Le drap qui recouvrait la tête de Leandro Gondi lui fut retiré brusquement par l’un des membres des Aigles. Le vigneron se trouvait dans un carrosse qui roulait tranquillement en direction de sa résidence.
— Sommes-nous arrivés ? interrogea le membre de la famille Gondi d’un ton écrasant. Cela me semble faire des heures que nous tournons en rond comme des idiots.
— C’est entièrement intentionnel, répondit le soldat qui l’accompagnait avec un curieux sourire aux lèvres. C’est dans le but d’égarer les filatures potentielles, on n’est jamais trop prudents. Mais soyez rassuré, nous n’avons aperçu personne de suspect.
Leandro dévisagea le soldat pendant un instant, il n’aimait pas la façon dont celui-ci lui souriait.
— J’espère bien, c’est votre foutu travail, après tout !
Le véhicule s’arrêta brusquement.
— Sortez, ordonna le soldat sans perdre son expression peu avenante.
— Vous n’allez pas inspecter les alentours pour vous assurer que personne n’épie la maison ?
— Tout est vérifié, monsieur. Sortez.
Après un grognement, Leandro sortit du véhicule. La vision qui l’attendait dehors le pétrifia. Derrière sa résidence, qui se dressait à une cinquantaine de mètres de là, une épaisse fumée et des flammes s’élevaient effroyablement vers le ciel. De toute évidence, une bonne partie de son vignoble était la proie d’un impressionnant incendie.
— Mon Dieu ! Vous n’étiez pas censés brûler quoi que ce soit avant plusieurs jours !
D’une démarche empressée, il contourna sa propriété pour évaluer l’ampleur des dégâts. À son arrivée sur les lieux, il aperçut avec perplexité une dizaine d’Aigles en armure s’affairant à ériger des bûchers de fortune. Le champ qui s’étendait derrière eux était en flammes. Il s’agissait d’une de ses meilleures vignes, une vraie richesse qui s’envolait en fumée sous ses yeux impuissants.
— Qu’est-ce que vous faites, bon sang ? hurla Leandro en s’avançant vers le groupe.
L’un des soldats tourna sa tête dans sa direction.
— Ne vous en faites pas, nous avons simplement décidé de faire les choses en grand ! s’écria le garde en s’approchant. Nous passons un message à tous les sales traîtres dans nos rangs.
— Quel traître ? s’exclama Leandro avec le regard rempli de rage.
Le militaire retira son casque.
— Les ignobles perfides dans ton genre, Leandro, répondit Antonio avant de le frapper avec la barbute qu’il venait tout juste d’enlever.
Leandro s’étala sur le sol de terre froid et mouillé avec plusieurs dents en moins. Les yeux rivés sur Antonio, il porta la main à sa bouche ensanglantée.
— Tu sais pourtant comment je fonctionne, commença Antonio en lançant son casque au loin. Tu savais parfaitement à qui tu avais affaire et les conséquences qui t’attendaient si tu osais me trahir. Malgré tout ce que les Médicis peuvent bien dire, leurs rangs sont infestés de mes hommes… tu croyais vraiment que je n’apprendrais pas tes petites machinations ?
— Ils m’ont forcé, mentit Leandro, terrifié. Je t’aurais prévenu du complot bien avant que cela représente un danger pour toi.
— Même si c’était vrai, tu aurais mieux fait de ne jamais coopérer.
— Ils m’auraient tué ! s’écria Leandro en crachant un long filament de sang.
Antonio arbora un sourire triste, puis reprit la parole.
— Mon cher, il y a pire que la mort. Tu vas l’apprendre dans quelques instants.
Le chef de la famille Gondi fit signe à deux de ses hommes d’approcher. Ils agrippèrent le fautif fermement par les épaules.
— Je te laisse choisir : brûlé ou égorgé ?
— Tu ne peux pas faire ça, ce n’est pas ma faute ! rugit le vigneron d’une voix désespérée. Tu ne peux pas…
Antonio s’approcha et frappa violemment sa victime de sa main gantée de fer.
— Brûlé ou égorgé ?
Leandro détourna le regard et cracha encore une fois un long filet de sang, bien décidé à ne pas coopérer. Antonio le frappa de nouveau, cette fois d’un coup bien porté au ventre.
