III

Sur la plage, abandonné

Bonjour à tous, ici l’auteur. Je vous souhaite la bienvenue dans mon cerveau, pardonnez mon intrusion. Fini de tricher : j’ai décidé d’être mon personnage principal. D’habitude, ce qui m’arrive n’est jamais grave. Personne n’en meurt autour de moi. Par exemple, je n’ai jamais mis les pieds à Sarajevo. Mes drames se nouent dans des restaurants, des boîtes de nuit et des appartements à moulures. Le truc le plus douloureux qui m’était arrivé ces derniers temps, c’était de ne pas avoir été invité au défilé de John Galliano. Et puis, tout d’un coup, voici que je meurs de chagrin. J’ai connu la période où tous mes amis buvaient, puis celle où ils se droguaient, puis celle où ils se mariaient, et maintenant je traverse celle où tous divorcent avant de mourir. Cela se passe dans des endroits pourtant très gais, comme ici, à la Voile Rouge, une plage tropézienne où il fait très chaud, eurodance debout sur le bar, pour rafraîchir les lumpenpétasses en bikini on les douche avec du Cristal Roederer à une brique les 75 cl avant de leur sucer le nombril. Je suis encerclé de rires forcés. J’ai envie de me noyer dans la mer mais il y a trop de jet-skis.

Comment ai-je pu laisser les apparences dicter ma vie à ce point-là ? On dit souvent qu’ « il faut sauver les apparences ». Moi je dis qu’il faut les assassiner car c’est le seul moyen d’être sauvé.