V

 

Les gendarmes d’Issoire ont beaucoup de mal à comprendre la situation. Ils essaient d’abord de vous dissuader de déposer chez eux, pour retourner à Massiac. C’est dans le département où a été commis le délit supposé qu’il faut déposer. Ils appellent leurs collègues de Massiac. En effet, il y a là-bas des gens en train de porter plainte pour une agression, il faudrait s’y rendre. On leur explique la terreur des enfants, la fatigue du petit, ils finissent par se laisser fléchir. Pas facile non plus de leur faire comprendre ce qui s’est passé, comment, pourquoi, tout leur échappe. Ils prennent note, pour le principe, l’air ennuyé, de toute façon il faudra tout recommencer.

La journée se termine dans le dernier hôtel de Clermont qui a encore une chambre, le Mercure, et c’est un curieux choc de civilisations, dans la même journée, entre ce que vous venez de vivre, dans les montagnes, qui vous a ramenés à une violence archaïque, et le confort feutré de l’hôtel.

Le lendemain, pendant qu’un garagiste remet tant bien que mal la voiture en état de rouler, tu appelles Éric Naulleau, ton éditeur de L’Esprit des Péninsules. Il en reste abasourdi. En deux ans, ça lui fait beaucoup de violence avec le même auteur. L’année précédente, la férocité ordurière avec laquelle la directrice du Monde des livres avait répliqué à quelques lignes satiriques dans La Littérature sans estomac l’avait un instant ahuri, en dépit de son tempérament peu impressionnable. Et voilà que ça recommence, non plus à Saint-Germain-des-Prés, mais au fond de l’Auvergne. Il ne comprend pas, pas plus que les gendarmes d’Issoire, sur un autre mode. Il était convaincu d’avoir publié un hommage émouvant à la paysannerie, à un village, et voilà que ceux auxquels on est censé avoir rendu hommage manquent de lui massacrer son auteur. Il parle de venir sur place, de réunir les gens pour une séance d’explications. Ce qui s’est passé lui paraît impossible, il y a forcément un moyen d’arranger les choses. Il ne sait pas à quel point les haines, là-haut, peuvent devenir inexpiables, loin de toute explication rationnelle, comme ces vendettas qui se poursuivent sans que les protagonistes en aient gardé en mémoire la cause originelle. Il ne sait pas qu’il n’y a plus de retour en arrière ni d’arrangement ni d’explication, c’est terminé, pour des générations.

Il faut rapidement appeler la gendarmerie de Massiac. Après les dépositions des assaillants, ils sont convaincus que c’est toi l’agresseur. D’après eux, tu te serais jeté sur eux dès ton arrivée. Selon certains, tu aurais même brandi un couteau.

« On attendait votre appel, monsieur », te dit le gendarme au téléphone d’un ton de reproche. Il ajoute que tu as sévèrement blessé Henri. Les femmes se sont fait faire des certificats médicaux, des huit jours d’incapacité, tout le nécessaire. Bref, dans cette situation, avec tous les témoignages contre vous de familles différentes et les blessures sérieuses dans l’autre camp, tu risques une condamnation, qui pourrait être assez lourde.

Ce qui te sauve, ce sont les dépositions de ceux qui ont assisté aux événements depuis le jardin d’Élise. Élise elle-même a tenu à descendre à la gendarmerie. Le témoignage de la doyenne du village, avec ses quatre-vingt-treize ans, pèse lourd. Il lui faut beaucoup de courage, à Élise, pour affronter la haine définitive de tout un village, dans un lieu où elle a toujours vécu, et où ceux contre qui elle va témoigner forment son unique société, tous les jours de l’année. Annie, sa fille, qui ne revient au village que pour les vacances, et Bertrand, son gendre, déposent aussi. L’histoire écœure tellement Bertrand qu’il ne reviendra pratiquement plus par la suite.

Tu prends la mesure, petit bonhomme, de la déflagration produite par les quelques dizaines de pages publiées par un écrivain obscur chez un petit éditeur. Ce n’est pas seulement ta vie qui s’en trouve changée, mais c’est, définitivement, celle de tout le village, et d’une bonne partie de ceux qui le fréquentent. Toi qui ironisais volontiers sur ceux qui débitaient de grands discours sur le pouvoir de la littérature...

L’effet des témoignages est radical. Les assaillants passent d’un coup du statut de victimes à celui de coupables. Garde à vue pour tout le monde.