— Ne rends pas les choses plus douloureuses que nécessaire, conseilla Antonio d’un ton conciliant. Soyons honnêtes, tu ne t’en sauveras pas, tu vas mourir inévitablement ce soir. Plus tu t’entêtes, plus les choses vont durer et être insupportables.
— Non, articula Leandro, les larmes aux yeux. Je t’en supplie...
— Arrête de brailler, répliqua Antonio avec découragement. On finit tous par mourir, pour une raison ou pour une autre. Et tu sais quoi ? Ce n’est pas si terrible que ça ! Des gens meurent tous les jours, ce que tu vis aujourd’hui n’a rien de si extraordinaire. Dans dix minutes, tout peut être terminé. Brûlé ou égorgé ?
Le corps parcouru de frissons incontrôlables, Leandro soupira bruyamment. Au prix de grands efforts, il parut se ressaisir.
— Égorgé, finit-il par choisir avec résignation.
— Parfait, un excellent choix.
Antonio posa une main sur la tête de Leandro et frotta gentiment sa chevelure, comme s’il s’agissait d’un chien.
— Faites sortir la femme ! s’écria-t-il ensuite.
— Quoi ? Non !
— La ferme ! rétorqua Antonio avant de le frapper une troisième fois.
La grande porte arrière de la maison s’ouvrit et un homme armé d’un poignard en émergea en traînant brutalement Costanza Gondi, la femme de Leandro. La pauvre paraissait sous le choc.
— As-tu déjà vu quelqu’un mourir par ta faute ? interrogea Antonio en se tournant vers le vigneron.
— Je t’en supplie, juste moi…
Après avoir esquissé un sourire, Antonio observa l’homme qui tenait Costanza. Il lui fit signe de passer à l’action en glissant son index d’est en ouest sur sa gorge. Une seconde plus tard, la femme du traître tombait face contre terre dans une mare de sang.
La scène se déroulant sous ses yeux, Leandro avait entièrement craqué. Il ne parvenait plus à reprendre son souffle tellement il hurlait.
— Bon, je suis un homme accommodant, donc pour le reste, je vais choisir à ta place. Je sais qu’il s’agit de décisions épineuses. Faites sortir tout le monde dehors et attachez-les tous.
— Non, pas les enfants ! Quelle sorte d’homme es-tu, bon sang !
— Malheureusement pour toi et ta famille, je suis de la pire espèce, répondit Antonio. Allez, donnez-lui la raclée de sa vie.
Les hommes encadrant Leandro le martelèrent de coups sous les yeux des occupants de la maison que l’on tirait de force vers leur mort. Lorsqu’ils en eurent terminé avec le pauvre homme, toutes les victimes avaient été attachées aux structures de bois de fortune. Antonio n’avait fait aucune exception, les trois fils du vigneron s’y trouvaient et même les servants.
Antonio sortit un poignard et se pencha sur celui qui avait comploté contre lui. Il saisit sa main droite puis entailla profondément son avant-bras jusqu’à la hauteur du coude. Un flot impressionnant de sang en jaillit. Leandro était meurtri à un point tel qu’il ne réagit même pas à cette nouvelle blessure. Immobile, il se contentait de fixer avec des yeux vides son plus jeune fils, attaché à l’un des bûchers.
— Il ne te reste plus très longtemps à vivre, informa Antonio en remettant son arme à sa place. Alors ouvre bien grand les yeux et profite du feu de joie.
* * *
À la résidence du docteur Gustavio Calvino, un praticien qui œuvrait exclusivement pour la famille Médicis depuis une dizaine d’années maintenant, Constantino sommeillait dans la chambre qu’on lui avait assignée. Plongée dans l’obscurité, elle était uniquement éclairée par le feu qui crépitait dans le foyer au fond de la pièce. Un servant venait justement de passer pour y jeter quelques rondins. Cette chaleur et ce confort étaient propices à l’endormissement, toutefois Constantino ne parvenait pas à tomber dans les bras de Morphée. Chaque partie de son corps lui faisait mal.
Aucune de ses blessures n’était réellement grave, toutefois elles étaient si nombreuses que le garçon peinait à se tenir debout.
