Ce roman se déroule dans la RDA communiste, la République démocratique allemande (Deutsche Demokratische Republik ou DDR en allemand), au milieu des années soixante-dix, à l’époque où le niveau de vie du pays était l’un des plus élevés du bloc de l’Est. Le mur de Berlin – officiellement baptisé « Rempart antifasciste » à l’Est – était toujours fermement en place, et rares étaient ceux qui auraient pu prédire le tumulte de 1989 qui conduisit à son démantèlement.
On identifie aujourd’hui la RDA au redoutable ministère de la Sécurité d’État, ou MfS, plus connu sous le nom de Stasi. Cependant, tandis que personne à l’époque n’ignorait l’existence de la Stasi – et de son réseau d’informateurs officieux –, on ne découvrit qu’après la chute du Mur ses méthodes très spéciales et le nombre colossal de ses collaborateurs.
Les enquêtes criminelles étaient en général la chasse gardée de la police populaire (Volkspolizei ou Vopo) et en particulier de sa brigade criminelle (Kriminalpolizei ou Kripo). Quand une affaire avait des ramifications politiques, la Stasi prenait le relais ; elle disposait en effet de sa propre brigade criminelle, de sa propre unité de police scientifique, etc. Contrairement à ce que vous vous apprêtez à lire, Stasi et Kripo collaboraient rarement sur des enquêtes, même si une liaison s’opérait souvent en haut lieu. Malgré tout, de nombreux membres de la Kripo servaient d’informateurs à la Stasi, sans compter que la police populaire était un organe d’État, au même titre que la Stasi : son centre de détention provisoire au quartier général de Keibelstrasse, près de l’Alexanderplatz à Berlin, avait une réputation tout aussi abominable que celui de la Stasi à Hohenschönhausen, pour ne citer que lui.
La hiérarchie de la police et de la Stasi, fondée sur celle de l’armée, peut prêter à confusion pour le lecteur. À la tête d’une brigade d’enquêteurs – telle que celle de l’histoire qui va suivre –, on trouvait en règle générale un Hauptmann (l’équivalent du capitaine en France) ou peut-être, comme c’est le cas dans ce roman, un Oberleutnant (lieutenant). On ne doit pas confondre ce grade, qui est celui de mon héroïne, Karin Müller, avec le grade bien plus élevé d’Oberstleutnant (lieutenant-colonel), un rang au-dessous de celui d’Oberst (colonel).
Par souci d’authenticité, j’ai conservé l’emploi souvent monotone du « camarade » si cher aux communistes (Genosse/Genossin) dans les interactions entre collègues, surtout en présence d’officiers supérieurs.