COMMISSARIAT
DE WEST HOLLYWOOD

La journée commence mal. Deux voitures ont été dépêchées chez Maude, sirènes hurlantes pour se frayer un chemin à travers la circulation. Pin. Pon. Juste les gyrophares, pas de sirènes, pendant les trois derniers kilomètres. Elles devraient arriver dans dix minutes.

Telen est toujours assise face au bureau de l’inspecteur I. Perrino, Billy la tient entre ses bras. Ils sont profondément déprimés. Dehors, le matin sans vie, les extrémités brûlées des arbres qui se détachent sur le ciel ; s’il y a un soleil, il n’a pas de corps.

Ils sont désormais onze dans la pièce, pour la plupart debout, huit hommes et trois femmes, simples agents, inspecteurs, un lieutenant. Les premières chaleurs de la journée. Certains s’essuient déjà le visage. Quelque chose en eux indique que tout sera fini dans la matinée. L’assassin de Nina Voelker. Car c’est de ça qu’il s’agit, tonne Meyerson, d’un meurtre ! Ils sont tous d’accord. Toyer leur a mis un coup au moral en s’attaquant à l’une des leurs. Pour un flic, il n’y a rien de plus satisfaisant que de choper un tueur de flic.

Telen sent leur attention portée sur elle, leur euphorie professionnelle, leur profond soulagement. Elle a fait ce qu’il fallait, elle leur a offert Toyer sur un plateau.

Elle leur a donné l’adresse de Peter, a murmuré le mot de passe, poisson-chat, comme si c’était un funeste augure. Le mot de passe a été respectueusement communiqué par téléphone à la voiture stationnée devant l’immeuble de Silverlake, un agent l’a transmis au technicien informatique qui analysera l’ordinateur dans l’appartement.

À un kilomètre et demi du commissariat, un juge en peignoir signe sur sa table de cuisine le mandat de perquisition de l’appartement de Peter.

Des inspecteurs sont déjà sur place, attendant d’entrer, de fouiller dans les tiroirs, les poches, d’ouvrir les bocaux, d’étaler les sous-vêtements sur le lit, de déchirer les enveloppes.

Elle a donné à la police sa seule photo de Peter – une petite photo sur papier brillant salement abîmée –, sa description, celle de la Harley-Davidson, de la tenue qu’il porte. Les flics en savent désormais autant qu’elle. Mais ces informations sont inutiles, ce n’est plus qu’une question de minutes avant que la première voiture arrive chez Maude.

« Il est vraiment très vulnérable », a-t-elle dit plus tôt au mauvais agent. Celui-ci n’a rien répondu. « Il a ses bons côtés. »

Billy a expliqué au petit auditoire que Peter l’a aidé à trouver du travail.

« Il a vécu tant de bouleversements », a ajouté Telen.

Ils ont regardé ses lèvres.

« Sa femme est morte la semaine dernière, a surenchéri Billy.

– C’est lui qui l’a tuée ? » a demandé un agent.

Billy est assis là, inutile, se contentant de corroborer les affirmations de Telen.

« Il n’est pas si bon acteur que ça », déclare-t-il.

Mais bien sûr, c’est faux.