Régis jette son sac à dos Coach – encore une erreur – sur le carrelage et se laisse tomber dans le canapé du salon. Il est éreinté, et le terme n’est pas usurpé. Il est plutôt sportif, mais il vient de travailler, et c’est une première. Le « petit bourge », comme dirait Nora, a pu vérifier qu’une heure de ménage n’a rien à voir avec une heure de footing. Il y a une fatigue saine et une fatigue abrutissante. Il imagine, non sans éprouver une certaine angoisse, ce que cela signifierait d’avoir à faire ce genre de boulot pendant plusieurs mois, voire plusieurs années.
Nora pénètre dans la pièce, nue, dégoulinante, une serviette à la main.
Rien qu’en la regardant, sa fatigue s’estompe.
— Tu es splendide.
Elle ne relève pas. Se frictionne un instant la tête, puis soupire.
— Je viens à peine de prendre une douche et j’ai déjà chaud. Si quelqu’un s’aventure à me dire que le réchauffement climatique est une vue de l’esprit, je le donne en pâture à un ours polaire… Alors, cette journée à Borderhouse, ça a donné quoi ?
Régis ferme les yeux.
— Je ne sais pas. Le lieu est improbable. Je connaissais l’historique du bâtiment, mais y déambuler est une véritable expérience.
— Tu as appris quelque chose sur Nick ?
— Je sais bien que c’est la seule chose qui t’intéresse, mais je ne suis pas un détective privé. Alors tu pourrais d’abord t’inquiéter de savoir si ça s’est bien passé pour moi.
— Oui, c’est vrai, excuse-moi… Tu as l’air épuisé.
Nora s’approche du canapé, se penche et embrasse Régis du bout des lèvres.
— Mon petit bourge qui a dû se taper une journée de boulot pour faire plaisir à sa Nora chérie.
Régis laisse promener un instant ses mains sur la poitrine de Nora.
— Ça mérite bien une petite récompense…
Nora se redresse en jetant sa serviette sur la tête du jeune homme.
— C’est quoi cette remarque de macho ? Tu veux que je te taille une pipe avant de préparer le repas ou après ?
Régis se lève brusquement en hululant. La serviette blanche qui tombe en ombrelle pliée jusqu’à sa taille le transforme en un fantôme de série Z.
Nora, surprise, ne peut s’empêcher de hurler.
Puis de rire, lorsque Régis essaie de l’enlacer et qu’ils s’emmêlent dans la serviette avant de rouler par terre.
Lorsqu’ils arrivent à se débarrasser du monstre blanc, Nora glisse une main sous le T-shirt de Régis.
— Tu as l’air vraiment fatigué, ça prendra plus de temps, c’est parfait.
*
Sur la ligne d’horizon, le soleil lâche une vapeur orangée en s’enlisant dans les flots. Ces derniers jours, la température n’a cessé de monter et, étrangement, le crépuscule paraît apporter un surcroît de moiteur.
— Moi, j’aime bien cette ambiance tropicale, dit Régis. La terre va grouiller d’insectes et de reptiles. La végétation envahira tout, et l’homme sera obligé de copuler avec des varans pour faire baisser la température du sang de sa progéniture…
Ils sont nus sur la terrasse et contemplent la jungle de béton de la ville qui s’écrase contre les ombres violettes du crépuscule.
— Tu es finalement plus dingue que ce que j’imaginais.
— Je ne vais pas te sortir une phrase du genre « c’est l’hôpital qui se fout de la charité », parce que j’ai horreur des poncifs, mais permets-moi de le penser.
— Permission accordée. Et maintenant, parle-moi de Borderhouse…
— Comme je te le disais, le lieu est surprenant. Le télescopage des styles, tous déjà sans concession, donne un résultat, disons, singulier.
— Excuse-moi, mais je m’en fous un peu.
Régis soupire.
— OK, alors autant te l’avouer tout de suite, je n’ai pu obtenir aucune information précise sur Dickovski.
Nora lui rend son soupir.
