Je suis retourné dans la vieille serre de La Varenne. Elle est encore plus envahie par la végétation qu’autrefois, on la distingue à peine des fourrés qui l’ont engloutie. Juste un coin de mur en pierre, l’éclat terne d’une vitre poussiéreuse. Il y a toujours de l’herbe-à-serpents dedans. Quelques jours plus tard, de retour à Paris, je suis allé au théâtre de l’Athénée avec Ariane pour voir une pièce de Tchekhov, et les deux scènes se sont superposées dans mon esprit. À cause du moment où, pendant l’entracte, Ariane faisait la queue aux lavabos et où je suis allé au foyer chercher deux verres de vin blanc. Les miroirs y faisaient un dédale de glaces, vaguement comparable aux vitres de la serre. Juste assez pour faire le rapprochement quand le hasard a voulu que les mêmes personnes s’y trouvent. Presque les mêmes personnes, à trente ans de distance.
Les scènes étaient bien différentes, pourtant. De grands vases de glaïeuls flanquaient les colonnes du foyer : version nettement plus chic, avec leurs grandes fleurs le long de leurs hautes tiges, multicolores et parfumées, des rustiques arums tachetés de la serre, bas, comme crochetés au sol, et qui diffusent une odeur d’excréments, pour attirer les mouches qui pollinisent.
Alors que j’attendais devant le bar, j’ai vu maman se refléter dans le grand miroir qui me faisait face. J’ai sursauté et je me retournais pour aller vers elle quand j’ai vu que Fabrice l’accompagnait. Il n’y avait qu’eux deux en apparence ; nulle trace de ma tante. Et ils semblaient plutôt intimes, sa main à elle posée sur son épaule à lui. Ça pouvait être pour ne pas le lâcher pendant qu’il se frayait un chemin vers le bar. Mais ça ressemblait aussi à des gestes familiers qu’ils avaient au passage, lors des réunions de famille, qui me mettaient toujours mal à l’aise. Il la connaissait depuis l’enfance, depuis bien plus longtemps que Geneviève qu’il avait rencontrée à la fac.
Je me suis précipité vers le pilier le plus proche, bousculant une dame au passage – qui a dû trouver mes excuses comiques, parce que je les faisais le nez par terre ou presque. Une fois derrière mon pilier, j’ai de nouveau regardé dans leur direction et je me suis demandé si maman ne m’avait pas aperçu, parce qu’elle lançait des coups d’œil de mon côté. Elle regardait vers la zone du miroir où mon reflet pouvait apparaître ; mais il me semblait que si elle m’avait vu, elle aurait plutôt regardé en direction du pilier, pour me voir en chair et en os. D’ailleurs, ça n’a pas duré : elle s’est retournée vers le bar, puis tous les deux sont repartis, une fois leurs verres en main. Cette fois, elle n’avait plus la main posée sur l’épaule de Fabrice.
J’ai aussitôt pensé, les vitres aidant, à la vieille serre de La Varenne. Les vitres, et cette tendance que j’ai à me mettre dans ta peau, mon vieil Estive, quand la situation s’y prête. Que je me sens gêné ou que tu pourrais, toi, l’avoir été. La zone de mon moi qui doute le plus d’elle-même se solidarise avec toi, comme si nous étions deux frères ayant les mêmes problèmes, les mêmes complexes. Quand j’essaye de vous imaginer tous les trois autrefois, à la lumière des confidences de Jane, ma grand-mère, j’y arrive facilement pour maman – une jolie fille au milieu de ses deux soupirants, ça n’est pas difficile. Et aussi pour Fabrice, son habituel ton pédant, l’air pincé qu’il devait prendre quand vous vous moquiez de ses bottes. Pour toi, j’ai plus de mal. Dans certaines situations, je t’imagine sans peine : faisant « Psst… » du haut d’un toit en Algérie, ou encore galopant dans la lande avec maman. Mais à Paris, dans le foyer d’un théâtre, en présence de ton frère, ou encore de ton père, sur leur terrain à eux… D’après maman, tu ne voulais pas les affronter sur celui des mots, tu te défilais. Tu t’es quand même défilé jusqu’en Algérie, au lieu de demander un sursis jusqu’à ton bac – ce n’est pas rien.
