IV

MOISSON DE RELIQUES

Mais le signe le plus éclatant de la nouvelle alliance ne fut-il pas, au lendemain du millénaire, la découverte de nouvelles reliques ? L'Occident en était mal pourvu ; celles qu'il possédait paraissaient de qualité douteuse. Il se sentait, en ce domaine aussi, très démuni, tandis que dans les pays de la chrétienté orientale foisonnaient les débris sacrés. Voici que Dieu daignait tirer son peuple, enfin purifié, de cette indigence et lui fournir, en plus grande abondance, des armes si nécessaires dans la lutte contre les démons. De fait, les pèlerins qui, de plus en plus nombreux, allaient visiter les églises byzantines et celles qui continuaient de prospérer sous l'autorité des princes musulmans, rapportaient parfois de leur voyage des fragments de corps saints ; d'autres étaient fabriqués par des faussaires ; enfin, tout naturellement, les terrassements préparatoires aux reconstructions d'églises mettaient au jour des sarcophages inconnus. Mais pour Raoul Glaber, et pour tous les moines de son temps, ces reliques semblaient ressusciter de la terre, comme bientôt, à l'appel des trompettes, le feraient tous les défunts de l'humanité Ils attribuaient cette éclosion, dans le nouveau printemps du monde, à l'infusion de la grâce divine.

 

De la découverte partout de saintes reliques.

 

Le monde entier, comme nous l'avons dit, se trouvant revêtu de blanc par la rénovation des basiliques, il advint ensuite, c'est-à-dire la huitième année après le millénaire de l'incarnation du Sauveur, que divers indices permirent de découvrir, dans des lieux où elles étaient restées longtemps cachées, de nombreuses reliques de saints. Comme si elles avaient attendu le moment de quelque glorieuse résurrection, sur un signe de Dieu elles furent livrées à la contemplation des fidèles, et versèrent dans leur esprit un puissant réconfort. Il est connu que ces découvertes commencèrent tout d'abord dans une ville des Gaules, à Sens, dans l'église du bienheureux martyr Etienne. L'archevêque de la ville était alors Lierri, qui découvrit là, chose étonnante, des insignes des rites antiques : parmi plusieurs autres objets qui étaient cachés, il trouva, dit-on, un morceau du bâton de Moïse. A l'annonce de cette chose, accoururent des fidèles, non seulement des pays de Gaule, mais même de presque toute l'Italie et des régions d'outre-mer ; et il ne fut pas rare de voir des malades revenir de là guéris par l'intercession des saints1.


1 Id., ibid., III, 5.