> Seule pour toujours

Je suis un peu déprimée.

La Saint-Valentin est dans exactement deux semaines et je n’ai pas de chum.

Je sais que ce n’est vraiment pas nécessaire, que mon bonheur ne devrait être aucunement lié au fait que je sois amoureuse ou non.

Mais vu que ça ne s’est pas super bien terminé avec Mathieu, l’approche de la Saint-Valentin me donne un arrière-goût de pelure d’orange dans la bouche.

Comme pour me rappeler que l’amour, ça peut être super beau, mais aussi super laid.

Il me semble que c’est la seule fête commerciale à date fixe qui n’est pas pour tout le monde. Noël, le jour de l’An, Pâques, l’Halloween, tout le monde peut y participer.

La Saint-Valentin, c’est la fête des amoureux. Qu’est-ce qui arrive si t’en as pas ?

C’est de la discrimination !

Et que dire de la mascotte de l’événement ?

Noël, c’est un grand-papa souriant, bien en chair et vêtu d’un habit rouge.

Pâques, c’est un lapin qui pond des œufs en chocolat (hum, suspect).

Pour la Saint-Valentin, on a droit à un joufflu exhibitionniste qui a des ailes d’ange et une arme possiblement mortelle !

Tu parles d’un bizarre.

Fils de deux planètes, Mars et Vénus (comment ça copule, un astre ? Je veux voir ça !), Cupidon, un dieu, tombe amoureux d’une simple mortelle du nom de Psyché, une princesse qui vit dans un château. Cupidon va vivre avec elle, mais lui demande de ne jamais le regarder ni de deviner son identité.

Les sœurs de Psyché, affreusement jalouses, la persuadent qu’il cache son visage parce qu’il est un pou géant attendant le moment propice pour sucer tous ses organes.

Une nuit, Psyché s’approche de Cupidon avec une lampe. Elle découvre alors qu’il s’agit du plus bel homme qui soit, un mélange subtil entre le colonel Kentucky et Harry Potter.

Une goutte d’huile de sa lampe tombe alors sur lui ; Cupidon se réveille et, furieux d’avoir été trahi, décampe sans faire son lit.

Psyché part à sa recherche. Après plusieurs épreuves dont des problèmes administratifs au bureau des passeports, elle monte sur une tour, désespérée, pour se jeter dans le vide et en finir.

Mais la tour lui parle (sans blague) et la convainc de poursuivre sa quête.

Finalement, elle et Cupidon sont réunis.

Quelque temps plus tard, Psyché accouche d’une fille qu’elle et son amoureux baptisent, dans un moment d’exquise inspiration, Majuscule.

Dès que Majuscule met le pied à l’école, la cruauté du milieu scolaire la rattrape ; des camarades de classe la surnomment, insulte suprême – j’ai du mal à l’écrire tellement c’est abominable –, ils la surnomment donc, gulp ! Minuscule.

Horrifiés par une injure aussi grotesque, les parents changent son prénom pour Volupté.

C’est pas mal mieux.

J’avoue que j’ai un petit peu modifié l’histoire ; Mars et Vénus sont des dieux, je trouvais juste drôle l’idée de deux planètes qui pouvaient frencher, mais le reste est authentique.

Voyons l’origine de la fête de la Saint-Valentin. Tu vas voir, public en délire, c’est beaucoup moins pété que l’histoire de Cupidon.

Ça se passe dans le temps des Romains (Ier siècle après Jean-Claude).

Entre le 13 et le 15 février, on célébrait le festival du Lupercalia qui avait pour but de chasser les démons et de purifier la ville.

L’activité principale consistait à sacrifier des chiens et des chèvres dont les hommes utilisaient ensuite les peaux pour fouetter les femmes.

Ah oui, tout le monde était saoul et nu.

(Cela ressemble étrangement à certains Noëls passés dans la famille de mon père.)

À noter : l’empereur Claudius II (Claudius I a tellement eu de succès qu’il y a eu une suite) a fait exécuter à deux années différentes lors de son règne (IIIe siècle) des hommes nommés Valentin le 14 février.

(Exécuter des hommes prénommés Valentin, c’est plus dans la famille de ma mère que ça se passe.)

Comment, environ 1 700 ans plus tard, l’être humain en est-il venu à dénaturer et pervertir de si belles traditions en offrant des roses et du (beurk) chocolat (beurk) ?!

DÉCADENCE !

Après, on dit que l’homme a énormément évolué depuis l’Antiquité. Balivernes !

(L’homme n’a pas évolué, mais la femme, si... Hé, hé, hé...)

(…)

Pour l’instant, je pense que je ne suis pas mûre pour avoir un chum.

Même si je voyais Cupidon lancer des flèches ardentes à gauche et à droite et que je lui faisais de grands signes pour qu’il m’atteigne, ça ne fonctionnerait pas.

Il s’approcherait, me jetterait un coup d’œil et me dirait, l’air dégoûté :

– Dégage, espèce de looser ! Y’a personne qui t’aime. Même si j’essayais de te lancer une flèche, t’es tellement repoussante qu’elle va faire demi-tour en couinant de terreur.

Et moi de lui rétorquer :

– Hey, le pigeon grassouillet, t’as un p’tit swizzle !

C’est pas super mature comme réplique, mais j’aurais au moins l’impression d’avoir le dernier mot.

(…)

Tant de choses à écrire et si peu de temps pour le faire !

Fred vient de me demander si j’avais écrit « son » scénario sur l’histoire d’une petite personne qui devient géante et qui détruit tout sur son passage.

Hey, Brise du printemps (plutôt le contraire), je ne suis pas un robot !

En plus, il veut tourner un film de 90 minutes pour « pouvoir faire le tour des festivals avec et avoir accès aux plus grandes salles des cinéma ».

Toujours aussi réaliste, mon grand frère.