Je n’ai pas vu de serpents, ni dans la serre ni encore moins à l’Athénée, et pourtant le rapport entre les deux scènes m’a frappé, avec quelque chose d’un vague serpent à l’arrière-plan. D’un vague serpent, et aussi de toi et moi. D’un côté, les glaïeuls de l’Athénée, parfumés, leurs coupelles rebondies, soyeuses comme les robes du soir que portaient certaines spectatrices. D’un autre côté, les maigres (en comparaison) arums tachetés, les herbes-à-serpents. Eux restent au ras du sol et ils ont des corolles miniatures, rétrécies par rapport à celles des glaïeuls. J’ai vite compris d’où me venait le rapprochement. On appelle aussi les arums « vits-de-prêtre », à cause de leur épi central (celui qui laisse la place, en été, aux baies rouges) ressemblant à un phallus violet et maigre, comme un vit qui ne serait pas utilisé. Le gouffre s’est rouvert en moi, celui qui menace toujours de le faire, à la moindre occasion. Le problème de mon vit n’est pas qu’il soit maigre et violet, parce que inutilisé, mais qu’il ne remplisse pas son office naturel, procréer ; quelque chose de mystérieux l’en empêche. Guillaume et Élisabeth ont des enfants, Fabrice et Geneviève en ont, Arnaud et maman en ont eu un – pas Ariane et moi. Par Élisabeth, la pédiatre, que la situation désolait autant qu’Ariane et que maman, nous avions pu consulter les meilleurs spécialistes, et les résultats semblaient formels : le problème vient de moi, pas d’Ariane. De moi et de mon « vit-de-prêtre », aussitôt qu’on lui demande de faire ce qu’il est censé faire.
Je me suis posé la question ce jour-là : n’étais-je pas du côté de la serre et des vits-de-prêtre, dont j’aurais hérité d’Arnaud ? Qui avait réussi, lui, à avoir un enfant, mais il aurait été le dernier de la lignée ? N’étions-nous pas marginaux aussi pour cela, tous les deux ? Thérèse m’avait raconté autrefois l’histoire d’un pauvre chevalier, qui ne pouvait pas avoir d’enfants parce qu’un maléfice lui avait « noué l’aiguillette » à la naissance. J’avais moi aussi l’aiguillette nouée, et ça provenait peut-être d’un maléfice qui remontait à mes origines, aux questions entourant la mort de mon père. C’était pour moi une raison supplémentaire de vouloir découvrir la vérité. Alors le maléfice s’en irait, mon aiguillette se dénouerait. On est facilement superstitieux sur ce genre de sujet.
À l’Athénée, j’ai eu l’impression que les rôles étaient inversés, par rapport à la vieille serre. Que le jaloux, et celui dont on se moque, c’était désormais moi, ou plutôt toi à travers moi. Et que les deux rieurs, les deux complices, c’étaient eux. À mesure que l’univers mondain de l’opéra absorbait maman, que vos chevauchées à La Varenne devenaient des souvenirs. Et que c’était moi qui incarnais cette stérilité, cette maigreur affective. Moi qui étais partagé entre deux mondes différents : ton monde, les photos et les souvenirs de toi, et Franklin, « puer egregiae indolis », que j’avais été si fier de réciter. Daniel et Mathias d’Albi, les tenues sacerdotales, dont certaines étaient violettes. Vit-de-prêtre.
