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Donc, je vais à la Bibliothèque, la Bibliothèque Nationale, pour compulser la liste des officiers de l'armée de Montcalm en 1756, à Québec ; je veux voir aussi le dictionnaire de Moréri, et celui du Père Anselme, etc. Je lis tous les documents concernant la maison royale de Bretagne, mais je ne trouve rien là non plus. Et finalement à la Bibliothèque Mazarine, une aimable vieille dame, Mme Oury, la bibliothécaire en chef, m'explique patiemment que les Nazis ont bombardé et brûlé tous les documents français en 1944, chose que j'avais oubliée dans l'ardeur de mon zèle. Pourtant je sens qu'il devrait y avoir quelque chose en Bretagne. – À coup sûr, l'existence de Kérouack devrait être signalée en France, s'il y a des traces de son existence au British Museum de Londres ? – Je fais part de mes réflexions à la vieille dame.

Vous n'avez pas le droit de fumer, même dans les toilettes, à la Bibliothèque Nationale ; et impossible de glisser un mot aux secrétaires. Et ils sont l'objet d'une fierté nationale, les érudits qui sont tous assis là, à recopier des livres. Et on ne laisserait même pas entrer John Montgomery (John Montgomery qui a oublié son sac de couchage en grimpant au Matterhorn, et qui est le meilleur bibliothécaire et érudit d'Amérique ; et qui, de surcroît, est anglais). –

Mais pour le moment, il faut que je rentre pour voir ce qu'il advient des gentes dames. Mon chauffeur de taxi est Roland Sainte-Jeanne-d'Arc-de-la-Pucelle, qui me dit que tous les Bretons sont corpulents comme moi. Les dames m'embrassent sur les deux joues, à la française. Un Breton nommé Goulet se soûle avec moi. Jeune, vingt et un ans, les yeux bleus, les cheveux noirs ; et soudain il attrape Blondie et réussit à la terrifier (avec l'aide conjuguée des autres), c'est presque un viol, auquel moi et l'autre Jean, Tassart, nous mettons fin en criant : « Arrête !

– Du calme », j'ajoute.

Elle est trop belle, les mots sont impuissants. Je lui dis : « Tu passes toutes tes journées dans ce maudit institut de beauté ?

– Oui. »

Et moi, je m'en vais dans les fameux cafés des boulevards, et je m'assois pour regarder Paris défiler, les jeunes élégants, les vélomoteurs, les pompiers en visite, venus de l'Iowa.