CHAPITRE 11

Le lieutenant Jeff Trèchaud de retour à son bureau, se posait plusieurs questions :

– Comment quelqu’un peut-il arrêter de respirer ? Comment peut-on décider volontairement d’arrêter de respirer ? Quelqu’un a-t-il étouffé la femme d’Otto Didact et par conséquent l’aurait assassinée ?

Pourtant, il faut absolument qu’une personne en étrangle une autre pour qu’elle meure asphyxiée, mais dans ce cas :

– QUI avait étranglé Katia Didact ? s’interrogeait Jeff Trèchaud. Y avait-il seulement quelqu’un qui en aurait voulu à cette personne ?

Il n’avait rien trouvé de ce côté-là non plus.

Le policier ne pouvait pas prouver cette théorie, de plus il la trouvait fumeuse et peu fiable. Personne ne se trouvait à son contact au moment de sa mort, en effet, elle était seule dans sa bibliothèque. Son mari l’avait retrouvée dans son fauteuil…

Ce mystère ressemblait beaucoup aux énigmes de chambre close comme Sherlock Holmes ou Rouletabille en résolvaient dans les livres qu’il lisait parfois.

De plus, si elle avait voulu se suicider, elle n’aurait pas choisi d’arrêter de respirer. Elle n’avait pas non plus de tendances suicidaires. Quelques voisins avaient confirmé que Katia bien qu’un peu renfermée était plutôt enjouée, en tout cas, pas du tout suicidaire…

Le policier allait creuser et il verrait bien où cela le mènerait. De toute façon, il n’avait pas trop le choix… Son travail d’enquêteur commençait juste.

Pendant ce temps, Valérie qui n’avait pas ouvert sa boutique, avait rendez-vous chez le notaire, ayant repensé aux prédictions de la voyante, elle supposait que le notaire avait peut-être des informations…

La marchande d’antiquités espérait bien qu’il lui donnerait les fameux registres tant convoités. Ils contiendraient sûrement un moyen pour résoudre ce mystère si pesant pour elle.

La commerçante attendait beaucoup de ce rendez-vous qui, espérait-elle, ne la décevrait pas. Un taxi venait de la déposer devant l’étude du notaire, elle avait quelque cinq minutes de retard. Elle dut patienter quelques minutes dans la salle d’attente avant d’être reçue.

Maître Fourquès fit asseoir Valérie et lui demanda le motif de sa présence bien qu’il eût une petite idée sur le pourquoi de cette visite.

Il posa quand même la question :

– Qu’est-ce qui me vaut le plaisir de vous recevoir aujourd’hui Madame Turpignon ?

– Appelez-moi Valérie, on ne va pas faire de chichis, un peu de simplicité au lieu de l’austérité habituelle.

– Cette austérité fait partie de mon travail, Madame !

– Mettons cela de côté, voulez-vous ?

– Aucun souci, je préfère aussi la convivialité. Comme je vous le demandais précédemment, quel est le but de votre visite ?

– Voilà, comme vous le savez, lors de la succession de mon grand-père que vous avez administrée, j’ai hérité, avec mon mari, de la boutique d’antiquités à Nîmes. Ce magasin me cause pas mal de soucis en ce moment, mais j’y reviendrai si cela est nécessaire… Je voulais savoir si mon grand-père ne vous avait pas laissé par hasard quelque chose d’important à nous remettre le jour de la lecture du testament que vous auriez oublié de nous donner.

Le notaire essaya de ne rien laisser paraître mais son froncement de sourcils n’avait pas échappé à Valérie, elle se doutait qu’il lui cachait un fait important. Elle avait beaucoup d’espoir qu’il lui révèle où se trouvaient les registres de Pierre-André. Mais elle ne dit rien et attendit sa réaction.

Ce dernier se décida enfin :

– Par « Quelque chose », vous faites allusion à quoi précisément ?

– Excusez-moi, mais nous cherchons depuis des mois, les registres correspondant à l’époque où mon grand-père tenait la boutique, il vous en a peut-être parlé, ou encore, vous les a-t-il confiés pour les mettre en sécurité.

– Si je disposais de ces registres pourquoi vous les aurai-je cachés ?

Valérie voulait se mettre en colère mais préféra continuer avec douceur et tact.

– Je pense que vous savez où sont ces documents et je vous invite à me les remettre, ou alors à me dire où ils sont ?