Qu’aurais-tu fait ici, à l’entracte d’une pièce de Tchekhov ? Ça ne devait pas être ton genre d’auteur favori. Comme déjà il y a longtemps, quand j’essayais de t’imaginer en blouson de cuir au milieu des pères en costume-cravate, à la distribution des prix de Franklin, j’ai eu l’impression que nous étions destinés à faire scandale, toi et moi. Pour moi, mes hantises de Franklin, « Jésus est un idiot », le Possédé de Gérasa. Pour toi, tu aurais été ivre au foyer de l’Athénée, tu aurais pu crier : « Tchekhov est un idiot. » Les gens auraient commenté : « Qu’est-ce qu’elle fait avec ce vaurien ?… » Une balle de revolver avait empêché l’histoire de finir ainsi. Mais j’étais peut-être là, moi, pour la continuer. Tous les deux, on a un problème avec les Hommes sévères et les Hommes sauvages. Même si tu devais moins te soucier que moi du jugement des premiers.
Parmi eux, les patriarches surtout m’impressionnaient, j’aurais voulu leur ressembler – cruelle ironie du destin. Pour la vaste descendance, et aussi pour les grands espaces. Tel que je le voyais, notre film à Paris ne pouvait que se rétrécir, l’angoisse tapie dans mon estomac l’étranglerait peu à peu. La cheminée de notre chaudière tirait mal, par moments ça sentait les gaz brûlés dans l’appartement, selon le vent : ça m’empêchait de dormir, en pensant à Ariane, aux effets sur ses poumons. J’étais bien loin de Jouy, où les bottes avaient brûlé sur le poêle, sans que ça me fasse rien ; j’étais désormais responsable de quelqu’un. Mais j’étais aussi bien loin de La Varenne, où un grand vent devait disperser tous les miasmes et les gaz mal brûlés. Je n’arrivais pas à combattre seul cette angoisse, sans un vaste espace autour de moi, une vaste famille, dans lesquels les problèmes du quotidien se dilueraient. Sans quelque chose de plus grand que cette angoisse et qui lui donnerait du sens : une Terre promise mentale vers laquelle elle m’aiguillonnerait, qui ferait de la mort un simple rebondissement du voyage où j’emmènerais les miens. Comme toi, j’aurais voulu ressembler à mon grand-père Guède. Une sorte de patriarche à mes yeux, à la fois solide comme le roc et prodigue de ses biens, insouciant, pardonnant la mort d’un de ses chevaux si elle avait été utile à son petit-fils. Moïse non plus ne devait pas faire toute une histoire, si un jeune Hébreu impulsif faisait tomber un chameau dans un ravin. Brandir les Dix Commandements d’accord, les prêtres insistent beaucoup là-dessus, mais au quotidien les patriarches devaient surtout être bons et tolérants : sinon, les Hébreux ne seraient jamais arrivés jusqu’en Canaan, ils ne seraient pas restés ensemble jusque-là. Les Guède restaient ensemble depuis bien des générations, alors que les jalousies et les rivalités déchirent tant de familles : il devait y avoir un gène de bonté en eux pour l’expliquer, et donc aussi de tolérance et d’insouciance. Bon, tolérant, je l’étais peut-être, mais insouciant pas du tout, et solide comme le roc encore moins.
Le problème avec la cheminée a pris des proportions considérables dans ma vie. J’ai fait venir un plombier, qui avec son appareil de mesure a en effet détecté un taux de gaz brûlés excessif. « Mais vous savez, vous n’êtes pas le seul », m’a-t-il dit ; peut-être, mais les autres n’étaient pas responsables d’Ariane. Je me suis ensuite adressé au propriétaire, qui m’a répondu qu’aucun locataire ne s’était jamais plaint jusque-là, et que le problème n’existait sans doute que dans mon imagination. J’ai fait venir, toujours à mes frais, un chauffagiste, qui a confirmé le verdict du plombier et m’a expliqué que le problème venait du conduit de cheminée extérieur, qui était trop court par rapport au volume de gaz brûlés. Il aurait fallu le rallonger, mais cela exigeait un accord du syndicat des copropriétaires – autant dire mission impossible.
