Mourir

Moi aussi, comme Mireille Jospin, un jour ou l'autre, je tiens à mourir dans la dignité. Vincent Humbert en a assez, il le dit avec son pouce. Chirac reçoit sa mère, mais ne lui donne pas l'autorisation de disparaître. Comment le pourrait-il, d'ailleurs ? Les demandes afflueraient. Le chef de l'État deviendrait une sorte de pape à l'envers. De longues files d'attente se formeraient devant l'Élysée. D'ici à faire construire sur place un grand hôpital spécialisé avec crématorium associé, il n'y aurait qu'un pas qui pourrait démoraliser la nation entière. Tout individu qui estimerait ne pas vivre dans la dignité pourrait avoir envie de mourir digne. Cela risquerait de faire beaucoup de monde.

Imagine-t-on d'ici les dossiers, les enquêtes, les problèmes familiaux et religieux, les controverses, les effets latéraux sur le commerce, la publicité, la bonne tenue de l'armée ? La vie est sacrée, c'est entendu, mais que faire si elle est devenue insupportable ? Il y a un mot terrible de Franz Kafka au médecin qui refuse d'abréger ses souffrances : « Si vous ne me tuez pas, vous êtes un assassin. » C'est pointer du doigt le sadisme thérapeutique. La culture de vie n'est pas forcément le contraire de la culture de mort. Mais je m'arrête ici, et renvoie le lecteur ou la lectrice à la grande tirade d'Hamlet, « To be or not to be », etc.

29/12/2002