Il faut encore déposer, et redéposer. Chez les flics du 11e arrondissement de Paris, où tu habites. Tu es reçu par un officier de police, qui peine à la fois à comprendre ce que tu tentes de lui expliquer et à le transcrire de manière cohérente. Tu le vois transpirer sur son clavier, et ses questions t’inquiètent quant à la teneur de ce qu’il va te faire dire, qui comptera pour le procès.

« Donc, vous déclarez que vous avez écrit un livre qui est diffamatoire ?

— Non, en fait je voulais dire que j’ai publié un livre qui n’avait pas d’intention ni de contenu diffamatoire.

— C’est le contraire, alors ?

— Euh, c’est ça, oui, le contraire. Excusez-moi, je me suis peut-être mal exprimé.

— Bon. Alors on corrige. »

Il semble un peu las de toutes ces finasseries. Il s’emmerde visiblement, cet homme. Tu sais que tu t’es parfaitement bien exprimé, mais tu es bien obligé de ménager la susceptibilité du fonctionnaire de police. Il te considère comme un civil qui vient débiter des histoires peu claires et sans intérêt, tu le prends pour un abruti. Mais l’abruti a le pouvoir. Ne pas le brusquer. Tu parviens quand même, au prix de reptations presque insensibles en direction de son bureau et de quelques diversions verbales à te trouver à côté de lui, légèrement de biais, en vue de l’écran de l’ordinateur et de ce qu’il est en train d’y écrire. Il semble accepter tacitement, par une indulgence que tu apprécies à sa juste valeur, ta présence et ton coup d’œil.

Le spectacle est accablant. Une sorte de Nagasaki syntaxique, aggravé d’un Hiroshima orthographique. Pour l’orthographe, tu n’oses pas trop intervenir, soucieux de l’honneur de la police française, laquelle pourrait se gendarmer d’une remarque trop directe sur son analphabétisme. Tu croyais que depuis Courteline et Coluche les choses avaient changé. Elles sont peut-être pires. Tu peines à t’y retrouver parmi les phrases entortillées, bourrées de négations acrobatiques, de relatives en apesanteur. On dirait le style d’un immigrant moldave en pleine alphabétisation qui tenterait de se lancer dans une narration proustienne. Difficile de retrouver là-dedans un écho un peu clair de ce qui s’est passé. Tu parviens, à force d’exquises précautions verbales, à obtenir quelques modifications, mais le travail de réécriture serait de toute manière trop grand pour produire une copie lisible.

Et ce type prend des dépositions toute la journée. Et il doit être quelque chose comme inspecteur. Tu penses à tous ces gens qui viennent remettre leur vie entre ses mains, souvent des gens simples, paralysés par l’autorité, qui n’oseraient jamais suggérer un changement à un policier, ou qui tout simplement n’ont pas eux-mêmes une maîtrise suffisante de la langue pour se rendre compte de ce qu’on leur fait dire. Combien d’erreurs judiciaires, combien de drames parce que l’école ne permet même plus aux fonctionnaires de l’État de connaître leur propre langue ?

Les gendarmes de Massiac viendront jusqu’à Paris, pour interroger les enfants sur place, dans l’appartement. Ils se retirent avec chacun d’eux dans leur chambre. Ce qu’ils en tirent est heureusement beaucoup plus compréhensible que le récit des flics.

La justice se retrouve donc avec deux séries de récits complètement contradictoires, et quelques certificats médicaux. D’un côté, pour les médecins :

Jourde Armand, 15 mois : excoriations multiples. Points d’impact de bris de verre sur la joue gauche, l’avant-bras gauche, la main droite.

Jourde Raphaël, 11 ans : traumatisme psychologique.

Jourde Pierre : points d’impact par bris de verre sur les mains. Contusions de la cuisse droite.

De l’autre :

Maranne Claudine : hématome de la pommette jugale droite.

Maranne Christine : contusion avec hématome sous-cutané musculaire de la face antérieure du bras droit. ITT de 15 jours.

Vazeille Geoffrey : palpation douloureuse de la pommette gauche avec discrète rougeur, un hématome de la face antérieure de la jambe droite, des lésions multiples et superficielles de la face antérieure de l’avant-bras droit, une ITT de 8 jours est à envisager.