Ça m’obsédait tant qu’une nuit, je suis sorti par la fenêtre, les deux pieds dans le chéneau, pour aller voir de plus près cette cheminée. Est-ce que je ne pourrais pas rallonger le conduit moi-même ? Il y avait un gros tuyau rond en terre cuite, dont le chauffagiste m’avait montré que c’était le nôtre, parmi le groupe de six rassemblés sur un socle de cheminée. Je me suis approché et je l’ai contourné, en me demandant comment on prolongeait un tel conduit : toute une technique, sûrement, que j’étais loin de connaître. J’ai vu un homme qui me regardait, deux immeubles plus loin : il a ouvert sa fenêtre et tonné d’une voix martiale :
– Qu’est-ce que vous faites, jeune homme ?
J’ai failli lui répondre que c’était de famille, que nous étions cambrioleurs de père en fils. Mais Ariane, qui était penchée à la fenêtre et me suivait des yeux, lui a répondu que nous avions des problèmes de cheminée, qu’elle tirait mal et que j’étais sorti voir pourquoi. Ça a paru le convaincre ; en tout cas, il n’a pas appelé la police. J’ai souri malgré tout en pensant à toi, qui faisais « Psst… » du haut des toits. Même si, dans mon cas, ce n’était pas un jeu, plutôt de l’anxiété.
La Varenne me manquait, les Guède, Rob et Jane, les deux familles de cousins, les chevaux, la lande. Et aussi le souvenir de Vasko et de l’accident. Là-bas, la Mort n’était pas tapie en moi comme un alien sournois ; elle soufflait comme un grand vent et on pouvait l’affronter de face, en galopant vers elle. Les portes des maisons restaient ouvertes et si un intrus s’introduisait, il y avait toujours du monde ou des chiens pour l’accueillir – pas comme dans notre petit appartement, dont je vérifiais que la porte était bien fermée avant d’aller me coucher. Certes, je n’étais pas tout à fait un Guède, craignant toujours d’avoir de la boue aux semelles, m’essuyant les pieds sur le paillasson avant d’entrer, comme pour effacer une faute obscure. Mais là-bas, j’avais un film héroïque devant moi, dans lequel je pouvais être à la hauteur – je l’avais bien été à Jouy –, alors que je ne l’étais pas à Paris : trop de monde, trop de bruit, je n’y étais personne et je n’y serais jamais personne. J’avais aussi peu de chances de réussir professionnellement que tu en avais eu de « trouver de l’argent », comme tu le promettais à maman ; et moi, je n’étais même pas capable de cambrioler une maison.
Je parlais beaucoup avec Julien, et je m’étonnais parfois de voir combien nous étions proches, sur pas mal de points. Julien vivait pour la nuit, la fête et le sexe ; qui l’aurait cru, du petit garçon si sérieux de Chantenac ? Mais aussi, quelle revanche pour celui que son père repoussait avec dédain, que la grosse fille haineuse traitait de petit pédé : il était bien plus heureux et plus libre qu’eux n’auraient pu rêver de l’être un jour. Le bonheur est une denrée qu’on n’achète pas ; mais au moins il le cherchait seul, il n’essayait pas d’en priver les autres, comme si les en priver allait lui en donner un peu. Par rapport à lui, qui connaissait tous les endroits où l’on s’amusait à Paris, nous faisions un peu figure de provinciaux montés à la capitale. Mais il avait pour sa sœur une dévotion éternelle qui débordait sur le mari de celle-ci. Nous étions aussi proches, tous les trois, que nous l’avions été au cours de ce lointain été à Chantenac.
Au fil des années, il apparut qu’il n’aurait jamais la grande maison de couture qu’Ariane aurait dirigée ; il vivait bien trop au jour le jour pour cela, et il travaillait pour d’autres – mettre son talent à leur service lui suffisait. Mais il téléphonait tous les jours à Ariane, la couvrait de cadeaux, et il me parlait sévèrement quand il trouvait qu’elle n’avait pas bonne mine. C’était drôle de la part de quelqu’un qui se couchait rarement avant trois heures du matin et consommait des choses qui ne sont pas censées donner bonne mine. Mais il était plein de vie et de santé – en bonne partie grâce à Ariane, qui avait veillé dès le départ à ce qu’il se protège, à une période où le sida faisait des ravages, une raison de plus de sa dévotion envers elle. Plein de santé et de sensualité, avec les mêmes longs cils féminins qu’avant, un visage finement découpé, un corps à la fois élancé et courbe aux épaules, aux hanches, aux jambes, sans rien d’anguleux comme ceux des hommes. Un jour, il s’était habillé en fille pour moi, et j’en avais été impressionné – c’était bien une fille que j’avais devant moi, une jolie fille.
