « et l’on voyait des soleils, des lunes, des croissants, des équerres, toutes sortes de choses symboliques et cabalistiques reluire en or et en argent sur les écharpes de hauts dignitaires » (Tablettes..., p. 94).

Aucune loge du Grand Orient de France ou du Suprême Conseil de France ne portait le nom de « Bienfaiteurs de l’Humanité ». En revanche, au Grand Orient, il existait trois loges s’appelant respectivement Les Bienfaiteurs unis, Les Amis de l’Humanité et Les Héros de l’Humanité (information communiquée par André Combes). Henri Dabot a probablement confondu ces différents noms entre eux.

 

30 avril

Le texte de Charles Beslay, intitulé Au citoyen Thiers, chef du pouvoir exécutif de la République française (pour l’engager à donner sa démission), datait du 24 avril.

Même pour l’époque, Thiers, qui mesurait 1,55 m, était petit. D’après divers auteurs, le surnom de « petit Foutriquet » lui aurait été donné par le maréchal Soult.

« République in partibus infidelium » est une image amusante. Un diocèse était dit in partibus infidelium quand il correspondait à un siège virtuel, situé dans un territoire non chrétien. Beslay fit ainsi entendre à Thiers que la République qu’il dirigeait n’avait aucune réalité.

 

8 mai

On oppose fréquemment les officiers allemands, munis de cartes qu’ils savaient parfaitement lire, aux officiers français qui n’en possédaient pas et n’étaient pas habitués à en utiliser. « L’opinion publique, dit Alfred Fierro, fut choquée d’apprendre que certains officiers français étaient incapables de lire une carte. » Mais, pour cet auteur, cette ignorance fut « exagérée ». En effet, le général Cathelineau mentionne à plusieurs reprises l’usage qu’il faisait de ses cartes (Le corps Cathelineau pendant la guerre (1870-1871), p. 126, 335, 339). Quoi qu’il en fût, la défaite de 1871 donna un essor à l’enseignement de la géographie en France.

 

11 mai

Henri Dabot a écrit Mauléon pour Moléon.

 

26 mai

Le 24 mai, à l’initiative de Genton, il fut décidé de fusiller six otages. Les six personnes retenues furent Mgr Darboy, l’abbé Deguerry, curé de la Madeleine, trois pères jésuites et le président Bonjean, emprisonné depuis le 21 mars. Leur exécution eut lieu à la Roquette. Les photographies supposées la représenter sont des photomontages réalisés ultérieurement par les photographes Eugène Appert, Pierre-Hippolyte Vauvray, Trémelat et Jules Raudnitz (Voir Bertrand Tillier, La Commune de Paris, révolution sans images ? Politique et représentation dans la France républicaine, Seyssel, Champ Vallon, 2004, p. 397-398). Bertrand Tillier souligne que ces photographes ne cherchèrent pas à abuser le public et ne cachèrent pas que leurs œuvres étaient des trucages, contrairement à ce qu’écrivirent certains historiens de la Commune comme Jean Bruhat, Jean Dautry ou Émile Tersen.

Le père Captier fut exécuté avenue d’Italie, le 25 mai, en même temps que quatre autres dominicains et que huit laïcs.

D’après le récit de la Genèse (XIX, 24), les deux villes de Sodome et de Gomorrhe furent détruites « par une pluie de soufre et de feu »

 