Son visage était certainement la partie de son corps qui avait le plus souffert. Gustavio avait toutefois fait des merveilles, une simple incision sous les paupières lui avait permis de voir de nouveau. Cela avait aussi permis au sang de s’écouler, réduisant ainsi de façon considérable l’enflure. Ses pommettes lui faisaient un mal atroce, il ressentait une énorme pression attribuable à la tuméfaction. Cette partie de son visage n’était d’ailleurs plus qu’une gigantesque ecchymose de couleur sombre. Le docteur avait aussi dû se servir de ses aiguilles pour lui recoudre une vilaine entaille qui lui barrait le front.
Désormais, si aucune infection ne se mettait de la partie, Constantino pouvait espérer être sur pied dans quelques semaines.
— Pouvons-nous vous déranger ?
Dans un grand et douloureux effort, le soldat tourna la tête en direction de la porte. Laurent se tenait sur le seuil en compagnie de Niccolo.
— Bien entendu, répondit Constantino d’une voix qu’il reconnut à peine lui-même. Je n’arrive pas à m’endormir de toute façon .
Après avoir approché des chaises, les deux hommes prirent place près du lit. Niccolo cachait difficilement son malaise face aux blessures du garçon.
— Pour commencer, je tiens à vous informer que les coupables ont tous été arrêtés.
Comme c’était souvent le cas, Laurent mentait. À vrai dire, deux des assaillants étaient toujours au large et aucun effort ne serait déployé pour les capturer.
— C’est bien, répondit le fils de Virgile sans grand intérêt.
— J’aurais voulu vous apporter quelques bonnes nouvelles pour vous redonner la bonne humeur. Malheureusement, je n’en ai que de mauvaises.
— Que se passe-t-il ? interrogea Constantino, plein d’appréhension.
— Leandro Gondi a été tué hier soir, informa Laurent tristement. Nous avons retrouvé son corps derrière chez lui. Tout porte à croire que sa famille a également été assassinée, nous avons retrouvé plusieurs corps carbonisés à proximité de la maison. Feliciano nous a confirmé ce matin qu’il y avait des gamins parmi eux.
En entendant ces mots, Constantino ferma les yeux, l’expression pleine de regrets. Tout cela était entièrement sa faute. En approchant Leandro, il avait su qu’il mettait en danger la famille du vigneron. Toutefois, il n’avait jamais imaginé qu’Antonio irait jusqu’à tuer des enfants. En fait, il n’avait même jamais cru que le chef apprendrait l’existence de l’alliance secrète de Leandro avec les Médicis. Maintenant, des victimes innocentes en avaient payé le prix fort. Sur le coup, le soldat regrettait de ne pas avoir été tué lui-même.
— De toute évidence, une fuite s’est produite, affirma Laurent sombrement.
— Je veux tous les noms des hommes qui connaissaient l’existence de la mission que nous nous apprêtions à exécuter contre la famille Gondi, déclara Constantino en essayant vainement de se redresser dans son lit. Quelqu’un d’important nous a trahis.
Dès qu’il serait sur pied, Constantino avait bien l’intention de découvrir qui avait vendu la mèche. Lorsqu’il le saurait, il tuerait le traître de ses mains.
— Commencez donc par vous reposer, murmura Laurent après un petit rire. Il n’est pas question de reprendre du service tant que vous aurez cette tête.
— Vous avez besoin de récupérer, renchérit Niccolo, qui paraissait particulièrement inquiet du sort du garçon. Je n’ose même pas imaginer la réaction de votre père s’il vous voyait dans cet état.
Constantino desserra les poings et se résigna. Il était vrai qu’il n’arriverait pas à grand-chose avec les blessures qu’on lui avait infligées.
— Toutefois, je vous promets de vous fournir une liste de noms dès votre retour. Virgile serait certainement très fier de vous. Vous êtes assurément le plus tenace de tous les Aigles. Pour l’instant, rétablissez-vous.
Constantino acquiesça aux paroles du dirigeant. Satisfait, Laurent se frappa les cuisses avant de se lever.
— Je reviens vous visiter sous peu, mon cher, déclara-t-il avant de quitter la pièce d’un pas rapide.
— Prenez soin de vous, conclut le secrétaire en remettant les chaises à leur place.
Il s’apprêtait à franchir la porte lorsque Constantino l’interpella.
— Oui ? répondit Niccolo en revenant sur ses pas.
