Song Jia pénétra dans le hall de l’hôtel Shengguo, jeta un regard autour d’elle et se dirigea vers la réception pour y remplir sa fiche et accomplir les formalités d’enregistrement. Au moment où l’employée allait lui donner son numéro de chambre, elle lui demanda avec désinvolture : « Avez-vous une chambre portant le numéro 410 ? Chez moi, c’est le 410, alors je prends toujours ce numéro de chambre quand je voyage, ça me donne un peu l’impression d’être à la maison.
— Nous avons bien une chambre 410, mais je ne sais pas si elle est libre actuellement. Je vais vérifier, vous permettez ? »
L’employée de la réception tapota sur son clavier d’ordinateur : « Vous tombez bien, elle est libre. Alors, si cela vous convient, je vous donne la 410.
— Merci beaucoup », dit Song Jia qui prit la clef de la chambre, ramassa ses affaires et se dirigea vers l’ascenseur. Arrivée dans la chambre, elle se débarrassa de son sac à dos et fit un tour d’horizon de la pièce. C’était une chambre double standard, avec deux lits d’une personne, un bureau, un canapé, un poste de télévision, un frigo-bar et deux tables de chevet. Près de l’entrée s’ouvraient la salle de bains et un très grand placard. Elle savait que c’était la chambre où Hong Jun avait logé et bien qu’elle n’eût pas su dire pourquoi, elle en avait aussi la conviction intime. Une idée s’insinua alors dans son esprit et elle se mit soudain à fouiller partout : sur le lit, sous le lit, dans le placard, en dehors du placard, sous les lampes de bureau, derrière la cuvette des cabinets… elle espérait y découvrir un objet que Hong Jun aurait pu avoir laissé, mais elle eut beau faire le tour de la pièce, elle ne trouva rien.
Dehors, il faisait noir et on aurait dit qu’il allait tomber des cordes. Comme dit le proverbe : « À bonnes dents, bon appétit. À beau temps, pas de souci » et, en fait, il lui était bien difficile, par ce temps couvert et orageux, de conserver une humeur joyeuse. Elle s’assit sur le rebord du lit, découragée, et promena un regard morose dans la chambre vide et lugubre. Un sentiment de sombre terreur l’assaillit, lentement mais inexorablement. Il lui semblait flairer une étrange atmosphère, ressentir la menace d’un danger latent. Elle ne put empêcher son corps tout entier d’être parcouru d’un léger frisson. Malgré ses craintes et son envie de fuir cette chambre qui ne lui laissait rien présager de bon, elle fit des efforts désespérés pour maîtriser ses appréhensions car elle savait qu’au fond, si elle partait maintenant, jamais plus elle n’oserait franchir le seuil de cette pièce. Pour se réconforter, elle se dit : « Arrête de te faire des idées et de te faire peur. Ça ne sert qu’à te fabriquer des fantasmes et à t’induire en erreur. » Elle se leva et alla allumer toutes les lampes que pouvait compter la chambre ; après quoi, imitant Hong Jun, le poing droit projeté en avant, elle fit deux tours sur elle-même dans le sens des aiguilles d’une montre. Elle se sentit un peu mieux et se mit à ranger ses affaires dans le placard.
Puis elle réfléchit à la façon dont elle allait s’y prendre pour aller à la recherche de Hong Jun. Il ne s’agissait plus de ne compter que sur ses seules intuitions et ses propres conjectures ; il lui fallait en premier lieu s’assurer qu’il était bien rentré à Shengguo. Mais comment le savoir ? Elle songea à la compagnie aérienne et appela donc l’aéroport pour déterminer le nom de la compagnie avec laquelle Hong Jun avait le plus vraisemblablement fait le vol de retour sur Shengguo l’avant-veille ; puis elle s’assura de la présence de l’avocat sur ce vol et en obtint rapidement la confirmation. Elle était donc sûre à présent qu’il était bien revenu à Shengguo. Le problème se posait maintenant de savoir où il était. Elle avait beau se creuser la cervelle, elle ne voyait que deux réponses possibles : à l’hôtel Shengguo ou bien à la Dasheng. En d’autres termes, deux pistes s’offraient à elle pour partir à la recherche de Hong Jun : l’hôtel et la Dasheng.