1er juin

La colonne Vendôme avait été abattue le 16 mai. Ce fut une opération longue et assez délicate qui se déroula devant environ 20 000 spectateurs ; après bien des efforts, la colonne tomba sur un lit de fumier, de paille et de madriers. La responsabilité de cette action fut attribuée à Gustave Courbet, car, alors qu’il présidait la Commission des arts mise en place après le 4 septembre, il avait demandé que la colonne fût « déboulonnée », stricto sensu. Ce terme nouveau parut original, devint à la mode ; le surnom de « déboulonneur » fut désormais attaché à la personne de Courbet et, ultérieurement, lui nuisit fortement. Certes Courbet n’aimait pas cette colonne : il ne lui trouvait aucun intérêt artistique — pour lui, elle n’était qu’une « plate copie de la colonne trajane » — et il lui reprochait d’incarner des valeurs militaires contraires à la civilisation et à la démocratie. Mais il aurait souhaité que les bas-reliefs fussent transférés aux Invalides et il fut étranger à la rédaction du décret pris par la Commune le 12 avril (« La Commune de Paris considérant que la colonne impériale de la place Vendôme est un monument de barbarie, un symbole de fausse gloire, une affirmation du militarisme, une négation du droit international, une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus, un attentat perpétuel à l’un des trois grands principes de la République française, la fraternité, décrète : article unique : la colonne Vendôme sera démolie »). Contrairement à une mention portée par erreur sur le Journal officiel de la Commune, à la suite d’une erreur de nom, il ne réclama pas non plus l’exécution de ce décret et le fit savoir clairement à plusieurs reprises. Le 3e conseil de guerre le condamna pourtant à six mois de prison et à 500 francs d’amende. Le 30 mai 1873, l’Assemblée nationale vota la reconstruction de la colonne Vendôme ; le 26 juin 1874, un premier jugement du tribunal civil de la seine condamna Courbet — qui vivait en Suisse depuis juillet 1873 — à payer les frais de cette restauration. Il fit appel et après plusieurs années de procédure la sanction définitive tomba le 4 mai 1877 ; la créance de l’État fut fixée à 323 091, 668 francs, payables en annuités de 10 000 francs. La première annuité devait être versée le 1er janvier 1878, mais Courbet mourut le 31 décembre 1877.

 

2 juin

Voir Rapport sur les pertes éprouvées par les bibliothèques publiques de Paris en 1870-1871, par M. Baudrillart, Paris, impr. Paul Dupont, 1871.

Les fuséens (et non fuxéens) étaient des artilleurs ayant reçu une formation en pyrotechnie. Maxime du Camp mentionne un corps de fuséens « spécialement outillés pour l’incendie » dans Les Convulsions de Paris, t. IV, Paris, Hachette, 1881, p. 242.

Toutes sortes de rumeurs coururent sur les pétroleuses, décrites comme d’abominables mégères munies de récipients divers, arpentant Paris et déversant du pétrole dans les caves, par les soupiraux, avant d’y mettre le feu. Pour Lissagaray, il s’agissait d’« êtres chimériques, analogues aux salamandres et aux elfes » ; Édith Thomas, quant à elle, y voyait la manifestation d’une peur collective, comparable à la grande peur de 1789 (Édith Thomas, Les pétroleuses, p. 192). Devant les conseils de guerre, aucune preuve de l’existence de pétroleuses ne fut apportée. Néanmoins, trois femmes souspçonnées d’être des pétroleuses furent condamnées à mort : Joséphine Marchais, Élisabeth Rétiffe, Léontine Suétens. Victor Hugo plaida en leur faveur et, peut-être à la suite de son intervention, la peine de mort fut commuée à la peine des travaux forcés à perpétuité, en Guyane (Les pétroleuses, p. 203).

En revanche, l’incendie fut bien considéré par les combattants de la Commune comme un moyen de faire la guerre, notamment comme un moyen de défense permettant de retarder l’avance des Versaillais, et des femmes purent contribuer à les allumer. Par ailleurs, des incendies furent aussi provoqués par les obus lancés par les fédérés comme par les Versaillais. Bien avant la Commune, le 22 janvier, Le Petit Journal rapporta qu’un obus prussien qui était tombé dans une cave où se trouvaient trois tonneaux de pétrole (il s’agissait de réserves pour le chauffage et l’éclairage) avait déclenché un incendie.

Pendant la guerre et la Commune plusieurs vitraux de l’église Saint-Étienne-du-Mont furent abîmés : la rose ouest, les vitraux de l’Apocalypse, des saintes femmes, de l’Ascension, de l’Assomption (Élisabeth Pillet, Le vitrail à Paris au XIXe siècle. Entretenir, conserver, restaurer, Rennes, PUR, 2010, p. 219, 227, 234-235, 239).

Un prêtre habitué est un prêtre attaché au service d’une paroisse, sans avoir reçu de charge officielle.