Vazeille Henri : acuité de l’œil gauche diminuée à 4/10, hématome péri-orbital en lunettes, plaie médio-frontale suturée par un point de 1 cm, hématome au-dessus de la racine du nez de 2 × 4 cm, plaie à un travers de doigt sous la glabelle, suturée par deux points, mesurant 1 cm, plaie cutanée complexe du canthus interne, suturée en deux plans par 16 points superficiels et 3 points profonds, plaie conjonctivale surajoutée à 9 h, diminution de l’acuité visuelle de l’œil gauche à 4/10 sur un monophtalme, zone ecchymotique de 5 × 4 cm en région jugale droite, hématome de 3 cm de diamètre de la branche horizontale (tiers moyen) avec œdème.

Extraits des dépositions :

Maranne Claudine : Le 31 juillet 2005, vers 16 h 45 à peu près, j’arrivais avec ma famille du lieu où j’ai des bêtes. J’étais dans la voiture de ma fille... Alors que nous arrivions dans le village on a croisé M. Jourde Pierre, qui était à pied... Ma fille Sylvie lui a demandé d’un ton sec « qu’est-ce que tu viens faire là. On t’avait dit de ne plus revenir dans le village... ». À cela M. Jourde a répondu : ce n’est que des balivernes. À Lussaud, vous êtes tous des nuls et super nuls... Puis après cela M. Jourde m’a donné un coup de poing au niveau de l’œil... j’ai trébuchée et je me suis retenue par la voiture... je voyais des étoiles. Ma fille Christine s’est interposée en lui disant : « qu’il devrait avoir honte de battre ma maman »... À cela M. Jourde Pierre a dit à ma fille : « toi aussi tu en veux un » et il lui a donné un coup de poing sur le bras et l’épaule. Suite à tout cela et dans les minutes qui ont suivi M. Vazeille Henri est arrivé en voiture. Il a stationné sa voiture sur le côté et il est sorti de sa voiture. Il s’est adressé à M. Jourde Pierre en lui demandant s’il n’avait pas honte de battre des femmes. M. Jourde Pierre lui a dit : « Toi tu fermes ta gueule ou tu vas en attraper pareil. » À ce moment-là M. Jourde Pierre a donné un coup de poing dans la tête de M. Vazeille Henri. Suite à ces faits, M. Vazeille Henri est tombé sur le sol. Lorsqu’il s’est relevé, M. Jourde Pierre lui a donné un second coup de poing sur la tête... Ma fille est allée pour crier sa famille et Mme Vazeille Josiane, le petit fils Geoffrey Vazeille et le fils Vazeille Denis sont arrivés.

Question : Qui a jeté des caillous ou porté des coups sur la voiture de M. Jourde Pierre ?

Réponse : Je ne sais pas, je n’ai rien vu.

 

Maranne Christine : Je suis arrivée au village à bord de mon véhicule en compagnie de ma mère. M. Jourde était sur la route, je me suis arrêtée à côté de lui, j’ai baissé ma vitre et je lui ai demandé ce qu’il venait faire dans le village après toutes les cruautés et les monstruosités qu’il avait écrit sur ma famille et sur ma fille Léna. M. Jourde a répondu qu’à Lussaud on était tous des nuls et que c’était des balivernes... M. Jourde a frappé ma mère au niveau de sa pommette droite et ma mère a été sonnée... M. Vazeille Henri nous a défendu en disant à M. Jourde : « qu’est-ce que tu fais, qu’est-ce que tu fous là » et M. Jourde lui a donné un coup de poing dans son œil qui voit clair. M. Vazeille est tombé et saignait beaucoup au niveau de l’œil.

Vazeille Geoffrey : J’ai vu que M. Jourde Pierre levait la main sur ma mère et je me suis mis devant lui pour m’interposer et c’est là que j’ai pris un coup de poing. Ensuite mon oncle Maranne Gérard est arrivé et Pierre a dû vouloir le frapper. Mon oncle a évité le coup mais n’a pas frappé Pierre.

Question : une personne entendue par nos services prétend vous avoir vu donner un coup de poing avec une pierre sur la vitre de la voiture de M. Jourde Pierre. Qu’en est-il exactement ? Réponse : C’est faux...

Question : Qui a jeté des cailloux ou porté des coups sur la voiture de M. Jourde Pierre ?

Réponse : Je ne sais pas. Pour ma part, je n’ai pas vu de coups partir sur la voiture de M. Jourde Pierre, comme, je n’ai vu personne jeter des cailloux sur cette voiture... Vous venez de me montrer les photographies des dégâts visibles sur le véhicule de M. Jourde Pierre. Sincèrement, j’ignore qui a commis tous les dégâts sur cette voiture...

