MAXIME
MARDI SOIR
Nélio n’est pas venu au collège. Sarah et moi, on l’a attendu et puis on a commencé à travailler à deux. On pensait qu’il prendrait le train en route, mais on ne l’a pas vu du tout. Même le cours de math de seize heures, il l’a séché. Moi, je n’ai jamais entendu parler d’un rendez-vous chez le dentiste qui dure cinq ou six heures ! Surtout lorsqu’on n’a pas mal aux dents et pas d’appareil ! Quand Nélio dit des mensonges, ça se voit tout de suite : il lève le sourcil gauche.
À midi, à la grille de la cour, je l’ai suivi du regard. Et ce que j’ai vu a confirmé mes doutes. Nélio a longé le trottoir et il a traversé la rue. Ce n’est pas chez un dentiste, c’est au café de la Couronne qu’il est entré, ce menteur ! Il paraît qu’il y a de bons flippers dans ce bar…
Ce week-end, Monsieur prétendait avoir trop de travail pour venir me voir. Et lundi, il nous a carrément évités, Sarah et moi. Il nous snobait comme si on n’était plus assez bien pour lui.
Je ne sais pas ce que Nélio me cache. On est copains depuis le CP et on a toujours pu compter l’un sur l’autre. Quand j’ai eu un problème avec un élève de troisième qui me bousculait tout le temps, Nélio m’a accompagné chez la conseillère principale d’éducation. Le grand a été convoqué et puis tout s’est arrangé. Je peux sans doute l’aider. Alors, pourquoi est-ce qu’il ne me parle pas ? Ça ne sert à rien de garder les choses pour soi. Peut-être que ses parents vont divorcer, peut-être qu’il a une maladie grave, peut-être qu’il ne peut pas parler, va savoir.
Sarah pardonne tout à Nélio. À ses copines, elle jure qu’elle n’est pas amoureuse de lui. Mais aucune ne la croit. C’est simple : quand Sarah parle de Nélio, ses mots ressemblent à des chamallows. Ils sont roses, rebondis et tout sucrés. Mais aujourd’hui, elle a plutôt donné dans le bonbon plat et acide. Elle, d’habitude si douce, je l’entends encore :
— Nélio a intérêt à arriver en cours de dessin avec sa partie d’exposé terminée ! En plus, j’ai besoin de ses bandes dessinées pour travailler. S’il ne me les apporte pas jeudi, je ne lui adresse plus la parole !
Tout à l’heure, à dix-neuf heures, silence radio. Nélio ne m’avait toujours pas téléphoné. Aucune explication, aucune excuse. Alors, pour l’appeler, j’ai prétexté les BD de Sarah et j’ai posé des questions. J’ai cru que j’avais réveillé le dragon rouge.
— Un conseil, Maxime : lâche-moi et mêle-toi de tes affaires ! a-t-il soufflé dans le téléphone avant de me raccrocher au nez.
Il est dérangé, ce mec ! Non mais, pour qui il se prend ? C’est d’accord, je vais me mêler de mes affaires. Je ne lui dis plus un mot. Je ne veux plus rien savoir de lui. Nélio-le-Lâcheur n’aura même pas droit à un regard.