À la fin, tu ne veux plus sortir de l’hôtel ni voir personne. Tu ne veux plus dîner à minuit avec tous ces gens qui parlent, jacassent, te harcèlent de questions toujours pareilles, comme si tu n’avais pas déjà tout dit et tout donné sur scène, quand eux n’ont rien à donner mais veulent prendre, prendre, prendre encore, arracher un lambeau de toi dans une eucharistie sordide et croire, et dire ensuite que tu leur appartiens, qu’ils t’ont conquise.
Tu restes dans ta chambre et, quand tu as faim, tu appelles le room service, tu commandes un club sandwich. T’es pas dépaysée, avec le club sandwich, et jamais déçue. De New York à Hollywood, d’Amsterdam à Lagos, de Tel-Aviv à Barcelone, il est servi dans tous les palaces, t’as même pas besoin d’ouvrir la carte de restauration dans ta chambre, tu décroches, tu dis : « Un club sandwich et une bouteille de pinot-grigio. » Car tu peux être certaine aussi que figure sur la carte des vins le pinot-grigio. C’est une façon de se créer un chez-soi, une routine, un rempart — une errance acceptable.