CHAPITRE SEIZE

 

 

Service des urgences du CHU de Montpellier.

 

Après une opération de cinq heures, Mélodie luttait toujours.

Elle était entre la vie et la mort. Le pronostic vital était toujours engagé.

Les chirurgiens avaient été très factuels, mais sans laisser de faux espoirs.

« L’opération s’est bien déroulée. La victime est stabilisée, mais son cas reste préoccupant. Elle a perdu beaucoup de sang. Les prochaines 24 heures seront déterminantes. » Affirma le chirurgien.

 

***

 

Lorsque Mélodie a vu dans les yeux de sa mère que celle-ci allait vraiment tirer, par réflexe autant que par amour, elle a serré son fils contre elle et simultanément pivoté sur elle-même, afin de protéger son petit garçon.

Ce faisant, elle a exposé ainsi son dos aux tirs.

Elle a été touchée dans le dos par deux projectiles qui sont venus se loger dans ses poumons.

L’un d’eux près du cœur, c’est celui qui a donné le plus de fils à retordre à l’équipe chirurgicale.

Dans son malheur, Mélodie avait eu la chance qu’aucune des balles ne vienne perforer une artère ou une veine vitale. Elle avait cependant perdu beaucoup de sang.

Les médecins l’avaient plongée dans un coma artificiel afin de lui éviter des souffrances inutiles et lui permettre de récupérer plus facilement.

 

***

 

Derrière la vitre des urgences, son mari Julien, les deux sœurs et Benoît étaient restés toute la journée dans l’angoisse des résultats de cette opération.

Julien avait à nouveau son mobile collé à l’oreille. Il prenait des nouvelles de son fils, confié aux bons soins de sa tante à Lodève.

Au cours de cet épisode tragique, Julien avait assuré !

Si Mélodie s’en sort, cela sera grâce à lui. Dès qu’ils entendirent les coups de feu, Julien et Benoît, laissèrent tomber les victuailles et se précipitèrent sur Jackie pour la désarmer.

 

Celle-ci, hébétée par son geste se laissa faire sans résister.

 

Julien prit la direction des opérations.

Il confia la surveillance de sa belle-mère à Benoît, demanda à Daphné de s’occuper de sa femme Mélodie, et à Juliette de prendre le petit Alex terrorisé et de l’emmener dans la chambre pour le calmer.

Lui, allait se charger d’alerter les secours.

Heureusement, la ligne terrestre était rétablie. Julien connaissait tout le monde à Lodève.

Il expliqua la situation aux gendarmes qui commandèrent un hélicoptère sans attendre.

 

Une demi-heure plus tard, les premiers secours arrivaient et au bout de l’heure, Mélodie entrait en salle d’opération au CHU de Montpellier.

 

Jackie quant à elle avait été transférée à la gendarmerie de Lodève.

 

***

 

À la fin de cette journée, ils étaient tous épuisés.

Mélodie luttait pour sa vie et Daphné était nerveusement explosée.

Benoît et Juliette étaient autour d’elle et la serraient très fort.

Daphné avait pris à cœur sa mission de sauver Mélodie.

Elle était restée allongée sur le canapé, sa sœur dans les bras et, appuyait sur les plaies pour ralentir l’hémorragie. Elle lui avait parlé sans s’interrompre afin que Mélodie ne perde pas conscience. Maintenant Daphné subissait le contrecoup et délirait.

Ces habits imprégnés du sang de sa sœur, étaient poisseux et l’odeur forte d’hémoglobine était insupportable.

 

Une infirmière voyant Daphné dans cet état, la fit allonger sur un lit.

Avec l’aide Juliette, elles la déshabillèrent.

— Il faut lui enlever ces habits imbibés de sang et la laver afin qu’elle ne sente plus cette odeur dit l’infirmière. Je vais prévenir un médecin afin de lui donner un calmant. Elle est à bout de nerfs, effondrée de fatigue.

Au grand soulagement de Benoît et de Juliette, elle s’endormit quasi instantanément.

