Ce qui reste
En hommage à son ami Apollinaire, Picasso avait donné une tête en bronze de Dora Maar placée dans le square de Saint-Germain-des-Prés. On la vole en 1999. On la retrouve, paraît-il, assez vite dans un fossé près de l'hôtel de ville d'Osny, un château du Val-d'Oise. On l'expose là, personne n'est capable, jusqu'à ces jours-ci de l'identifier. Sans commentaire. Pour se venger de cette volonté d'ignorance, on regardera les photographies de l'atelier de Francis Bacon prises avant son transfert de Londres à Dublin26. Un foutoir éblouissant, le chaos ordonné du génie. Impossible de faire le ménage dans cette tanière bourrée de pinceaux, de caisses de champagne et de whisky, de pots, de photos.
L'ami de Bacon, John Edwards, essayait, de temps en temps, de faire un peu d'espace dans cette jungle. Il tombe un jour sur des liasses de billets de banque périmés. « Ah oui, dit Bacon, je les cachais parce que George Dyer me volait. Ensuite j'oubliais où je les avais mis. » Là encore pas de commentaire. Mais comme vous aurez bientôt affaire à l'euro, sachez que le poids des pièces émises dans cette monnaie communautaire représente vingt-quatre fois le poids de la tour Eiffel. Les billets, eux, mis bout à bout, mesureront cinq fois la distance de la Terre à la Lune. Peu de chose, en vérité.
29/04/2001