Le soir même elle téléphona à Jin Yiying pour se faire confirmer qu’il n’y avait toujours aucune nouvelle de Hong Jun à Pékin puis elle décida d’enquêter sur place à l’hôtel dès le lendemain matin. Après quoi, si ses recherches restaient vaines, elle irait à la Dasheng. Cette nuit-là, après s’être allongée sur le lit dans lequel Hong Jun avait dormi, elle passa son temps à se tourner et à se retourner, assaillie par mille pensées, et ne réussit à sombrer dans le sommeil qu’au moment exact où les premières lueurs de l’aube commençaient à percer faiblement à travers les rideaux.
… L’affaire ayant été réglée, Song Jia et Hong Jun partirent en voyage. Par une matinée radieuse ils arrivèrent au pied d’une petite montagne couverte d’une épaisse forêt et se mirent en route vers le sommet, gravissant main dans la main les lacets du petit sentier empierré. Aucun touriste aux alentours, seul le chant mélodieux des oiseaux accompagnait le bruit léger de leurs pas. Quoique d’humeur légère, Song Jia n’osait émettre un son de peur de rompre le charme rare de l’instant. Ils atteignirent le sommet. Song Jia n’aurait jamais pensé trouver un temple aussi imposant sur une montagne aussi insignifiante. Elle était ravie mais Hong Jun refusait d’y pénétrer, comme si l’endroit lui déplaisait. Elle dut le traîner jusqu’à l’entrée. La grande cour était déserte ainsi que la grande salle centrale où ils entrèrent. Song Jia trouva cela curieux : où donc étaient passés les moines ?
Ils traversèrent la grande salle et se retrouvèrent dans la cour de derrière où ils virent enfin deux moines. Ils passèrent leur chemin. Sur l’un des côtés s’ouvrait une pièce à l’entrée de laquelle un linteau noir portait une inscription en quatre caractères : “Bouddha dans fleur éclose”. À la porte, un moine leur réclama de l’argent, cent yuans par personne. Hong Jun était d’avis que ça n’en valait pas la peine mais comme Song Jia avait envie d’aller voir, ils s’acquittèrent du prix d’entrée. Dans la pièce il n’y avait qu’un très grand disque recouvert d’une fleur de lotus vraisemblablement faite de métal coloré, avec des fleurs rouge vif et des feuilles d’un vert cru mais dont les pétales étaient liés en botte. Le moine leur dit qu’ils pouvaient faire un vœu et que, si Bouddha les entendait, les pétales s’ouvriraient et ils pourraient voir le Bouddha au cœur de la fleur de lotus. Il leur faudrait alors payer encore cent yuans chacun.
Song Jia joignit pieusement les mains devant elle, ferma les yeux et fit un vœu dont elle seule connaissait la teneur. Lorsqu’elle rouvrit les yeux, elle entendit un grincement : le lotus se mit à tourner et les pétales à se déployer lentement laissant apparaître un petit Bouddha doré. Elle tira à nouveau deux cents yuans de son porte-monnaie.
En sortant, Hong Jun était d’humeur sombre et Song Jia lui en demanda la raison. Ils n’auraient pas dû, dit-il, se laisser avoir par ces moines qui leur extorquaient de l’argent. Song Jia répliqua que tout le monde savait que ce n’était qu’un simulacre, que c’était pour s’amuser, que ce n’était donc pas la peine de prendre tout cela trop au sérieux ! Au lieu de cela, Hong Jun s’obstinait à vouloir percer à jour le mécanisme rusé mis au point par les moines. Il fit le tour par l’arrière de la pièce et découvrit une petite porte où il se faufila. Song Jia essaya en vain de le faire revenir sur ses pas mais il restait sourd à ses injonctions et elle n’eut plus qu’à le suivre. La porte s’ouvrait sur un escalier très étroit qu’ils descendirent. Il n’y avait aucune lumière et il y faisait très sombre. Ce n’est qu’une fois arrivés au bas de l’escalier qu’ils aperçurent la lueur d’une lampe à huile vers laquelle ils dirigèrent leurs pas et là, il y avait un moine en train de tourner un grand disque. Hong Jun l’apostropha : « Le fameux “Bouddha dans fleur éclose” ! Ainsi c’est vous qui faites marcher le mécanisme d’ici !
— Qu’est-ce que ça peut bien vous faire ? ricana le moine.
— Vous n’avez pas le droit de tromper les gens pour leur extorquer de l’argent !
