Free-lance
Je m’installe dans l’attente. Cela a le mérite de me calmer. Je remplis mon Désert des Tartares avec ce que je trouve. Ainsi, on vient par exemple de me briefer sur une recherche de « signature » pour un lancement de parfum féminin : Hypnose de David Copperfield, Las Vegas. C’est payé cinquante mille nouveaux francs (la moitié si l’idée n’est pas vendue). Il faut trouver une phrase courte, provocante, forte, qui dise à la fois le bénéfice consommateur et induise de manière positive la « reason why ». En clair, exprimer que ce parfum va permettre aux femmes (la cible) de séduire les hommes (la cible de la cible) mais pas pour une nuit seulement : pour une passion éternelle et durable, et ce grâce au savoir-faire de son fabricant. Je reviens après une semaine de réflexion et propose cette liste :
Au lieu de vous marier, portez Hypnose de Copperfield.
Hypnose de Copperfield. Ce n’est pas un parfum, c’est un tour de magie.
Hypnose de Copperfield. Parfum pour ce soir, et demain soir, et tous les autres soirs.
Hypnose de Copperfield. Il cache une histoire d’amour dans un double fond.
Portez Hypnose et laissez agir toute une vie.
Hypnose de Copperfield. Ce parfum est truqué.
Hypnose : le flacon qui rend amnésique.
Hypnose de Copperfield. Après, vous ferez semblant de ne plus vous souvenir.
La réunion se passe très mal. Personne n’est satisfait, pas même moi. Je les écoute, quitte Paris l’après-midi même pour Verbier (Suisse), une station de sports d’hiver du Valais. De là-bas, au bout de trois semaines de travail, je faxe le slogan que vous connaissez et qui a fait en une année de ce produit le leader mondial des fragrances vendues en « food » :
Hypnose de Copperfield, sinon l’amour dure trois ans