— Pouvez-vous m’apporter un peu de lecture ? Quelques dossiers à éplucher, vous voyez un peu ce que je veux dire.
Dans le cadre de la porte, le secrétaire arbora un sourire complice.
— Vous ne lâchez pas prise facilement… je vais vous apporter tout ça demain.
— Merci.
* * *
— Excusez-moi, monsieur ! s’exclama poliment un membre des Aigles en interceptant Feliciano au moment où celui-ci s’apprêtait à quitter la place de la Seigneurie à pied.
Le chef de la sécurité se tourna et observa le soldat dans l’obscurité. Il s’agissait de l’une des taupes d’Antonio, l’homme qui lui avait fait croire que Fedora accouchait prématurément pour le piéger. Il tenait entre les mains une arbalète, ce qui ne laissait présager rien de bon. Feliciano posa aussitôt la main sur le pommeau de son épée.
Il n’avait à l’instant qu’une envie : lui enfoncer une lame dans l’un de ses yeux. Malheureusement, il s’agissait d’un plaisir qu’il ne pouvait se permettre.
— Hum ?
— Aucun besoin de marcher jusqu’à votre résidence, un carrosse vous attend au coin de la rue…
— Qu’est-ce qu’Antonio me veut ?
— Je crois que vous en avez une bonne idée, déclara le soldat en dirigeant son arbalète dans sa direction. Vous croyez vraiment que vous alliez vous en sauver aussi aisément ?
— De quoi parlez-vous ?
— Avancez…
Feliciano obtempéra, il ne pouvait rien faire d’autre. Une minute plus tard, il était devant un carrosse d’apparence banale. Le soldat lui retira son arme et lui ordonna de monter à bord. Feliciano jeta un œil plein d’appréhension sur le véhicule. Il avait l’horrible impression qu’il n’en ressortirait pas vivant. Après un soupir, il ouvrit la portière et entra. À l’intérieur, Antonio Gondi l’attendait en compagnie d’Osualdo. Celui-ci braquait une arme à poudre dans sa direction.
Étonnamment, cette vision le calma un peu. Il était peu probable que l’homme fasse feu dans le carrosse. Après tout, la déflagration aurait de bonnes chances d’atteindre tous les occupants, sans compter qu’elle les rendrait sans doute tous sourds.
— Vous êtes certain que vous voulez faire feu avec ce genre d’engin ici ? lâcha Feliciano d’un ton moqueur. Votre lanceur de couteaux n’est pas là ?
— Tais-toi, espèce de petite fiente, grogna Osualdo, qui n’était pas d’humeur à discuter du sort de Léon.
Antonio, qui portait toujours son inséparable gorgerin, revêtait un long pardessus en velours noir. Sous son pourpoint, il semblait avoir enfilé une cuirasse légère, remarqua Feliciano de son œil aiguisé. Visiblement, le chef du clan Gondi craignait encore plus pour sa sécurité. Son regard froid était braqué sur lui, il ne paraissait pas pressé d’amorcer le dialogue.
— Vous avez essayé de me baiser, finit-il par articuler. Je n’avais peut-être pas été assez clair dans mes menaces ? De plus, je ne crois pas m’être montré ingrat à votre endroit. Je vous l’accorde, vous avez une lame sur la gorge en tout temps, mais vous êtes aussi largement payé pour être un traître à votre patrie.
— De quoi parlez-vous ? Qu’est-ce que j’ai fait ?
Antonio bondit à une vitesse étonnante sur le chef des Aigles. Il l’agrippa fermement par la gorge et l’étrangla. « Il est beaucoup plus fort qu’il ne le laisse croire », constata Feliciano, qui n’arrivait pas à se défaire de son emprise.
— Ne jouez pas à l’idiot avec moi ! Je sais que vous étiez à la tête d’une opération dont le but était de me tendre un piège avec le soutien de Leandro Gondi. J’ai bien envie d’envoyer votre sale tête dans un coffre à votre jolie rouquine !
Antonio relâcha sa prise et frappa violemment la tête de Feliciano contre l’une des parois de bois du carrosse.
— J’ai tué pour moins que ça ! s’écria-t-il en reprenant sa place.
Déconcerté, Feliciano se replaça sur son siège sans quitter des yeux Antonio. Le chef de clan s’efforçait visiblement de retrouver son calme.
