La guerre de Troie fut un sujet récurrent dans l’art et la littérature occidentale durant trois millénaires. Ce mythe se révéla extraordinairement populaire chez les Grecs, d’Homère aux œuvres des grands tragédiens, et fit l’objet d’illustrations sur des poteries et des objets d’art, puis plus tard, devint un thème repris par les artistes de l’Empire romain. Le monde antique considérait la guerre de Troie comme un événement historique avéré – certains tentèrent même de prouver qu’ils descendaient des grands héros et de revendiquer ainsi leur part de gloire.
De nos jours, un certain scepticisme règne quant à la réalité de cette guerre, ou du moins, quant à la version qui en est présentée dans les sources artistiques et littéraires antiques. Cependant, certaines découvertes archéologiques semblent montrer qu’une guerre évoquant celle que décrit Homère pourrait bien avoir eu lieu. Des documents hittites de l’Antiquité mentionnent notamment un conflit ayant opposé le royaume d’Ahhiyawa (Achaia, qui serait l’ancien nom de la Grèce) à la cité de Wilusa (Ilios, ultérieurement appelée Troie). Des archéologues affirment en outre avoir découvert le véritable emplacement de Troie, qui se trouverait à Hisarlik en Turquie du Nord, et attestent de la destruction de la cité par un incendie en 1180 avant J.-C.
Pour correspondre à cette chronologie archéologique, le roman Nous, Filles de Sparte commence à la fin du xiiie siècle avant J.-C. Il se situe donc à l’époque de la civilisation mycénienne de la fin de l’Âge du bronze, une civilisation dominante en Grèce à cette époque. Cependant, en écrivant ce roman, mon objectif n’était pas de démontrer la réalité historique de la guerre de Troie, ni d’écrire un récit exact du point de vue historique, mais plutôt un roman que l’on pourrait qualifier d’historiquement vraisemblable – il s’agit en effet d’une reconstitution historique du mythe de la guerre de Troie basée sur les traces matérielles existantes de cette période de la préhistoire, mais également d’une interprétation et d’une appropriation des règles de la littérature antique s’appuyant sur ce mythe. Nous, Filles de Sparte entremêlent donc la réalité archéologique et la tradition mythologique, tout en tissant un nouveau récit remplissant les vides laissés par chacun de ces domaines. Mais ce roman ne retrace pas l’histoire de la guerre. Il est centré sur les existences intimes d’Hélène et de Klytemnestre, deux figures traitées de manière inappropriée ou injustement négligées dans les sources antiques. Que pensaient ces femmes ? Que ressentaient-elles ? Pourquoi ont-elles agi comme elles l’ont fait ? Si elles avaient réellement existé, en tant que reines à l’époque de l’Âge du bronze en Grèce, à quoi auraient ressemblé leurs existences ? Ce sont les questions que je me suis posées, et auxquelles j’espère avoir répondu dans ce roman.
Si cette période de la civilisation grecque vous intéresse, la lecture de The Cambridge Companion to the Aegean Bronze Age (2008) est un bon début. Je recommanderai également le merveilleux ouvrage de Bettany Hugues, Helen of Troy (2005), qui fut pour moi une extraordinaire source d’information et d’inspiration au cours de mes recherches. Et quiconque est intéressé par l’expérience des femmes dans le monde antique pourra lire Goddesses, Whores, Wives and Slaves : Women in Classical Antiquity (1975, édition revue publiée en 1994). L’ouvrage offre un aperçu accessible de ce sujet et est en quelque sorte devenu un guide incontournable.