Question : pouvez-vous nous dire les raisons pour lesquelles cette querelle a pris naissance ?

Réponse : C’est à cause d’un livre. Il raconte l’histoire du village en disant des histoires qu’il ne devrait pas dire. Je n’ai jamais lu ce livre.

Question : Que reconnaissez-vous avoir fait dans cette affaire ?

Réponse : Je reconnais avoir heurté involontairement la voiture de M. Jourde Pierre alors que ce dernier fonçait sur moi en reculant. C’est tout ce que j’ai fait. Par contre M. Jourde Pierre m’a donné deux coups de poing et m’a reculé dessus avec la voiture, j’ai fourni un certificat médical pour ces blessures.

Question : Pouvez-vous préciser l’endroit exact où cette altercation s’est passée ?

Réponse : Cela s’est passé en dehors de la propriété de M. Jourde Pierre. À aucun moment nous ne sommes rentrés dans la cour de la maison de M. Jourde Pierre.

 

Vazeille Henri : Il est fou furieux, comme je l’ai déjà dit je n’ai fait que lui demandé ce qu’il faisait là. Il m’a répondu « t’occupe pas de ça » et il m’a frappé, plusieurs fois.

 

Maranne Gérard : C’est moi qui ai accroché cette pancarte à l’entrée du village en face de mon tas de fumier. Je l’ai fait pour lui montrer que mon tas de fumier n’est pas plus sale que le reste. Sur cette pancarte j’avais marqué : « bienvenue à Charletu le poète ». Par Charletu, il faut entendre le mot Charlot... Cette altercation est dûe au livre que M. Jourde Pierre a écrit sur les gens du village. J’ai lu quelques pages du livre et il est vrai qu’il raconte des choses horribles. Certaines concernent mes parents, même s’ils ne sont nommés personnellement. Pour ma part il parle de mon tas de fumier que j’entrepose à l’entrée du village et qui sali celui-ci. Mais de la façon dont les phrases sont tournées on pourrait croire que c’est moi qui est sale. Mais je n’en suis pas sûr, je relirai le livre pour savoir si je dois porter plainte pour diffamation ou non.

 

Andraud Lucas : Je connais M. Jourde Pierre depuis toujours. J’ai toujours eu de bonnes relations avec lui. Je ne l’ai pas revu depuis la parution du livre. J’ai lu ce dernier, il est vrai qu’il y a une quinzaine de pages qui, je pense, ont choqué certaines personnes. Le livre n’est pas vraiment diffamant, il relate principalement la vérité, mais certains passages ont été arrangés voir inventés. Le livre parle de ma famille mais ce qui en est écrit n’est pas choquant.... Comme je ne voulais pas me mêler de leur affaire, je suis rentré directement chez moi sans faire attention à ce qu’ils pouvaient dire ou faire. Une fois chez moi j’ai attendu que cela se passe...

Gaux, Élise : J’habite Lussaud commune de Laurie depuis que je suis mariée en 1937... Je connais M. Jourde Pierre depuis qu’il est tout petit. Nous avons toujours été en bons termes avec ses parents et avec lui. J’ai lu le livre qu’a écrit M. Jourde, et je n’ai rien trouvé d’injurieux à l’intérieur, ni de mauvais... Je savais que M. Jourde devait revenir au village le 31 juillet 2005. Pour moi tout le village le savait... À un moment, j’ai entendu les enfants de M. Jourde criaient. Je suis sortie de la maison pour voir ce qui se passait. J’ai vu M. Jourde, dans sa cour, entouré de plusieurs personnes... Toutes ces personnes étaient en furie, elles essayaient de s’en prendre à M. Jourde et elles l’insultaient « salaud, ordure, fumier ». J’ai vu ces personnes taper à coups de pied sur la voiture de M. Jourde. J’ai vu également M. Vazeille Geoffrey casser la vitre arrière gauche du véhicule de M. Jourde avec une pierre quand ce dernier tentait de sortir de sa cour par un petit chemin... Je crois que M. Jourde était attendu car toutes ces personnes sont arrivées presque au même endroit, au même moment.