— Il faut tout de même préciser, enchaîne Régis, qu’il est interdit, sauf cas de force majeure, de parler au personnel et de déranger la tranquillité des résidents quel qu’en soit le prétexte. Tu avoueras que ces conditions ne sont pas idéales pour obtenir des informations.
— On peut même dire qu’elles sont nulles, conclut Nora, dépitée. Alors, inutile de te fatiguer pour rien. Autant arrêter tout de suite…
Régis affiche un sourire que le contexte rend plutôt intrigant.
— Tu n’as pas le droit d’adresser la parole à qui que ce soit, ce qui n’empêche pas l’inverse de pouvoir se produire…
Nora s’approche de la balustrade, son corps ruisselant de transpiration, nimbé de vapeurs violines. Elle se tourne lentement.
— Et alors ?
— Si on remettait ça ?
— Non, sérieusement…
Régis s’approche et l’embrasse du bout des lèvres.
— Un des résidents est venu me parler.
— Excuse-moi, mais ça n’a rien d’extraordinaire.
— En théorie, non. Mais ce type est totalement hallucinant.
Nora s’écarte de lui en un geste d’agacement.
— Donc, il n’a rien pu te dire d’intéressant. Et puis si ça n’a aucun rapport avec Dickovski, je m’en fous un peu…
— Justement, ça a un rapport.
— Il n’y a même pas cinq minutes tu as avoué que tu n’avais obtenu aucune information, et maintenant…
— Ce n’est pas tout à fait ce que j’ai dit. Je n’ai eu aucune information « précise », mais j’en ai eu tout de même.
— Eh bien vas-y, accouche…
— Bon, accroche-toi. D’abord ce type s’appelle Mister Monk. Déjà peu banal. Puis il m’a demandé si j’étais le Prince charmant…
Nora éclate de rire.
— Il t’a dragué, quoi !
— Pas vraiment. Il a parlé d’une Belle endormie, mais il était trop tard… Quelqu’un s’était déjà chargé de la réveiller.
— Ne me dis pas que…
— Si. Dickovski himself. Et alors là, il l’a éreinté. Il ne l’aime pas du tout. Il l’a même traité de menteur.
— Ça ne m’étonne pas…
— Comment ça ?
— Une preuve de plus que Dickovski est une ordure.
— Attends… Attends… Et l’histoire de la princesse ? Tu trouves ça normal ? Il a également précisé que Dickovski venait de très loin pour la voir. On ne peut pas dire que San Francisco ce soit le bout du monde !
— Aucune importance. Ton Mister Monk est dingue, mais son point de vue sur mon… enfin… sur Dickovski est pertinent.
— Justement.
— Justement quoi ?
— Si ce type est capable d’émettre un point de vue pertinent, c’est qu’il n’est pas totalement dingue.
— Tu ne vas pas me dire que toi tu crois à cette histoire de conte de fées ?
— Bien sûr que non. Mais c’est peut-être un message crypté.
Nora éclate de rire.
— Tu as fumé quoi, là-bas ?
— Tu me charries. Normal. Mais comment expliques-tu que ce Mister Monk soit venu me parler de Dickovski, alors que j’étais justement là pour en savoir plus sur lui.
— Cette clinique lui appartient. Tous les résidents le connaissent. C’est une simple coïncidence. Sinon, tu pourrais également trouver étrange qu’un type te parle d’une belle endormie alors que notre relation commence devant Sleeping Beauty…
— Bon sang ! Tu as raison. Une preuve de plus ! Mister Monk ne m’a pas croisé par hasard.
— Tu es en plein délire. Comment pouvait-il savoir que nous avions vu le film de James B. Harris ?
— Je ne sais pas. Mais il ne s’est pas contenté de parler, il m’a également fait un cadeau.
*
– Qu’est-ce que c’est que ça ?
Nora cligne des yeux en regardant l’objet doré qui miroite dans la main de Régis sous les dernières lueurs alizarines du couchant.
— Tu le vois bien, non ?
— La forme est étrange, un peu rétrofuturiste, mais je dirais une clef.
— Évidemment. Qu’est-ce que ça pourrait être d’autre ?
— Je ne sais pas, moi. Un instrument chirurgical, un outil de précision, un fragment de circuit imprimé… Bref, je suis sidérée que tu aies piqué ce truc, en tout cas.