— Je les trompe, et après ?
— Comment pouvez-vous être à ce point sans foi ni loi ?
— Avec le peu de nourriture que mangent les moines, comment voulez-vous qu’ils se préoccupent de leur foie ? Et moi, réfugié dans ce réduit, à la loi de quel pays voulez-vous que j’obéisse ? »
Hong Jun voulut répliquer mais on entendit grincer l’escalier et deux moines apparurent, un gourdin à la main. Comprenant que la situation ne leur était pas favorable, Song Jia s’empressa de dire : « C’est bon, nous partons ! »
Mais Hong Jun insista : « Je dois absolument leur faire entendre raison ! »
Il n’avait pas fini sa phrase qu’un des moines brandit son gourdin et se mit à le frapper. Hong Jun ne put esquiver le coup et le reçut en pleine tête. Le sang qui coulait dissimula son regard indigné. Un autre moine vint lui asséner quelques coups de gourdin supplémentaires. Song Jia brûlait d’envie de lui prêter aide et assistance au péril de sa vie et de le protéger de son propre corps, mais le moine tourneur la saisit à bras-le-corps et lui mit la main sur la bouche, l’empêchant de faire un pas et d’appeler au secours. Elle voyait les deux gourdins conjuguer leurs efforts pour s’acharner sur Hong Jun sans pouvoir faire un geste, elle devenait folle…
Song Jia finit par se réveiller, tout entortillée dans ses draps, le corps entier couvert de sueur. Elle se découvrit et poussa un énorme soupir, encore toute secouée par le rêve qui ne cessait de la hanter.
Dehors, il pleuvait à verse. Après avoir pris son petit déjeuner, elle se présenta à la réception de l’hôtel, disant qu’on lui avait demandé de se mettre en contact avec un certain Hong Jun mais qu’elle ne connaissait pas son numéro de chambre. Après avoir vérifié, l’employée lui répondit qu’ils n’avaient aucun client de ce nom. Song Jia s’inquiéta encore de savoir s’il était possible que cette personne vienne à peine de quitter l’hôtel ; ce à quoi la demoiselle répondit qu’un M. Hong Jun avait bien séjourné dans cet hôtel mais que cela datait d’une dizaine de jours.
Lorsque Song Jia, contrariée, regagna sa chambre, une femme d’âge mûr revêtue d’une blouse bleu clair était en train de nettoyer la salle de bains. Sous l’effet d’une inspiration soudaine, elle s’approcha pour lui demander : « Grande sœur, qui était la personne qui logeait dans cette chambre avant moi ? »
La femme de chambre jeta un regard sur Song Jia puis baissa à nouveau la tête pour continuer sa tâche.
— Il y en a eu tellement, comment voulez-vous que je me rappelle ? finit-elle par dire après un moment.
— Je vous parle de celle qui était là juste avant moi.
— Je ne m’en souviens pas. J’ai tellement de chambres à nettoyer !
— Je veux dire que la personne qui était là avant moi devait être un homme, et pas quelqu’un de très bien ! Il a eu l’aplomb de cacher sous l’oreiller une de ces choses dégoûtantes qu’utilisent les hommes !
Elle devint aussitôt toute rouge et conclut : « Je vais de ce pas en parler au directeur ! »
Ces mots eurent pour effet d’affoler la femme de chambre qui se redressa aussitôt pour protester : « Ce n’est pas possible ! J’ai changé les draps après le départ du client.
— C’était resté coincé entre les deux taies d’oreiller.
— Comment est-ce possible ? C’était un jeune homme distingué et courtois, très grand, l’air instruit. Vraiment mignon, comme nous disons en cantonais ! Et toujours très poli, pas du tout du genre à mener la vie. Comment a-t-il bien pu faire une chose pareille ?
— Le cœur de l’homme est insondable ! » Sans le vouloir, Song Jia laissa traîner un accent cantonais puis reprit son air sévère pour demander : « Quel jour est-il parti, exactement ?
— Le jour de la fête nationale, il était encore ici. Ensuite, il s’est absenté quelques jours et n’est revenu qu’avant-hier, toujours dans cette chambre. Mais, cette fois-ci, il n’est resté qu’une seule nuit.
— Vous voulez dire qu’il est parti hier matin ?
