Et voici qu’à travers la grande forêt brune
Qu’emplit la rêverie immense de la lune,
On entend frissonner et vibrer mollement,
Communiquant au bois son doux frémissement,
La guitare des monts d’Inspruck, reconnaissable
Au grelot de son manche où sonne un grain de sable;
Il s’y mêle la voix d’un homme, et ce frisson
Prend un sens et devient une vague chanson:
«Si tu veux, faisons un rêve.
Montons sur deux palefrois;
Tu m’emmènes; je t’enlève
L’oiseau chante dans les bois.
»Je suis ton maître et ta proie;
Partons, c’est la fin du jour;
Mon cheval sera la joie,
Ton cheval sera l’amour.
»Nous ferons toucher leurs têtes;
Les voyages sont aisés;
Nous donnerons à ces bêtes
Une avoine de baisers.
»Viens! nos doux chevaux mensonges
Frappent au pied tous les deux,
Le mien au fond de mes songes,
Et le tien au fond des cieux.