Il fonce, il accélère, on ne peut pas le suivre. Il est celui dont on dit : il a le feu aux fesses. Il ne sait pas rester en place, comme s’il était assis cul nu sur des braises sans culotte en amiante et qu’il avait peur de prendre feu.
Il n’est bien nulle part. Il pense que c’est mieux ailleurs alors il va ailleurs. Il veut du nouveau, comme les romantiques. Enfer ou ciel, qu’importe, écrira Baudelaire.
Comme les naufragés sur Le Radeau de la Méduse, il regarde l’horizon, il pense qu’ici et maintenant, c’est l’enfer. Que le paradis, c’est plus loin.
Chaque week-end les routes sont couvertes de tous ceux qui pensent qu’ils seront mieux ailleurs. Ils font des excès de vitesse pour être plus vite ailleurs.
Ils courent toujours, ils courent après le bonheur. C’est pas en courant qu’on attrape le bonheur, c’est en marchant.
Marcher lentement, faire bon ménage avec soi-même, bien s’entendre avec soi.
Marcher du même pas. Au lieu de partir vite pour s’oublier, pour se perdre, pour se fuir, pour se sauver.
L’oisiveté ne mène pas au vice.
« L’oisiveté exige tout autant de vertu que le travail : il y faut la culture de l’esprit, de l’âme et des yeux, le goût de la méditation et du rêve, la sérénité, toutes valeurs bien rares aujourd’hui. Ce ne serait pas les acquérir que d’employer ses dimanches à se créer de nouveaux besoins, des soucis inédits, ajouter au mouvement d’une vie déjà trop mouvementée ; au contraire, ce serait tomber dans un épuisement dont les jours ouvrables et le travail mesuré au cordeau ne suffiraient pas à nous guérir. » Paul Morand.