— Je ne sais pas quand il est parti mais je l’ai vu rentrer avant-hier après-midi. Il m’a même saluée fort aimablement. Ce n’est qu’hier matin, lorsque je suis venue remettre un peu d’ordre dans sa chambre, que j’ai appris qu’il n’était plus là.
— Savez-vous où il est allé ?
— Vous avez l’intention d’aller lui régler son compte ?
— C’est que vous en avez dit tellement de bien. J’ai envie d’aller voir un peu à quoi il ressemble, en fin de compte.
— À vrai dire, il n’est pas mal du tout ! Mais c’est dommage, je ne sais pas où il est allé. Au fait, mademoiselle, cette chose-là, où l’avez-vous mise ?
— Comment aurais-je pu garder une chose pareille ? Je l’ai jetée dans les toilettes et j’ai tiré la chasse d’eau.
— Puisque vous l’avez jetée, inutile d’aller trouver le patron. Ce jeune homme n’avait aucune mauvaise intention, croyez-moi. De plus, il ne savait même pas qui viendrait dans cette chambre après lui.
— C’est bon ! N’en parlons plus », conclut Song Jia en poussant sciemment un soupir.
Apparemment ce n’était pas à l’hôtel Shengguo qu’elle découvrirait ce qu’était devenu Hong Jun. Autant explorer la deuxième piste.
— Savez-vous où se trouve la Dasheng ? demanda-t-elle.
— Bien sûr ! Comment voulez-vous que quelqu’un de Shengguo l’ignore ? Je vais vous expliquer : vous sortez de l’hôtel, vous tournez à gauche, vous prenez tout droit dans l’avenue Shengbei et vous y êtes. C’est la grande bâtisse couleur jaune d’œuf, vous trouverez facilement.
— C’est loin ?
— Pas très. Moins d’une demi-heure à pied.
— Merci beaucoup.
Song Jia prit son sac et sortit. Il ne pleuvait plus mais l’air restait gorgé d’humidité. Song Jia s’attarda un instant à la porte de l’hôtel avant de se décider à se mettre en chemin. Elle n’était pas encore allée très loin qu’elle eut la sensation d’être suivie. À l’institut de la police où elle était étudiante elle avait reçu une formation en matière de filature, aussi fit-elle quelques brusques changements d’allure et de direction qui lui confirmèrent la présence effective d’un homme sur ses traces. Cette nouvelle péripétie jetait une ombre supplémentaire au tableau. La situation serait-elle, et de loin, plus sérieuse et plus complexe que ce qu’elle avait d’abord imaginé ? Après un instant de réflexion elle traversa inopinément la rue et monta dans un taxi.
Celui-ci la conduisit à la Dasheng. En descendant, elle regarda à droite et à gauche sans voir qui que ce soit qui aurait pu la suivre. Elle traversa la rue et se dirigea vers l’entrée principale d’un pas décidé. C’est alors qu’une hésitation la retint dans son élan : Hong Jun aurait-il aimé la voir surgir à cet endroit ? Sa disparition pouvait avoir deux explications possibles : ou bien il l’avait lui-même organisée afin d’être libre d’aller enquêter sur un point particulier de l’affaire, ou bien il avait rencontré une difficulté quelconque, ou encore se serait mis lui-même dans une fâcheuse posture, se trouvant ensuite dans l’impossibilité de rentrer en contact avec elle. Quoi qu’il en soit, sa disparition avait certainement quelque chose à voir avec la Dasheng : raison de plus pour ne pas s’y précipiter de façon inconsidérée. Si jamais ses initiatives venaient perturber l’enquête de son patron ou dévoiler prématurément ses plans, ce serait désastreux ! Mais d’autre part, si elle ne se rendait pas à la Dasheng, où donc pouvait-elle aller chercher Hong Jun ? Elle s’éloigna de l’entrée principale et emprunta le petit chemin extérieur sur lequel elle s’éloigna à pas lents. En règle générale, elle n’avait jamais de doute quant à ses choix ; mais, en l’occurrence, elle ne savait trop quelle carte jouer.
Soudain, elle entendit quelqu’un derrière elle l’appeler à mi-voix par son nom. Elle tourna la tête et aperçut un jeune homme en complet bleu qui la regardait : « Venez avec moi, mademoiselle Song », et aussitôt il traversa la rue comme si de rien n’était et pénétra dans le jardin. Song Jia hésita un bon moment avant de se décider à le suivre. Le jeune homme choisit un endroit tranquille pour s’y arrêter et l’attendre. Elle l’y rejoignit et l’examina avant de lui demander : « Qui êtes-vous ? Comment se fait-il que vous sachiez mon nom ?