— Ce n’est pas la peine de rester, affirma un interne en s’adressant aux deux garçons et à Juliette. Allez-vous reposer, il ne se passera rien avant demain matin. Tout le monde sera plus reposé et nous y verrons plus clair. Pour Mélodie, n’ayez pas peur, aux soins intensifs nous la surveillerons en permanence.

 

***

 

À contrecœur, ils décidèrent tous les trois de suivre ce conseil.

Dans un hôtel proche, ils prirent une chambre de trois lits. Ils sautèrent le repas, le cœur n’y était pas et d’ailleurs personne n’avait faim.

La charge émotionnelle de la journée les avait épuisés. Ils dormirent comme une masse.

À 6 heures du matin, ils furent réveillés par une des tantes de Julien venue de Lodève.

Elle avait apporté des vêtements propres pour Daphné et quelques habits pour les uns et les autres.

Sans perdre de temps avec un petit-déjeuner, ils foncèrent à l’hôpital.

 

***

 

Aux urgences, ils retrouvèrent Daphné qui, dès son réveil était allée voir sa sœur.

 

Les nouvelles étaient bonnes.

Mélodie avait passé une nuit très tranquille et l’infirmière leur dit que le médecin venait de passer. Il avait confirmé qu’elle se rétablissait bien et que les paramètres vitaux étaient redevenus normaux.

 

Elle devrait être tirée d’affaire.

 

Juliette, submergée par l’émotion après une journée et une nuit d’angoisse, ne put retenir ses larmes et se mit à pleurer sans retenue, contaminant toutes les personnes présentes.

Tous souhaitaient maintenant se rapprocher de Mélodie, la toucher pour sentir la vie revenir en elle.

 

L’infirmière cependant leur refusa l’accès à la chambre. Mélodie était encore dans le coma.

L’entourer ne servirait à rien, il fallait surtout éviter de la fatiguer inutilement.

Julien insista cependant en expliquant que sa femme avait fait un bouclier de son corps pour protéger son fils mais qu’elle ne savait pas que son fils était hors de danger.

— C’est important, insista Julien.

— Elle est en coma artificiel mais il arrive que certaines personnes donnent des signes, dit l’infirmière. Bon OK. Je vais voir avec le médecin de permanence.

Quelques minutes plus tard, elle revint avec le sourire et proposa :

— Vous pouvez y aller, mais pas plus de deux minutes et uniquement son mari.

 

***

 

Julien revêtit une blouse, une charlotte et se lava soigneusement les mains avec un produit désinfectant.

Il franchit la porte précautionneusement sur la pointe des pieds de peur de faire du bruit.

Sa femme était allongée dans un lit spécial. Elle était entourée de douzaines d’appareils dont certains faisaient des petits bruits réguliers.

 

Mélodie intubée et perfusée de tous côtés était méconnaissable.

Il s’assit à côté d’elle au niveau de sa tête et lui prit la main. Il la caressa longuement.

Quand l’infirmière revint pour lui dire de quitter la pièce, il s’approcha de Mélodie pour lui faire une bise sur la joue et, tout en serrant la paume de sa main, il lui glissa doucement à l’oreille.

— Alex va bien !

À ce moment, il sentit la main de sa femme se contracter légèrement et aperçut une larme couler sur sa joue.

 

Il n’avait pas conscience de la joie qu’il venait de faire émerger dans l’esprit embrumé de sa femme.

Mélodie avait sauvé son fils, c’était tout ce qui comptait. Elle allait maintenant pouvoir se consacrer pleinement à son rétablissement et se battre encore plus fort.

 

L’infirmière sortit précipitamment pour chercher de l’aide et s’écria :

— La chambre 33, se réveille !

 

***

 

Dès sa sortie, Julien fut submergé de questions.

Il eut juste la force de dire :

— Elle m’a fait un signe et a versé une larme quand je lui ai dit qu’Alex allait bien.

Toute la famille réunie, s’embrassait et se félicitait de ces bonnes nouvelles.