Nous avions pris des voies très différentes, mais nous avions parfois les mêmes images en tête. Il se confiait à moi, sans rien me cacher, de ce qu’il n’aurait pas osé dire même à sa sœur. Il aimait faire l’amour avec des hommes de cinquante ou soixante ans ; il éprouvait une émotion particulière avec eux, spirituelle et pas seulement physique, qu’il n’éprouvait pas avec des garçons de son âge.
– J’ai l’impression d’être loin de Paris, de faire l’amour avec un patriarche de la Bible sous sa tente, me disait-il. C’est du sexe, et du voyage, et quelque chose de plus encore. Surtout quand ils sont grands et secs, mais il y a toujours quelque chose de grand et sec chez un homme dans ces cas-là, et quand ils me pénètrent, c’est comme s’ils me plantaient un pieu de leur tente dans le corps. Comme si j’étais une dune de sable, douce et chaude, qu’il y avait des palmiers pas loin, que les étoiles brillaient. Et eux m’aiment, des hommes qui ont l’autorité et qui se mettent parfois en colère m’aiment, au lieu de… bref. Heureusement que le sexe existe pour soigner, pour oublier.
– Oui…, disais-je, même si je ne savais pas grand-chose de ce sexe-là (sauf peut-être la nuit sensuelle avec Clara), mais j’admirais Julien, pour ce qu’il tirait de ses souvenirs pour les surmonter.
– Quand je fais la fête ça va, mais au naturel je me sens fragile, un petit jeune homme au milieu d’hommes bien plus puissants que moi. Et jamais je ne serai puissant comme eux, je n’en ai même pas envie, il faut devenir vaniteux et bête à la fois pour ça. Mais là, je deviens comme une déesse, j’ai l’impression d’avoir un grand cul de déesse, et ces hommes puissants se prosternent sur mon cul, se prosternent devant moi. En fait, ça peut paraître bizarre, mais je n’aime pas tellement le corps des hommes au départ, je trouve celui des femmes bien plus beau et plus sensuel. J’ai d’abord envie de devenir une femme pour qu’ensuite un homme m’aime. Et quand je sens qu’il m’aime, au moins mon corps mais un peu plus si possible, j’arrive à aimer son corps. Parce qu’il m’offre tout ça, sa puissance, sa vanité, sa bêtise. Et quand il a joui et qu’il reprend son souffle, avec cet air épuisé des hommes qui viennent de jouir, je lui fais poser la tête sur mon ventre et je la caresse. Comme une déesse apaise les sacrificateurs du temple quand ils lui ont fait leur offrande.
Lui aussi tirait de l’anxiété qui lui crispait le ventre un aiguillon pour aller plus loin qu’elle, devenir plus vaste qu’elle. Même s’il la gardait dans son ventre, alors que je la projetais devant moi, que je voulais galoper avec elle. Mais c’était étrange, cette image du patriarche, du bon patriarche, qui nous hantait tous les deux. Alors que ni l’un ni l’autre n’en avions eu un pour père, loin de là, pour des raisons différentes.
L’ironie du destin a voulu que Julien se marie, avec un médecin, et que le couple adopte deux petits Éthiopiens, Mariam et Salim. Deux enfants qu’ils allaient élever remarquablement, avec tout l’amour et le sérieux possibles. Pour finir, c’est lui qui, paradoxalement, se rapprocherait le plus de cette image du patriarche qui nous hantait tous les deux. Grâce à l’évolution des mœurs, et à cause du maléfice qui me frappait.