 

Gaux, Colette : J’ai vu Mme Maranne Claudine et Christine devant le garage de M. Jourde. Ce dernier était devant son garage et ces femmes l’insultaient : « ordure, salaud, bâtard, ton père n’est pas enterré à Lussaud mais à Laurie ». M. Jourde n’a pas réagi de façon violente mais il n’y était pas indifférent... De là est arrivé Henri Vazeille en voiture... À la suite d’un échange de coups Henri Vazeille a chuté... En voyant M. Henri Vazeille, je me suis portée sur lui pour le secourir. Il saignait beaucoup. Lucas Vazeille est arrivé en même temps que moi avec une bassine d’eau et un gant de toilette. Voyant que cela ne suffisait pas, j’ai demandé à ma sœur d’aller chercher de l’eau oxygénée... J’aperçus ensuite un pugilat dans la cour de M. Jourde, devant sa maison... Je tiens à préciser que les injures envers les enfants, âgés de 14 et 11 ans, étaient à caractère racial en l’espèce « bicot ». Les enfants de M. Jourde sont d’une maman dont la famille est d’origine des DOM-TOM. Suite aux injures qui leur étaient adressées et les violences dirigées envers leur père, les enfants sont devenus complètement paniqués, en particulier Raphaël, 11 ans, dont je me suis occupée devant son état de détresse...

Gaux Annie, épouse Vialat : Elles se sont arrêtées brutalement à sa vue, elles sont descendues et ont commencé à l’insulter : « ordure, salaud, fumier, bâtard, de toutes façons ton père n’est pas enterré ici mais à Laurie, c’est « CHARLETU ». M. Jourde a réagi calmement en demandant à ces deux personnes de se calmer... J’ai entendu Mme Maranne Claudine dire à M. Jourde : « tu as laissé ta noire pour prendre une blanche. La pauvre femme elle ne sait pas ce que tu vaux sinon elle ne t’aurait pas pris ». Je voudrais insister sur la violence de la scène, celle-ci était très forte... Comme mon mari, je crains des représailles suite à mon témoignage.

 

Vialat Bertrand : J’ai vu une voiture s’immobiliser à la hauteur de M. Jourde et en sont sorties Mme Maranne Claudine et sa fille... elles l’on insulté copieusement, « salaud, bâtard, t’as osé revenir, ton père n’est pas enterré là mais à Laurie, il a été enterré comme un chien et d’autres »... Là est arrivé M. Vazeille Henri en voiture, qui le voyant a essayé de l’écraser contre la porte de sa grange... Vazeille Henri est sorti avec un bâton à vaches et il est allé vers M. Jourde et a commencé à le frapper avec son bâton. M. Jourde a esquivé plusieurs coups, lui a demandé de s’arrêter, qu’il ne voulait pas le frapper. Il a prévenu M. Vazeille, lequel a continué à frapper. M. Jourde a donné un coup de poing, je précise un seul, au visage... Les deux femmes l’ont suivi dans sa cour, rejointes par M. Vazeille Geoffrey, Denis et Josiane ainsi que M. Maranne Gérard... Une nouvelle bagarre a commencé... tout cela s’est passé avec une violence incroyable, une sauvagerie de la part des personnes agressant M. Jourde... Je crains très sérieusement des représailles à la suite de mon témoignage...

Plainte

Le 1er 02 2005

Monsieur le Procureur

 

Je viens par la présente porter à votre connaissance une série de faits qui nous amènent, mon mari, ma fille et moi, à porter plainte à l’encontre de M. Pierre Jourde.

En effet, il y a quelques semaines, nous avons appris la parution et la mise en vente d’un livre intitulé « Le Pays perdu »...

Les traits sous lesquels on nous dépeint, les actes que l’on nous prête sont tout à la fois injurieux et diffamatoires.

À titre d’exemple (page 45 et suivantes)

« [...] Ils forment un couple spectaculaire, sur le tracteur, lui sec et efficace et elle sur le siège passager souveraine et débordante sous le soleil »

« [...] Le vin rouge a augmenté ses biberons et à cinq ans elle aime boire son petit verre de crème cassis »...

Vous prenez comme avocat Jean-Paul Carminati, qui est aussi un romancier et un ami. Il tente de faire qualifier les faits comme tentative d’assassinat. C’est sans doute ce dont il s’agissait vraiment, même si cela n’était pas l’intention consciente au départ. Tu l’as senti, le meurtre était dans l’air, dans l’excès de la haine, dans l’atmosphère de lynchage collectif, dans les caillasses lancées au hasard. Seront finalement retenues les violences en réunion, avec la circonstance aggravante qu’elles ont été commises sur des mineurs, et les injures à caractère racial. Et c’est ainsi que vous vous retrouverez, un autre jour d’été, après deux ans, au tribunal d’Aurillac.