— Je ne l’ai pas piqué, je l’ai trouvé. Et je suis absolument sûr que c’est ce Monk qui l’a laissé exprès pour moi.
— Tu veux que je te dise : tu me fais peur. Dis-moi que tu as fumé un pétard à dix-huit feuilles, ou je ne fais plus équipe avec toi.
Régis soupire. Puis affiche finalement une moue résignée.
— Tu as raison. J’extrapole un peu. Mais à peine. En tout cas, lorsque je l’ai trouvée, il m’a paru évident qu’il s’agissait d’une clef.
— Et c’est reparti…
— Comment ça ?
— Tu te fous de moi, là ? Tu ne vas pas me dire qu’avec ta propension naturelle à fantasmer, tu n’as pas fait le parallèle avec la clef d’or d’Ariane et Barbe-Bleue, l’opéra de je ne sais plus quel obscur compositeur.
— Saint-Saëns. Et il est loin d’être obscur.
— Dans quel Saëns ? s’esclaffe Nora.
Régis ne peut s’empêcher de rire à son tour.
— Fous-toi de moi. Mais si on parle d’événements synchrones et acausaux plus que de coïncidences, dans un esprit jungien, alors on peut tout de même reconnaître que…
— Tu es vraiment en plein délire. Je crois que tu n’as toujours pas compris le sens de ma quête. Je ne suis à la recherche d’aucun graal, mystique ou quantique. Je veux juste obtenir la preuve que Dickovski est mon père et savoir pourquoi il me rejette aussi violemment. Le reste ne m’intéresse pas.
— Tu as raison, n’empêche que…
— Quoi encore ?
— Lorsque j’ai quitté la clinique, j’étais totalement vanné et je ne pensais plus du tout à la… clef, qui se trouvait dans la poche de mon jean. Le portique de détection ne s’est pas déclenché.
— Eh bien, ta clef n’est pas en métal, tout simplement.
— Elle en a pourtant l’air.
— Quand tu dis ça, tes yeux brillent comme si tu envisageais une hypothèse totalement absurde.
— Pourquoi ? Un matériau extraterrestre ça n’a rien d’absurde…
— Bon, j’en ai assez entendu pour aujourd’hui. En ce qui me concerne, on en est toujours au point zéro… Ah, au fait, j’ai oublié de te dire que Rachel était passée. Elle nous attend à 20 heures au Millenium.
— Tu as vu ma mère ? Je ne savais même pas qu’elle était rentrée.
— Elle ne fait que passer. Elle repart demain.
— Et alors ?
— Quoi, et alors ?
— Eh bien je ne sais pas, moi. Que s’est-il passé ? Tu l’as trouvée comment ? Et… tu l’appelles par son prénom ?
Nora sourit.
— Tu as peur de quoi ?
— Je n’ai peur de rien, mais ma mère est un peu spéciale.
— Je le suis aussi, non ?
— Oui, mais ce n’est pas pareil.
— Ouf ! Je ne suis donc pas qu’un substitut maternel.
— Ne sois pas ridicule ! s’emporte Régis.
— Ah… Terrain miné.
— Pas du tout, mais elle a deux obsessions, Mozart et la chirurgie esthétique.
— Et alors ?
— En dehors de La Flûte enchantée, qui est un pur chef-d’œuvre, et de quelques autres bricoles, reconnaissons-le, Mozart a gâché son immense talent en faisant de la musique au kilomètre.
— Le classique ce n’est pas mon rayon, peut-être parce que ma mère n’écoute que ça. En tout cas, pour elle aussi, Mozart est le plus grand compositeur de tous les temps.
— Tu vois ! C’est ce que pensent les trois quarts des gens. Et le quart restant n’écoute jamais de musique classique. Mais il y a plus de génie dans le premier mouvement de la neuvième de Beethoven que dans toutes les symphonies de Mozart réunies.
— Tu fais quoi, là ? Tu t’entraînes pour la discussion au Millenium ? Parce que si c’est le cas, je te conseille plutôt de réviser tes cours de chirurgie esthétique.