— Je m’appelle Tian Liangdong, je suis vice-directeur de la sécurité de l’hôtel Shengguo et j’ai bien sûr accès à la liste des clients de l’hôtel.
— Pourquoi voulez-vous me parler ?
— Vous êtes à la recherche de l’avocat Hong, n’est-ce pas ?
— Comment le savez-vous ?
— Vous l’avez dit ce matin à la réception. J’étais à côté. Ensuite, je vous ai suivie au troisième étage et j’ai entendu votre conversation avec la femme de chambre. J’en ai conclu que vous étiez venue tout exprès pour lui. »
En songeant au mensonge qu’elle avait raconté à la femme de service, elle ne put s’empêcher d’avoir le feu aux joues. Elle baissa alors le visage, feignant de se frotter les yeux.
— Mais comment pouviez-vous savoir que je devais venir ici ? lui demanda-t-elle encore, en relevant la tête.
— Je ne voulais pas rentrer en contact avec vous à l’hôtel, aussi vous ai-je suivie lorsque vous êtes sortie. Je n’aurais jamais pensé que vous m’auriez découvert et distancé. Apparemment, vous avez reçu un entraînement spécial en la matière. Mais je vous avais entendue vous informer sur la Dasheng auprès de la femme de chambre et j’ai pensé que c’est là que vous alliez, d’où ma présence en ces lieux.
— Et que voulez-vous donc me dire ?
— Que l’avocat Hong n’est pas à la Dasheng.
— Et où est-il ?
— Il est en détention.
— Où est-il ? demanda encore Song Jia en le regardant avec de grands yeux comme si elle n’en croyait pas ses oreilles.
Tian Liangdong modifia sa façon de s’exprimer pour préciser : « On est en train de l’interroger au bureau de la Sécurité publique. »
Ce n’est qu’après un long silence que Song Jia, très préoccupée, lui en demanda la raison.
— Ils le soupçonnent d’avoir fait du trafic de drogue, mais je ne suis pas exactement au courant de la situation.
— Pourquoi venir me raconter cela ? demanda-t-elle, un peu méfiante.
— J’ai suivi les cours de l’avocat Hong à l’université. C’est en quelque sorte mon professeur et quelqu’un que je respecte et que j’admire.
— Alors vous allez pouvoir m’aider à le sortir de là.
— C’est-à-dire que…
— Si c’est une question d’argent, n’hésitez pas à me le dire, s’empressa-t-elle d’ajouter en se remémorant sa discussion avec Hong Jun à propos de cette bande de profiteurs.
— Je ne pense pas. Ce n’est pas que je ne veuille pas vous aider, mais je crains de n’avoir jamais connu d’affaire de cette importance. J’ai entendu dire qu’elle bénéficiait d’appuis de taille.
— Alors, comment dois-je m’y prendre ?
Et Tian Liangdong de suggérer après un instant de réflexion : « Maître Hong a un ancien camarade de classe qui est procureur adjoint, ici à Shengguo. Il s’appelle Zheng Xiaolong. Peut-être pourriez-vous aller le trouver. »
Song Jia approuva cette suggestion mais n’ajouta rien.
— Mlle Song, c’est tout ce que je peux faire pour vous. Je crains par ailleurs que l’hôtel Shengguo ne soit pas un endroit très sûr et j’espère que vous redoublerez d’attention.
Sur ces mots, il s’éloigna.
Song Jia n’aurait jamais imaginé que l’histoire de Tong Wenge aurait des développements d’une telle complexité. Ça lui rappelait ces films sur les luttes clandestines que l’on voit au cinéma. Pour l’heure, elle était seule dans cette ville inconnue et ne pouvait s’empêcher d’éprouver un sentiment d’abandon et de crainte. Mais elle ne pouvait se dérober car c’est ici qu’était celui qu’elle désirait protéger fût-ce au péril de sa vie ! Il lui fallait absolument trouver le moyen de libérer Hong Jun. La seule pensée de cette noble cause lui donna le courage de redresser la tête et de reprendre fièrement le chemin de l’hôtel.