– Oui ! Je sais où ils sont ! Votre grand-père, avec qui j’avais de bons rapports, m’avait demandé de garder relativement secrète l’existence de ses registres. Je ne devais pas vous les remettre à la lecture du testament mais je devais attendre que vous en fassiez la demande. Ce que vous êtes venue faire aujourd’hui ! Je n’avais pas soupçonné que vous veniez pour cela mais je tiens à vous signaler que je n’ai fait que respecter les dernières volontés de votre grand-père…

Là-dessus, il fit une pause et attendit à son tour une réaction de la part de la vendeuse.

– Vous les aviez depuis le début, comment aurai-je pu le deviner ? Je vous demande de me remettre ces registres qui sont très importants pour l’exploitation de ma boutique, insista-t-elle avec fermeté.

– Je n’ai jamais eu l’intention de ne pas vous les remettre. J’attendais juste que cette demande vienne de vous comme aujourd’hui, et cela, afin de respecter la volonté de votre grand-père. Vous savez quoi en faire ?

– Non ! Vous avez une suggestion peut-être ? Ou une recommandation de la part de mon grand-père concernant les cahiers de recensement des ventes.

– Pas une suggestion, mais votre grand-père m’a dit en me remettant ces registres d’en prendre grand soin, car les noms et les adresses contenues dans ces livres seraient sûrement utiles un jour ou l’autre… Je crois que ce jour est arrivé ! Qu’en pensez-vous ?

– Oui, en effet ! Je vous remercie de me remettre ces documents car ils vont certainement m’aider à mieux gérer ma boutique.

Le notaire s’interrogea et cette attitude témoignait que cette révélation l’avait intrigué, il se hasarda à une question embarrassante :

– En quoi quelques registres, anciens de surcroît, pourraient-ils vous aider à administrer un commerce, à moins que vous n’ayez quelque chose que vous ne m’ayez pas dit ?

– En fait, je suis à la recherche du nombre de livres que mon grand-père aurait vendu avant de me léguer ce magasin. Et il n’y a pas là de quoi faire un mystère. Ni rien qui ne puisse être révélé au grand jour.

Après cet échange, le notaire se leva, il prit une clé sur son bureau et disparut dans la pièce voisine. Quelques minutes qui pour Valérie parurent des heures, suffirent au notaire pour revenir avec trois énormes cahiers anciens qui ressemblaient à la série de livres qu’elle vendait dans son magasin…

Valérie était étonnée : trois registres pour la totalité du temps passé à l’exploitation de la boutique en un peu plus de cinquante ans d’ouverture, mais bon, après tout, peut-être que peu d’objets avaient été vendus, cela pouvait s’expliquer…

– Tenez, fit le notaire avec empressement, voici tout ce que votre grand-père m’a remis, ces trois gros cahiers reliés que je n’ai même pas ouverts…

– Je m’attendais à ce qu’il y en ait plus, au moins cinq, voire six ou sept. Ce n’est pas grave, mais vous êtes sûr qu’il n’y en a que trois, se permit de relancer la commerçante.

– J’en suis certain, déclara solennellement le notaire.

Après lui avoir remis les trois volumineux cahiers qui avaient servi à son aïeul pour enregistrer ses ventes, il se rassit.

– Voilà, votre grand-père m’a demandé de vous remettre ces trois ouvrages, j’espère que cela vous servira au mieux. Je vous les transmets aujourd’hui, le 7 janvier 2016. Dès que vous aurez signé le document de remise qui prouve que vous en avez pris possession.

Valérie signa la feuille que le notaire lui tendait, le libérant ainsi de ses obligations envers elle et son grand-père. Maintenant, elle était prête à affronter la suite. Elle ne savait pas encore à quoi s’attendre mais Valérie imaginait qu’une partie du mystère, au moins, allait être résolue grâce à ces précieux documents. Dans le taxi qui la ramenait, elle ouvrit le registre et lut la page de garde.

Il était écrit en préambule, registre de la boutique d’antiquités : « Le vieux parchemin antiquités. »

Pendant ce temps-là, le policier creusait, creusait sans savoir ce qu’il allait découvrir. Le lieutenant Trèchaud relisait ses notes pour vérifier si un détail ne lui aurait pas échappé. Après un examen minutieux du dossier qui ne contenait presque rien, il se confirma à lui-même qu’il n’avait rien manqué.

Cependant, en reprenant le rapport du médecin légiste sur la mort de Katia, il découvrit qu’un morceau de biscuit avait obstrué la trachée et arrêté la respiration. Maintenant, Jeff pouvait classer l’affaire puisqu’il s’agissait d’un simple accident domestique. Du moins, cela en avait tout l’air.