— Bon, reprit-il d’une voix plus posée. Puisque vous ne semblez pas avoir pris mes menaces au sérieux, je vais devoir y aller de façon plus drastique…
— Qu’est-ce que cela est censé vouloir dire ?
— Que si vous tentez à nouveau quelque chose contre moi, ce n’est pas votre tête que je mettrai dans un coffre, mais celle de votre fils.
— Si vous osez…
— Et je vais payer des hommes pour violer votre femme, coupa Antonio en arborant un sourire glacial. Lorsqu’ils auront terminé, ils ne la tueront pas, mais lui tailladeront son magnifique visage…Après, je vous tuerai moi-même sous ses pauvres petits yeux terrifiés. M’avez-vous bien compris, monsieur Fontana ?
— Si vous…
Hors de lui, Antonio frappa violemment son siège.
— M’avez-vous bien compris, monsieur Fontana ? hurla-t-il d’une voix enragée. Je me moque éperdument de votre nécessité dans nos plans. Je vous le jure, si vous ne me dites pas que vous avez bien compris, Osualdo va vous exploser la tête. Et, contrairement à ce que vous pouvez bien penser, je me fiche des dégâts que pourrait faire cette arme.
Feliciano n’avait jusqu’ici jamais vu le dirigeant de la famille rivale dans un état pareil. Il y avait quelque chose dans ses yeux qui rendait la scène particulièrement terrifiante.
— J’ai bien compris…
— Accomplissez ce que je vous demande et tout ira bien, promit Antonio. Gardez bien en tête qu’à partir d’aujourd’hui je vous fais surveiller jour et nuit. À la moindre action suspecte de votre part, je vous brise.
Feliciano acquiesça, il ne doutait pas une seule seconde des paroles de son adversaire. Le massacre de la famille de Leandro Gondi démontrait parfaitement à quel point Antonio n’avait aucune limite.
Après un long silence troublant, le chef des Gondi reprit la parole en essayant vainement de sourire.
— Bon, excusez-moi, je m’emporte parfois. Compte tenu des derniers événements, je ne veux plus vous voir pour le moment. Toutefois, votre vaine tentative de me piéger m’a décidé : nous allons assassiner Laurent de Médicis. Nous profiterons de sa prochaine sortie hors de la ville pour agir.
— Ça ne risque pas de se produire dans un avenir proche, vous pouvez me croire. Laurent ne mettra pas les pieds hors de Florence tant que le conflit avec Rome ne sera pas réglé. Malgré tout, je peux vous avertir lorsqu’une occasion se présentera.
— Je n’ai pas besoin de votre aide pour connaître les déplacements de Laurent hors de la ville. Je sais que vous êtes chargé de sa sécurité lors de ses sorties. Alors quand viendra le moment de frapper, je vous dirai exactement quoi faire. Vous voulez que votre enfant grandisse et devienne un jour un adulte ? Vous vous contenterez d’obéir aveuglément à mes ordres comme un bon petit soldat sans cervelle. Compris ?
— Parfaitement…
— Maintenant, fichez-moi le camp…
Feliciano ne se fit pas prier et quitta le véhicule rapidement.
— Je ne l’aime pas, nous devrions nous débarrasser de lui sans attendre, affirma Osualdo lorsque Feliciano fut parti. À t’entendre, nous avons de nombreux hommes à l’intérieur du palais, nous pourrions tuer Laurent aisément sans son aide.
— Si c’était vraiment le cas, tu peux me croire que ça serait déjà fait. Non, Laurent demeure malheureusement intouchable au palais. Nous avons bien quelques infiltrés parmi les Aigles, mais la plupart de mes contacts comptent surtout parmi les cuisiniers, les servants et quelques magistrats. Ce ne sont en aucun cas des tueurs. De toute façon, même si c’était le cas, je ne veux pas l’assassiner au palais, je veux qu’il meure sur la place publique par des mains anonymes.
— Je vois, répondit Osualdo avec une teinte de déception dans la voix.
— En ce qui concerne Fontana, lorsque nous en aurons terminé avec Laurent, nous l’abattrons aussi. S’il m’a prouvé quelque chose aujourd’hui, c’est que je ne peux pas lui faire confiance.