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Nous nous sommes promenés autour de Cumberland et Rockland, la terre des concombres et celle du rock. On regardait les terrains à vendre. On a trouvé ce que je cherchais, isolé dans les bois. Encore, il y aura toujours des voisins, pire lorsque leur fosse septique sort de terre et que les moustiques nous ont mangés pour les cinq minutes où on a eu le temps de constater qu'il faudrait au moins cinquante gros camions de roches pour permettre au terrain mouillé d'absorber un château médiéval. Une usine de chais-pas-quoi crachait sa boucane juste en face de la vue. Après ça moi et Sébastien étions prêts à signer pour le terrain de 219 000 $. Nous avons pris un traversier qui nous a emmenés de l'autre côté de la Ottawa River (version amérindienne anglaise). Le long de la rivière Outaouais (version indienne française), les maisons sont en décomposition. Des dépotoirs par ici, des cochonneries par là, enfin, je me sentais chez moi ! Gatineau, trou de mon cœur ! Ça sent la misère dans ce coin-là comme partout ailleurs sur la planète. Ce qui me fait réfléchir sur Ottawa la propre. Comment se fait-il que l'on ait rencontré au moins cinq grosses usines qui crachaient leur misère au Québec et qu'on n'en voie jamais à Ottawa ? Pourquoi les gens sont si fiers en Ontario, si je-m'en-foutisme au Québec ? Ai-je tort dans ce que j'avance ? Les petites maisons en ruine de Hull, c'est rare d'en voir à Ottawa. Seul Ottawa est capable de vouloir détruire un édifice comme celui de la Défense parce qu'il le trouve laid. Y aurait-il une exigence de vie plus grande chez les Ontariens que chez les Québécois ? Les Anglais plantent des fleurs, prennent soin de leur gazon, tout est toujours parfait. Je ne me souviens pas d'avoir vu ça de l'autre côté de la rivière. Est-ce les Québécois qui ont d'autres intérêts que de montrer à tout le monde leur belle grosse maison, leurs belles petites fleurs, leur petite richesse amassée sur soixante ans ou sur deux générations ? Ou est-ce les Anglais qui sont en crise du « et-que-vont-dire-les-voisins » ? Eh bien, les voisins, moi, vous disent d'aller chier, que dans le fond, on se fout bien de vous et vos fleurs.
carole cadotte <138194788@archambault.ca>