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Jorg est débarqué du Canada via Amsterdam et Paris. Le temps d’en fourrer une couple avant d’espérer coucher avec notre colocataire Martin. Il tourne autour de nous trois comme une vraie mouche à merde, demandant attention et affection. Je l’ai toujours détesté, parce que sans cesse il a voulu Sébastien et qu’il n’a jamais arrêté de le toucher et de lui courir après. Je n’aime pas l’idée qu’il couche avec Martin non plus. On a néanmoins passé une excellente journée hier. Son voyage à Londres ne sera peut-être pas inutile, il nous a présenté son ami Sean qui demeure à Croydon dans la banlieue sud de Londres. Son frère, qui est très beau mais hétéro, est guitariste et cherche à former un groupe de musique. Il pourrait bientôt emménager à Londres. On a magasiné, mangé chez Maxwell, restaurant immangeable, essayé des pantalons de clown chez Harrod’s, la honte de ma vie. Vais-je apprendre qu’il n’y a rien de pire que de faire du shopping avec trois tapettes dans un magasin à rayons bourré de vendeurs, eux-mêmes de vraies queens ? Un petit christ de vendeur hyper beau s’est mis à draguer Sébastien et a réussi à le convaincre d’acheter une paire de pantalons hyper laide. Heureusement que j’ai convaincu Sébastien qu’il ne fallait pas acheter uniquement parce que le vendeur est jeune et beau et qu’il fait pitié et qu’il risque de perdre son emploi s’il ne vend pas au moins un morceau de linge ce week-end.

Il y a des jours où je me demande ce que je fais avec Sébastien. Ce n’est certainement plus une histoire de cul ; si ce n’était que ça, je n’aurais point besoin de lui. Encore hier on me draguait, peu importe le club où nous sommes allés. Un, entre autres, pas mal impressionnant avec sa chemise ouverte. Sébastien n’arrêtait pas de me dire que l’on pourrait coucher ensemble à trois. Je ne voulais rien savoir. Ça commence à m’emmerder cette histoire de le faire à trois, ça me fait penser qu’il va bientôt sauter sur quelqu’un et je ne vois pas le but de continuer cette relation. Je suis l’esclave qui fait tout dans l’appartement sous prétexte qu’il travaille, et je dois endurer la pression de ne point être capable de trouver de l’emploi. Sans compter l’argent que je lui dois. Et puis, être dans un couple ça demande tellement de compromis et de sacrifices qu’il vaudrait mieux que cela nous rende heureux. Avoir des enfants est une bonne raison pour qu’un couple tente de continuer, mais selon les statistiques cela n’empêche pas les hétéros de se séparer et de divorcer. En ce qui nous concerne, les gais, c’est beaucoup de souffrances inutiles s’il n’y a pas une raison de nous tenir ensemble.

carole cadotte <138194788@archambault.ca>