 

3 juin

« Quand on prend du galon, on n’en saurait trop prendre » ; ce proverbe était fréquemment usité au XIXe siècle ; il signifie que « quand on est à même, il faut prendre tout ce qui peut être pris » (Littré). Certains membres de la Commune, Napoléon Gaillard par exemple, aimaient en effet se montrer chamarrés et « dorés sur tranche ». D’après Mme Blanchecotte, « les puritains de la Commune » cherchèrent vainement à « refréner cette intempérance de décors » par des admonestations et des décrets ; les « généraux peu sages » firent la sourde oreille et continuèrent « à éblouir la foule » (Tablettes d’une femme pendant la Commune, Tusson, Éditions du Lérot, 1996, p. 123).

 

4 juin

Le 26 mai, sur un ordre écrit signé de Ferré, le colonel Gois conduisit une cinquantaine d’otages rue Haxo, où se déroula « un massacre » (Maxime Vuillaume), que Varlin, Vallès et Cournet furent impuissants à empêcher. Outre l’abbé Sabatier et l’abbé Planchat mentionnés par Henri Dabot, se trouvaient plusieurs autres ecclésiastiques, trois jésuites, quatre pères de Picpus, un frère de Saint-Vincent-de-Paul, un vicaire de Notre-Dame-de-Lorette et un séminariste de Saint-Sulpice. Le souvenir des prêtres tués en ce lieu est rappelé par une église, Notre-Dame-des-Otages, édifiée en 1935-1936, qui succéda à une chapelle construite par les jésuites en 1894, et par une dalle commémorative placée rue du Borrégo (dans la cour de l’actuelle maison paroissiale, où se trouve aussi une porte la prison de la Roquette ; une seconde porte est conservée aux Archives diocésaines de Paris). Les autres victimes étaient quatre civils qui avaient été arrêtés comme mouchards et des gardes républicains, qui furent inhumés dans le cimetière de Belleville, où un obélisque signale leur sépulture.

La remarque faite à propos de la rue Planchat peut s’appliquer à la rue Darboy et à la rue Deguerry. Il peut en effet paraître paradoxal d’avoir honoré ces trois ecclésiastiques en attribuant leur nom à une rue, mais sans leur donner leur titre, ordinairement considéré comme une marque de respect.

 

9 juin

Grâce à la libérale obligeance de M. Pascal Monnet, administrateur du Panthéon, et à M. Cédric Leveillard, qui nous a accompagnée sur place, nous avons pu examiner longuement et attentivement la partie de la colonnade circulaire et le mur qui s’élève derrière elle, face à la rue Soufflot. L’inscription relevée par Henri Dabot en 1895 n’est plus lisible ; dans le renfoncement d’une baie donnant sur l’intérieur de la coupole, nous avons pu lire les lettres A et, plus loin, VE, mais elles semblent avoir appartenu à un nom isolé plutôt qu’à une inscription. L’érosion a abîmé un certain nombre de pierres dont la surface est complètement décapée et, au fil du temps, l’administration du Panthéon a fait procéder à un certain nombre de réagréages.

 

5 septembre

D’après l’auteur de la notice consacrée à Théophile Régère dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, son plus jeune fils se prénommait Gontran et non Gaston (tome 8, p. 306).

 

19 octobre

À l’occasion d’une fouille dans l’église Saint-Laurent, furent découverts, dans les sous-sols, des ossements anciens que l’on mit immédiatement en rapport non avec l’existence d’un ancien cimetière, mais avec une histoire de jeunes filles qui auraient été abusées puis assassinées par des prêtres. Dans un tel « roman », il faut voir, dit Jacques Rougerie, « le fruit d’une haine plus que séculaire, atavique, et jamais démentie » (Paris libre. 1871, Paris, Seuil, 1971, p. 227)

 

31 octobre

Enfant, Gambetta avait été blessé à l’œil droit et était devenu borgne. Il ne fit remplacer son œil exorbité par un œil de verre qu’en 1867.

 

5 novembre

Dans Les Jours d’épreuve (Paris, Hachette, 1872), Elme Caro consacra quelques pages aux « deux Allemagne ». D’après lui, l’Allemagne de Mme de Staël avait bien existé, au temps des lieder et « avant l’ère des canons Krupp ». Il pensait que l’on pouvait peut-être en trouver encore « quelques traces dans les honnêtes populations du midi de l’Allemagne », mais qu’elle tendait à « rentrer dans les limbes du passé » pour laisser la place à une autre Allemagne, « active, robuste, formidable » (p. 33).