*
Régis et Nora sont attablés au Millenium depuis vingt minutes. Le serveur est déjà passé trois fois et Régis a essayé d’appeler sa mère au moins vingt fois au téléphone.
— Qu’est-ce que je t’avais dit ? Ma mère vit sur une autre planète. Ou plutôt dans un autre espace-temps. Les seuls horaires qu’elle respecte sont ceux de ses concerts !
Régis appelle le serveur.
— On va finalement prendre une bouteille pour patienter. Un rosé bien frais.
— Je vous conseille un Porter Creek… Russian River Valley, chardonnay. Petit degré, grands arômes.
— Parfait !
Le portable de Nora se met alors à vibrer. Elle décroche.
— Allô ? Oui…
Nora secoue un long moment la tête. Un blanc interminable pendant lequel arrive la bouteille de rosé. Le serveur fait goûter Régis puis remplit les verres. Régis, plutôt tendu, vide le sien d’un trait.
— Ah… Bon, d’accord, reprend Nora. Non, non, ne vous inquiétez pas, je comprends… À une prochaine fois, alors…
Et elle raccroche.
— C’était Rachel. Elle pensait juste faire une petite injection d’acide hyaluronique et finalement une micro-dermabrasion s’est avérée nécessaire. Du coup, de petites rougeurs disgracieuses l’empêchent de se montrer en public. Elle va donc prendre un plateau repas et le docteur Ravon lui a trouvé une chambre à la clinique pour y passer la nuit. Elle nous souhaite un très bon appétit.
Régis se ressert machinalement un verre de rosé.
— Qu’est-ce que je t’avais dit ? Elle nous donne rendez-vous dans un restaurant vegan sans nous demander notre avis, puis elle nous pose un lapin et nous souhaite bon appétit ! C’est insensé…
Nora éclate de rire.
— Tu trouves ça marrant, eh bien pas moi ! Remarque, si elle a déjà ton numéro de portable c’est que vous avez vraiment sympathisé…
— C’est à cause du lapin, dit Nora entre deux hoquets.
— Quel lapin ?
— Celui qu’elle nous a posé dans un restaurant vegan…
Régis manque de s’étrangler, puis éclate de rire à son tour.
Le fou rire les gagne sous l’œil passablement inquiet du serveur.
Lorsque Nora parvient à se calmer, elle prend soudain un air sérieux, presque mélancolique.
— Tes parents font partie de l’élite de cette putain de planète. Un grand chef d’entreprise et une artiste de renom pour qui l’argent n’est pas un problème et qui peuvent se permettre tous les caprices, comme faire un saut à San Francisco pour se faire gommer une ridule entre un concert à Sydney et un autre à Paris… Ce qui les rend forcément suspects. Mais lorsque ta mère est tombée sur moi, elle n’a pas cherché à savoir d’où je venais, ni quel genre d’études je faisais ou je ne faisais pas. J’étais la petite amie de son fils et c’était suffisant. Elle s’est tout de suite adressée à moi de façon amicale. Ton père a été un peu plus lourdingue, normal pour un quinqua qui se la joue face à une gamine, mais il était sincèrement ravi que tu sois avec moi, ce que je ne comprends pas vraiment, mais ça c’est une autre histoire… Ils ne pourraient, bien sûr, plus se passer de leur fric, mais même s’ils ont perdu le sens des réalités, ton père reste un chercheur et ta mère une artiste. Ils sont un peu excentriques, et ce n’est pas si mal que ça, et puis ils t’aiment, ça se voit, et ils te respectent. J’imagine que leurs activités les ont souvent éloignés de toi et que ton enfance a dû être bercée par des « je te promets que je serai là pour ton anniversaire » et des « je te garantis que cette année on passera Noël en famille », mais lorsqu’on voit le résultat on peut dire qu’ils se sont plutôt bien démerdés… Alors que… ma mère m’a aimée, bien sûr, trop même, mais j’aurais préféré qu’elle soit un peu plus excentrique et moins dépressive, et si… mon père ne l’avait pas larguée comme une merde, ç’aurait peut-être été le cas…
Nora pleure. Régis est tétanisé. Un semblant de sourire, un peu ridicule, encore collé sur ses lèvres.
