Dans Candide, les personnages sont souvent ramenés à une seule caractéristique ou à une pensée, une idéologie. Leur psychologie n’est donc guère développée par le narrateur. Cette caractéristique renvoie au genre du conte, qui a tendance à confier au personnage une fonction (l’auxiliaire, l’agresseur, la princesse, le héros, etc.) au lieu de le doter d’un caractère développé.
Candide est le héros du conte dont on suit les péripéties. C’est un jeune bâtard élevé en Westphalie, dans le château du baron de Thunder-ten-tronckh, où il vit en paix avec le précepteur Pangloss et la belle Cunégonde, la fille du baron dont il tombe amoureux. Candide incarne son prénom : « Sa physionomie annonçait son âme. Il avait le jugement assez droit, avec l’esprit le plus simple » (p. 45-46). En outre, le jeune homme ne peut croire que la vie puisse être malheureuse, respectant aveuglément les principes philosophiques que lui enseigne Pangloss.
Un jour, les deux amants sont surpris ensemble et Candide est chassé du château. Débute alors pour le jeune homme une aventure qui lui fera parcourir le globe et lui révélera le monde tel qu’il est, avec ses richesses et ses splendeurs, mais également avec ses drames et sa violence. Privé de l’objet de son amour, il n’a de cesse de rechercher sa bien-aimée au cours du récit. Durant son périple, Candide s’étonne naïvement de ce qu’il découvre, des malheurs auxquels il est confronté, tant sa vie au château de Thunder-ten-tronckh était idyllique. Bercé par les théories de Pangloss, il ne soupçonnait pas que de telles atrocités pouvaient être commises. Son voyage lui permet donc de s’écarter peu à peu de son maître de philosophie pour se forger sa propre pensée.
Candide est droit, honnête et innocent, ce qui lui vaut nombre de malheurs dans une société décrite comme hypocrite et mercantile. Grâce à ses amis, il parvient tout de même à échapper à ses poursuivants. Au fil de ses mésaventures et à mesure que Candide se détache de son éducation, il ressent une profonde tristesse. Il finit tout de même par trouver le bonheur dans le travail simple de la terre, entouré de ses proches.
Maître à penser dans le château de Thunder-ten-tronckh, Pangloss dispense ses leçons aux jeunes gens du château y compris à Candide, qui l’écoute émerveillé. Perçu comme un véritable dieu par ce dernier pour qui il semble professer la parole divine, Pangloss enseigne la « métaphysico-théologico-cosmolonigologie » (p. 47). Ce mot-valise reprend les trois sciences traditionnelles en vogue à l’époque que sont la métaphysique, la théologie et la cosmologie.
À travers ce personnage, Voltaire souhaitait se moquer de la philosophie optimiste de Leibniz qui jouissait, à l’époque de l’auteur, d’une grande renommée. Celui-ci était convaincu que le monde était forcément bon et idéal puisque pensé par Dieu, l’être parfait. Pangloss prête à rire, car il ne fait que réciter des extraits de cette théorie qu’il ne comprend pas et qu’il déforme en donnant des exemples illogiques pour argumenter sa doctrine :
« Il est démontré, disait-il, que les choses ne peuvent être autrement : car, tout étant fait pour une fin, tout est nécessairement pour la meilleure fin. Remarquez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes, aussi avons-nous des lunettes. » (p. 47)
Ce personnage représente le type du faux savant, tant détesté par Voltaire. En effet, Pangloss est incapable de penser par lui-même et a hérité des savoirs philosophiques vétustes qu’il ne prend pas la peine de remettre en question. Fort de ce qu’il pense connaître, il se croit au-dessus des autres et a réponse à tout. Mais, sous le couvert de réflexions obscures, son intelligence est simulée. On peut le rapprocher des personnages de médecin chez Molière (dramaturge français, 1622-1673), eux aussi moqués pour leur soi-disant science et leur langage ampoulé.
Objet de l’amour de Candide, Cunégonde est la fille du baron de Thunder-ten-tronckh. Candide passe une grande partie du conte à la chercher après l’avoir cru morte. Elle n’est décrite que par son physique, dont la beauté vient de ses formes généreuses et de son rang. Les infortunes multiples qu’elle vit tout le long du récit la rendent finalement très laide, et c’est contraint par sa promesse que Candide l’épouse, et non plus par amour. Même Cunégonde, qui se révélait à l’origine parfaite, est finalement une désillusion !
Cacambo devient le valet de Candide durant son voyage à Cadix, mais il n’est réellement présent qu’au cours des aventures outre-Atlantique. Cacambo est un ami fidèle et de bon conseil pour le héros. Plein de bon sens, il permet à Candide de se sortir de bien des situations dangereuses, notamment lorsque les deux compagnons sont enlevés par le peuple des Oreillons, prêts à les dévorer. Polyglotte, il assiste Candide dans ses rencontres hispaniques et devient même, lors de leur séjour à Eldorado, le leader du duo.
Le personnage de la vieille peut être considéré comme l’équivalent masculin de Cacambo pour Cunégonde. Très pragmatique et vive d’esprit, elle offre toujours une aide précieuse aux deux amants en situation de déroute. Fille de pape, le récit de sa vie qui est fait aux chapitres 11 et 12 laisse entrevoir une existence de souffrances physiques et morales atteignant des sommets d’abominations.
Comme Cacambo, la vieille est un personnage sympathique et très actif. Sa sagesse impressionne, quand, après avoir raconté sa destinée tragique, elle dit à Cunégonde qui se plaint d’être la femme la plus malheureuse sur terre :
« Enfin, mademoiselle, j’ai de l’expérience, je connais le monde ; donnez-vous un plaisir, engagez chaque passager à vous conter son histoire ; et s’il s’en trouve un seul qui n’ait souvent maudit sa vie, qui ne se soit souvent dit à lui-même qu’il était le plus malheureux des hommes, jetez-moi dans la mer la tête la première. » (p. 85)
Candide rencontre Martin à l’occasion d’un concours de l’être le plus malheureux du Surinam. Ce philosophe, ancien libraire à Amsterdam, accompagne le héros dans la fin de son voyage qui le mène à Constantinople, tandis que Cacambo est chargé de retrouver Cunégonde. Martin et Candide passent la plupart de leur temps à philosopher, et l’on découvre à travers leurs discussions des théories pessimistes à l’exact opposé de celles transmises par Pangloss. En effet, Martin considère que rien de bien ne peut arriver et qu’il faut se résigner au malheur.