Dans Germania, Henri Heine avait dénoncé « la suffisance glacée et stéréotypée » des Prussiens, qu’il présentait comme un « peuple de pantins pédants », ayant « avalé le bâton de caporal dont on les rossait jadis ».

Mélanie Louise Sophie de Pourtalès (1836-1914) était la fille de Paul Athanase et de Mélanie Renouard de Bussière. En 1857, elle épousa un banquier suisse, Edmond de Pourtalès. Sa vie se partageait entre Paris et le château de la Robertsau, en Alsace ; elle était souvent invitée au château de Compiègne. Ayant, pour des raisons familiales, l’occasion de se rendre régulièrement à Berlin, elle alerta le général Ducrot sur les préparatifs prussiens. Le général Ducrot lui-même en informa le général Frossard. Mis au courant des inquiétudes de la comtesse de Pourtalès, Napoléon III lui demanda « à travers quels gros nuages [ses] beaux yeux bleus [avaient] donc vu l’avenir » (cité par Robert Grossmann, Comtesse de Pourtalès, Strasbourg, La Nuée bleue, 1995). Après 1871, son image s’imposa comme l’une des incarnations de l’Alsace.

Fils et neveu de deux officiers de l’armée napoléonienne naturalisés sous la Restauration, Eugène Stoffel, né en 1821, suivit ses études à l’École polytechnique et à l’École d’application de l’artillerie. Il participa à la campagne d’Italie. Remarqué par l’Empereur grâce à un texte qu’il avait publié sur Vercingétorix et César, il fut nommé officier d’ordonnance de la maison impériale et chargé des fouilles archéologiques en 1861. En 1866, il fut envoyé à Berlin comme attaché militaire et fut promu colonel en janvier 1870. Il commença la guerre aux côtés de Napoléon III, parvint à quitter Sedan et devint chef d’état-major de l’artillerie de l’armée de Paris. En mai 1871, alors qu’on lui offrait le commandement du 14e régiment d’artillerie pour combattre la Commune, il se fit mettre en disponibilité (Voir Daniel Lérault, De Waterloo à la Légion étrangère. Le singulier destin des colonels Stoffel, chez l’auteur, 2008). Les rapports militaires qu’il rédigea de 1866 à 1870 furent publiés en 1871 à l’initiative des frères Garnier ; dans la lettre donnant son accord en vue d’une publication, pour laquelle il renonça à ses droits d’auteur, le colonel Stoffel écrivit : « J’avais discerné, dès les premiers mois de mon séjour à Berlin, que la guerre avec la Prusse était écrite dans le livre du destin, et je me voyais forcé de vivre au milieu d’un peuple, notre futur et implacable ennemi, dont je reconnaissais en toute chose la supériorité écrasante. Je voyais la lutte imminente entre ce peuple instruit, viril, discipliné, plein de patriotisme et de foi, gouverné par de vieilles et fortes institutions respectées de tous, et notre malheureuse nation, ignorante, sceptique, égoïste et vaine, qui a perdu jusqu’à l’idée de patrie et qui, ne respectant plus rien, se fait un jeu depuis quatre-vingts ans de renverser tour à tour toutes les institutions qui la régissent ». Tous les rapports du commandant Stoffel auraient dû permettre à Paris d’apprécier avec justesse le degré de préparation militaire auquel étaient parvenus la Prusse et les États allemands du Sud.

Pour l’image de l’Allemagne dans l’opinion française, voir Claude Digeon, La crise allemande de la pensée française. 1870-1914, Paris, PUF, 1959.

 

11 novembre

L’abbé François Moigno (1805-1884) publia divers travaux scientifiques, ainsi que Les Actualités scientifiques, qui parurent de 1865 à 1884.

 

22 novembre

Quaerens lupa quem devoret. Henri Dabot adapte ici la première épître de saint Pierre, 5, 8, en substituant une louve au lion, probablement en s’inspirant de la louve de Dante (chant premier de « L’Enfer »).