Le dieu de la machine arrive alors pour remettre le temps en marche.
— Je vous conseille le barbecue Maitake Mushrooms. Les champignons sont cueillis à l’état sauvage et n’ont rien à voir avec ceux que l’on trouve habituellement, cultivés au Japon. La touche de nectarine marinée s’accordera parfaitement avec le chardonnay…
— C’est parfait, répond mécaniquement Régis. Cuits à point, s’il vous plaît. Les champignons, je veux dire…
— Plutôt saignants pour moi, enchaîne Nora, de façon tout aussi mécanique.
Le serveur acquiesce, un peu désarçonné. Puis fait brusquement demi-tour et s’éloigne rapidement.
Ils éclatent de rire.
— Ça fait du bien d’être parfois un peu con, avoue Nora.
— Je suis heureux de te l’entendre dire… Tu sais, Dickovski on va finir par le coincer, que ce soit ton père ou pas, il cache quelque chose, ça c’est sûr, et je finirai bien par découvrir quoi… Et puis il y a un détail que j’ai oublié de préciser, Mister Monk a dit que la princesse s’appelait Drusilla Strange…
— Et alors ?
— Drusilla Strange est le personnage principal d’une nouvelle de Theodore Sturgeon, un auteur de l’âge d’or de la science-fiction américaine. Elle vient d’une autre planète et se retrouve obligée d’être débarquée sur Terre. Et elle ne comprend pas cette race qui ne profile que les parties qu’on peut voir…
— Je ne comprends pas.
— Eh bien, au début du texte, elle regarde passer une voiture et elle voit parfaitement toutes les pièces qui la composent, qu’elle est lisse, élégante et belle, de l’avant à l’arrière, dans toutes les parties visibles. Mais elle voit aussi ce qu’il y a en dessous, un cauchemar aérodynamique et…
— Je ne vois toujours pas où tu veux en venir…
— Je ne sais pas trop non plus, mais avoue qu’une fois de plus, c’est étrange…
— Écoute, il y a d’abord cette clef en or qui évoque immanquablement celle trouvée par Maeterlinck dans les gravats d’Orlamonde et qui fait écho à l’un des poèmes d’Ariane et Barbe-Bleue… Et maintenant une extraterrestre du nom de Drusilla Strange, sorte de Belle au bois dormant chaperonnée par un moine.
— Il me semble que tu fais quelques raccourcis, là.
— Peut-être, mais comme je te l’ai déjà dit, tout ça est totalement délirant et ne nous conduit nulle part…
— La nature est un temple où de vivants piliers laissent parfois sortir de confuses paroles. L’homme y passe à travers des forêts de symboles qui l’observent avec des regards familiers…
— OK avec Baudelaire. Nous sommes tous perdus dans une forêt de symboles. Mais là, et je n’ai pas peur d’insister, nous ne sommes ni dans un remake de Barbe-Bleue ni dans un reboot d’Alien, nous sommes dans MON histoire, l’histoire banale d’une fille qui essaie de retrouver son père.
— Je ne crois pas que…
— Écoute. Je me suis trompée en voulant la jouer à la Metro-Goldwyn-Mayer. On ne va pas faire rugir le lion inutilement. Le rôle du privé te va bien mais tu es un peu trop fantasque. Alors c’est simple, je vais retourner voir Dickovski. Parce qu’en fait, il n’y a pas d’autre solution. Ça passe ou ça casse.
— Il a deux gardes du corps armés.
— Tu ne crois tout de même pas qu’il va s’amuser à flinguer sa fille en pleine rue.
— Je ne sais pas, ce type est dingue. Tout est possible.
— C’est mon père. J’en suis persuadée. Et ce n’est pas un docteur Je Kill mais un chef d’entreprise. Et même s’il était prêt à foutre ma vie en l’air, il ne le fera pas au détriment de la sienne. Ma décision est prise…
— Très bien. Mais la mienne l’est aussi. J’ai horreur de ce job, mais demain je retourne à Borderhouse.